"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 8 juin 2019

LES FUSÉES DE SAINT PAÏSSIOS Entretien avec le docteur en théologie finlandais Hannu Pöyhönen


Hannu Pöyhönen (photo), docteur en théologie, qui s'est entretenu avec saint Païssios l'Hagiorite et il a organisé un monastère orthodoxe dans la ville finlandaise de Lammi, parle de ses rencontres avec le vénérable staretz.
-Docteur Hannu, vous avez mentionné que vous avez eu le privilège de rencontrer saint Païssios l'Hagiorite et de converser avec lui.
-Oui, je l'ai fait. C'est arrivé par la grâce de Dieu.
-Quels ont été les principaux sujets de vos conversations ?
-Il y en avait beaucoup, y compris certains très personnels. Mais certains sujets nous concernaient tous. Par exemple, les épreuves et les tribulations et la capacité des chrétiens de ne pas paniquer et de savoir que nous ne sommes pas seuls - nous sommes avec Dieu. Je me souviens qu'un jour le Père Païssios a dit : "Savez-vous ce que font les gens avant qu'une fusée ne soit lancée ? Ils comptent à rebours : "Dix, neuf, huit, sept..., un, décollage ! Quand ils disent " décollage ", le lancement a lieu. De même, si vous avez atteint le point de décollage, vous allez vous envoler." Nous avons tous atteint le fond de notre vie, n'est-ce pas ? Et nous (notre communauté) l'avons testé avec notre propre exemple plusieurs fois au cours de ces années : L'aide de Dieu vient au moment même où il semble que nous nous sommes efforcés à l'extrême et que nous nous sommes épuisés. L'aide vient d'une manière miraculeuse, et vous réalisez que l'énergie dépensée a été les "étapes" dont vous aviez besoin. Et votre tâche est ...d'oublier ce qui est derrière, et de tendre la main vers ce qui est devant (Phil. 3:13), comme l'apôtre l'a dit.
Surmonter la malédiction de Babel
Comment avez-vous rencontré le Père Païsios ?
-Quand je suis arrivé pour la première fois au Mont Athos, littéralement "tourmenté par la soif spirituelle " [1], j'ai demandé à tout le monde vers qui me tourner pour un conseil spirituel ? Et ils répondirent d'une seule voix : "Allez voir le Père Païssios." Alors, en 1988, ce nom était sur toutes les lèvres. Bien sûr, je voulais beaucoup parler avec le staretz, mais l'ancienne malédiction de Babel fut révélée : J'avais une très mauvaise connaissance du grec [moderne]. Certes, je connaissais bien le grec ancien et je le lisais, mais la langue d'Homère, sans parler de l'anglais ou du finnois, ma langue maternelle, n'était pas bonne pour une discussion approfondie avec le saint staretz. De quoi allez-vous parler avec un grand ascète si vous ne connaissez pas la langue de l'autre ? Et je ne pouvais pas supporter d'aller voir le saint homme et de lui poser des questions très importantes avec mon pauvre grec. Quoi qu'il en soit, lors de ma première visite au Mont Athos, j'ai entendu parler de Saint Païssios.
J'ai donc appris le grec moderne à fond et l'année suivante, je me suis de nouveau rendu au Mont Athos.
Un "miracle électoral"
Je n'espérais pas vraiment voir le starter parce que c'était la Pentecôte et j'étais sûr qu'il avait des centaines d'invités. Dès que je suis monté dans sa cellule, il s'est avéré que j'étais le seul visiteur ! Les élections législatives avaient lieu ce jour-là et tout le monde s'était rendu dans les bureaux de vote.
-Au moins un peu de bien vient de la politique pour une fois!
-Nous avons donc parlé dans sa cellule avec le staretz pendant une heure. Le staretz, qui était plongé dans la prière, comptait ses chapelets de prière et m'écoutait, pendant que je lui racontais ma vie, et lui demandais conseil. Mais il n'y avait pas d'agitation, pas de précipitation, c'était une conversation paisible et tranquille. C'est quelque chose qui m'a tout de suite frappé - cette atmosphère bénie de sérénité et de tranquillité pendant mon entretien avec le Père Païssios.
Ce sont les moments mêmes de votre vie qui, comme vous le réalisez par la suite, sont la vraie vie. Vous vivez de cette lumière et de cette paix, et leurs souvenirs vous aident à vous souvenir du Christ, même dans l'agitation et les difficultés. J'appellerais ce sentiment, le contact avec l'éternité bénie. Ayant une fois expérimenté ce sens de la Patrie Céleste, vous ferez de votre mieux pour ne pas le perdre.
Une "icône"

Saint Païssios l'Hagiorite
De plus, en présence de grands hommes comme saint Païssios, vous vous trouvez.
Pourriez-vous nous expliquer cela, s'il vous plaît ?
-Chaque fois que j'ai parlé avec le Père Païssios (et je suis allé vers lui à plusieurs reprises), j'ai vu son amour et son respect et j'ai compris que le staretz voyait vraiment l'image de Dieu en moi et vénérait cette image, cette icône. Et il a toujours eu le désir de m'aider et de me servir. Je ne parle pas d'aide dans les choses de tous les jours, comme faire du café, offrir une chaise, tenir la porte ouverte ou aller chercher un sac à dos lourd - bien qu'il y ait tout cela aussi ; je parle du désir d'un vrai chrétien de faire tout son possible pour aider son prochain dans son chemin vers Dieu. Et le staretz Païssios avait ce pouvoir ! Le pouvoir de son amour pour son prochain aide à être soi-même, sans théâtralité et sans se tromper soi-même.
Je serai franc : je n'ai jamais vu autant d'amour pour le prochain chez personne si ce n’est chez saint Païssios.
Après notre conversation, en nous quittant, le Père Païssios s'est approché de moi avec un énorme sac poubelle en plastique : "Je n'ai pas de parapluie. S'il vous plaît, prenez ce sac, qui vous protégera de la pluie." "Quelle pluie, Géronda ? Pourquoi ce sac ? Le ciel est dégagé !" "Ça vous sera très utile, je le sais avec certitude." Nous nous sommes séparés. Quinze minutes plus tard, il a commencé à pleuvoir - et je n'ai jamais vu une pluie aussi forte de ma vie. Je pense que c'est à ça que devait ressembler le Déluge. Je n'en suis pas sûr, cependant. J'ai fait un trou pour mon visage dans l'"imperméable" que le staretz m'avait donné et j'ai alors marché pendant une heure et demie jusqu'au monastère où je devais passer la nuit. Quand je suis arrivé, les gens pensaient que j'étais un être extraterrestre - Après une tempête de pluie, j'étais sec, heureux et joyeux ! Pour moi, " l’imperméable" de cet incident amusant était une image des prières et des bonnes intercessions des saints pour nous, pécheurs. Il peut y avoir des tempêtes et toutes sortes de calamités dans nos vies, mais la vraie prière nous protégera toujours du danger.
C'est ainsi que j'ai connu le vénérable staretz Païssios. Nous nous sommes rencontrés plusieurs fois par la suite. Bien que j'aie essayé de l'"épargner" parce qu'en effet des milliers de personnes affluaient vers lui et je détestais déranger le ministère du staretz. Je venais souvent lui demander sa bénédiction et ses prières et nous parlions pendant une minute ou deux. Cependant, à plusieurs reprises, lorsque les circonstances le permettaient, nous avons parlé pendant des heures.
Les cris finlandais sur le mont Athos
Un jour, mon père-confesseur avoua : " Je suis désolé mais je ne peux pas t’aider avec ce problème. Tu ferais mieux d'aller voir le Père Païssios, je pense qu'il peut t'aider." A l'époque, le staretz était très malade. Mais une fois qu'il a entendu le début de mon histoire, il a oublié sa maladie et est devenu toutentier attention. Et pas seulement une attention polie et courtoise - il s'est plongé complètement dans la prière et est devenu plus jeune sous mes yeux. Il était clair qu'une tâche des plus sérieuses se déroulait en lui - je dirais même, sa synergie avec Dieu - en mon nom. C'était à la fois majestueux et effrayant.
Après avoir prié, le Père Païssios a levé les yeux et m'a dit quelques mots très simples. Mais ces paroles venaient du fond de son cœur, de l'expérience personnelle de sa lutte contre le péché ; et, je dois l'admettre, comme une bombe, elles ont détruit l'agglomération de misères et de tentations avec laquelle j'étais venu voir le staretz. Après cela, je courus de sa cellule vers le monastère d'Iveron et je criais à haute voix : "Gloire à Dieu ! Gloire à Dieu !" J'espérais que personne ne me verrait et penserait que j'étais fou.
Rigueur salvifique
-Le saint homme t'a-t-il toujours tapoté dans le dos ?
-Non, il ne l'a pas fait. Parfois, il peut être strict. Pas en colère, bien sûr, mais strict. C'était dicté par son amour pour les gens. C'était nécessaire, par exemple, lorsque la rigueur était le seul moyen de sauver les autres du désespoir. 
Un jour, alors que mon camarade et moi revenions d'Ouranoupolis à Thessalonique, il me raconta l'histoire suivante. Ses deux fils étaient morts dans des accidents de voiture, à un an d'intervalle. Aucune parole ne pouvait décrire sa douleur et celle de son épouse. Son épouse tomba gravement malade, il  eut une crise cardiaque et le couple était désespéré. Mon compagnon s'est rendu au Mont Athos avec sa dernière force pour chercher consolation auprès du staretz Païssios. Entendant le deuil du père, voyant l'état terrible de son esprit, le staretz s'adressa à lui très sévèrement : "Tu pleures tes fils, qui sont maintenant avec le Christ. Mais tu pleures pour la mauvaise raison : Tu es en difficulté et non eux. Tu dois trouver un père spirituel et vivre sous sa direction." Mon compagnon m'a dit qu'il ne s'attendait pas à de telles paroles de la part du staretz, qui était toujours aimable et tendre. "Mais où trouverai-je un père spirituel, Géronda ?" "Va au monastère d'Iveron, et tu le rencontreras en chemin." Il est parti et il a rencontré le Père Maximos, son futur père spirituel, sur un sentier pédestre. Ce pasteur l'a aidé, lui et sa famille, à sortir du gouffre du découragement.
La rigueur du Père Païssios était dictée exclusivement par son amour. En effet, l'homme avait besoin de soutien et il le reçut et, en même temps, il réalisa que Dieu prenait soin de lui, de son épouse et de leurs fils défunts.
Les " falaises froides de la Finlande "[2]
et les ferventes prières finnoises 
Maintenant que le Père Païssios est au Ciel, sentez-vous que vous maintenez le contact avec lui et que vos "conversations" continuent ?
-Je ne peux pas me considérer comme un interlocuteur digne de ce nom, mais je compte sur les prières, le soutien et l'amour de cet homme vénérable. Et je suis heureux d'avoir réussi à traduire et à publier quelques livres sur le staretz Païssios l'Hagiorite, ses lettres et ses conférences ici en Finlande. Bien sûr, je me tourne continuellement vers lui dans mes prières. J'espère que la découverte de saint Païssios aidera beaucoup d'entre nous à nous rapprocher de Dieu.


