"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 26 novembre 2022

Homélie du père Boris Bobrinskoy: Guérison du possédé gérasénien (Luc 8,26)



Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. 

Au cours de l’année, c’est à plusieurs reprises que nous entendons dans les différents évangiles ce récit de la guérison du possédé Gérasénien – ou Gadarénien comme il est dit ailleurs. C’est un événement assez spectaculaire. Spectaculaire non pas tant par la guérison elle-même que par la manifestation de la puissance de ces forces démoniaques qui sont capables de précipiter dans la mer un troupeau entier d’un millier de bêtes peut-être. Par-delà l’anéantissement de ces porcs, il importe de prendre conscience que, comme les Pères nous le révèlent, chacun de ces démons pourrait détruire le monde entier si jamais il en recevait le pouvoir car il en a la force. L’épisode très frappant que nous venons d’entendre est particulièrement représentatif de toute la vie humaine de Jésus puisque nous pouvons affirmer que, depuis le début jusqu’à la Croix, toute la vie humaine de Jésus est un combat permanent contre les forces du mal, contre les forces de mort, contre les esprits des ténèbres. Dès le début, en effet, c’est déjà un combat quand Marie doit mettre au monde Jésus et qu'elle n’a pas de place dans une auberge pour y passer la nuit. Ce combat ne va pas s’interrompre, il sera marqué ensuite par le massacre des Innocents par Hérode. Tout cela indique à quel point les forces de mal sont déterminées et avec quelle vigueur elles se déchaînent contre la Lumière divine qui vient dans le monde éclairer les hommes. 

Pour illustrer ce combat nous avons aussi toutes les tentations de Jésus au désert. Ce moment fort est particulièrement révélateur car cette marche de Jésus au désert n'est évidemment pas un hasard. Sa rencontre avec Satan en personne – si on peut l’appeler une personne – n'est nullement un accident de l’histoire car les évangiles disent précisément que l’Esprit poussa Jésus dans le désert pour y être tenté. Par conséquent la tentation au désert était nécessaire. Quelles qu’elles soient, toutes les tentations que Jésus a connues, depuis le début et jusqu’à la dernière tentation sur la Croix, nécessaires. Elles sont des tentations par lesquelles Jésus a montré Sa puissance et Sa victoire à travers un combat qui fut incessant. 

Dans ce combat, les guérisons de possédés, les expulsions des démons, les exorcismes sont fréquents dans la vie de Jésus. Ils ne sont pas seulement opérés par Jésus en personne, mais également par Ses disciples quand Il les envoie – encore bien avant la Passion – à la prédication. Quand ensuite ils reviennent vers Jésus, ils sont absolument étonnés : « Voilà Seigneur, voilà que nous guérissons des malades et que les esprits nous obéissent et sont chassés » ; et Jésus rendit grâce « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir ouvert les yeux aux humbles. » Ainsi nous voyons que cette puissance de guérison est en Jésus et qu'Il la communique à qui Il veut. Prenons-en bien conscience ! Jésus communique Sa puissance de guérison à ceux qui deviendront Ses apôtres – cela signifie « ses envoyés » –, à Ses disciples, mais aussi à Son Église qui est, elle-même, toute entière apostolique. Nous tous, nous sommes porteurs de l’Esprit de Dieu et, tous, dans notre prière commune de l’Église, nous avons la force de chasser les démons. Trop souvent nous l’oublions, trop souvent nous n’y croyons pas. 

Aujourd’hui comme à l’époque du Christ, les forces de mal sont à l’œuvre. Lorsque Jésus demande au démon « Quel est ton nom ? » celui-ci répondit « Légion ». Ici, « Légion » désigne une multitude, car beaucoup de démons avaient assailli le possédé, et précisément cela correspond tout à fait à notre expérience, à la réalité de tous les temps. Aujourd’hui comme hier, les démons sont légions. Ils peuvent prendre des formes diverses et adopter des méthodes variées. On peut décrire ces méthodes : il y a l’agression directe comme il y a la possession véritable… Il y a aussi les passions, ce sont des possessions plus intimes, parfois moins visibles mais, sans doute, plus graves encore car plus insidieuses : lorsque les passions nous enténèbrent et nous asservissent, nous ne pouvons plus réagir et nous devenons réellement des esclaves et des serviteurs du prince de ce monde. 

