"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 30 novembre 2013

Vie de sainte Rachel moniale du grand schème du monastère du Saint-Sauveur à Borodino [1835-1928] (5)


Un jour que mère Rachel était malade, elle reçut la visite d'un certain Gabriel Fomitch, un originaire de Kourakine, un homme grand et fort de constitution, et pensant que mère Rachel allait bientôt mourir, il se mit à lui faire ses adieux. Mère Rachel, avec un sourire, lui raconta la fable du chêne et du roseau. "Le chêne était fort et se vantait de sa robustesse au roseau, mais vint la tempête et elle cassa le chêne, tandis que le roseau, petit et fin, se courba sur la terre. Mais une fois la tempête passée, le chêne gisait par terre, tandis que le roseau s'était redressé. Alors vous voyez, Gabriel Fomitch, toutes sortes de choses sont possibles." Dix jours plus tard, la femme de Gabriel Fomitch vint au monastère faire part du décès de son mari.

Un jour une certaine Anastasie, qui regardait la cellule de Matouchka, remarqua sa literie et pensa: "0n dit que les ascètes dorment à même des planches, mais ici on a des édredons! On dort sur des lits moelleux". Sur ces entrefaites, Matouchka arriva, donna un coup de poing dans l'oreiller et dit: "Voilà mon duvet, tout fait!" Et la paille en sortit.

Une certaine Anne demanda à Matouchka la bénédiction de se faire construire une isba à Gjatsk; elle avait une charpente prête à la campagne, il ne restait plus qu'à la transporter à la ville. Mère Rachel le lui permit, mais lui ordonna d'attendre un peu. Anna n'écouta pas. Peu après il y eut un incendie à Gjatsk et la charpente brûla.

Matouchka prévit aussi le moment où elle allait quitter cette vie. Le 26 août 1928, elle annonça à ses nombreux visiteurs qu'elle les voyait pour la dernière fois, elle était déjà très faible. Aussitôt la maladie progressa fortement, et Matouchka en souffrait cruellement, mais elle ne cessait pas de recevoir les visiteurs. A la fête de la Nativité de la Mère de Dieu, elle communia et pour la première fois depuis le début de sa maladie, elle permit qu'on la dépose sur le divan [avant cela elle se reposait dans un fauteuil]. Elle refusa le secours de la médecine, disant qu'elle n'avait désormais plus besoin de médecins du corps. Les souffrances augmentaient de jour en jour, mais (couchée) elle n'en continuait pas moins de recevoir les visiteurs. Son visage devenait souvent resplendissant, comme illuminé par l'éclair. Peu de temps après, elle demanda qu'on la remette dans le fauteuil, reprit des forces et se mit à chanter de sa vieille voix:

— Le Seigneur m'a ressuscité et les gens se sont réjouis! Hé bien Macha, j'ai de nouveau reçu de la mort un sursis de trois semaines.

— Alors, Matouchka, cela veut dire que vous nous quitterez à la Protection de la Mère de Dieu? s'enhardit à lui demander sa servante de cellule.

— Oui, ma chère Macha.

Dès lors, elle se remit à recevoir des visiteurs comme d'habitude, et même à les servir à table. Le 28 septembre, mère Rachel demanda à sa servante de cellule de la laver. Le lendemain l'aumônier, l'hiéromoine Barthélémy, vint la visiter. En cas de nécessité, mère Rachel l'appelait toujours, uniquement par la prière. De même cette fois-ci. Il lui donna la communion et le 22 septembre, l'onction des malades. Le 23 septembre, il revint pour communier mère Rachel qui était alors tout à fait paisible, dans un état bienheureux, "comme un petit ange d'une beauté et d'une humilité non terrestres". Ce jour-là, elle dit à sa servante de cellule:

— Quand bien même tu vivrais deux cents ans, tu te retournerais et tu verrais que cela ne fait pas même un seul jour. Tu sais, Macha, on m'enterrera au-delà du monastère, cela ne fait rien, beaucoup de grands noms reposent là. On dira toute sorte de mal, et on m'enterrera au-delà de la clôture. L'huile, Macha, donne-la à l'église. Tu n'auras pas la charge de la brûler toute ta vie. Tu dors encore, Macha, mais quand tu t'éveilleras, alors tu verras beaucoup de choses.

Le lendemain, 24 septembre, mère Rachel reçut des visiteurs pour la dernière fois, elle était vaillante et joyeuse, elle but même du thé et à certaines personnes de Moscou elle dit qu'elle mourrait dans deux jours. Le soir, après avoir congédié toutes les personnes présentes, elle pria:

— Mère de Dieu, pardonne tout à Macha: pour ce qu'elle savait et pour ce qu'elle ne savait pas!

Après la prière, mère Rachel bénit sa servante de cellule avec une icône du Sauveur et dit:

— Et toi, marche sur les traces du Sauveur.

Macha lui demanda de lui indiquer la façon de vivre.

— Vis dans la vérité, Macha, voilà la voie de la vérité.

Le 25 septembre, mère Rachel fit appeler le père spirituel du monastère, le père André, pour qu'il lui porte la communion, et elle communia pour la dernière fois. A partir de ce moment, elle n'absorba plus aucune nourriture. Elle faiblissait de plus en plus, mais elle ne cessait pas de se soucier de ses enfants spirituels, elle donnait à sa servante de cellule ses dernières instructions et ses derniers conseils spirituels. Elle lui dit de nourrir tout le monde, comme de son vivant.


Version française

Françoise Lhoest

que nous remercions  chaleureusement




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