"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 26 septembre 2009

Père Thomas HOPKO: Notre Frère est notre Vie



Le but de toute prière et de tout jeûne, de toute liturgie et de tous sacrements, de tous les exercices spirituels et de toutes les pratiques ascétiques, c'est d'arriver à connaître et à aimer Dieu en toutes les personnes et en toutes choses, en particulier nos ennemis et les "moindres de nos frères." Tel est l'objet du Carême de printemps et de la vie elle-même.

C'est le plus haut et plus grand mystère, la vérité la plus profonde: Dieu est vu, connu et aimé en tout et tous. Car le Fils unique de Dieu est venu sur terre sous forme de créature afin de réunir toutes choses en lui, les êtres célestes comme les terrestres (Éphésiens 1:10). Il est venu pour s'identifier à chacun et à chaque chose, en particulier aux pécheurs, aux êtres fantasque et à ceux qui sont perdus. Étant notre Dieu et notre Créateur, Il est devenu notre frère et notre esclave. Et donc, en Lui, nous rencontrons tout et tous. Et dans tout le monde et en tout, nous Le rencontrons.
Le staretz Silouane, moine du Mont Athos qui est décédé en 1938 et a été glorifié comme saint de l'Église en 1988, est parvenu à connaître ce profond mystère et cette vérité la plus profonde à travers sa propre expérience spirituelle. Il lui a rendu témoignage dans ses écrits, qui sont parfaits comme lecture en saison de Carême.

Ces quarante ans, depuis que le Seigneur par l'Esprit Saint m'a donné de connaître l'amour de Dieu, je me suis lamenté pour le peuple de Dieu.

O frères, il n'y a rien de mieux que l'amour de Dieu quand le Seigneur enflamme l'âme avec l'amour pour Dieu, pour notre prochain.

L'homme qui connaît le délice de l'amour de Dieu - quand l'âme, réchauffée par la grâce, aime à la fois Dieu et son frère -, sait notamment que "le royaume de Dieu est en nous."

Heureuse l'âme qui aime son frère, notre frère est notre vie. Si nous voulons aimer Dieu, nous devons observer tout ce que le Seigneur a prescrit dans les Evangiles.

Nos coeurs doivent déborder de compassion et ne pas sentir de la pitié uniquement pour nos congénères, mais pour toutes les créatures pour toute chose créée par Dieu.

L'homme qui a l'Esprit Saint en lui, à un degré si faible soit-il, s'afflige jour et nuit pour toute l'humanité. Son cœur est rempli de compassion pour toutes les créatures de Dieu, et plus spécialement pour ceux qui ne connaissent pas Dieu ou qui Lui résistent... Pour eux, plus que pour lui-même, il prie jour et nuit, que toutes puissent se repentir et connaître le Seigneur.

Je vous en conjure, mettez ceci à l'épreuve. Quand un homme vous fait affront ou apporte le déshonneur sur votre tête, ou prend ce qui est vôtre, ou persécute l'Eglise, prions le Seigneur en disant: «O Seigneur, nous sommes tous tes créatures. Aie pitié de Tes serviteurs et tourne leur cœur vers le repentir", et vous serez conscients de le grâce dans votre âme. Pour commencer, contraignez votre cœur à aimer ses ennemis, et le Seigneur, en voyant votre bonne volonté, vous aidera en toutes choses, et l'expérience elle-même vous montrera le chemin. Mais la personne qui pense avec malveillance à ses ennemis, n'a pas l'amour de Dieu en lui et ne connaît pas Dieu.

Saint Antoine le Grand, résume tout cet enseignement en quelques phrases courtes. "Notre vie et notre mort sont avec notre prochain ", écrit-il. "Si nous gagnons notre frère, nous avons acquis Dieu. Mais si nous scandalisons notre frère, nous avons péché contre le Christ". Et, comme nous l'avons vu, Saint Silouane dit tout cela en cinq mots brefs: "Notre frère est notre vie."
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Photo:

Prier (285)



Quoi que tu veuilles dire
Si cela ne pourrait être béni
Tais toi
Et prie

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Athos


ATHOS
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vendredi 25 septembre 2009

Père Vasile Catalin Tudora: "Les amants du corps"


À l'aube du christianisme, quand les religions païennes dominaient encore le monde, les quelques chrétiens qui vivaient dans l'Empire romain étaient appelés parfois avec le terme péjoratif "d'amants du corps". La raison n'était pas une prédisposition à se livrer au péché, dont ils étaient éloignés, mais le simple fait de prendre bien soin du corps des êtres chers qui avaient disparu. Le culte des personnes décédées était bien développé, même dès les premiers siècles et les cimetières avaient une grande importance, pensons aux catacombes! Le souci des défunts, ne s'exprimait pas cependant seulement dans les rites funéraires, mais quelque chose d'encore plus profond apparaissait. Pour le monde païen, qui considérait déjà avec méfiance et faussement cette petite "secte juive", le plus scandaleux était que les corps des chrétiens étaient confiés à la terre, au lieu d'utiliser les moyens les plus communs d'élimination des corps de l'époque: la crémation , la combustion des corps.

On peut se demander pourquoi je "déterre" cette vieille histoire, après 2000 ans? Ce thème est de la plus grande importance aujourd'hui, parce que la crémation est de plus en plus acceptée même dans les confessions chrétiennes. Par souci d'un profit rapide, les sociétés funéraires décrivent ouvertement dans leur publicité l'incinération comme un procédé rapide et abordable. Les panneaux publicitaires d'autoroute qui parlent d'une "crémation totale pour 995 dollars!" font partie de ce que l'on voit lors des déplacements quotidiens. On ne peut que se demander ce que serait une crémation partielle !

Si je dois être d'accord avec une chose que les gens disent, c'est que les funérailles aujourd'hui ne sont pas à bas prix, mais l'argent ne devrait pas être la raison pour laquelle les gens devraient choisir la crémation au lieu des enterrements traditionnels. D'autant plus que l'Église ne recommande que des soins appropriés et des funérailles modestes, rien d'extravagant ou qui sorte de l'ordinaire. Gardant la voie médiane, comme toujours, l'Église orthodoxe recommande l'enterrement non pas seulement comme un caprice, mais comme une véritable expression de notre foi dans le Christ et de Sa résurrection, avec de profondes racines théologiques.



