Tombe du martyr à Kem
Vassili Fiodorovitch Nadéjdine est
né à Moscou le 12 janvier 1895. C’était le 5e des 6 enfants (3 garçons :lui :
Basile, Vladimir et Paul et 3 filles, Catherine, Anna et Véra) de pieux
parents : Fiodor Alexéiévitch, marguillier de l’église de la Protection de
la Mère de Dieu, et de son épouse Sophia Pavlovna. Vassili fréquenta l’école
religieuse du monastère « Derrière l’icône du Sauveur », puis en 1910,
entra au séminaire de Moscou. Il chantait à l’église, dirigea le chœur.
Un parent de son père, l’archevêque
Anastase (Gribanovsky) fut affecté au diocèse de Kholm (maintenant Chelm en
Pologne, un pays dépeçé par ses voisins qui fut rayé de la carte de 1795 à
1918) et le jeune Vassili put l’accompagner dans ses visites pastorales,
notamment au monastère Saint-Onuphre de Jableczna. Puis l’archevêque étant muté
à Kichiniov en Moldavie, c’est là que le jeune Vassili prépara l’examen d’entrée
à l’Académie Ecclésiastique de Moscou l’été 1916.
Mais à cause de la guerre, le
semestre s’interrompit prématurément et le jeune Vassili fut invité dans une
famille aristocratique du gouvernement de Saratov pour enseigner le catéchisme
à deux enfants : Fiodor et Sophie Medem, qui l’aimèrent beaucoup. À la fin
de février, il repartit pour reprendre les cours du 2e semestre, mais ce fut la
révolution de février 1917 et l’abdication du tsar Nicolas II. Dès la fin des
examens, Vassili retourna à Saratov. Le comte Medem avait une petite église
dans sa propriété, et Vassili y prononça des sermons, notamment à la
Saints-Pierre-et-Paul, il déclara que « beaucoup ne sont pas capables
d’apprécier les exploits d’apostolat des saints Pierre et Paul, que tout l’arbitraire,
les assassinats d’innocents, les vols, etc. prouvent qu’une grande partie du
peuple russe n’a pas été atteinte par le message du christianisme » et que
« les derniers temps, dont parle l’apôtre Paul , se
rapprochent ».
Revenu à l’Académie, il put y
entendre les cours de Nouveau Testament dispensés par un jeune professeur très
brillant : l’archimandrite Hilarion Troitsky, futur évêque martyr de
Véréia. Au printemps 1919, l’Académie étant fermée par les bolchéviques, le
typhus régnant à Moscou, Vassili emmena sa sœur Catherine, restée veuve avec trois
petits enfants, chez un ami prêtre dans le diocèse de Penza où il enseigna les
mathématiques jusqu’en 1921, mais avec un intermède à Moscou où il se maria
avec une musicienne, Elena Serguéievna Borisoglebskaïa, et ramena avec lui à
Penza sa jeune épouse et son autre sœur, Anna, qui mourut peu après. Il revint
à Moscou, passa ses examens finaux à l’Académie (clandestinement) en 1920, prit
un emploi de comptable plus près de Moscou.
Un an plus tard, le 26 juin 1921, il
fut ordonné au sacerdoce et affecté à l’église Saint-Nicolas « de la
Cabane-de-paille », une église en bois construite par le célèbre
architecte Chekhtel, pour un régiment dans le nord de Moscou. C’est là qu’il
allait servir jusqu’à son arrestation en 1929. La paroisse comptait de nombreux
membres de l’intelligentsia, en particulier de l’Institut d’Agronomie tout
proche, soucieux de voir leurs enfants instruits dans la foi. Le père Vassili
s’attela à la tâche avec enthousiasme, organisant des rencontres de catéchèse,
formant une très belle chorale, allant à des concerts de musique classique avec
eux, discutant de littérature sérieusement et d’un point de vue chrétien.
Certains membres de la paroisse, avec sa bénédiction, se joignirent à lui pour
l’aider dans le travail catéchétique. En 1928, souffrant de tuberculose, il dut
aller en Bachkirie boire du lait de jument, et en son absence, c’est son ami, le
futur saint martyr père Vladimir Ambartsoumov[1]
qui le remplaça.