Parmi les multiples manières dont les démons cherchent à nous éloigner de Dieu, il y a évidemment la persécution. Mais la persécution directe n’est sans doute pas la façon la plus dangereuse, ni la plus perverse, ni la plus définitive. Comme nous le constatons dans tous les pays depuis les origines jusqu’à aujourd’hui, le sang des martyrs crée la semence de la foi. Que ce soit en Russie, que ce soit en Orient, partout où la foi chrétienne est persécutée, partout où les croyants donnent leur vie, partout où les chrétiens témoignent jusqu’au sang par leur souffrance, partout où, exclus, méprisés, rejetés ils témoignent de l’Unique Nécessaire. Partout, les martyrs ont engendré de nombreux croyants à la foi en Christ. 

Mais il y a encore d’autres manières bien plus insidieuses par lesquelles les forces de mal agissent. Il y a ce que l’on appelle la désacralisation du monde et de l’esprit. Notre Europe – on en parle beaucoup aujourd’hui – a été jadis une Europe chrétienne, et pourtant il semble qu’on veuille en effacer le souvenir comme en témoignent les débats autour de la Constitution européenne qui a dû écarter non seulement l’idée de Dieu mais encore toute référence à une racine religieuse et spirituelle. Tout ceci illustre certainement une réalité profonde et vécue, le monde se sécularise et se désacralise en rejetant Dieu à la fois dans les oubliettes du passé, dans l’archéologie, dans les musées, voire dans des sacristies poussiéreuses, et à la fois aussi dans le clos très fermé de ce que l’on voudrait que deviennent nos églises, à savoir des ghettos.

Certes ces ghettos peuvent être agréables, commodes, confortables et chauds mais, sous la pression du monde moderne ils sont menacés d’isolement, ils manquent d’ouverture et surtout de rayonnement. Il faut être attentif à ces attaques perfides et multiformes. Sans doute les médias y participent, que ce soit par toute l'imagerie – pas seulement la pornographie – qui nous pénètre et nous détruit, et que ce soit encore par cette idéologie qui veut que l’homme et la femme soient libres de leur vie, de leur corps, de leur destinée. Tout ceci a pour conséquence non seulement un relâchement profond de la morale mais aussi une négation des racines spirituelles. Les racines sont véritablement déracinées. 

Mais il ne s’agit pas pour moi de développer davantage ce sujet ici. Je pense que nous comprenons que, dans notre vie chrétienne, notre témoignage chrétien doit être un témoignage éveillé et conscient. Prions surtout pour que le Seigneur nous donne la force non seulement de vivre notre foi en profondeur, mais aussi de mener nous-mêmes le combat spirituel dans notre propre cœur, dans notre imagination, dans notre propre corps, dans notre sexe… dans tous les domaines de notre existence. Prions pour que le Seigneur nous donne la force de nous opposer à toute tentative de ces forces de mal, à toutes ces attaques qui visent à effacer en nous l’image de Dieu, cette image de Dieu par lequel et dans lequel l’homme a été créé. Nous avons été en effet créés à l’image de Dieu. Cette image est en nous, elle est dite indestructible mais on peut la ternir au point que, désormais, elle ne rayonne plus. Or, cette image doit rayonner, elle doit se manifester, elle doit grandir en nous comme le Christ Lui-même grandit en nous de jour en jour et d’année en année dans notre vie entière. C’est pourquoi nous devons ainsi apprendre à vivre, ce que j’appellerais, la dimension baptismale de notre existence, c’est à dire le combat permanent, le rejet du mal et la renonciation à Satan. 