Pour en revenir au début, nous nous rappelons que l'Homme a été façonné à l'image de Dieu par un acte spécial de création. "Dieu forma l'homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l'homme devint une âme vivante." (Genèse, 2:7). Toutes les autres créatures ont été amenées à l'existence d'un simple "Qu'il en soit ainsi!", mais Dieu a pris le temps de façonner l'homme de Ses propres mains dans ce que le saint apôtre Paul appelle "le temple de l'Esprit Saint" (1Corinthiens, 6:19). L'homme fut créé à la fois comme un être unique, corps et âme, une unité duelle: matérielle et spirituelle. saint Grégoire de Nazianze commente ceci en disant : "Dieu a mélangé de la terre à de l'esprit et a créé un être qui est visible et invisible, éphémère et éternel, terrestre et céleste en même temps ".

Pour mieux souligner l'importance du corps du Christ Lui-même, le Fils de Dieu, a choisi de se montrer à nous comme un homme, non comme un esprit, être né dans le monde, d'une femme, comme chacun de nous. Le Christ est aussi ressuscité des morts non pas comme un esprit, mais encore une fois avec le même corps qui a été crucifié et mis dans un tombeau. Son corps ressuscité était réel, même "spiritualisé", affichant toutes les marques des plaies pour saint Thomas et les apôtres afin d'annihiler tout doute possible.

De l'exemple du Christ, il nous faut réaliser que nos corps sont importants, même après que nos âmes les aient quittés. Remettre les corps à la terre, c'est laisser Dieu décider ce qui va leur arriver. Certains seront corrompus et se décomposeront en retournant à la terre d'où ils viennent, d'autres, choisis par Dieu, les saints, iront dans l'incorruptibilité. Les reliques miraculeuses des saints sont la preuve du lien entre nos corps et nos âmes. Dans la grâce de Dieu, les corps des saints demeurent dans un lien mystique avec leurs âmes et sont en mesure de continuer à faire des miracles, même après qu'ils aient quitté cette vie.

Si nous croyons en la seconde venue du Christ, les corps sont d'une grande importance. Les corps déposés en terre, font face à l'Est en attendant de répondre promptement à l'appel du Christ, Soleil de justice, à Sa seconde venue en gloire. Ils attendent d'être réunis avec leurs âmes afin, hommes à nouveau complets, corps et âme, d'entrer dans le Royaume des cieux.

La société d'aujourd'hui cependant, a un point de vue différent. Corrompue par l'athéisme et les croyances païennes, une partie importante de la population a cessé de croire en un Dieu personnel. Un récent sondage national publié au Dallas Morning News (le 24 Juin 2008) révèle que 30 pour cent de la population interrogée, y compris de nombreux chrétiens, croient en un Dieu impersonnel, une énergie, une force, en tout sauf en une personne. Beaucoup de gens aujourd'hui ne croient pas en l'au-delà, donc pour eux la mort est la fin de tout, un point de non retour. Les corps ne sont donc qu'une réminiscence inutile de ce qui jadis fut l'homme, rien de plus. La crémation est donc aussi un moyen pratique de disposer de la matière organique morte et inutile.

Pour nous, chrétiens orthodoxes, cependant, la mort n'est pas la fin mais un nouveau commencement. Dans tous les offices de funérailles orthodoxes, nous n'utilisons jamais le terme de "mort", mais nous disons plutôt "qui est allé vers le Seigneur". Les saints sont commémorés non à la date de leur naissance, mais à la date de leur mort, le moment où leurs efforts terrestres ont été acceptés dans le Royaume des cieux. Si nous mourons avec le Christ, nous croyons que nous serons ressuscités avec Lui, alors la mort ne nous effraie pas.

Nos corps se décomposent par le processus naturel de décomposition, mais c'est seulement pour détruire la nature corrompue de notre corps, donc ils peuvent encore s'élever dans l'incorruptibilité. "Ainsi en est-il de la résurrection des morts. Le corps est semé dans la corruption, il ressuscite incorruptible; il est semé méprisable, il ressuscite dans la gloire, il est semé infirme, il ressuscite plein de force, il est semé corps naturel, il ressuscite corps spirituel. " (1Co 15:42-44).

La crémation n'est rien d'autre qu'une profanation délibérée de la création de Dieu, une chute de la grâce, un rejet du Dieu personnel qui Lui-même a revêtu le même corps humain que nous sommes si prompts à détruire. C'est pourquoi l'Église refuse un enterrement correct et des offices commémoratifs pour les gens qui ont choisi d'être incinérés. Ce n'est pas une punition, mais la reconnaissance attristée qu'une personne a coupé ses liens avec le Corps du Christ.

Remettre les corps à la terre en fonction de notre tradition, c'est en soi une déclaration de foi. C'est une croyance en un Dieu incarné, c'est une croyance en la Résurrection et dans le Royaume à venir. Amen!

(Père Vasile Catalin Tudora est prêtre de l'Eglise Grecque Orthodoxe d'Euless au Texas)

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
illustration/photo:
icône:

Prier (284)



Le chant le plus pur
Naît dans ton cœur
C'est ce soupir de l'âme
Qui a la nostalgie du Royaume

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Mgr Kallistos(Ware) au Mont Thabor

jeudi 24 septembre 2009

Saint Nicolas et les trois enfants de Moscou



Ma grand-mère m'a raconté comment saint Nicolas avait sauvé notre famille en 1943, pendant la guerre, à Moscou.

Resté seul avec trois enfants, le ventre gonflé par la faim, ne pouvant pas obtenir de la nourriture, même avec des cartes de rationnement, elle a vu dans la cuisine l'icône de Saint Nicolas, noircie par le temps. En désespoir de cause, elle lui a adressé la parole: "Comment peux-tu voir cela [sans rien faire]?"

