"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 9 septembre 2010

Staretz Michel de Valaam



[Le staretz] Michel est né en 1877 en Lettonie. Il avait à peine atteint l'âge d'un an et demi lorsque sa mère mourut, et quand il avait six ans, son père est mort aussi. Il a vécu une vie triste d'orphelin, et son enfance ne fut donc pas digne que l'on s'en souvienne. Plus tard, il n'en parla jamais, par conséquent, elle est peu connue. Il lui a fallu un certain temps pour agir avec détermination, mais quand il était dans son adolescence, il prit la décision de devenir moine. Ses proches essayèrent de l'en dissuaderi, lui disant de se trouver un emploi et de mener une vie matérialiste réussie.

Dans l'usine où Michel travaillait, un incident s'est produit qui l'ébranla au plus profond de son être avec la pensée de la mort subite. Un mécanicien, voulant arrêter une certaine machine, s'approcha de trop près. La veste du mécanicien fut attrapée et en une minute il ne restait plus rien de lui. Ce bref contact avec la mort le conduisit finalement à quitter le monde.

Le troisième jour après Pâques, lorsque Michel eut dix-huit ans, tranquillement, sans rien dire à personne, il prit un petit baluchon sur ses épaules et quitta la maison en silence. Dans son baluchon, Michael emportait une Bible et deux changes de vêtements.

Dormant dans la forêt à la belle étoile, le futur staretz se nourrit de ce que Dieu lui envoyait. Michel marcha de monastère en monastère, la prière sur les lèvres, abandonnant tout souci terrestre. Tout en cherchant la volonté de Dieu pour lui-même, cette pensée lui vint à l'esprit: "Sois ferme dans la défense de l'orthodoxie pure. Tu auras à supporter beaucoup, mais reste ferme, jusques à la mort. "

En 1902, Michael entra au monastère de Valaam et abandonna le monde à jamais. Derrière les murs de pierre du monastère, il vécut pendant de nombreuses années dans le silence et la paix, communiant dans son cœur. Quinze ans plus tard, le silence du starez fut brisé. Une révolution eut lieu en Russie et un nouveau gouvernement fut institué, gouvernement fondé sur l'athéisme. Tout comme dans les arènes de Dioclétien, le sang des moines et des prêtres fut versé en rivières sur la terre stérile. Le jeune moine Michel en a beaucoup souffert, sachant le sort auquel ses frères chrétiens étaient confrontés à l'extérieur de son monastère.

Puis, un jour, au cœur de l'hiver, les moines et moniales de Valaam virent un homme courir vers leur île, à travers le lac gelé, vers leur monastère. Il criait pour avertir les moines que les soldats communistes venaient au monastère. Les trois cents moines remplirent rapidement toutes les possessions du monastère sur des traîneaux et des chevaux et commencèrent la marche douloureuse vers le pays libre de Finlande. Comme ils étaient presque tous gelés à mort, ils décidèrent de faire un grand feu. Se réchauffant près du feu, avec le reste de ses frères, le jeune moine Michel regardait son monastère bien-aimé au lointain. Ayant la nostalgie de ce lieu, il pleurait tandis que la brise d'hiver gelait ses larmes.

Finalement, les moines arrivèrent sains et saufs en toute sécurité en Finlande et à l'abri des persécutions ils construisirent un nouveau monastère dans le désert, pratiquement à partir de rien. Au cours de ces périodes sombres et difficiles, il y eut une nouvelle persécution à l'intérieur du nouveau monastère. Il y avait un mouvement pour «réformer» l'ancienne tradition de l'Orthodoxie pour la rendre conforme au goût du monde déchu. Tous ceux qui s'opposaient à ce nouveau "système" furent impitoyablement persécutés et mis au ban. [Le staretz] Michal a beaucoup souffert de cela et il s'est rappelé sa détermination à "être dans la défense ferme de la pure orthodoxie."

Pour sa fermeté à maintenir les vieilles traditions, Michel a été jugé. Au milieu du procès, le futur staretz a dit: "Vous pouvez m'enterrer vivant, mais je ne vais pas m'éloigner de la tradition que j'ai reçue." Après son procès, il fut exilé sur une île déserte.

En 1957, le moine Michael fut forcé de quitter le monastère en raison de la persécution. Souffrant de ce qu'il n'avait pas persuadé ses frères, Michael déménagea au monastère des Cavernes de Pskov, à la frontière de l'Union soviétique. Le staretz Michel vécut les dernières années de sa vie sur cette terre dans un silence total et dans la solitude, vivant pour la seule prière .

Icône du staretz Michel donnée à la Fraternité St Germain d'Alaska

Les récits suivants sont des comptes rendus des réunions, des entretiens et des conversations du staretz dans les années précédant sa dormition. Ses entretiens semblent révéler que son esprit était mort à ce monde, et vivant dans l'autre monde.

Ses yeux étonnants, brillants et limpides, me regardaient. J'ai réalisé que le Père Michel avait le don de clairvoyance, il lisait mes pensées et connaissait mon passé. "Mon père, lui ai-je demandé," Qu'est-ce que vous pensez de la mort? "

Le staretz répondit:

"Il n'y a pas de mort. C'est simplement un passage d'un état à un autre. Pour moi personnellement, la vie de l'autre monde est beaucoup plus réelle que ma vie ici. Plus le chrétien vit de la vie intérieure, plus il est détaché de ce monde, et insensiblement il se rapproche de l'autre monde. Quand la fin arrivera, c'est facile, le rideau mince se dissout tout simplement.