Cette renonciation à Satan que nous demandons à l’adulte – ou à l’enfant baptisé par la bouche de son parrain ou de sa marraine – nous devons l’opérer nous-mêmes de jour en jour. Nous devons demander au Seigneur le discernement et la clairvoyance pour être capables de voir où sont les embûches et quelles sont les flèches enflammées du mal afin d’y résister avec ce que saint Paul appelle « le bouclier de la foi et le glaive de la parole de Dieu ». Tout cela sont des choses tout à fait essentielles, mais cela ne concerne pas seulement ma vie personnelle ni mon combat individuel puisque que nous sommes tous solidaires les uns les autres dans l’Église. Quand un seul homme tombe, disent les Pères, beaucoup tombent autour de lui, et quand un seul homme s’élève et se sanctifie, beaucoup se sanctifient autour de lui. Nous sommes donc tous, les uns les autres, responsables de cette sanctification, de cette confession de foi qui est celle de l'Église, pour toutes nos communautés ecclésiales dont celle où nous vivons aujourd’hui. Par conséquent ce combat spirituel est une exigence permanente de notre vie ecclésiale. Mais il faut prendre toute la mesure de la dimension baptismale de notre existence, ainsi ce combat est rejet de Satan mais il est aussi, évidemment, recherche de vie plénière en Christ dans l’Esprit Saint. Quand cette vie plénière en Christ dans l’Esprit Saint se réalise alors, à ce moment-là, l’Esprit Saint devient en nous un feu qui brûle, un feu qui embrase, et un feu qui nous presse de l’intérieur pour dire, pour annoncer, et je dirais même, pour crier la parole de Dieu. Car c’est une parole de Dieu dont le monde a besoin ! Nous devons réapprendre à témoigner, nous ne devons pas nous terrer, nous enfermer à clé, dans nos églises, dans nos familles, dans nos petites communautés. Nous devons apprendre à respirer et à dilater nos cœurs pour crier vers le monde que le Christ est ressuscité et qu’Il est victorieux des forces de mal. C’est ainsi et c'est seulement ainsi que nous nous opposerons aux forces du mal qui cherchent par d'innombrables moyens à détruire l’Église, altérer son visage, ternir sa renommée, étouffer son rayonnement… C'est par la puissance du Christ que nous devons contrecarrer tout cela. 

Amen. 

Merci à Anne M. qui m'a fait parvenir ce texte!

Librairie du Monastère de la Transfiguration

 

 
Nous avons le plaisir de vous informer de la mise en ligne d'un nouvel ouvrage de Jean-Claude Larchet

Qu'est-ce que la théologie ?
Jean-Claude Larchet
 
 
 
 
 

La théologie orthodoxe a une spécificité. Soumise depuis le XVII° siècle à des influences occidentales venues alternativement du catholicisme et du protestantisme, puis de la philosophie, cette spécificité s'est en partie perdue. L'irruption, en Occident, des sciences humaines dans plusieurs de ses branches, a constitué un nouveau défi, offrant à celle-ci le moyen d'être plus rigoureuse, mais présentant aussi le risque d'une sécularisation.

Ce livre a comme but de redéfinir, sur les bases de la Tradition orthodoxe, la nature et les méthodes spécifiques de la théologie orthodoxe dans son ensemble et dans les différents domaines où elle s'est déployée : théologie dogmatique, études bibliques et exégèse, patrologie, histoire de l'Église, théologie morale et bioéthique, hagiographie, iconologie, étude des canons, théologie pastorale ...

Écrit dans un langage simple et clair, il ne s'adresse pas seulement aux praticiens de la théologie et à ceux qui enseignent ces matières, mais il intéressera aussi tous les fidèles qui, dans leur vie ecclésiale et spirituelle personnelle, en rencontrent les applications.

Dans un monde globalisé où toutes les frontières sont abolies et où les identités sont brouillées, il constitue un guide précieux pour un retour aux sources de la théologie orthodoxe dans ses formes et ses contenus.

Jean-Claude Larchet, né en 1949, est un théologien et patrologue orthodoxe français de notoriété internationale. Dans plus de 30 livres, traduits en 20 langues, et près de 150 articles, il a abordé les différents domaines de la théologie orthodoxe, conjuguant le respect de la Tradition et le souci de répondre aux interrogations et aux besoins de l'homme contemporain. On a écrit de lui qu'« il est l'un des rares auteurs contemporains capables de combiner la rigueur scientifique avec un sens vibrant de la vie intérieure de l'Église».

 
Paru récemment
Collection des 9 tomes des catéchèses de l'Archimandrite Aimilianos
 
Monastère de la Transfiguration.
24120 Terrasson- Lavilledieu

vendredi 25 novembre 2022

Père Andreas Agathokleous: « Transformez votre peine en joie »


On dit qu'à notre époque, il y a beaucoup de douleurs mentales et corporelles. Mais ce n'est pas seulement à notre époque que nous voyons des maladies, des rivalités personnelles, du stress et une montagne de difficultés qui pressurisent et écrasent les gens, où qu'ils vivent sur terre.

Bien sûr, il n'y a pas de moindre de l'intensité de notre douleur en sachant que d'autres personnes souffrent autant que nous. Si nous voulons voir les choses de cette façon, il pourrait y avoir une certaine consolation et cela nous aide à supporter. C'est quelque chose, au moins. Mais la chose la plus importante pour nous aider à supporter notre douleur et toute épreuve qui pourrait nous advenir est l'expérience de la Croix du Christ. Notre propre Dieu a été crucifié, a souffert et a été rejeté par tous. Il nous comprend parce qu'Il a vécu les mêmes expériences.

