La Crimée ressuscite le Kosovo sur la scène médiatique. L’analogie plait. Elle devient l’incontournable des tribunes et des discours politiques du moment. Le «cas du Kosovo à l’appui », on s’évertue ici à confirmer, ailleurs à infirmer, telle prise de position, tel raisonnement géopolitique…
La péninsule russophone porte un coup de projecteur inattendu sur le Kosovo. Quinze après la dernière guerre dans les Balkans, l’occasion est inespérée de renouveler un certain intérêt auprès de la communauté internationale et de l’opinion publique, au-delà des comparaisons récurrentes.
Qu’en est-il effectivement du Kosovo en 2014? Comment vivent ceux qui ont été les spectateurs malheureux du basculement de son statut? Quel est le traitement réservé à la minorité chrétienne dans cette province autonome de Serbie devenue indépendante par auto-proclamation en 2008?
Sur la droite, l'abbé du monastère de Visoko Dečani, l'archimandrite Sava
Janjić, échange sur l'alarmante situation des chrétiens du Kosovo avec les
représentants de Solidarité Kosovo. A sa droite, l'évêque du Kosovo-Metochie,
Monseigneur Théodose.
Le constat est alarmant. Dans son rapport sur les groupes minoritaires au Kosovo, Human Rights Watch dénonce le "profond dénuement" et "la discrimination" dont ils sont victimes.
Parmi ces groupes minoritaires se distingue la communauté serbe, la plus importante d’entre eux. De confession chrétienne orthodoxe, elle représente aujourd’hui 7% de la population du Kosovo contre 14% avant 1999, la majorité étant quant à elle composé à 90% d’Albanais de confession musulmane.
D’une année à l’autre, le Kosovo s’épure un peu plus. Les Serbes s’exilent rarement par choix. Ils y sont souvent contraints et toujours déchirés d’abandonner leur terre natale et celle de leurs ancêtres. D’autant plus que l’idée d’un potentiel retour leur est proprement inenvisageable. Même un retour pour quelques heures peut rapidement tourner au drame. C’est ainsi que le 7 janvier dernier, des réfugiés serbes qui revenaient à Djakovica pour y célébrer la messe de Noël selon l’ancien calendrier ont été la cible de jets de pierres provenant de militants radicaux qui avaient bloqué l’entrée de l’église. Le slogan scandé par la foule hostile était sans équivoque : « Pas de Noël au Kosovo, pas de Chrétiens à Djakovica ».
Pour les Serbes qui ont fait le choix de rester au Kosovo, la vie est un véritable enfer.
Parquées dans des enclaves, ces familles vivent dans l’angoisse, traumatisées par les agressions à répétition subies depuis la guerre. La violence qu’elles subissent est multiforme, physique comme matérielle. Il y a tout juste une semaine, la coopérative agricole de la soupe diocésaine a été détruite par des extrémistes. En plus d’avoir anéanti les maigres ressources que possède la communauté, cet acte de vandalisme a réussi à entretenir un sentiment collectif de peur chez les familles chrétiennes.
Au chevet de cette minorité éreintée, l’Église est régulièrement prise pour cible. Humiliées et menacées, les autorités religieuses tirent la sonnette d’alarme. Dans deux communiqués publiés les 24 et 26 avril dernier sur le site du diocèse du Kosovo, l’abbé du monastère de Visoki Dečani, l’archimandrite Sava Janjić, lance un appel qui résonne comme un cri de désespoir :
« De nouvelles menaces ont été proférées verbalement et au moyen d’inscription sur les murs de l’enceinte du monastère. La sécurité de la vie monastique et des pèlerins est en danger. »
Les antécédents sont trop nombreux pour ne pas prendre au sérieux ces nouvelles menaces. « Au cours de ces quinze dernières années, le monastère a été attaqué par quatre fois dont à deux reprises à la grenade. Lors de ces attaques, des inscriptions « UCK » (correspondant aux insignes de « l'armée de libération du Kosovo », un groupe terroriste responsable de l’expulsion de 250 000 Serbes du Kosovo et de la destruction de 150 églises. NDLR) ont été taguées partout sur le site religieux. Nous venons de découvrir ces mêmes inscriptions sur les murs ainsi que sur la porte cochère de notre monastère. »
Comble d’infortune, l’état major de la Force de l'Otan au Kosovo (Kfor) a récemment annoncé la fin de sa mission au Kosovo. Bientôt, les soldats chargés de la protection du monastère depuis 1999 se retireront.
Qu’adviendra-t-il alors des monastères et de la vie monastique? Si la présence des forces internationales n’a pas empêché les quatre dernières attaques, elle en a cependant fortement limité l’impact en maintenant les assaillants à bonne distance du monastère. Qui les dissuadera désormais de renouveler leurs attaques ? Qui les empêchera d’arriver à leur fin - la destruction du monastère ?
Quinze après la guerre, les drames que la minorité serbe du Kosovo subit ne faiblissent pas.
« Nous, Chrétiens, nous nous sentons vulnérables […] le Kosovo est le seul territoire d'Europe où des sanctuaires, des moines et des pèlerins chrétiens sont encore menacés», écrivait le Père Janjić dans son communiqué du 24 avril 2014
Photo archive: Depuis 1999, les soldats de la KFOR
protègent le monastère de Visoko Dečani
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SOLIDARITE KOSOVO/ Contact:
Ivana GAJIC
Chargée de communication et des relations institutionnelles
Solidarité Kosovo
BP 1777 - 38 220 Vizille - www.solidarite-kosovo.org
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