Après cela, elle est sortie en courant dans l'escalier, ayant décidé de ne plus rentrer à la maison. Elle n'avait même pas atteint la porte d'entrée principale, quand elle a vu deux billets de banque de dix roubles sur le sol. Ils étaient déposés en croix. Cet argent a sauvé la vie de ses trois enfants, dont l'un était ma mère.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Prier (283)



C'est le chemin du cœur
Ce sont les larmes de componction
Qui te montreront la Voie du Christ

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Prier (282)



Quand le monde entier
Sera devenu un oratoire
Où la prière coulera comme source
Le Royaume des Cieux sera proche

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

Le couvent de Lintula en Finlande

mercredi 23 septembre 2009

L'histoire de Père Georges



J'étais à l'époque l'higoumène du monastère de Mtsensk. Je devais souvent aller à Kalouga pour affaires. Lors d'une telle visite, je me promenais dans la rue et j'ai vu une femme qui portait un foulard épais qu'elle avait revêtu sans recherche, près d'une belle grande maison. Son visage pâle était si triste que je l'ai tout de suite regardé attentivement, et elle m'a dit:

- Mon père, mon mari se meurt, je ne peux pas le laisser trop longtemps, mais il a besoin d'être confessé. Ne refusez pas, je vous en prie, venez à l'intérieur.

Heureusement, j'avais les Saints Dons avec moi. Elle me conduisit à l'intérieur, je regardai son mari: il était très malade, il n'allait pas vivre longtemps. Je l'ai confessé et lui a donné la Communion. Son esprit était tout à fait clair, il m'a remercié avec des larmes, et puis il a dit:

- Je suis dans le pétrin. Je suis commerçant, mais quelque chose est arrivé qui a fait que j'ai dû emprunter sur ma maison, mais je n'ai pas d'argent pour rembourser le prêt, et dans deux jours, elle sera vendue aux enchères. Maintenant, je vais mourir, et la famille n'aura rien.

J'ai ressenti de la pitié pour lui.

- Ne vous inquiétez pas, lui ai-je dit, peut-être, Dieu accordera que je sois en mesure de vous aider de quelque façon.

Je l'ai quitté rapidement et je me suis rendu au bureau télégraphique: J'ai demandé à un de mes fils spirituels, marchand lui aussi, de venir à mon hôtel.

Le soir, il était déjà dans ma chambre, il comprit la situation, et lorsque la vente aux enchères a eu lieu, il a été en mesure de pousser le prix de la maison jusqu'à 35.000 roubles. La ville a acheté la maison, 7.000 ont servi à payer le prêt, et 18.000 furent mis sur le compte bancaire du marchand mourant.

Je retardai mon départ pour le monastère et, après toutes les procédures financières, je me suis rendu auprès de l'homme malade pour lui parler de son succès. Il était encore en vie ... Il me remercia d'avoir sauvé sa famille de la pauvreté, et il mourut vers le soir... Je ne restai pas pour l'enterrer, mais je me précipitai au monastère et je l'oubliai, m'affairant à d'autres occupations.

Plusieurs années passèrent. La révolution gronda. Le pouvoir soviétique élimina beaucoup de gens à cause de leur foi. Ils m'ont pris, aussi.

Une nuit, le gardien de prison vint vers moi et chuchota:

- Prépare-toi, Père, j'ai reçu une liste pour vous tous aujourd'hui, cette nuit, ils vous amèneront loin.

J'ai communiqué les paroles du gardien à mes codétenus. Est-il nécessaire de dire ce qui se passait dans chacune de nos âmes? Bien que nous ayons su que nous étions condamnés à mort, jusque-là, nous attendions sur le pas de porte; maintenant nous étions sur le point de la franchir [pour aller à la mort].

N'étant pas en mesure de supporter de rester dans la cellule, j'ai mis mon épitrakhélion et je suis sorti pour aller prier dans le couloir sans fenêtre. J'ai prié et pleuré comme jamais auparavant dans ma vie, j'ai tellement pleuré, que mes larmes ont trempé la broderie de soie sur l'épitrakhélion.

Tout à coup, j'ai vu un homme inconnu près de moi, il m'a regardé avec sympathie, et il a dit:

- Ne pleure pas, Père, ils ne vont pas vous fusiller.

- Et qui êtes-vous? J'étais surpris.

Toi, Père, tu m'as oublié, mais les bonnes actions ne sont pas oubliés ici, dit l'homme. Je suis ce marchand, que tu as préparé à la mort à Kalouga.

Et au même moment où ce commerçant a disparu, j'ai vu qu'un trou apparaissait dans le mur de pierre du couloir, et à travers lui, j'ai vu la lisière de la forêt, et au-dessus, dans l'air, ma défunte mère.

Elle secoua la tête et dit:

- Non, Egorouchka, ils ne vous tireront pas dessus, mais nous nous reverrons dans dix ans.

La vision terminée, encore une fois je me suis trouvé près du mur blanc, mais c'était Pâques dans mon âme. Je me suis précipité dans la cellule et j'ai dit:

- Mes chers enfants, Dieu merci, nous ne serons pas fusillés, faites confiance à la parole d'un prêtre (j'ai compris, que le commerçant et ma mère parlaient de nous tous).

Le chagrin profond dans notre cellule, fut changé en la joie irrépressible. Ils m'ont cru: quelqu'un me baisa les mains, quelqu'un d'autre mes épaules... Nous savions que nous allions vivre.

La nuit se passa, et à l'aube, nous avons été transférés à la prison d'expédition.

De là, j'ai été envoyé à B., et bientôt ils m'ont libéré, grâce à une amnistie, et j'ai vécu dans le monastère Danilov ces dernières années. Six de mes codétenus sont devenus mes enfants spirituels.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

Chant Géorgien

mardi 22 septembre 2009

Le saint Archevêque Jean de Changhaï, Bruxelles et San Francisco


Archbishop John (Maximovitch)


Saint Jean de Changhaï ( fêté le 2 juillet)


L’archevêque Jean naquit dans le sud de la Russie, dans le village d’Adambora, province de Karkhov. Saint Jean de Tobolsk était parmi ses ancêtres de la famille Maximovitch. Il reçut une excellente éducation.