Nous savons que, si quelqu'un nous montre de la compréhension, bien qu'il soit le bienvenu, ce n'est pas suffisant. Nous avons besoin de quelqu'un qui supportera le poids de la douleur et nous donnera la force de continuer. L'expérience de ceux qui croient en Christ et L'invoquent confirme que leur cri n'a pas disparu dans le vide. Plus ceux qui se sont humiliés, après leur difficulté, et ont demandé l'aide du seul capable de fournir une issue lorsque nous sommes tentés (1 Cor. 10, 13), plus le Christ est venu et a transformé la douleur en réconfort, les ténèbres en lumière. Avec cette expérience, nous savons que tout n'est pas noir, que la vie n'est pas seulement de la douleur, sans moyen d'y échapper.

Nous suivons le chemin des souffrances, soutenus par la parole du Christ et Sa promesse qu'il sera avec nous tous les jours de notre vie (Matthieu. 28, 20). Il ne nous a pas trompés en nous faisant croire que, si nous Le suivions, tout serait exactement comme nous le souhaitions. Au contraire, il nous a avertis que nous aurions des épreuves dans ce monde (Jean 16, 35), tout en recommandant que nous prenions courage, parce qu'Il avait vaincu le monde, c'est-à-dire le mal qui y règne.

Si les gens veulent surmonter la douleur de leur vie en dépendant uniquement de leurs propres ressources, ils verront bientôt à quel point ils sont faibles. Ceux qui comptent uniquement sur Dieu, sans faire ce qui est en leur pouvoir, seront déçus. Mais ceux qui, sérieusement et de manière responsable, font tout ce qu'ils peuvent et en appellent aussi humblement à Dieu à l'aide comprendront la dynamique de la foi, c'est-à-dire d'une relation féconde avec le Dieu vivant.

« Si vous supprimez les tentations, personne ne sera sauvé » est un ancien dicton du Livre des Anciens qui indique, d'une part, l'universalité de la douleur et des épreuves et, d'autre part, le bénéfice qui peut en découler. Si, à tout moment et en tout lieu, les gens ont leur propre douleur personnelle, qu'elle soit grande ou petite, continue ou passagère, mentale ou corporelle, c'est parce que, derrière eux, ils ont Adam et sa chute. Si les chrétiens ont de la douleur mais connaissent aussi la joie et la paix, c'est parce qu'ils ont le Christ, le nouvel Adam qui, par Sa mort et Sa résurrection, a vaincu la mort et nous a donné Sa vie.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

PEMPTOUSIA



jeudi 24 novembre 2022

Père Tryphon: :Cacher des péchés à son père confesseur

Cellule de saint Jean Maximovitch, 
St. Tikhon's House, San Francisco

Un certain nombre de personnes m'ont écrit pour exposer qu'ils étaient hésitants à confesser certains péchés, de peur d'être embarrassés en présence de leur prêtre. Une femme dit qu'elle ne pourrait supporter l'idée qu'un homme puisse entendre le détail de sa vie pécheresse, et s'étonnait de ce que le prêtre penserait d'elle après l'avoir entendue en confession. Il me faut ici faire remarquer qu'une mère spirituelle peut aussi entendre les confessions de ses enfants spirituels, le prêtre prononçant ensuite simplement la formule d'absolution, avec la bénédiction de la mère spirituelle, comme cela se pratique régulièrement dans les couvents de femmes.

Je suis moine depuis près de 30 ans, et je dois dire que je ne pense pas qu'il existe un péché que je n'aurais pas déjà entendu. Nul n'a exposé devant moi quelque chose qui aurait pu me choquer personnellement, car la condition humaine est partagée de tous. Ce que j'ai cependant expérimenté, c'est la joie d'entendre une bonne confession. Voir la charge de culpabilité et de honte levée, et les larmes de la vraie repentance, c'est une chose merveilleuse. La crainte de la honte devant le prêtre en a tenu beaucoup éloignés de cette levée du poids du péché, et du banissement de la honte, et tout ça pour rien. La crainte d'être embarassé empêche beaucoup de faire une bonne confession.