-Et que pensent les lecteurs finlandais du staretz Païssios ? Le trouvent-ils un peu bizarre et étranger?
-Bien au contraire : gloire à Dieu, les Finlandais l'aiment beaucoup. Et beaucoup d'entre eux se sont convertis à l'Orthodoxie. Mais ce n'est que le tout début ; beaucoup de choses restent encore à découvrir.
Pourquoi pensez-vous qu'ils l'aiment beaucoup ?
-Il y a un certain nombre de raisons. Tout d'abord, il est notre contemporain et il a parfaitement bien vu la vie de la société moderne. Deuxièmement, le Père Païssios n'a jamais parlé d'une manière difficile à comprendre - toutes ses paroles étaient simples, accessibles, colorées et vivantes. Et, plus important encore, elles ont été honnêtes et confirmées par sa vie. D'ailleurs, on peut l'appeler le "pain véritable" que les gens d'aujourd'hui recherchent tant. Vous souvenez-vous que nous avons parlé du "pain spirituel en plastique" dans notre conversation précédente ? Le Père Païssios nous a donné et nous donne encore ce pain authentique. C'est comme un bon livre pour enfants - il faut être capable de leur dire des choses très importantes en termes simples. Le staretz avait cette capacité. Et, troisièmement, il avait un sens de l'humour très subtil et très bon, ce qui est une qualité de vie cruciale, à mon avis ; une bonne plaisanterie peut adoucir le cœur. Le sourire du saint a aidé les gens à comprendre que la tâche de Dieu est de leur donner la liberté et non de les entasser dans une "boîte" ou de les épuiser avec des instructions et des injonctions. Quelqu'un qui a été libéré du mal peut-il s'abstenir de sourire ?
Et nous, tout en essayant d'organiser notre vie monastique ici à Lammi, nous considérons que notre tâche est de faire connaître la vie et les exploits spirituels de ce saint homme à ceux qui nous rendent visite. Nous sommes convaincus que sa vie est un modèle de notre temps pour vivre avec Dieu. S'efforcer et être capable de servir les autres de tout cœur est très révolutionnaire dans notre monde moderne, qui vénère les idoles de la consommation et du confort. Bien que le christianisme lui-même soit "révolutionnaire."


Le staretz disait : "Si vous ne servez pas votre prochain, vous ne serez jamais heureux, ce sera une fausse joie. Mais quand vous vous consacrerez à votre prochain, vous verrez la joie que Dieu vous donne." Et notre vie confirme la justesse de ses paroles toutes les heures. Regardez autour de vous, vous verrez combien d'égoïstes malheureux crient de joie ! Les gens souffrent, prennent des antidépresseurs, suivent des "cours de bonheur" et font tout ce qu'ils peuvent pour y parvenir, mais le résultat est toujours le même : leurs yeux sont remplis de douleur et leur âme se dessèche. Nous devons sans cesse revenir aux bases de la vie spirituelle. C'est si facile d'être heureux - il suffit de commencer à aimer les autres.


Une prière de protection
-Je suis persuadé que les pèlerinages au Mont Athos sont grandement bénéfiques pour leurs participants.
-Pas seulement bénéfiques. Ils leur confient également de nouvelles tâches. L'une des tâches principales de notre fraternité en Finlande est de restaurer la dévotion à la Très Sainte Théotokos [Mère de Dieu]dans ce pays.
Pourquoi donc ? -Pourquoi ? Voulez-vous dire que cette vénération a été interrompue ?
-Elle a été pratiquement abandonnée. Dans le protestantisme, en particulier le protestantisme moderne, la Mère de Dieu est "respectée" au mieux. Il n'y a aucune trace de l'ancienne vénération dans la société contemporaine non religieuse - l'Église lui est étrangère. A mon avis, l'abandon de la dévotion à la Très Sainte Théotokos est la cause de la destruction des familles. Non seulement les gens modernes se sentent seuls, mais ils sont aussi isolés du Ciel. Nous avons une bonne raison de les appeler "orphelins spirituels". C'est pourquoi nous avons nommé notre communauté en l'honneur de la Reine du Ciel-Panaghia [Toute Sainte].
Vers qui les gens se  tourneraient-ils toujours dans toutes leurs misères ? A la Vierge Très Pure. Nous voulons donc montrer aux gens que bien que nous soyons seuls et isolés du Ciel, nous avons l'occasion de briser ce mur : nous devons juste nous rappeler que nous avons tous en Elle une Intercession Fervente, et que Son voile protecteur est étendu sur nous tous.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
***
[1] Allusion obvie au commencement du célèbre poème de Pouchkine: " Tourmenté par la soif spirituelle, je me traînais dans un lugubre désert."
[2] Une allusion à : "Des falaises froides de la Finlande à la Colchide flamboyante", vers du poème Aux contempteurs de la Russie d'Alexandre Pouchkine, composé par lui en 1831. 

Le scientifique et Dieu


Soudain mourut un éminent scientifique, et son âme fut jugée devant Dieu.

Fasciné par la quantité et la profondeur de ses connaissances, le scientifique dit au Créateur sans détour: 

"Nous, les scientifiques, avons conclu que nous n'avons plus besoin de Toi ! Nous avons déverrouillé tous les mystères et savons tout ce que Tu sais : nous sommes capables de transplanter le cœur et tout autre organe du corps, de cloner des humains, de créer de nouvelles espèces de plantes et d'animaux...

 En un mot, nous pouvons faire tout ce qui était considéré comme miraculeux et attribué à Ta sagesse et à Ta toute-puissance. Créateur, Tu sais, on n'a plus besoin de Toi, nous ne sommes plus Tes enfants, nous avons déjà eu des réussites fantastiques. 

Nous pouvons même facilement créer un homme à partir d'argile ! " 

- Et [le scientifique] se pencha machinalement pour ramasser un morceau d'argile quand il entendit une voix calme venant du Ciel :" Utilise ta propre argile!..."

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

vendredi 7 juin 2019

Les grands penseurs amériKKKains

Le visage amène et plein d'esprit 
de Mr. Zbigniew Brzezinski 

*
Un des principaux "idéologues" américains 
Zbigniew Brzezinski 
est crédité de la phrase 
"après l'effondrement de l'Union soviétique,
 le principal ennemi des Etats-Unis
 est 
l'Eglise orthodoxe" !

***

Alexis Smirnov: D'où vient la doctrine de la primauté de Phanar dans le monde orthodoxe ?