Evidemment,
son activité pastorale lui valut d’être d’abord expulsé de son logement puis arrêté
le 28 octobre 1929. Lors de son interrogatoire le père Vassili déclara qu’il
lisait pour la catéchèse des textes de saint Basile le Grand, saint Grégoire le
Théologien, qu’il avait parlé de son pèlerinage à Sarov, etc. et qu’un chrétien
pouvait vivre dans une réalité non chrétienne ambiante jusqu’à une certaine limite,
mais qu’au-delà, il fallait être prêt à des changements de conditions de vie,
si on voulait rester chrétien, car on ne peut pas être chrétien seulement de
nom.
À la prison des Boutyrki, le père
Vassili rencontra le père Serge Métchov qu’il connaissait bien : ils
purent parler plusieurs heures ensemble, ce qui les affermit tous les
deux : le père Serge (qui mourut en martyr le 6 janvier 1942) témoigna par
la suite que le père Vassili était prêt à comparaître devant son Seigneur. Le
20 novembre 1929, l’OGuépéou condamna le père Vassili à 3 ans de détention au
camp des Solovki, mais la navigation étant déjà interrompue, il fut laissé
jusqu’au printemps à Kem. Là, dans une baraque du camp, le père Vassili tomba
malade du typhus, et mal soigné il contracta aussi la gangrène.
Sa matouchka Elena, qui était
enceinte de leur cinquième enfant, fut autorisée à venir à Kem ; elle put
lui transmettre de la nourriture le jour et rester de longues heures la nuit au
chevet de son mari jusqu’à sa mort. « Je suis si heureuse de pouvoir vivre
ici et de pouvoir l’aider au moins un peu», écrivait-elle de Kem à sa famille.
Le père Vassili put communier. Dans sa dernière lettre, expédiée avant l’arrivée
de son épouse, il écrivait : « J’ai senti qu’il était temps de vous
écrire une lettre d’adieu… Comme il m’était doux de me sentir entouré d’amour ».
Et il rendait grâces. Il mourut le jour de l’anniversaire de matouchka Elena qui
fut autorisée à enterrer son mari à Kem, le corps ne fut donc pas jeté dans une
fosse commune. Pour sa part, après la naissance de son bébé, elle fut condamnée
à trois ans d’exil, loin de ses enfants, mais néanmoins elle rendait grâces à
Dieu pour tout.
*
L’église détruite a été maintenant
reconstruite, toujours en bois, la paroisse du père Vassili revit, elle compte
de nombreux jeunes et une chorale très active. Tous sont profondément attachés
au trésor de sainteté de leurs deux prêtres martyrs et reprennent des méthodes
de travail du père Vassili : chorale, groupes de discussion, cercles
d’activités, animés par des jeunes désireux d’approfondir leur foi. Il y a
quelques années, une étudiante de l’Université Saint-Tikhon a fait dans le
cadre de son cursus un reportage[2]
qui l’a elle-même bouleversée, sur la vie et l’œuvre de saint Vassili. Elle a
retrouvé son dernier fils, Vassili Vassiliévitch, qui garde pieusement la croix
pectorale de son père et sa lettre de nomination signée du saint patriarche
Tikhon.
Françoise Lhoest[3]
*
Tropaire ton 2 :
Par ta douceur tu as été dès ta jeunesse à l’image du Christ, tu as aimé les
divins commandements de toute ton âme et de tout ton cœur ; tu as été un
bon pasteur donnant ta vie pour tes brebis, à l’image de Dieu notre Sauveur.
Saint prêtre martyr Basile prie le Christ notre Dieu de sauver nos âmes.
Kondakion, ton 2 :
Zélé pour la gloire de Dieu et la foi orthodoxe, enseignant ton
troupeau, saint prêtre martyr Basile, tu as accompli dignement ton service
pastoral sur la terre, Devant l’autel de Dieu avec joie et reconnaissance, plein
de douceur mais ferme devant tes bourreaux, et en glorifiant le Christ tu as
quitté ta sombre prison pour les demeures tant désirées du Père. C’est pourquoi
aujourd’hui en célébrant le Dieu Trinitaire, avec la cohorte des saints
martyrs, protège-nous par tes prières, nous qui t’honorons avec amour.
[1] Voir bulletin de la Crypte, novembre
2012.
[2] Radost’ moya, 26 minutes sur You Tube.
[3] Avec les ressources d’Internet en
russe.
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