Aucun prêtre ne pense mal d'un pénitent, car tous les prêtres se réjouissent lorsqu'ils voient la levée du poids du péché et de la honte dans le Mystère de la Confession. Comme le pénitent, le prêtre témoigne de la miséricorde du Christ, et le prêtre, lui-même pécheur, est aussi élevé, car lui aussi, il est en grand besoin de la miséricorde et du pardon du Christ.

Nos vies se chargent de passions et d'habitudes pécheresses parce que nous manquons de nous battre contre le moindre péché que nous avons besoin de confesser. Nos blessures et nos plaies sont pleines d'inflammation, parce que nous refusons de leur appliquer le moindre remède. La femme au puits de Jacob a contemplé la miséricorde du Christ, et nous aussi, nous nous tenons au puits devant le Seigneur, lorsque nous nous tenons devant l'Évangéliaire, et la Croix, avec le prêtre comme témoin devant le Christ, Qui est prompt au pardon.

Dans l'amour du Christ,

mercredi 23 novembre 2022

Contre la cupidité et l'anxiété: Luc 12:16-21/ Le riche fou

La vie est un don de Dieu. Aucune quantité de possessions, aussi abondante soit-elle, ne peut la rendre plus grande ou lui donner de la sécurité. La notion selon laquelle la vie consiste en des possessions, en « avoir » (l'exigence constante de plus), est supprimée dans cette « péricope » par la compréhension que la vie ne peut pas être assurée par les possessions, que l'existence est un don equi échappe au contrôle humain.

Les humains ont un destin éternel (Lc 12:31-32). Cette existence n'est pas la seule : ce qu'ils font maintenant a des conséquences pour l'avenir (Luc 12:20). Cette péricope (exemple) est l'histoire du riche fou. L'homme était riche parce qu'il avait beaucoup de récoltes. Il était fou parce qu'il pensait qu'elles assuraient sa vie "pour de nombreuses années à venir" (Luc 12: 19). Quand sa vie s'est terminée, ses biens étaient dispersés. Le fait n'est pas simplement que l'on ne devrait pas « se soucier » de la nourriture et des vêtements (Luc 12:22), mais que l'on devrait beaucoup plus radicalement « vendre ce que l'on a et donner des aumônes » (Lc 12:33).

Ce contraste entre la vie en tant qu'« existence » et la vie en tant que « possession » est clair lorsque Jésus a dit : « quiconque cherche à sauver sa vie la perdra, et celui qui perd sa vie la préservera » (Luc 17:33). Ce que le Seigneur dit, c'est qu'une personne détrempée n'a pas peur de la pluie et qu'une personne assassinée n'a peur d'aucune menace. Par la perte, nous atteignons le gain, et par la haine de nous-mêmes et de nos possessions, nous arrivons au véritable amour. L'être humain a un dynamisme caché, comme la graine. Si elle ne meurt pas dans la terre fertile, elle reste seule. Mais si elle meurt, elle porte beaucoup de fruits.

La richesse par rapport à Dieu a deux significations : la foi et les œuvres. La première est la réponse de la foi, d'avoir une vie de communion étroite avec Dieu (cf. Luc12:37) ; la seconde est la disposition des biens conformément à la foi. Cela signifie partager vos biens avec les autres plutôt que de les accumuler pour soi-même (Luc 12:21).

Celui qui se prosterne, parade et s'encense lui-même, se noie. Cependant, s'il a pour but de « tout donner » pour que ses frères/sœurs trouvent du repos, alors cette personne est déjà entrée dans la vie éternelle - parce qu'elle vit pour son prochain - elle se voit dans tous les autres (cf. Luk 10:25-28).

Jésus-Christ et Ses saints ont ce genre d'amour ; c'est pourquoi ils ont ce type de force qui vainc la mort. Parce qu'ils étaient de vrais humains, ils respectaient « l'autre » comme eux-mêmes. Et c'est pourquoi près des saints - le petit, l'humble et le grand - chaque personne se sent valorisée. Les saints se réjouissent quand les autres se sentent valorisés et en paix.

Mais cela ne se produit pas si je fais mon propre club et si je veux me mettre en valeur. D'autres se sentent valorisés, aimés et en paix quand je deviens compost afin que les autres puissent planter leur arbre, seulement si je m'écarte, si je disparaîs et n'existe pas. Je ne veux même pas d'un « merci » - il me suffit que l'« autre » ait la vie !