Métropolite Zizioulas et son "patriarche"

Faut-il rappeler que Jean Zizioulas, était un des artisans de la tentative avortée de célébration commune entre le pape catholique romain et le "patriarche" d'Istanbul, pour faire l'union entre les deux églises!
voir
et la recension du livre
Frère Patrice Mahieu, o.s.b. « PAUL VI ET LES ORTHODOXES », collection « Orthodoxie », CERF 2012, pp. 197-200
Le livre comporte quelques informations inédites. L’une d’elle concerne la « commission secrète » dont les travaux se sont tenus à Chambésy puis à Zurich en avril et juin 1970 (p. 194-200). Constituée du côté orthodoxe par le métropolite Damaskinos et Jean Zizioulas [déjà néfaste comme laïc], elle émit un avis favorable pour une concélébration eucharistique entre le pape Paul VI et le patriarche Athénagoras.
 Lire la recension de ce livre ICI
C.L.G.

***



En tant que théologien grec, John Zizioulas tente de justifier les prétentions papales du patriarche Bartholomée.


Les actions anti-canoniques du patriarche Bartholomée en Ukraine ont provoqué la plus grande crise de l’église orthodoxe depuis le schisme de 1054.


Et le problème ne réside pas uniquement dans l’intervention d’une église locale dans les affaires d’une autre, ni dans le différend portant sur un territoire canonique. De telles choses sont déjà arrivées. Et la rupture de la communion eucharistique n’est pas nouvelle. Ce fut le cas entre les églises d'Antioche et de Jérusalem, entre celles de Jérusalem et de Roumanie etc.


Le problème principal réside dans la tentative de Constantinople d'imposer à tout le monde orthodoxe un nouvel enseignement sur l'Église et de le présenter comme traditionnelle pour l'Orthodoxie. À savoir, obliger tout le monde orthodoxe, en particulier la «nouvelle» autocéphalie (qui est apparue après les conciles œcuméniques), à se soumettre à un centre et à reconnaître les privilèges spéciaux de la «nouvelle Rome».


Jusqu'en 2016, de telles affirmations existaient davantage au niveau de la théorie que des pratiques et n'étaient soutenues, dans une certaine mesure, que par les églises grecques, le reste de ces affirmations étant étrangères et incompréhensibles pour les autres.


Il y a eu des discussions périodiquement sur la primauté, par exemple entre le l'Eglise orthodoxe russe et le métropolite Elpidifor (Lambriniadis) en 2014, qui n'ont toutefois pas abouti à des conflits majeurs.


Le signe avant-coureur de l'orage a été le Concile crétois, où le Phanar, par les règles imposées, a tenté de consolider son droit de convoquer les Conciles œcuméniques. Deux ans plus tard, l'invasion de Constantinople en Ukraine a suivi. Après cela, ils déclarèrent leur droit exclusif d'accorder l'autocéphalie et de mener un procès péremptoire contre tout membre du clergé. Le Tomos pour le patriarcat de Constantinople est devenu la quintessence des revendications papales du patriarche Bartholomée et de leur conception de référence. Après de telles actions, le conflit ouvert entre le Phanar et les églises locales est devenu inévitable et l’ensemble du monde orthodoxe s’y est impliqué.


Il est nécessaire de souligner une caractéristique: les revendications de pouvoir de Constantinople reposent non seulement sur des arguments canoniques historiques, mais également sur un système théologique et dogmatique particulier. Et ce système a été formé non pas hier, mais il y a plusieurs décennies. Son auteur principal est le métropolite de Pergame, Jean Zizioulas. Pour les Ukrainiens, il est surtout connu en tant que membre de la délégation de Constantinople qui, en 2018, a sillonné les églises locales pour les mettre devant le fait de l'octroi de l'autocéphalie à "l'Eglise d'Ukraine" [non canonique].


C'est pourquoi l'analyse du système théologique de ce hiérarque grec est nécessaire à la compréhension des processus actuels. L'analyse détaillée n'est pas l'affaire d'un seul article. Nous considèrerons les caractéristiques générales de ce système.

Enseignement à propos de l'Eglise locale


L'ecclésiologie de Zizioulas repose sur la doctrine de l'Église locale et de l'Eucharistie.


Pour beaucoup, l'identification de l'Église locale aux patriarcats autocéphales ou aux métropoles est coutumière. Cependant, Zizioulas l'utilise dans un sens différent, à savoir: L'église locale est ce qu'on appelle maintenant le diocèse. En analysant l'Évangile et les premiers textes chrétiens, il parvient à la conclusion que la communauté eucharistique, présidée par l'évêque, s'appelait à l'origine Eglise locale, entourée d'un comité d'anciens (prêtres). L'Eucharistie, la congrégation et l'évêque sont donc des éléments constitutifs de l'Église.


Selon Zizioulas, une telle communauté combine l’historique (ce qui était et ce qui est) et l’eschatologique (ce qui sera et ce qui devrait être - le royaume de Dieu). La catholicité et l’universalité sont les principales caractéristiques de l’Église locale: dans un lieu où se rassemblent tous les membres de l’Église de cette région, toutes les divisions naturelles et sociales sont surmontées - sexe, race, nationalité, langue, profession, statut, etc. Dans la compréhension de Zizioulas, chaque église locale exprime la plénitude de l'Église en tant que corps du Christ.


Le problème principal réside dans la tentative de Constantinople d'imposer à tout le monde orthodoxe un nouvel enseignement de l'Église et de le présenter comme un tradition pour l'Orthodoxie.


À première vue, tout est assez orthodoxe: l'Église, selon Zizioulas, n'est pas une organisation, c'est un mode de vie concentré dans l'Eucharistie. En lisant un tel raisonnement, on pourrait penser qu’il s’agit d’une véritable foi orthodoxe. Cependant, après avoir examiné les détails, on est surpris de constater une métamorphose étonnante.


Dans une section de son livre «Être en communion», Zizioulas parle beaucoup du fait qu’un évêque n’existe pas sans communauté, le service dans l’Église est impensable sans communauté, le pouvoir et le charisme de l’évêque sont de nature «relationnelle», etc. Mais alors, de façon inattendue, il prétend ensuite que l’évêque est le principe exclusif de l’unité de la communauté.


En 2014, cette thèse de Zizioulas sera reprise par le métropolite Elpidifor (Lambriniadis) dans l'article «Le premier sans égal»: «au niveau ecclésiologique de l'Église locale, le principe de l'unité n'est pas un presbyterium ou un ministère commun des chrétiens, mais l'identité de l'évêque!


La question se pose: si l'évêque est la source exclusive de l'unité de la communauté, alors quel est le contenu réel de la sobornost [1]? Comment la source de l'unité peut-elle être à l'extérieur ou au-dessus de la communauté?


Ainsi, déjà au niveau de l’enseignement de Zizioulas sur l’Église locale, on peut voir que la catholicité, la communauté et la communion revêtent un caractère abstrait et contradictoire.


Et cela semble lié à la dialectique schématique qu'il tire de la doctrine particulière de la Trinité, en essayant d'extrapoler ce schéma à tous les niveaux de la hiérarchie de l'Eglise.


Discours sur la doctrine de la "monarchie" du Père: l'hypostase de Dieu le Père est le principe (c'est-à-dire le début, la source) de l'unité de la Trinité. En même temps, Zizioulas oppose personne et essence, affirmant que l'unité de la Trinité est assurée non par une entité unique, mais par l'hypostase de Dieu le Père, qui est le "premier commencement" de la Trinité.
Doctrine de la primauté


Le rôle principal dans ses arguments sur la primauté est joué par le principe du «un-plusieurs», qu’il extrait par abstraction de la doctrine de la Trinité, du Christ et de l’Eucharistie. Selon ce principe, l'unité et la communication du "plusieurs" sont impossibles sans le "un", qui, chez Zizioulas, sans aucune explication est identifié au "premier".


Après cela, Zizioulas, par analogie, applique ce principe à une structure hiérarchique de l'Église, en faisant valoir qu'à tous les niveaux de la vie de l'église - locale, régionale et universelle - il doit y avoir un évêque primat.


Déjà ici, vous pouvez trouver la plus grave erreur méthodologique de Zizioulas. Une comparaison abstraite de la Trinité et de la structure de l'Église sans explications quelconques est absolument inacceptable. Parce que dans ce cas, relatif et absolu sont mêlés et qu'une hiérarchie intolérable est introduite dans la compréhension de la Trinité. Si Dieu le Père est un prototype de l'évêque «supérieur» dans l'Église, il s'avère que, dans la Trinité, il remplit la fonction de «supérieur», ce qui frise l'hérésie absolue et contredit les enseignements des Pères de l'Église en ce qui concerne l'égalité de toutes les personnes de la Trinité. D'autre part, la hiérarchie de l'Eglise est absolutisée et "divinisée".