Le mystère du péché est en marche depuis un certain temps, mais je pense que le temps va maintenant vers une autre direction. En effet, combien de martyrs nous n'avons eu récemment, et même à présent? Cela montre combien de saints sont toujours en vie. À la fin des temps il n'y aura pas plus de martyrs parce que l'apostasie sera tellement vile."

"La vie intérieure est-elle difficile?" ai-je demandé au staretz.

Le staretz a déclaré:

"Non, si vous la prenez dans le droit chemin. Dans la vie intérieure, il n'est pas de ligne droite. Une personne monte ou bien descend. Aucun être qui recherche la consolation ne peut s'attendre à acquérir la paix intérieure. Il ne sait même pas ce que c'est. Dans le monde il y a beaucoup de gens qui ne sont que des cadavres qui marchent, ils ne pensent à rien, si ce n'est à leur confort. Quand on est jeune, ou même d'âge moyen, nous pouvons cacher notre moi véritable. Une personne âgée ne peut pas faire cela. Souvent, la révélation du vrai moi d'une personne est épouvantable.

Il est important d'éviter les mêmes chutes, quelles qu'elles soient; alcool, jeu, impureté, et ainsi de suite. Après chaque chute, s'affaiblit. Nous nous habituons à nos péchés et à la fin la Grâce divine ne produit aucune impression sur nous, et nous devenons, en premier lieu, indifférents à la vie chrétienne, puis violemment hostile à Dieu. Quand un homme atteint ce stade, il perd la capacité de reconnaître sa faute et dégénère. D'autre part, ceux qui sont vraiment désolés, même s'ils tombent dans le même péché encore et encore, commencent à se sentir indifférents à son égard, puis le haïssent. Peu à peu, tous les péchés deviennent dégoûtants pour eux, et ils deviennent des saints de Dieu. Chacun est libre de choisir la première ou la deuxième voie. Ceux qui choisissent la bonne voie, doivent se rappeler que plus on commence tôt, mieux c'est. Il est difficile de rompre les habitudes anciennes. Les criminels et les assassins ne sont pas nés en tant que tels. Ils n'étaient pas différents de n'importe qui d'autre, mais ils ont négligé de regretter leurs petits péchés et se sont retrouvés comme des dégénérés."

Le staretz Michel me donna un jour un morceau de papier qui dit ce qui suit, "Le bonheur et le malheur, l'ascension et la chute, la santé et la maladie, la gloire et le déshonneur, la richesse et la pauvreté, tout vient de Dieu et doit être accepté comme tel."

J'ai regardé le staretz en disant: "Cette parole est dure, mon Père."

Le staretz a répondu:

Non, beaucoup de gens frappés par le malheur sont soit déprimés, compte tenu de tout ce qu'ils ont perdu, ou rebelles, croyant qu'ils ont souffert injustement. La vérité, bien sûr, c'est que Dieu se penche nous tous à sa manière, qui est la meilleura pour les personnes concernées.

Nous avons seulement une foi morte. Cette situation est commune aux démons. Ils savent qu' il y a un Dieu, mais ils s'opposent à Lui quand même. Souvenez-vous toujours que toutes les épreuves dans cette vie sont conçues pour nous rendre plus détachés de ce monde. Par conséquent, elles nous conduisent à une vie meilleure.

Vous voyez, tandis que nous n'avons pas la paix d'esprit, nous ne pouvons pas voir Dieu. Nous sommes en mesure de comprendre le passé dans les limites permises par Dieu, mais nous ne savons pas quoi faire maintenant et que faire dans le futur. Si nous n'avons pas la paix de l'âme, cela signifie que, intérieurement, nous n'avons pas encore atteint un état de plénitude et nous sommes aveuglés par les passions qui nous empêchent de voir le monde sous son vrai jour. Mais quand nous atteignons une paix intérieure, nos passions sont maîtrisés et nous voyons clairement qui nous sommes et où nous allons. Vous voyez, il est impossible d'être un bon serviteur de Dieu et de travailler dans sa vigne dans n'importe quelle position, avec quelque succès, à moins que la paix intérieure ne soit atteinte en premier. Les gens apprécient cette paix par-dessus tout, mais il est évident qu'ils ne peuvent pas l'atteindre par ceux qui ne l'ont pas eux-mêmes. Donc beaucoup de sermons, de livres, et d'exercices, ne produisent aucun effet, car ils ne sont pas nés de la paix intérieure, dans la contemplation et le détachement. Mais quand vous avez atteint la paix intérieure, tout va bien parce que Dieu est avec vous. Ce n'est que dans la paix intérieure profonde que nous pouvons voir Dieu et comprendre Sa Volonté.

"Qu'est-ce qui aide, mon père", ai-je demandé au reclus, "pour obtenir la paix intérieure? "

Le staretz répondit:

"Supporter avec patience les épreuves et la prière pure."

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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