L'« autre » c'est moi. « Car comme le corps est un et a beaucoup de membres, mais tous les membres de ce corps, étant nombreux, sont un seul corps, il en va de même pour le Christ » (1Cor 12:12). « Il y a un corps et un seul Esprit » (Eph 4:4). C'est pourquoi les saints - les humbles - même lorsqu'ils existent, c'est comme s'ils n'existaient pas, ils ne prennent pas de place et ils ne font pas de bruit. Et quand ils ne sont pas là « dans la chair », quand ils sont absents, ils sont également avec nous et gardent le monde entier dans la vie. Ainsi, le mode de vie des saints est celui de mourir volontairement et de se sacrifier par amour pour « l'Autre » et pour « l'autre », grand ou petit, pour Dieu ou le prochain.

La vie semble si fragile et contingente que de nombreux biens sont nécessaires pour la sécuriser, même si les possessions sont encore plus fragiles que la vie. Seule l'élimination de la peur par la persuasion que la vie est un don donné par la source de toute réalité, peut générer la liberté spirituelle et l'héroïsme de l'amour qui est offert par le partage généreux des possessions, voire la disposition de soi.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

mardi 22 novembre 2022

Livre des Jours de Valaam



" La pauvreté est un bon maître pour la connaissance de soi, et la connaissance de soi conduit à la noblesse d'esprit. Frères, pardonnez-moi pour tout."

Higoumène Agathange
(1841-1909)
27 décembre

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Disciple proche de l'higoumène Damascène depuis sa jeunesse, et novice en même temps que Père Agapit, le futur grand hésychaste de Valaam, Agathange le zélé fut aussi destiné à faire revivre la Grande Laure de saint Alexandre de Svir dans le voisinage de Valaam.

Sa correspondance avec Père Agapit, montre que ce puissant reconstructeur de Svir, qui avait un excellent esprit d'administrateur, était aussi un sérieux combattant patristique du royaume de l'ascèse.

Comme pasteur de son troupeau monastique, Agathange était aussi remarquable, quelquefois très chaleureux et très humain, qualités rares aujourd'hui, alors que les grands obstacles pourraient être évités par ceux qui gouvernent spirituellement, avec un peu de sagesse d'humilité.

La correspondance de Père Agapit avec saint Théophane le Reclus, était aussi partagée avec son ami Agathange. Tandis qu'il était à Valaam, plein de zèle ascétique, le jeune Agathange passa quelque temps seul dans une des skites où jadis de grands startsy avaient combattu le Malin. Il fut tourmenté d'angoisse toute la nuit, jusques au moment où il comprit la nature maligne du phénomène. Et il utilisa cette expérience plus tard quand il devint un "Abba", donnant des conseils à des ascètes inexpérimentés afin de les amener à la noblesse de l'esprit.

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Valaam en 1901

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Valaam en 1992

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Epilogue


Le soir est venu, la lumière va s'estomper.
Le royaume terrestre pour eux est fini.
En haut, le dais de la mort est étendu;
Ils viennent à Toi assoiffés de paix.
Donne le repos, ô Seigneur dans le havre des Cieux
Aux âmes de ceux qui sont dans l'au-delà du tombeau

Staretz Pambo
Prière pour le repos du staretz Michel I

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Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
VALAAM PATERICON
Book of Days
Valaam Society of America
New Valaam Monastery
Alaska
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lundi 21 novembre 2022

ARCHIPRÈTRE BASIL ROSS ADEN: De la vanité et de la modestie

De la vante et de la modestie

Le mot du jour est « vanité ». Notre société considère que la réussite est une raison suffisante d'être fiers de nous-mêmes. Elle ne voit rien de mal avec les joueurs de football qui font une danse d'exaltation lorsqu'ils marquent [...]. Mais aujourd'hui, dans notre lecture de 2 Corinthiens 10:7-18, saint Paul rejoint le Seigneur qui critiqua le pharisien qui se félicitait dans le "Parabole du Pharisien et du Publicain" (Luc 18:11).

Il est facile de se vanter quand on se mesure selon ses critères

Comme le Pharisien, les adversaires de Paul à Corinthe se vantent de leurs pouvoirs et dons supérieurs. De plus, ils critiquent la prétendue faiblesse et le manque de talent de Paul. Mais Paul répond par l'observation qu'il est facile de se vanter quand on se mesure selon ses propres critères. Le vantard se regarde à travers le miroir de sa propre opinion. Il s'attribue tout le mérite, même pour ce que d'autres ont contribué et fait.