"Au niveau ecclésiologique de l'Eglise locale, le principe de l'unité n'est pas le presbyterium ou le ministère commun des chrétiens, mais l'identité de l'évêque!"

métropolite Elpidifor (Lumbriniadis)


En général, le «principe d'analogie» lui-même est discutable en tant que méthode théologique. Par exemple, l'archiprêtre Serge Boulgakov, représentant de l'École de théologie de Paris, a comparé les personnages de la Trinité aux différences de sexe d'une personne, et son Saint-Esprit était associé à la «féminité». De toute évidence, l'utilisation d'analogies peut mener à un pur fantasme qui dépasse la réalité. Il semble que dans le cas de Zizioulas, nous avons affaire au même fantasme.


La doctrine de la «monarchie du Père» a été utilisée pour justifier la primauté de Constantinople par le métropolite Elpidifor dans l'article susmentionné «Le premier sans égal», où il défendait également un «ordre théologique» spécial dans la Trinité: «L'Église a toujours compris systématiquement et la personnalité du Père comme le premier Primat dans la communion de la Sainte Trinité». Elpidifor a probablement emprunté cette thèse précisément à Zizioulas, établissant une analogie entre l'évêque et Dieu le Père.


Le théologien grec bien connu Hierotheos (Vlachos), est opposé à une analogie aussi vulgaire et primitive entre la Trinité et l'Église:


«Selon les enseignements de l'apôtre Paul, l'Église est le Corps du Christ. Le fondement de l'Église est Christocentrique et non pas triadocentrique, car le Christ est « un de la Sainte Trinité » et Il s'est incarné, c'est-à-dire qu'Il a accepté la nature humaine et l'a vécue. Lorsque l’Eglise est caractérisée comme une «image» ou «à l’image de la Sainte Trinité», alors du côté strictement théologique, il y a confusion entre théologie et économie et confusion entre incréé et créé. De plus, dans la définition de l'Église en tant qu'image de la Sainte Trinité, de nombreux problèmes se rapportent à la comparaison entre les Églises et les propriétés hypostatiques des personnes de la Sainte Trinité! »


Même si nous comparons les relations au sein de la Trinité et les relations entre les Églises locales, nous devons supposer qu'une Église devrait exister, qui serait la source et le début de toutes les autres Églises locales, tout comme Dieu le Père est la source de la Trinité et Christ est la source et le chef de l’Église. Faites attention à la rhétorique de Constantinople - elle s’appelle souvent «l’Église mère» et «la mère de toutes les Églises»! De telles affirmations ne sont nullement accidentelles et tiennent à la nécessité de se conformer à la logique du principe abstrait «un-plusieurs». Ceci est une démonstration pratique de l'influence de la doctrine de Zizioulas sur la rhétorique de Constantinople.


Mais le fait est que Constantinople n’a jamais été une source pour d’autres Églises. Seule l'église de Jérusalem a le droit de revendiquer ce rôle. Par conséquent, Constantinople doit rechercher des arguments supplémentaires en faveur du fait d'être le "début" et la "source" de toutes les Églises orthodoxes. Il y a donc des chimères idéologiques et des affirmations selon lesquelles Constantinople est la source de la pureté de l'enseignement orthodoxe, etc. Par conséquent, d'autres Églises locales ne pourraient maintenir leur conscience dogmatique dans la pureté que dans la communion avec le "premier trône" de Constantinople, qui est le porteur de cet "infaillible" hellénisme.


* * *


Premièrement, l’erreur principale de Zizioulas est de croire que l’analogie peut être la base de l’enseignement sur l’Église. Cependant, l'analogie n'est qu'une analogie. En réalité, l’Eglise n’est pas l’image de la Trinité et les premiers hiérarques de l’Eglise ne sont pas l’image de Dieu le Père. Une telle comparaison ne peut être autorisée, sauf à titre de métaphore. Pourquoi Zizioulas a-t-il eu besoin de telles conclusions abstraites alors qu'il existe des définitions plus réalistes de l'Église? Est-ce que ces conclusions permettent certaines manipulations?


Deuxièmement, le contenu de l'analogie elle-même est incorrect. La façon dont Zizioulas décrit la Trinité ne correspond pas à l'enseignement orthodoxe et est au bord de l'hérésie.


La première et la deuxième [erreurs] permettent à Zizioulas d’effectuer la manipulation, qui consiste en une "neutralisation" plutôt virtuose du concept de conciliarité. D'une part, Zizioulas répète sans cesse que «l'un» n'existe pas sans «plusieurs». Il semblerait que ce soit la raison de la conciliarité. Cependant, la deuxième partie de la thèse transforme la première en une formalité. Si la source de l'unité du «plusieurs» réside dans le «un», qui s'identifie au «premier», alors la sobornost, «tourne à l'envers» et est perçue par le Phanar du point de vue de la «perspective inversée».


Dans la rhétorique pratique, cela se traduit par l'identification du pouvoir et de la responsabilité. Constantinople répète tout le temps que ses privilèges ne sont pas du pouvoir, mais une «responsabilité transfrontière», et que cette responsabilité ne découle pas des Eglises locales existantes, mais de Constantinople même! En reprenant Orwell [2], les thèses des Phanariotes peuvent être représentées de la manière suivante: la liberté est la soumission, le pouvoir est l’amour, la communication est l’opinion de chacun, etc.


C’est-à-dire que Constantinople dit en quelque sorte: nous prenons soin de vous, nous vous servons, nous sommes épuisés pour votre bien et nous supportons des pertes de réputation. Et de son point de vue, c'est la "collégialité"! Mais dans le même temps, les Phanariotes croient qu’ils sont les seuls à savoir quel est le vrai bien pour les autres Églises locales. La conciliarité devient alors une abstraction, séparée de la volonté réelle des Églises locales et elle est remplacée par la volonté subjective et l'idée du bien commun de Constantinople.


Une telle manipulation est très similaire à la doctrine catholique de la primauté et de l'infaillibilité du pape. Les catholiques justifient également la primauté dans les catégories "ministère", "responsabilité", etc. Évidemment, tous les modèles "papistes" doivent en fin de compte justifier l'infaillibilité du "premier sans égal".


L'erreur de telles théories est évidente. La sobornost n'est pas soumise au «premier», même s'il se considère comme un «serviteur du Concile» et elle implique une discussion commune obligatoire des questions les plus importantes pour l'Église. Dans ce contexte, la compréhension générale de l’essence de la «communication» de Zizioulas est erronée. Et c'est un triste exemple de la façon dont la théologie, orientée vers la philosophie personnaliste (avec ses idéaux de liberté, de personnalité et d'amour), est devenue son contraire.


Version Française Claude Lopez-Ginisty

d'après




NOTES:

[1] Sobornost (en russe : Соборность "Communauté spirituelle de personnes vivant ensemble") est un terme russe important dans le vocabulaire religieux et philosophique au sein de l'Église orthodoxe russe. Conciliarité... Voir wikipedia


[2] Cf. 1984, publié en 1949. Dans ce roman, le langage manipule les notions les plus élémentaires afin de maintenir les êtres dans la sujétion. Le nouveau langage théologique inepte des phanarodoxes stambouliotes, permet la même supercherie.(NdT)

Saint Jean du Nouveau Valaam


Procession
Participaient à la liturgie l’archevêque d’Helsinki et de toute la Finlande Léon, le métropolite de Kuopio et de Carélie Arsène, le métropolite d’Oulu Élie, le métropolite du Burundi et du Rwanda Innocent (Patriarche d’Alexandrie) et l’ex-métropolite d’Oulu Pantéléimon, avec le clergé du monastère. Le père Mattias Palli, représentant l’Église orthodoxe apostolique d’Estonie (Patriarcat de Constantinople), participait également à l’office. Les moniales du monastère de la Sainte-Trinité de Lintula, ainsi qu’un grand nombre de clercs et de laïcs ont assisté à la célébration. Après la lecture de l’Évangile et l’homélie de l’archevêque, l’archidiacre Victor a lu le synaxaire du saint. Après la liturgie a eu lieu la procession de l’icône de saint Jean dans les locaux du monastère, où vécut le saint dans l’ascèse et où il devint père spirituel de nombreux orthodoxes, tant de Finlande que de l’étranger. Le recueil des lettres de saint Jean a été publié en russe, alors que le saint était encore en vie. Les lettres de l’Ancien de Valaam sont connues dans de nombreux pays du monde. À l’issue de la divine liturgie, le représentant de l’Église orthodoxe apostolique d’Estonie, le père Madis Palii a adressé ses félicitations à l’Église de Finlande de la part du métropolite de Tallin et de toute l’Estonie Stéphane (Patriarcat œcuménique). Celui-ci a offert au monastère une icône de tous les Néomartyrs d’Estonie. L’après-midi de la fête, le métropolite Pantéléimon a récité l’Acathiste à saint Jean en l’église du monastère dédiée à tous les saints ascètes. La mémoire du saint est fixée au 5 août. On peut trouver ici une courte biographie et des conseils spirituels du saint.
Source (dont photographie) : Romfea
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Staretz Jean de Valaam


Ivan Alexeyevitch ALEKSEYEV est né en 1873 au Nord de Moscou. Il entra à 16 ans au monastère de Valamo. Après 4 ans, il en sortit pour effectuer son service militaire. Il passa ensuite deux ans avec sa famille et six ans après l’avoir quittée, il retourna à Valamo (1900). Il devint moine en 1910 sous le nom de Iakinf.
En 1921, il fut ordonné diacre puis prêtre et fut envoyé comme higoumène du monastère de saint Tryphon à Petsamo dans le Cercle Arctique. 11 ans plus tard, il retourna à Valamo et fut placé à la tête de la petite communauté monastique qui vivait sur l’île Saint-Jean-Baptiste. Il y prit le grand schème sous le nom de Jean.
Il fut choisi par les moines comme confesseur en 1938.
Le monastère de Valamo fut abandonné pendant la dernière guerre et il dut fuir avec les autres au Nouveau Valamo en Finlande. Il naquit au ciel paisiblement en 1958.