à 15 ans

Dès son enfance, le jeune Michel (il avait pour protecteur l’Archange) mangeait peu et avait une petite santé, mais il était fasciné par les exploits ascétiques de l’archevêque Mélèce Léontovitch dont les reliques se trouvaient au monastère de la Protection de la Mère de Dieu à Kharkov. Le saint homme passait, avant sa mort survenue en 1814, des nuits entières en prière, immobile, les bras levés vers le ciel. Il connaissait le jour de son trépas et était renommé pour dormir peu. Le premier biographe de saint Jean mentionne que le saint archevêque ressemblait à son modèle en toutes choses : il n’avait pas dormi dans un lit depuis quarante ans, il savait l’heure de sa mort et il reposait dans la crypte d’une cathédrale où on célébrait des pannikhides1 et où l’on récitait quotidiennement le psautier pour demander son intercession.

Excellent étudiant en Droit, il passait plus de temps à lire la vie des saints qu’à ses études. Il rencontra le métropolite Antoine Khrapovitsky, l’éminent théologien et candidat au Patriarcat, qui décela immédiatement ses dispositions spirituelles éminentes.
En 1921, pendant la guerre civile, sa famille partit pour Belgrade et le saint ascète obtint un diplôme en Théologie. Il avait payé une partie de ses études en vendant des journaux.
En 1924, il fut ordonné lecteur et, en 1926, on le tonsura moine et l’ordonna diacre, lui donnant le nom de son lointain ancêtre, Jean de Tobolsk.
Le 21 novembre de la même année, il devint hiéromoine. De 1925 à 1927, il enseigna la religion dans un collège serbe ; de 1929 à 1934, il passa au séminaire serbe de Bitol. Il officiait alors en grec pour les Grecs du lieu qui l’estimaient beaucoup. Le Chrysostome serbe, le saint évêque Nicolas Véliminovitch, comme le métropolite Antoine, appréciait beaucoup ses qualités spirituelles. Souventes fois, on l’entendit déclarer : «Si vous voulez voir un saint vivant, allez à Bitol voir le père Jean» ! Plus tard, en France, des prêtres catholiques dirent à leurs ouailles qu’il y avait encore des saints, dans les rues même de Paris, faisant allusion à «Saint Jean Pieds-nus» qui avait alors sa cathédrale dans un garage de Versailles !
Ce fut au séminaire où il enseignait que l’on découvrit qu’il dormait peu, assis ou prostré devant ses icônes. De même qu’il mangeait également peu, une fois par jour avant minuit et se nourrissait en carême de prosphores, s’abstenant de nourriture la première et dernière semaine du quadragésime. Il célébrait chaque jour la Divine Liturgie.
En 1934, on décida de le faire évêque. Ayant reçu une convocation du Synode, il s’y rendait quand il rencontra quelqu'un à qui il raconta qu’il avait été envoyé par erreur à Belgrade, à la place d’un autre hiéromoine Jean. La même personne ayant vérifié, lui annonça que la situation était encore pire : c’était lui qui devait être ordonné évêque !
Il fut alors envoyé en Chine, rétablit l’unité de l’Église orthodoxe et fut très actif dans l’organisation de la vie de ses paroissiens, allant partout dans les prisons, les hôpitaux, les asiles d’aliénés, rassemblant les orphelins des rues pour leur donner un abri et se dépensant inlassablement pour tous, Russes, Serbes, Ukrainiens, Juifs, Chinois. Il célébrait chaque jour, à la cathédrale de Changaï, et puisait dans les Saints Dons une force incommensurable que l’on en s’attendait pas à trouver dans ce petit corps épuisé.


Vladika Jean à Changhaï

Un jour, une de ses paroissiennes fut mordue par un chien enragé. Elle refusa les soins appropriés et eut la rage elle-même. Alors qu’elle était à l’article de la mort, il vint la voir pour la communier. Ayant reçu les Saints Dons, elle les rejeta. Saint Jean les consomma aussitôt, au grand désarroi de ceux qui étaient avec lui et qui savaient que la rage était une maladie terriblement contagieuse. Mais lui, placide et ferme, répondit simplement : «Rien ne m’arrivera, ce sont les Saints Dons» ! Et il avait raison, le Corps très saint et le Sang très précieux du Christ le vivifièrent chaque jour de sa vie.

Quelqu'un lui avait écrit de Hong Kong et n’avait pas reçu de réponse. Après une année, Vladika Jean était dans la ville et, au milieu de la foule, il appela l’homme qui lui avait écrit et qu’il n’avait jamais vu de sa vie !
En 1946, il fut nommé archevêque et, en 1949, après l’arrivée des communistes en Chine, il se réfugia avec cinq cents personnes aux Philippines, sur une île souvent ravagée par les typhons. Pendant toute la durée du séjour des réfugiés, l’archevêque Jean bénissait les quatre coins du camp et il ne fut menacé qu’une fois par un typhon qui se dérouta. Après leur départ, il fut totalement détruit par les éléments. Il avait emmené ses paroissiens aux USA, obtenant pour chacun d’entre eux un visa d’entrée.
En 1951, il devint archevêque d’Europe occidentale, d’abord à Paris puis à Bruxelles. Il s’intéressa tout de suite aux saints locaux et les fit incorporer dans le calendrier de l’Église Russe Hors-Frontières. Il encouragea les services en français et y participa. Il savait célébrer la Divine Liturgie dans une foule de langues dont le grec, le chinois, le français et le hollandais.
Mais Vladika Jean était un fol-en-Christ ! Refusant les apparences mensongères de la gloire humaine et mondaine, il se comportait quelquefois d’une manière qui choquait les esprits épris de bon ton et d’attitudes guindées. Il était pieds nus dans ses sandales mais, quelquefois, ayant donné ses chaussures à un mendiant, il arrivait pieds nus et célébrait ainsi. Il n’avait pas beaucoup de respect pour ce que certains hommes d’Eglise considèrent comme les convenances, obligatoires dans le monde. Ce que Dieu demandait, il le faisait, ne se posant pas la question de savoir si le monde allait être embarrassé.

1952:Tunis
Une lumière apparait autour de sa tête

On aurait aimé qu’il ait plus l’air d’un hiérarque avec des vêtements impeccables et une diction meilleure, mais il était ainsi, mal coiffé, hirsute, ayant l’air d’un fou, habillé comme il le faisait déjà en Chine, des étoffes les plus grossières, nu-pieds trop souvent et aspergeant d’eau bénite en plein visage, les bonnes dames de l’excellente société russe. Avec les enfants, c’était autre chose. Les enfants l’adoraient car sa sainteté leur était évidente et ils comprenaient très vite à quel point il était vrai !