Regarder vers l'extérieur ou vers l'intérieur

Mais l'apôtre note que ceux qui s'enflent de cette manière ne sont "pas sages" (vs. 12). Les arrogants regardent leur apparence extérieure et voient ce qu'ils veulent voir. Mais saint Paul dit qu'ils devraient regarder vers l'intérieur et se demander s'ils sont « du Christ » - et s'ils pensent et agissent comme s'ils étaient du Christ. Ou sont-ils juste au service d'eux-mêmes ?

Notez comment saint Paul démontre la vertu de la modestie. Il ne se vantera pas "de choses au-delà de la mesure" ni ne s'attribue pas le mérite des réalisations des autres. Il ne veut pas récolter là où d'autres ont semé. Mais il est résolu à porter l'Évangile là où d'autres ne l'ont pas encore prêché.

Pour la réflexion

Saint Anatole d'Optina a déclaré : "Là où Dieu est - il y a la paix... où que le diable soit - tout est ruine, orgueilleux et hostile" (Schaefer 2009, Kindle Loc 885). Si se vanter est une expression de vanité, alors partout où il y a de la vantardise, nous pouvons être sûrs que Satan est actif. Il prend le contrôle du cœur, de l'esprit et de la bouche des arrogants.

D'autre part, saint Isaac le Syrien a déclaré : « L'humilité s'accompagne de modestie et de recueillement » (Isaac 2011, Homélie 70). Ceux qui sont sans prétention ont le contrôle d'eux-mêmes et peuvent agir avec sagesse et discrétion.

Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

PRAVMIR

Œuvres citées (en langue anglaise)

Isaac, the-Syrian. 2011. Homilies of St. Isaac the Syrian. Edited by Homily 72 St. Isaac the Syrian, Ascetical Homilies of St Isaac the Syrian: Holy Transfiguraton Monastery.

Schaefer, Archimandrite George. 2009. Living Without Hypocrisy: Spiritual Counself of the Holy Elders of Optina. Jordanville, N.Y. : Printshop of St. Job of Pochaev.

dimanche 20 novembre 2022

23e DIMANCHE APRÈS LA PENTECÔTE - 20 novembre 2022



Saints Martyrs de Mélitène


Les 33 saints martyrs de Mélitène sont commémorés aujourd'hui. Parmi eux, saint Hiéron, né dans la ville de Tiana dans la seconde moitié du IIIe siècle. Sa pieuse mère chrétienne, Stratonica, était aveugle. 

Les empereurs co-dirigeants Dioclétien et Maximien encourageaient vigoureusement le paganisme et utilisaient l'armée pour imposer leur campagne. Hiéron avait une grande force physique, et il fut choisi comme conscrit, mais il refusa de servir dans une armée qui persécutait les chrétiens. Les autres conscrits le soutenaient. 

Dans un rêve, Hieron reçut l'avertissement d'un martyre imminent, mais il ne fut pas découragé. Lorsqu'il comparut avec 32 autres personnes devant le gouverneur, ils déclarèrent ouvertement leur foi en Christ et furent condamnés à de nombreuses tortures et à la mort par décapitation. 

L'un des parents de Hiéron, Victor, avait renié sa foi et avait soudoyé le gouverneur. Il offrit ses terres en guise de pot-de-vin. Le gouverneur, mondain et avare, accepta et libère Victor. De retour chez lui, Victor s'effondra et mourut au moment où Hieron et les autres remettaient leurs âmes à Dieu. 

Ainsi, les 33 entrèrent dans leur récompense éternelle, tandis que l'apostat perdit ses biens, ses amis et sa vie, dans ce monde et dans l'autre. Le gouverneur cupide, offrit de vendre aux chrétiens la précieuse tête de Hiéron pour son poids en or. Chrysanthe, qui était riche et pieux, s'avança et paya la somme demandée. Hiéron reçut ainsi une sépulture chrétienne. Plus tard, sous le règne de l'empereur Justinien, ses reliques furent retrouvées et s'avérèrent incorruptibles.

Saint Willibrord d'Utrecht


Aujourd'hui, nous commémorons également saint Willibrord, le premier évêque d'Utrecht. Il était originaire de Northumbrie. Son père, Wilgils, qui s'était converti au christianisme, se retira du monde et confia son fils à l'abbaye de Ripon. Plus tard, Willibrord passa douze ans à l'abbaye de Rath Melsigi en Irlande, qui était un centre d'apprentissage au VIIe siècle. 