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Ses conseils et instructions spirituels sont écrits dans une langue très simple et sont le miel venu tout droit des enseignements des saints pères théophores.

Je ne suis pas allé beaucoup à l’école et j’écris comme je parle.

La prière est le plus difficile de tous les exercices spirituels et elle demande jusqu’à notre dernier souffle, l’énergie nécessaire pour un dur combat... Pourtant le Seigneur dans sa Miséricorde accorde aussi de temps en temps un répit à celui qui prie, afin qu’il ne soit pas affaibli. Établis toi-même le temps de ta règle de prière personnelle, sa durée selon le temps dont tu disposes, il n’y a là rien d’arbitraire : sois modeste afin d’éviter la hâte et afin de n’être pas esclave de la règle.

Les saints pères appellent la prière la reine des vertus, car elle attire les autres vertus. Saint Agathon disait : la prière est combat jusqu’au dernier souffle.

Ne sois pas déconcerté si ton cœur est sec pendant la prière, continue, garde l’attention sur la partie supérieure de ta poitrine comme je te l’ai dit. Au travail et devant les autres, essaie de te tenir l’esprit devant Dieu, c’est-à-dire en te souvenant de Dieu et du fait qu’Il est toujours présent.

Le Seigneur accorde la prière à ceux qui prient.

La prière et le souvenir de Dieu sont équivalents : on peut marcher ou travailler et penser à Dieu, c’est aussi une prière.


Tu écris que tes maladies t’ont été envoyées par Dieu pour tes péchés. Non, tu ne dois pas penser ainsi. Les voies du Seigneur sont insondables et nos esprits limités ne peuvent comprendre quelles différentes sortes de maladies et de chagrins sont envoyés par Dieu aux différents pécheurs que nous sommes.


Il a pris chair humaine et a souffert comme un homme, non pas pour les saints, mais pour les pécheurs comme toi et moi.

Tu ne dois pas désespérer car il n’existe pas de péché qui soit plus grand que la Compassion de Dieu.

La caractéristique de l’homme est de tomber, celle du diable est de ne jamais se repentir.

Quand tu es dans les tourments, attends la paix, quand tu es dans la paix, attends les tourments.


Accorde-nous, Seigneur, de vivre selon ta Volonté, car nous pécheurs ne savons ce qui est bon pour nous.

L’attention est l’âme de la prière.

Tu écris : le Seigneur me pardonnera-t-Il ? Tu t’es confessé et repenti, le Seigneur t’a pardonné et ne se souvient plus de tes péchés (cf Ézéchiel) Sois-en sûr ! L’apôtre Carpe (cf. 2 Tm 4,13) priait le Seigneur de punir deux pécheurs. Un hérétique avait attiré un orthodoxe dans son hérésie et maintenant l’apôtre priait le Seigneur de les punir. Le Seigneur lui montra cette vision : le ciel s’ouvrit, une lumière brillante resplendit. L’apôtre leva les yeux et vit le Seigneur. Le Seigneur lui dit : baisse ton regard maintenant. L’apôtre regarda et il vit ces deux pécheurs au bord d’un ravin et au-dessous, il y avait un énorme serpent effrayant. Le Seigneur lui a dit : veux-tu que Je punisse ces pécheurs ? L’apôtre se réjouissait de ce qu’ils allaient être punis. Alors le Seigneur envoya deux anges pour sauver les pécheurs et Il dit à l’apôtre : frappe-Moi etcrucifie-Moi une seconde fois ; Je suis encore prêt à souffrir pour les pécheurs. La vision prit fin. Tu vois comme la Compassion de Dieu est grande : Il est prêt à souffrir à nouveau pour nous pécheurs et toi tu doutes que le Seigneur te pardonne tes péchés.

N’aie pas confiance en toi de ce côté-ci de la tombe.

Sache que nous ne pouvons traverser cette vie sans tribulations. (Le Seigneur l’a dit : dans ce monde vous aurez des tribulations. (Jn 16,23)

Les saints pères disent : cache les péchés de ton prochain et les tiens seront cachés.

Il est bon quelquefois de se remémorer ses péchés passés car cela donne naissance à l’humilité, mais quand le souvenir des péchés passés conduit au désespoir, il est clair que l’ennemi essaie de troubler l’âme. Ne l’écoute pas, calme-toi, ne sois pas anéanti, déprimé, essaie de chasser de telles pensées par la prière.

Tu m’écris que spirituellement tu ne vas pas bien, que quelque chose manque,probablement la foi et l’amour du Seigneur. L’ennemi te trouble, mon enfant. Ne l’écoute pas. Tu as la foi et tu aimes Dieu. Ta crainte est vaine parce qu’elle vient de l’amour-propre. Vis comme tu le fais ; ne réfléchis pas trop. Après tout tu t’observes et tu désires progresser et ce désir est la moitié du salut. Que veux-tu de plus ?

Si une âme pécheresse tombe en enfer, la sainte Église prie pour cette âme et le Seigneur la libère des chaînes de l’enfer. Moi qui suis pécheur, je crois en la prière de l’Église.

Ne sois pas surpris qu’il y ait en toi des passions : elles sont là pour nous rappeler que nous ne sommes que des êtres humains et pour nous enseigner l’humilité.
Répète chaque jour la prière à la Mère de Dieu (Vierge Marie ô Mère de Dieu, Réjouis-toi,pleine de grâce) douze fois et trente-sept fois la prière de Jésus.

Les saints pères comparent l’obéissance au martyre.

Il est triste d’entendre que des prêtres enseignent à leurs enfants spirituels de se faire des images mentales du Sauveur, de la Mère de Dieu et des saints quand ils prient. Cette manière de prier est incorrecte et même dangereuse. Je vais te dire brièvement comment prier d’après les saints pères. L’intellect devrait être enfermé dans les paroles de la prière et l’attention portée sur la partie supérieure de la poitrine, car l’attention est l’âme de la prière. L’attention ne doit pas être « pressée » sur le cœur. Si l’attention se porte sur la poitrine, le cœur s’y joindra par « sympathie ». Quand un sentiment de tendresse et une sensation de chaleur apparaissent, ne crois pas avoir reçu quelque chose de grand. C’est le résultat naturel de la concentration et non une illusion du malin. Le Seigneur par Sa Grâce, donne la consolation à celui qui prie.

Les saints pères disent que même chez les saints, des défaillances de la nature humaine subsistent, ceci pour qu’ils gardent l’humilité.

Être au Thabor avec le Sauveur est une chose très joyeuse, mais quand il s’agit d’être au Golgotha, sois patient.

Cela ne sert à rien de se contenter de lire et de demander comment être sauvé. Il faut s’exercer, travailler, purifier notre cœur des passions. Tu sais maintenant ce qu’est la vie spirituelle. Le temps est venu, commence le combat.Que le Seigneur soit ton Maître et ne m’oublie pas dans tes saintes prières.

Même s’il est difficile pour toi de développer ta vie spirituelle dans le monde, sache que le Seigneur aide ceux qui essaient de le faire.

Le Seigneur nous garde dans la vertu, non pas en réponse à nos efforts, mais en réponse à notre humilité. Là où il y a eu une chute, elle fut précédée par l’orgueil, dit saint Jean Climaque.

Les saints pères, par leur propre expérience, ont étudié en détail les subtilités de la nature humaine et ils nous consolent, nous offrant des écrits détaillés sur la manière de combattre le péché.
Lis chaque jour un chapitre de l’évangile et des épîtres.

Dans le choix d’une voie spirituelle, on doit être guidé par la sainte Écriture et non par l’instinct.

Un certain staretz a dit : si l’âme n’a que des paroles et aucune action, elle est comme un arbre qui fleurit sans porter de fruits. Les fleurs ne font qu’attirer l’œil et quand on les quitte on les oublie, mais le fruit de l’arbre satisfait la faim de l’homme et lui donne la force de vivre sa vie.

Tu écris que quelquefois, pendant la prière tu es très perturbé par des penséesblasphématoires. Elles sont si viles que tu as honte de regarder les icônes ou de parler au prêtre. Ne sois pas embarrassé. De telles pensées ne sont pas nôtres mais viennent de l’ennemi du genre humain, le démon. N’y prête pas attention et essaie de tourner tes pensées vers quelque chose d’extérieur.