Genève 1956

Un jour, il se trouvait à Marseille. La ville, pour lui, était d’abord celle où le roi de Yougoslavie avait été cruellement assassiné. Il voulut «naturellement» célébrer une pannikhide à la mémoire du Roi. Dans l’église, tout le monde eut été heureux de l’assister et de pontifier plus que lui-même ne le fit jamais, mais en pleine rue !… Car il voulut célébrer l’office à l’endroit même où avait eu lieu l’assassinat et son clergé eut honte et le laissa seul, au milieu de la rue, avec une petite valise et un balai. Il s’installa, balaya un coin de route pour y poser l’aigle épiscopal sur lequel il allait se tenir et alluma l’encensoir. Il officia seul jusques au bout. L’icône de la cathédrale Saint Jean Baptiste de Washington D.C., fondée avec sa bénédiction, a maintenant une grande icône avec des scènes de sa vie. Sur une des «fenêtres», on voit l’archevêque, au milieu des rues de Marseille, entouré de voitures, célébrant la mémoire du roi Alexandre de Yougoslavie !
Il accomplit aussi innombrables miracles en Europe, avant de retourner aux Etats-Unis, en 1962. La communauté de San Francisco était divisée, il réussit à apaiser les dissensions et, malgré les difficultés, à faire construire la cathédrale orthodoxe où il reposera après sa mort. Il connaissait l’heure de sa mort, ayant annoncé qu’il mourrait à Seattle. Il mourut devant l’icône miraculeuse de Koursk, celle-là même qui avait guéri le jeune Séraphim de Sarov.
Après sa mort, jusques à sa glorification et depuis lors, les miracles n’ont pas cessé. Les reliques saintes et incorrompues sont maintenant dans la cathédrale et non plus dans la crypte. Pendant des années, des messages sont venus du monde entier et ont été mis sous sa mitre, dans le sépulcre où il reposait. Et il a prié pour que Dieu exauce les demandes de ceux qui lui demandaient d’intercéder. Il est apparu souvent et en des lieux différents, à des gens qui, quelquefois, ne le connaissaient pas et les a réconfortés. Il a continué son apostolat depuis les autels célestes et n’a pas abandonné ceux qui faisaient appel à lui. Il a parlé, consolé, enseigné, comme s’il était encore parmi nous et il est encore parmi nous. Beaucoup de convertis à l’orthodoxie ont compris la sainteté parce qu’il la leur a enseignée par sa vie et ses actes. Nous pouvons encore rencontrer des gens qui l’ont connu. Quand nous les rencontrons effectivement et qu’ils nous parlent de lui, nous comprenons quel être extraordinaire a habité parmi nous, a foulé notre terre, a vénéré les vieux saints occidentaux qui étaient oubliés et rejetés et nous a appris à les aimer.



La cellule de son natalice

Pendant des années, inlassablement, la Saint Herman of Alaska Brotherhood (de Platina, en Californie) a maintenu la flamme du souvenir, publiant des témoignages innombrables sur la vie et les miracles de saint Jean. Il les avait bénis pour commencer la vie monastique dans les déserts de Californie et ils ont transmis au monde entier l’enseignement du bienheureux hiérarque.


Funérailles à San Francisco

Reliques de saint Jean

Leur livre, «Blessed John» (Le Bienheureux Jean) a répertorié des centaines de manifestations de sainteté du bienheureux Vladika Jean. Dans ce livre qui eut plusieurs éditions et dans la revue Orthodox Word, ils ont répandu dans le monde la vénération de l’archevêque fol-en-Christ. Voici quelques témoignages publiés par la revue mentionnée...

Icône de la Cathédrale
St. JohnThe Baptist de Washington D.C.
USA

• J’inclus ici une note que j’ai écrite en 1972. Aujourd’hui, un de mes amis catholique romain m’a raconté un rêve qu’il a eu la nuit dernière. Hier, je lui ai dit que quand il irait à San Francisco, la semaine prochaine, il devrait s’arrêter à la cathédrale russe Hors-Frontières et me rapporter de l’huile de la lampe qui brûle au dessus du tombeau de Jean Maximovitch. Il me raconta son rêve de la nuit dernière : quand il alla à la cathédrale, il commença à prendre de l’huile de la lampe, en grande quantité, et puis il entendit une voix qui disait : «Dis à M. (donc à moi), de venir ici lui-même et de prendre l’huile». Cet ami me dit aussi qu’il commença à faire le signe de la croix à la manière orthodoxe. Mais il lui fut dit qu’il ne tenait pas correctement ses doigts. Il se corrigea et puis il se réveilla au lit, faisant le signe de la croix correctement, à la manière orthodoxe. Son compagnon de chambre, un boudhiste, lui demanda ce qu’il faisait. Il le regarda et lui dit : «Je prie».
Je pense que je devais vous écrire cela. Qui sait ? Peut-être que Jean Maximovitch est un saint. Plus tard, j’ai voyagé jusqu’à San Francisco, je suis allé directement à la tombe, après la Divine Liturgie. J’ai prié près des reliques de Vladika Jean, lui demandant pardon pour le scepticisme que j’avais à propos de sa sainteté. Cela veut dire beaucoup pour moi que Vladika Jean m’ait amené à l’église synodale, à San Francisco, en particulier pour être près de ses saintes reliques. (27 avril 1976)