À la demande de Pépin de Herstal, Willibrord, accompagné de onze compagnons, fut invité à christianiser les Frisons païens de la côte de la mer du Nord (Pays-Bas). En 695, Willibrord fut élevé à l'épiscopat et établit sa cathédrale à Utrecht. Pépin mourut en 714 et le païen Radbod lui succèda. Il se lança dans un programme d'incendie d'églises et de meurtre de missionnaires chrétiens. Willibrord fut contraint de fuir, mais en 719, Radbod mourut et le saint évêque fut libre de retourner à Utrecht et de poursuivre son travail missionnaire. Il s'éteignit en ce jour en 739.

St Lazare du Mont Galicien


Saint Lazare du Mont Galision, près d'Ephèse, est également commémoré aujourd'hui. Il naquit près de Magnésie, dans une famille de paysans au Xe siècle.. Après avoir quitté son foyer, il se rendit à Attaleia pour devenir moine, puis se rendit en Palestine où il entra au monastère de Saint Sabbas. Des années plus tard, il retourna dans sa région natale où il fonda trois monastères tandis qu'il devint stylite et vécut sur une colonne. Les moines de ses fondations monastiques vivaient dans des cellules individuelles plutôt que dans des monastères cénobitiques. Sa vie a été relatée par son disciple Grégoire le cellérier. Saint Lazare est allé à sa récompense éternelle en ce jour de l'année 1053.

Prêtre-martyr Daniel Sissoev


Le 20 novembre est également l'anniversaire du martyre du prêtre Daniel Sysoev, 34 ans, à Moscou, en 2009, aux mains d'un fanatique musulman. Le Père Daniel était à la fois un prêtre de paroisse et un missionnaire actif. Il défia toutes les fausses croyances, tant hérétiques que païennes, convertissant de nombreuses âmes à la vérité du christianisme orthodoxe. Dans l'autel, nous avons un pomyannik [dyptiques] général énumérant les noms des fidèles décédés. La liste comprend le père Daniel dont on se souvient à chaque liturgie dans notre église.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après


in Mettingham. 

ENGLAND

Invention des reliques du staretz roumain Dionisie [Denys] bientôt glorifié par l'Eglise


Mt. Athos, 18 novembre 2022

orthodoxianewsagency.grorthodoxianewsagency.gr     

Les saintes reliques du bienheureux staretz Dionisie (Ignat), qui sera canonisé par l'Église orthodoxe roumaine en 2025, ont été mis au jour sur le Mont. Athos hier (17 novembre).

Le père Dionisie est né dans le comté de Botoşani, en Roumanie, en 1909, et fut tonsuré moine sur le Mont. Athos en 1927. Au cours de ses 78 années de vie monastique sur la Sainte Montagne, il s'est distingué comme un grand ermite et confesseur de nombreux pères athonites, dont le staretz Joseph de Vatopedi, enfant spirituel de saint Joseph l'hésychaste. Il fut également reconnu comme un pratiquant qualifié de la Prière de Jésus. Le bienheureux staretz s'est né au Ciel le 28 avril 2004, à l'âge de 95 ans.

À l'invitation du Hiéromone Dionisie II, l'higoumène Ephraim de Vatopedi est venu recueillir les reliques à la kellia de la skite de St. George de Kolitsou, qui est sous Vatopedi. Il était accompagné de Sa Grâce l'évêque  Timotei de Prahova, vicaire de l'archidiocèse de Bucarest, rapporte Vatopedi.

L'évêque Timotei, l'higoumène Ephraim et le hiéromoine Antipas de la cellule d'Iveron de St. Anne ont également parlé du staretz Dionisie.

Le monastère écrit :

Le bienheureux staretz Dionysie était un guide spirituel expérimenté. Son accueil était ouvert et comprenait chaque croyant, chaque confesseur. C'était l'accueil de Dieu le Père, qui attend le retour du prodigue, pour lui pardonner et mettre l'anneau de l'éternité sur lui. Son discours était direct, pur et empirique. Pendant toutes les années que le staretz a vécues et a pratiqué l'ascèse dans le Jardin de la Mère de Dieu il n'a jamais cessé de remercier et d'être reconnaissant envers la Mère de Dieu et le Christ pour leurs bénédictions et leurs interventions divines dans sa vie.

Pour lire les paroles du staretz Dionisie, voir l'article [en anglais]« Le jeûne est la grâce divine ».

Les reliques du staretz Joseph de Vatopaidi ont été exhumées au monastère du Mont. Athos en octobre dernier.


Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

ORTHOCHRISTIAN