Il y a des gens, qui par ignorance du sens de l’Écriture, se sont attachés à l’enseignement déplacé selon lequel certains sont prédestinés au salut et d’autres à la destruction…Comme si notre Seigneur, dans sa Grâce et son Amour de l’homme voulait que quiconque périsse.

Les démons de la vaine gloire sont les prophètes de nos rêves.

Ta santé n’est pas très bonne, ne sois pas désespéré : soumets-toi à la Volonté de Dieu. Nous mourrons tous demain, si ce n’est aujourd’hui déjà.

Voici ce que j’ai observé, c’est une très grande faute et une faiblesse que d’être anxieux de prolonger notre vie. De toutes façons, la vie et la mort sont entre les Mains de Dieu et le Seigneur a dit : cherchez d’abord le royaume de Dieu et le reste vous sera donné par surcroît.

Les afflictions ont deux vertus : la première est de développer notre zèle envers Dieu et de faire naître en nous une gratitude qui vienne du fond du cœur. La seconde est de nous délivrer des vains soucis et des choses secondaires.

Saints pères, priez Dieu pour nous pécheurs et ouvrez nos esprits étroits afin que nous comprenions vos écrits.

Tu écris que tu n’as pas encore commencé (ta vie spirituelle), ce sentiment est bon car il conduit à l’humilité.

Plus l’homme s’approche de Dieu, plus il voit ses fautes et son état pécheur.

Le Seigneur connaît notre faiblesse et Il nous a accordé le repentir quotidien, jusques au jour de notre mort.

Le souvenir de la mort est un don de Dieu. Il est dit : souviens-toi de ta fin et tu ne pécheras plus.



La chose la plus profitable est de considérer les autres comme bons et toi-même comme le pire de tous. Observe-toi et tu verras que tu es pire que quiconque.

La prière d’un enfant est prompte à atteindre Dieu. (Le Seigneur nous a demandé d’être semblables aux petits enfants.)

Nous devrions nous souvenir que notre vie passe très rapidement et qu’elle est une préparation pour la vie éternelle à venir.

Les oiseaux sont si petits et leurs pattes sont pareilles à des allumettes et ils se débrouillent pour trouver leur nourriture pendant la saison froide. Gloire à Ta Sagesse, Seigneur, gloire à Ta création !

Tu aimes à lire les vies des saints, continue à le faire, elles sont une grande source d’inspiration pour les pécheurs que nous sommes.

Souviens-toi de l’heure de la mort et ne condamne jamais plus personne pour quoi que ce soit, ce que tu condamnes chez les autres te fera tomber dans les mêmes péchés, il ne peut en être autrement.

(À une femme qui devant s’occuper de plusieurs choses dans l’église, et qui se plaignait de ne pouvoir suivre les offices), saint Macaire a dit : le travail est pour ceux qui prient et la prière pour ceux qui travaillent.

En fait, le moine diffère du laïc seulement par le fait qu’il n’est pas marié e tainsi les laïcs devraient — et doivent en fait — vivre la même vie que les moines dans l’accomplissement des commandements.

Que le Seigneur t’accorde la sagesse. Il est inutile pour toi de te tourmenter et de penser que tu as oublié certainement de confesser un péché, les péchés qui conduisent à la mort, sont ceux dont tu es conscient et dont tu ne te repens pas.

Ne sois pas troublé si des pensées charnelles t’attaquent. Quelquefois, il est naturel qu’il en soit ainsi. La seule Grâce de Dieu peut nous en délivrer, mais je sais pourtant qu’elles reviendront en nous jusqu’au dernier jour. Même la vieillesse n’est pas exempte de leurs attaques.

Aucune maladie ne nous vient sans la Volonté de Dieu.

Ne sois pas abattu si tu es distant pendant la prière. Continue à te forcer à prier.

Bien sûr, il est assez effrayant de mourir, la crainte de la mort est caractéristique de tous, dit saint Jean Climaque, mais le désespoir et la tristesse viennent de l’ennemi.

Tu as commencé à avoir une mauvaise santé. Que faire ? Soumets-toi à la Volonté de Dieu : les maladies nous rappellent notre passage dans l’éternité. Je te souhaite santé du corps et salut de l’âme. Que le Seigneur te garde.

(À quelqu’un dont l’époux n’était pas orthodoxe) Sois fidèle à ton époux, ne sois pas fausse avec lui et obéis-lui en tout, excepté en ce qu’exige l’Orthodoxie. Il n’est pas nécessaire de parler de sujets religieux, mais si lui-même vient à aborder le sujet, réponds-lui ce que tu sais, mais prie Dieu intérieurement. Enseigne, non pas par la parole mais par l’exemple d’une vie chrétienne vertueuse. Ne le force pas à aller à l’église. S’il veut y aller c’est une autre chose. Sois satisfaite et reconnaissante de ce qu’il ne t’empêche pas d’y aller. Prie pour lui simplement, comme un enfant : Seigneur, sauve et aie pitié de mon époux, préserve-le et enseigne-lui la vérité. Laisse le reste à la Volonté de Dieu et sois en paix.

Les Saintes Écritures nous disent qu’il y aura la vie éternelle et l’éternelle souffrance : nous devons y croire fermement et ne pas nous engager dans des discussions théologiques ardues avec nos petits esprits limités et nos cœurs qui ne sont pas purifiés des passions.

Saint Isaac le Syrien dit : fuis les raisonnements sur les dogmes comme tu fuirais un lion furieux.

S’il n’y avait pas d’afflictions, il n’y aurait pas de salut.

Il est un remède aux afflictions, dit saint Marc l’Ascète : la patience et la prière.

Notre grande erreur est de ne pas assez penser à notre passage dans l’autre monde.Notre vie dans cette vallée de larmes n’est après tout rien qu’un chemin vers l’éternité et une préparation. Ô éternité, éternité sans fin ! Bien qu’ici-bas il y ait la douleur et que la vie soit quelquefois très dure et les peines lourdes et que les maladies frappent, il y a la pensée réconfortante quej e mourrai et que tout cela cessera. Mais qu’est-ce qui nous attend après ? Seigneur, par les décrets que Tu connais, sauve-nous pécheurs, amen!

La Compassion de Dieu envers nous les pécheurs est incroyable : Il a pris chair et Il est devenu vrai homme (sans le péché). Je ne te cache pas que je pleure en écrivant.

Comprends cependant que sans les humiliations, on ne peut pas devenir humble.

Mon enfant spirituel, ne sois pas déprimé, ne désespère pas du salut de ton âme,ces pensées viennent du démon, ne les accepte pas.
Traduction française Claude Lopez-Ginisty
d'après: 
Father John: Christ Is in Our Midst: Letters of a Russian Monk
SVS Seminary Press, USA, 1996

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"Il est triste d’entendre que des prêtres enseignent à leurs enfants spirituels de se faire des images mentales du Sauveur, de la Mère de Dieu et des saints quand ils prient. Cette manière de prier est incorrecte et même dangereuse. Je vais te dire brièvement comment prier d’après les saints pères. L’intellect devrait être enfermé dans les paroles de la prière et l’attention portée sur la partie supérieure de la poitrine, car l’attention est l’âme de la prière. L’attention ne doit pas être « pressée » sur le cœur. Si l’attention se porte sur la poitrine, le cœur s’y joindra par « sympathie ». Quand un sentiment de tendresse et une sensation de chaleur apparaissent, ne crois pas avoir reçu quelque chose de grand. C’est le résultat naturel de la concentration et non une illusion du malin. Le Seigneur par Sa Grâce, donne la consolation à celui qui prie."

Staretz Jean de Valaam ( Dieu est parmi nous!)


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Icône de saint Jean du Nouveau Valaam


PRIERE AU CIMETIERE

Aujourd'hui je suis allé au cimetière. Il faisait beau et la route était sèche. J'ai fait le tour de toutes les tombes et lu les inscriptions qui y étaient gravées: qui était mort, quand, combien d'années chacun avait passé au monastère et à quel âge chacun était mort.

Il y a maintenant 154 moines qui reposent au cimetière du Nouveau Valaam. Je les connaissais tous. A présent leurs corps reposent dans ces tombes car la loi de la mort est une loi inexorable. Nous savons où et quand nous sommes nés, mais où et quand nous mourons, il ne nous appartient pas de le savoir. L'homme vient de la terre et il y doit retourner. Mais son esprit vient de Dieu et il retournera auprès de Dieu.

Où êtes-vous maintenant nobles Pères? 

Quelle sorte de vie menez-vous? 