• Un samedi, je rendis visite à une de mes amies américaines, maintenant décédée, qui vivait dans une maison de retraite et ne pouvait se déplacer qu’en chaise roulante. Elle était entièrement seule et mes visites lui faisaient toujours grand plaisir. Il faisait très chaud ce jour-là, et je devais voyager pendant à peu près une heure avant d’arriver vers elle. Ayant passé quelque temps avec elle, je commençai à me préparer à rentrer à la maison dans une chaleur assez étouffante. Mais je réussis à demander à une femme qui venait voir sa mère de me prendre avec elle dans sa voiture, bien que cela n’ait pas été sur son chemin. Elle me conduisit à mon appartement et, afin de ne pas la retenir trop longtemps, je sortis très vite de l’automobile et, dans ma hâte, je fermai la porte sur trois doigts de ma main droite. La douleur fut très intense, et la femme fut effrayée. Mais, immédiatement, je courus à l’intérieur, dans la maison ; il y avait du sang, une douleur terrible et, immédiatement les jointures de mes trois doigts se mirent à enfler immensément et à devenir bleues. Je pensais que les doigts étaient brisés, puisque je ne pouvais pas les plier. Je dois vous dire que je travaille comme pianiste dans une école de danse et que je joue plusieurs heures par jour, tous les jours. Je pensais que je serais incapable de travailler pendant longtemps et que je pouvais même perdre mon travail, et j’étais terrifiée. Aussi, en larmes, je me tournai pour demander de l’aide vers Vladika Jean, avec ces paroles : «Tu vois, Vladika, ce qui est arrivé à ma main. Pendant ta vie, tu as aimé visiter les malades. J’aime aussi visiter les malades et, maintenant, je peux perdre mon travail». En larmes, je tombai dans le sommeil après avoir placé ma main malade sur son portrait. Je me réveillai le matin et je ne pouvais pas reconnaître ma propre main. ce qui était enflé avait disparu, la couleur était normale et il y avait seulement une petite douleur à peine sensible quand je pliais les doigts. Pendant tout le dimanche, j’ai remercié Vladika, et je demandai qu’il me guérisse complètement. Le lundi, il ne restait plus de trace et je jouai, sans gêne aucune, pendant plusieurs heures. Depuis ce temps-là, je remercie Vladika chaque jour et je prie pour le repos de son âme. J’aimerais vivre pour voir sa canonisation. (27 mai 1977)

• «Le Christ est ressuscité ! En vérité, Il est ressuscité» ! Cher Père, avec les prières de reconnaissance au Christ ressuscité, Celui qui accomplit des miracles à travers ses saints, je vous écris cette relation. Pendant plusieurs années, j’ai eu une grosseur dans la peau, du côté de la nuque. Cela a commencé comme une tête d’épingle, et cela a grandi en taille et en longueur, jusqu’à ce que cela atteigne une proportion considérable. Il y a un an et demi, j’ai été forcé d’enlever ma croix et ma chaîne, parce que la chaîne coupait la grosseur, la faisait saigner et me faisait très mal. J’ai mis ma croix et ma chaîne dans le tiroir d’une commode. Cela m’ennuyait de ne pas porter la croix du Christ autour de mon cou et, quelquefois, je pensais qu’il me faudrait faire enlever cette grosseur par un chirurgien. Mais j’avais d’autres problèmes et d’autres soucis et ceci ne semblait qu’une partie de ces soucis. Je ne me fis pas opérer. Au lieu de cela, par la prière et le jeûne, j’essayai d’améliorer mon être intérieur plutôt que mon apparence extérieure. Alors que je commandais des icônes d’un magasin de Californie, je vis quelque chose à propos d’une huile gratuite du sépulcre de l’archevêque Jean Maximovitch. Alors, par curiosité, j’ai demandé un peu de cette huile. A ce moment-là, je n’avais pas la moindre idée sur cet homme et ce qu’il avait fait. Je ne savais rien de lui. Ma commande fut un peu retardée, c’était la volonté de Dieu. Cependant, pendant ce temps, je commençais à apprendre des choses sur l’archevêque Jean, sa pieuse vie, ses œuvres, ses actions, ses guérisons, et j’entendis parler de cette huile et de la manière de l’utiliser. Un sentiment réel de respect commença à croître en mon cœur pour cet homme. A ce moment-là, de tout mon amour, je demandai les prières de l’archevêque, et je priai aussi pour son repos. Dans ma prière, je dis à l’archevêque que, commençant le premier jour du carême, je me ferais une onction sur la nuque avec son huile et lui demandai qu’il supplie le Seigneur de faire disparaître cette grosseur. Ainsi, pendant les quelques jours qui restaient avant le début du carême, je priais : «S’il te plaît, souviens-toi de moi, archevêque Jean. Tu sais combien je veux à nouveau porter ma croix. Prie pour moi, toi qui es agréable à Dieu. Thaumaturge béni, enlève cette grosseur qui m’empêche de porter la Croix vivifiante de notre Sauveur».
La nuit du lundi 13 mars 1978, après que j’eus dit mes prières du soir, dans mon coin d’icônes, je pris de l’huile de mon étagère, j’en mis un peu sur mon doigt et, pour la première fois, je me fis l’onction dans la région où il y avait la grosseur. Je ne ressentais rien. Combien il était étrange, pensai-je instantanément, que je manque l’endroit où il y avait cette grosseur ! Mais comment pouvais-je manquer cette grosseur ? Elle avait été avec moi pendant si longtemps. Je partis du coin d’icônes jusqu’à un miroir mural pour vérifier, mais la veilleuse n’était pas suffisante pour voir. Mon cœur commençait à battre fortement. Je me ruai vers la salle de bain, j’allumai la lumière et je vérifiai ce qu’il y avait sur ma nuque. La grosseur était partie, il n’y avait pas de sang, pas de cicatrice, pas de douleur. Avec des larmes, je retournai vers mon coin d’icônes et je remerciai l’archevêque Jean Maximovitch. Peu de temps après, je fis dire une pannikhide pour le repos du bienheureux Jean. Pour ce service, je portai ma croix pour la première fois depuis plus d’un an. Maintenant, chaque fois que je touche cette croix, je remercie le bienheureux Jean et je prierai pour lui toujours. Pour votre information, j’ai trente-trois ans, je suis marié et je suis père de deux enfants. Dieu m’est témoin que ce que j’ai écrit est la vérité.