Je crois fermement que vous n'êtes pas morts. Vous êtes seulement partis pour un autre monde invisible. Mais les morts restent sourds à mes parole! Où ils sont et quelle vie ils mènent est un grand mystère. Le saint apôtre Paul dit que "nous marchons par la foi et non par la vue"

Notre fraternité a décliné vers la vieillesse. La plupart d'entre nous marchent avec un bâton. Quelques tombes sont déjà creusées et il y des cercueils en réserve.

Bientôt, très bientôt, mon corps terrestre sera étendu dans un de ces cercueils, descendu dans le froid tombeau et recouvert de sable. Ils feront un petit tas au sommet de la tombe et y mettront une croix. Peut-être y aura-t-il quelque bonne personne qui écrira mon nom sur une plaque et la fixera à la croix.

Nobles Pères qui demeurez, je vous en supplie, lorsque vous viendrez à ma tombe, priez pour mon âme pécheresse.

Schéma-Higoumène Jean
Mes pensées, 1956
in A Star in The Heavens 
by Archimandrite Panteilemon, 
Valamo Monastery 1991
Version française Claude Lopez-Ginisty
Photo:

jeudi 6 juin 2019

Andrei Vlasov: L'Église de Jérusalem est-elle la Mère de toutes les Églises ?


Patriarche Théophile III de Jérusalem.
Photo : UOJ
Que penser de l'affirmation du Patriarche Théophile III de Jérusalem selon laquelle son Église est garante de l'unité du monde orthodoxe tout entier.

Le 16 mai 2019, le Patriarche Théophile III de la Ville Sainte de Jérusalem et de toute la Palestine a reçu une délégation de la Société impériale orthodoxe de Palestine (IOPS). Dans son allocution de bienvenue, le Patriarche de Jérusalem a prononcé les paroles qui méritent notre attention à la lumière des événements qui se déroulent aujourd'hui dans le monde orthodoxe : "L'Eglise de Jérusalem, qui est la Mère de toutes les Eglises, est garante de l'unité de l'Eglise orthodoxe."
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 Que pourrait-on cacher derrière cette formulation apparemment inoffensive ?
L'IOPS a organisé un séminaire international à Jérusalem à l'intention des chefs de ses antennes régionales et étrangères et de ses bureaux de représentation. Elle a été consacrée au 200e anniversaire du soutien diplomatique de la présence russe au Moyen-Orient.
Le Patriarche Théophile III a adressé de nombreuses paroles agréables à la délégation de l'IOPS et a publié un discours de bienvenue sur le site officiel du Patriarcat de Jérusalem. "Nous reconnaissons en particulier le rôle que l'Eglise orthodoxe russe a joué pendant des siècles, en particulier pendant la période ottomane, en soutenant l'Eglise de Jérusalem sur les plans politique, diplomatique et, bien sûr, financier ", a déclaré le Patriarche.
Tout cela est vrai. On ne sait pas quel aurait été le sort des Églises orthodoxes au Moyen-Orient - et ce sont les plus anciennes Églises de Constantinople, d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem - sans l'aide de Rus’.  [Soutien]Politique, diplomatique et financier. C'est précisément grâce à cette aide que les Églises les plus anciennes existent encore à bien des égards.
Mais parmi ces paroles agréables, il y avait une phrase qui devrait alerter : "L'Église de Jérusalem, qui est la Mère de toutes les Églises, est la garante de l'unité de l'Église orthodoxe".
Comme on le sait, Constantinople s'est déclarée Mère de toutes les Églises. De plus, le Phanar affirme que l'Église orthodoxe en tant que telle ne peut exister sans le Patriarcat de Constantinople. Le Phanar dit aussi que c'est ce patriarcat qui est le garant de l'unité de l'Eglise orthodoxe, que toutes les Eglises locales orthodoxes ne peuvent être considérées comme telles que dans la mesure où elles sont en communion avec le Patriarcat de Constantinople.
Et maintenant le Patriarcat de Jérusalem déclare la même chose. Dans quelle mesure ces déclarations sont-elles légitimes ? Dans les commentaires sous ces paroles du Patriarche Théophile III, beaucoup expriment l'opinion que, historiquement, oui, elles sont tout à fait légitimes. Cependant, les choses ne sont pas si simples.
En effet, l'Église du Christ, qui a reçu son existence historique au Cénacle de Sion le jour de la descente de l'Esprit Saint sur les apôtres, était égale à la communauté de Jérusalem, non pas même chrétienne (ce nom fut adopté pour la première fois dans la communauté d'Antioche) mais simplement communauté des disciples. Les apôtres ont quitté Jérusalem pour prêcher aux quatre coins du monde. La communauté de Jérusalem, par sa hauteur morale, était l'idéal de la communauté chrétienne, qu'aucune autre communauté n'a jamais atteint.
Pour résoudre des questions déroutantes, les chrétiens des premières décennies se sont tournés spécifiquement vers la communauté de Jérusalem. En ce sens, il est tout à fait légitime d'affirmer que l'Église de Jérusalem ou plutôt la première communauté apostolique de Jérusalem est la Mère de toutes les Églises. Cependant, l'Église locale actuelle de Jérusalem est liée indirectement plutôt que directement à la première communauté apostolique de Jérusalem.
Le livre des Actes des Apôtres nous donne un aperçu de la première communauté chrétienne. Sur le plan ethnique, elle se composait de Juifs, qui étaient conditionnellement divisés en deux groupes : Juifs et hellénistes, et ce dernier signifie non pas les Grecs, mais les Juifs de la diaspora, qui vivaient dans d'autres pays et parlaient grec. Exceptionnellement, les Saintes Écritures mentionnent le païen Nicolas d'Antioche.
Malgré la décision du Concile des  Apôtres de l'an 49 de notre ère sur la non-obligation pour les païens convertis au christianisme d'observer les commandements de la loi de Moïse, les membres de la communauté de Jérusalem eux-mêmes respectaient assez scrupuleusement cette loi. Le témoignage du chroniqueur chrétien du IIe siècle Hégésippe suggère que les descendants des parents par la chair du Seigneur Jésus-Christ, dont le premier était Jacques, frère du Seigneur, furent successivement les évêques de Jérusalem.
Pendant la première révolte juive contre les Romains (66-70 ap. J.-C.), les chrétiens de Jérusalem se réfugièrent dans la ville de Pella et évitèrent ainsi les horreurs du siège de Jérusalem et de sa dévastation ultérieure. Après 70 ap. J.-C., quelques chrétiens retournèrent à Jérusalem, et la communauté chrétienne de cette ville reprit. Cependant, son influence sur d'autres communautés, en particulier à Rome, Alexandrie et Antioche, cessa pratiquement.
Mais pendant la deuxième révolte juive sous la direction de Bar-Kochba (132-135 ap. J.-C.), cette communauté chrétienne de Jérusalem fut complètement détruite et cessa d'exister. De plus, elle futfrappée des deux côtés. Les Juifs rebelles exterminèrent les membres de la communauté en tant que chrétiens, et les Romains en tant que juifs. La répression de la révolte de Bar Kochba par les Romains fut très cruelle. Jérusalem fut détruite et la population survivante fut vendue comme esclave ou bien prit la fuite. L'empereur romain Hadrien interdit aux Juifs sous peine de mort non seulement de vivre à Jérusalem, mais aussi de s'en approcher.
Une ville païenne entièrement nouvelle, Aelia Capitolina, fut construite sur le site de Jérusalem détruite. Elle fut colonisée par des vétérans des légions romaines et des Grecs de souche. Il n'y avait rien dans Aelia Capitolina qui était lié soit à l'ancienne communauté chrétienne ou bien à l'histoire de Jérusalem, de la Palestine, de la culture et des traditions juives.
L'historien ecclésiastique Eusèbe de Césarée indique que la communauté chrétienne est rapidement réapparue à Aelia Capitolina, mais qu'elle était déjà grecque par sa composition ethnique et sans aucun lien avec la première communauté de Jérusalem. Le rôle de cette communauté et, par conséquent, du siège épiscopal fut insignifiant pendant plusieurs siècles. Un autre siège en Palestine, celui de Césarée, joua un rôle beaucoup plus important.
L'essor du siège de Jérusalem se produisit dès le IVe siècle sous l'empereur saint Constantin le Grand. Elle est le résultat de l'acquisition des principaux sanctuaires chrétiens par la reine Hélène - le Saint Sépulcre, [l’invention de] la Croix vivifiante et d'autres sanctuaires- et du début d'un pèlerinage à grande échelle des chrétiens dans ces sanctuaires.
En 451 après J.-C., par décision du IVe Concile œcuménique, le Siège de Jérusalem obtint le statut de patriarcat, avec la subordination des communautés chrétiennes en Palestine. Cependant, tenant compte de l'éclatement de la première communauté chrétienne de Jérusalem en 132-135 après J.-C., ainsi que de la position politique insignifiante de Jérusalem, le Concile œcuménique détermina non pas la première place dans les diptyques à l'Église de Jérusalem, semble-t-il, mais seulement la cinquième, après celles de Rome, Constantinople, Alexandrie et Antioche.
A la suite de l'invasion arabe du VIIe siècle, le christianisme en Palestine en général et le Patriarcat de Jérusalem en particulier déclinèrent. Cela s’intensifia encore plus après la conquête de la Palestine par les Croisés en 1099 lorsque les Latins s’emparèrent des églises orthodoxes et les transférèrent au Vatican. Après la conquête de la Palestine par les Turcs en 1599, la position du Patriarcat de Jérusalem s'améliora sensiblement.
Quant à la composition ethnique de la communauté de Jérusalem et de ses primats, comme nous l'avons dit, elle est grecque depuis la première moitié du IIe siècle. À l'époque de la domination arabe, la communauté devint majoritairement arabe. Et après le dernier évêque-Archevêque arabe de Jérusalem, Dorothée II (XVIe siècle) et jusqu'à ce jour, le Patriarcat de Jérusalem a l'image suivante : l'épiscopat et une partie importante du clergé sont des Grecs, et le troupeau est principalement arabe.
Cet état de choses a causé et cause encore de nombreux conflits entre la congrégation et l'épiscopat. Aujourd'hui, le Patriarche de Jérusalem appartient au groupe théorique des Églises locales grecques qui, dans leurs politiques, se basent traditionnellement sur Constantinople.
Sur la base de ce petit aperçu historique, laissons chacun décider, à sa discrétion, s'il serait historiquement correct d'appeler le Patriarcat de Jérusalem d'aujourd'hui la Mère de toutes les Eglises. Et il n'est pas si important de savoir s'il y a ou non des raisons historiques de reconnaître un Patriarcat comme "Mère de toutes les Eglises" que la question de savoir si une telle reconnaissance implique des privilèges pour un tel Patriarcat dans la vie moderne des Eglises locales.
Beaucoup plus importante et ambiguë est l'affirmation du patriarche Théophile III selon laquelle l'Église de Jérusalem "est le garant de l'unité orthodoxe".
La doctrine de l'unité de l'Église est l'une des vérités dogmatiques fondamentales incluses dans le Credo de Nicée-Constantinople : "Je crois en l'Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique". Par conséquent, si nous commençons à dire que quelqu'un, une Église locale - Jérusalem, Constantinople ou une autre - est le garant de l'unité orthodoxe, la question logique est : qui sera alors le garant de la doctrine de la Très Sainte Trinité ou de l'incarnation de Jésus Christ ?
Il n'est pas si important de savoir s'il existe ou non des raisons historiques de reconnaître un Patriarcat comme "Mère de toutes les Eglises" que la question de savoir si une telle reconnaissance implique des privilèges pour un tel Patriarcat dans la vie moderne des Eglises locales.
La prochaine étape logique d'un tel raisonnement sera la question : qui est le garant de la pureté du dogme en général ? Qui a l'autorité dans l'Église pour déterminer où est la Vérité et où est sa distorsion ? Cette question s'est posée il y a plusieurs siècles. Et cela a été décidé de différentes manières dans le catholicisme et l'orthodoxie.
Pour les Latins, le souverain pontife [le pape] est le garant de tout l'enseignement moral et spirituel, sans exception. Il est le critère visible et tangible pour déterminer la pureté de la foi. Le dogme de l'infaillibilité papale est formulé par les Latins comme suit : "Nous enseignons et définissons que c'est un dogme Divinement révélé que le pontife romain, lorsqu'il parle ex cathedra, c'est-à-dire lorsqu'il exerce la charge de pasteur et de médecin de tous les chrétiens, en vertu de sa suprême autorité apostolique, définit une doctrine concernant la foi ou la morale que doit avoir l'Église universelle, par l'assistance divine qui lui a été promise dans le bienheureux Pierre, possède cette infaillibilité avec laquelle le Divin Rédempteur a voulu que son Église soit dotée d'une doctrine définissant la foi ou la morale et que, par conséquent, ces définitions du pontife romain sont d'elles-mêmes et non du consentement de l'Église irrévocable. Ainsi donc, si quelqu'un, à Dieu ne plaise, avait la témérité de rejeter notre définition : qu'il soit anathème."
Dans le christianisme orthodoxe, il n'existe pas de dogme similaire clairement défini et documenté sur qui est infaillible et, par conséquent, peut être le garant et le gardien du dogme et de la morale. Cependant, dans la tradition orthodoxe, il est entendu que seule la plénitude de l'Église du Christ peut être un tel gardien et garant. On dit de l'Église qu'elle est "la colonne et le fondement de la Vérité" (1Tim. 3, 15). C'est à l'Église que le Seigneur a promise que "les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre elle" (Mt 16, 18).
L'Église n'est pas une institution visible (plus précisément, pas seulement visible) et encore plus l'unique institution. Il n'y a pas de procédure d'action bien définie, à la suite de laquelle l'Église peut montrer son infaillibilité en définissant les dogmes de la foi et en les protégeant des fausses doctrines. Il n'y a pas de procédure clairement définie pour convoquer les conciles œcuméniques, ni pour déterminer qui a le droit de les convoquer, ni combien d'évêques de chaque Église locale devraient y participer, ni comment ces délégués devraient être nommés au Concile. Il n'existe aucune procédure pour la mise en œuvre des décisions du Concile. Il n'y a pas d'organe exécutif responsable, etc.
Mais malgré toutes ces difficultés, l'Église a toujours été consciente d'être la seule garante de la préservation de la Vérité. Voici comment s'exprime cette conscience dans l'Encyclique des Patriarches orientaux (1848) (elle s'adressait "à tous les Fils orthodoxes authentiques de l'Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique") : "Ni les Patriarches ni les Conciles n'auraient alors pu introduire de nouveautés parmi nous parce que le gardien de notre piété (iperaspistis tis thriskias) est le corps même de l'Église, le peuple lui-même, qui désire que son culte religieux soit toujours le même et du même type que celui de ses pères.
Même les Conciles ne garantissent pas toujours la véracité des décisions qui sont prises en leur sein. Dans l'histoire de l'Église, il y a eu plusieurs cas où des Conciles possédant toutes les caractéristiques des Conciles œcuméniques étaient, en fait, prédateurs et ont été reconnus comme tels après des périodes plus ou moins longues.
Imaginons la situation dans laquelle se trouvaient les chrétiens quand un tel Concile prédateur n'était pas encore reconnu comme prédateur. Après tout, les partisans d'un tel pseudo-concile faisaient valoir à tout le monde qu'ils avaient raison et que le Concile œcuménique avait pris des décisions particulières contraignantes pour tous. Imaginons à quel point il était difficile pour les orthodoxes de prouver et de défendre leur foi orthodoxe à l'époque. Tous ces problèmes et difficultés semblaient pousser les chrétiens à une décision assez simple - établir qu'une personne ou un corps collégial dans l'Église avec des pouvoirs et une procédure de décision clairement définis serait le garant visible de la pureté de l'enseignement moral et spirituel.
Dans le christianisme orthodoxe, il est entendu que seule la plénitude de l'Église du Christ peut être le gardien et le garant de la doctrine et de la morale.
Les Latins succombèrent à une telle tentation et transférèrent facilement cette fonction au pape. C'est très simple et pratique d'avoir un garant visible et de lui confier toute la responsabilité de prendre des décisions.
Mais les orthodoxes ont toujours rejeté cette tentation et défendu fermement l'affirmation selon laquelle l'Église, dans sa plénitude, est gouvernée par l'Esprit Saint, Qui crée Lui-même des formes et des procédures pour Lui-même. Plus d'une fois dans l'histoire de l'Église, les décisions des conciles œcuméniques ont été rejetées, de sorte qu'elles triomphèrent plus tard après des décennies, voire des siècles de lutte pour la pureté de la foi orthodoxe. Plus d'une fois dans l'histoire de l'Église, il y  eut des cas où la Vérité ne fut défendue que par un seul évêque, par exemple, Marc d'Éphèse au Concile de Ferrare-Florence. Mais à la fin, la Vérité gagna. Le Saint-Esprit conduisit l'Église à travers des difficultés et des barrières apparemment insurmontables à la Vérité, laconduisant par les voies que Lui seul connaissait.
Reconnaître l'existence d'un garant visible des vérités dogmatiques signifie rejeter cette direction de l'Esprit Saint. Et la deuxième question est de savoir qui doit être nommé "garant" : le Pontife romain, le Patriarcat de Constantinople, Jérusalem ou la Russie ?
Je veux vraiment penser que les paroles du Patriarche Théophile III de Jérusalem selon lesquelles le Patriarcat de Jérusalem "est le garant de l'unité de l'Eglise orthodoxe" ne sont que des paroles qui ne seront pas traduites en actes. Sinon, les revendications du Patriarcat de Jérusalem sur ce qui appartient à l’ Église du Christ toute entière doivent être rejetées, tout comme les revendications actuelles du Patriarcat de Constantinople sur la primauté sont rejetées.
Version française Claude Lopez-Ginisty
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