• Dans les Philippines, j’accompagnais souvent Vladika à la ville de Guyane où, dans un hôpital philippin, il y avait des Russes qui étaient sérieusement blessés, à qui Vladika rendait visite, leur donnant de petits Evangiles et des petites icônes. Au cours d’un de ces voyages, en entrant dans le quartier russe, nous entendîmes des cris terribles semblant venir de loin. Vladika demanda la raison de ces cris. L’infirmière russe lui répliqua qu’ils venaient d’une femme qui était perdue et qui, parce qu’elle dérangeait les patients avec ses cris, avait été placée dans l’hôpital militaire américain inutilisé qui était près de ce bâtiment. Vladika décida immédiatement d’aller vers la femme malade mais l’infirmière russe lui conseilla de ne pas y aller parce qu’une odeur épouvantable venait d’elle. «Cela ne veux rien dire», dit Vladika. Et, d’un pas rapide, il alla vers la femme malade dans le bâtiment à côté. Je le suivis. En fait, il y avait vraiment une odeur insupportable qui venait de cette femme malade. Allant jusqu’à elle, Vladika mit une croix sur sa tête et commença à prier. Je sortis. Il pria pendant assez longtemps, puis il confessa la femme malade et lui donna la sainte communion. Quand nous partîmes, il n’y avait plus de cris, seulement un grognement très doux. Quelque temps passa. Au cours d’un autre voyage à l’hôpital, nous avions à peine franchi le seuil de la cour qu’une femme vint en courant de l’hôpital et se jeta aux pieds de Vladika. C’était la femme qui était perdue et pour laquelle Vladika avait prié.

Récemment, le hiéromoine Damascène1, membre de la fraternité de Saint Germain d’Alaska, a remarqué que «la chose la plus remarquable dans la vie de saint Jean tient au fait qu’il exprima par sa vie beaucoup de types de sainteté différents. […]
1. Il fut avant tout un grand ascète, dans la tradition des saints moines d’autrefois comme saint Macaire le Grand, saint Pacôme le Grand et bien d’autres…
2. Il savait lire dans les cœurs et pouvait identifier et nommer des gens qu’il n’avait jamais vus auparavant. Illuminé par la Grâce de Dieu, il pouvait entendre et répondre aux pensées des autres, avant qu’ils ne les expriment. Il prévoyait le futur, il connut ainsi le temps de sa propre mort. Ainsi, il appartint tout à fait à la tradition des grands moines et staretz d’autrefois et, plus particulièrement, à celle des Pères spirituels clairvoyants du monastère d’Optino.
3. Il fut miséricordieux dans la tradition de saint Philarète le Miséricordieux et de bien d’autres saints. […] Il se sacrifia pour les orphelins, allant les chercher dans des bidonvilles dangereux et dans des maisons de prostitution […].
4. Il fut hiérarque et théologien […].
5. Il fut apôtre, évangéliste et missionnaire, dans la tradition des saints Cyrille et Méthode […]1.
6. Il fut anargyre et thaumaturge dans la tradition de saint Martin de Tours, de saint Nicolas de Myre en Lycie et de bien d’autres […].
7. Il fut pasteur aimant se sacrifier pour son troupeau, comme saint Jean de Cronstadt et tous les autres hiérarques et prêtres saints du passé. Son amour était si grand que tout un chacun avait l’impression d’être son favori. Il débordait d’amour sacrificiel pour son troupeau et pour ceux qui était au dehors de ce troupeau également, comme en témoigne la vieille femme juive mourante qu’il guérit soudain par les paroles de la salutation pascale : «Christ est ressuscité !».
8. Il délivra le peuple de la captivivé comme le saint Théopte Moïse et saint Paulin de Nole. Il sortit cinq mille fidèles orthodoxes de Chine communiste pour les amener en Amérique.
9. Enfin, il fut, à un certain degré, fol-en-Christ dans la tradition de saint André de Constantinople. Il ne pouvait pas être fol-en-Christ dans la pleine acception du terme car cela aurait compromis la dignité de son service de hiérarque. Et pourtant, à plusieurs reprises, il fit des choses étranges pour le monde, suscitant la réprobation de gens qui ne le virent pas pour ce qu’il était : un homme de Dieu. Il fut ainsi critiqué pour avoir marché pieds nus et pour avoir porté une mitre de carton que lui avaient fabriquée ses orphelins».

Hirsute, cheveux en bataille, lunettes de guingois, pieds nus, bégayant comme le saint Théopte Moïse, ne s’accordant nul répit sur la terre des vivants, ne dormant que quelques heures, ne mangeant qu’une fois par jour, ne craignant pas d’affronter ce que les autres considéraient comme le ridicule pour sauver les âmes, ne faisant acception ni de nationalité, ni de langue, ni de quoi que ce soit devant la détresse des malades, des prisonniers, des aliénés, le bienheureux Vladika Jean est un grand Luminaire au ciel de l’orthodoxie.
Un soir de novembre 1964, alors que l’Eglise Russe Hors-Frontières célébrait la glorification de saint Jean de Cronstadt, peu de gens vinrent aux vigiles à la cathédrale de San Francisco. Un groupe de Russes avait organisé un bal ce soir-là pour Halloween, fête païenne s’il en est. Saint Jean se rendit après le service dans la salle de danse. La musique s’arrêta et il fit, bâton pastoral à la main, le tour de la salle en regardant chacun de ceux qu’il connaissait sans mot dire, à la consternation générale. Il partit, sans rien dire aussi, et le lendemain, à l’église, exprima son indignation.
Il fut un superbe père spirituel. Un de ses enfants disait, peu de temps après sa mort, qu’il n’aurait jamais plus de père spirituel car personne ne pourrait, comme Vladika Jean, lui téléphoner au milieu de la nuit pour lui dire : «Cesse de prier et va dormir, le Seigneur a entendu ta prière et l’a exaucée» !
Il allait toujours à la recherche de la brebis perdue, où qu’elle se trouve. Dans la région de Montpellier, il partit avec un diacre français de mes amis, prier sur les tombes des Russes qui étaient enterrés dans un cimetière local. Il chercha longtemps une tombe et l’on chercha avec lui, sans résultat. On n’osait pas le presser de partir car il s’entêtait à chercher, étant sûr qu’il y avait cette âme pour laquelle il devait prier dans ce cimetière. Finalement, il sortit du cimetière et, dans ce qui était l’ancien cimetière désaffecté, trouva la tombe du défunt russe qu’il cherchait et put prier pour lui.

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Que Vladika Jean cherche toujours nos âmes indignes pour les protéger et les conduire au Christ ! Amen !

Claude Lopez-Ginisty

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Ecoutez la voix de saint Jean Maximovitch!




Ecoutez sa vie ( en anglais):


Photos & Icônes:

Video de sa glorification ( en grec!):



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Prier (281)



Toutes tes lectures
Aussi saintes soient-elles
Ne valent jamais le bonheur
Que fait naître un de tes actes de charité

上帝的朋友 ( L'ami de Dieu)

lundi 21 septembre 2009

L'anamkhara ou amitié de l'âme dans l'orthodoxie celtique



Ste Brigitte de Kildare


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Le terme d'anamkhara est familier aux irlandais. C'est l'ancien concept de "l'ami de l'âme" qui vous écoute, vous guide et vous aime.

Il y a une sorte d'amour qui est indissoluble,
que ni le temps ni l'espace,
ne peuvent couper ou détruire,
et même la mort ne peut abolir,
car avec Dieu l'union des caractères,
et non celle des lieux,
unis les amis dans une commune demeure.

Saint Jean Cassien



L'une des églises les plus anciennes et créatives du christianisme, l'Église Celtique des origines, a grandi en importance, des siècles avant que des conflits théologiques et politiques ne divisent tragiquement le peuple chrétien. Cette Église Celtique commençante, existant tout à fait indépendamment de Rome à partir du cinquième au douzième siècle, était composée d'une grande variété d'Églises dans des endroits comme l'Irlande, le Nord de l'Angleterre, la Cornouailles, le pays de Galles, l'Ecosse, la Bretagne et l'île de Man.

Bien que ces Églises n'aient jamais été administrativement unies, elles ont connu dans une large mesure l'unité entre elles, grâce à leur style de vie monastique, aux liens familiaux et d'amitié, au respect pour la guidance [spirituelle]des femmes et à leur spiritualité commune. Dans cette première Église celtique, une personne qui agissait en tant qu'enseignant, confesseur, ou guide spirituel était appelée par les Gallois periglour ou beriglour, ainsi que par les Irlandais et les Écossais anamkhara, qui signifie "ami de l'âme" ou simplement "âme amie". Ce genre de ministère a finalement été associé par l'Église occidentale essentiellement masculine avec le prêtre ordonné dans le sacrement de réconciliation, mais, dans les premiers temps du christianisme celtique, ces relations étaient ouvertes aux laïcs et aux clercs, aux femmes et aux hommes.

Une anecdote de Saint-Brigitte de Kildare, trouvée au début du siècle neuvième dans le Martyrologe de l'Oengus Culdee, témoigne de l'importance de l'anamkhara...

Un jeune clerc de la communauté de Ferns, fils adoptif de Brigitte [sainte Brigitte de Kildare], avait l'habitude de venir la voir avec friandises. Il était souvent avec elle dans le réfectoire pour prendre de la nourriture.

Un jour, après être allé à la communion, elle frappa un battant de cloche. "Eh bien, jeune clerc, là", dit Brigitte, "as-tu un anamkhara?". "Oui", répondit le jeune homme. "Chantons son requiem", dit Brigitte. "Pourquoi?" demanda le jeune clerc. "Parce qu'il est mort", dit Brigitte. "Quand tu as terminé la moitié de ta ration, j'ai vu qu'il était mort". "Comment sais-tu cela? "Facile à dire, répondit Brigitte, à partir du moment où ton anamkhara était mort, j'ai vu que ta nourriture a été mise (directement) dans le tronc de ton corps, puisque tu était sans tête. Sors et ne mange rien jusqu'à ce que tu aies à nouveau un anamkhara, car toute personne sans anamkhara est comme un corps sans tête, elle est comme l'eau d'un lac pollué, ni bonne à boire, ni pour se laver. Voilà ce qu'est une personne sans ami de l'âme (anamkhara)!".

Cette histoire, dans le contexte d'un repas avec des références à la mort et l'eau, a des connotations symboliques, sacramentelles que la plupart des chrétiens reconnaîtront. Elle suggère que les Celtes croyaient que des amis de l'âme chrétiens était quelque chose de crucial pour la subsistance humaine et la croissance spirituelle, et que de telles relations de mentorat étaient finalement liées à l'amitié avec Dieu.

[...] aussi bien les chrétiens du désert et ceux des pays celtes, et les anecdotes qu'ils ont écrites, affirment la valeur des amitiés avec les enseignants, les confesseurs et les guides pour atteindre la sainteté personnelle et acquérir la sagesse.

Selon Nora Chadwick dans son ouvrage classique The Age of Saints in the Early Celtic Church (L'Age des Saints dans l'Église celtique primitive), l'anamkhara était à l'origine quelqu'un qui, comme compagnon, partageait sa cellule et à qui on se confessait révélant les aspects confidentiels de la vie.

Ainsi, Chadwick dit que la tradition celtique de la guidance spirituelle a été fortement influencée par les chrétiens du désert et que l'apparition de l'anamkhara dans les Églises celtiques était un développement naturel qui pouvait être liée au syncelle, "celui qui partage une cellule" dans l'Église orthodoxe grecque.

Considérant l'importance de la cellule dans la spiritualité du désert comme lieu où l'on rencontre Dieu et où l'apprend "tout", partager sa cellule avec un ami de l'âme alors, est partager son moi le plus intime, sa vie, son esprit et son cœur.

Jean Cassien (c. 360-435), visiteur précoce du désert et l'un de ceux dont les écrits ont été les plus responsables de la grande popularité de la spiritualité du désert chez les Celtes chrétiens, partage sa cellule à Bethléem, avec son ami Germain, pratique commune de l'Orient pendant le quatrième siècle, jusqu'à ce qu'elle soit condamnée par les législateurs monastiques, peut-être de peur qu'une telle intimité puisse mener à des comportements condamnables. Dans ses Conférences, toutefois, Cassien compare l'amitié à ceux qui, par l'union de caractère, et "non de lieu", sont unis entre eux "dans la demeure commune". Ce lien entre amis, dit-il, est indissoluble: "Ce lien, dis-je, n'est pas brisé par les circonstances, aucun intervalle de temps ou d'espace ne le pourrait briser ou détruire, et la mort même ne peut pas séparer ceux qui sont unis par un tel lien".

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
SOUL FRIENDSHIP
in Early Celtic Monasticism