"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mardi 20 août 2019

Kirill Aleksandrov : Les dix erreurs du patriarche Bartholomée

Le Patriarche Bartholomée et Petro Porochenko.
Photo : UOJ
Ce que le chef du Phanar n'a pas pris en compte, en passant un accord avec Petro Porochenko et en reconnaissant les schismatiques ukrainiens.
Le Patriarcat de Constantinople, à travers les efforts de ses hiérarques et de ses théologiens, tente ouvertement d'imposer au monde orthodoxe tout entier le concept du "premier sans égal". Cette idéologie prétend que le Phanar exprime l'essence même de l'Orthodoxie, que l'Église du Christ elle-même ne peut exister sans cela.
Certes, pour le moment, il n'y a pas de déclarations sur l'absence de péché du patriarche de Constantinople ou du patriarcat dans son ensemble, mais cela découle logiquement de la notion précitée de "premier sans égal".
"Le patriarche de Constantinople n'est pas sans péché, mais il a toujours raison puisqu'il est le patriarche de Constantinople", semble être l'idée des bienfaits dont bénéficie le chef du Phanar.
C'est exactement ce que disent les monastères de l'Athos qui entrent en communion avec les schismatiques ukrainiens de l'Église orthodoxe d'Ukraine. Ils ne comprennent pas ou prétendent qu'ils ne veulent pas aller en profondeur dans l'essence des décisions prises par le Phanar mais simplement montrer de l'obéissance à leur patriarche.
C'est vrai, dit l'apôtre Paul : "Mais si nous, ou un ange du Ciel, vous annonçons un autre évangile que celui que nous vous avons prêché, qu'il soit maudit" (Galates 1, 8). Mais il s'agit d'un autre sujet de discussion. Analysons ici les actions et les décisions du Phanar et du patriarche Bartholomée et réfléchissons à la question de savoir si une personne qui prétend être la plus sage et la plus juste dans le monde orthodoxe peut agir de cette manière.
L'épopée avec le Tomos et l'OCU [« église ukrainienne » schismatique] a commencé le lundi 9 avril 2018, avec la visite du président de l'époque, Petro Porochenko, à Istanbul, et avec les négociations avec le patriarche Bartholomew.
patriarche Bartholomée et Petro Porochenko, Istanbul, 09.04.2018
Photo : president.gov.ua
Le service de presse du Président a rendu compte très rapidement des résultats des négociations. Il n'y avait qu'une seule ligne sur la création de l'Église autocéphale en Ukraine : "Le Président de l'Ukraine a également noté l'importance de l'introduction d’une  église orthodoxe locale unique en Ukraine, à laquelle le peuple ukrainien aspire." Mais malgré cela, comme cela s'est avéré plus tard, c'est alors que le patriarche Bartholomée a pris une décision de principe - de jouer la carte ukrainienne. Et c'est là qu'il a fait la première erreur.
Erreur 1
Le patriarche Bartholomée a fait un pari essentiellement perdant-perdant dans son jeu - premièrement, sur la politique, et deuxièmement, sur l'homme politique qui s'était discrédité pendant quatre ans de règne et avait très peu de chance d'être réélu pour un second mandat.
Dans presque tous les domaines des relations internationales, les pays préfèrent ne pas mener de négociations sérieuses et ne pas signer d'accords avec les dirigeants des États au cours de la dernière année de leur mandat. Un tel leader est appelé le "canard boiteux" en raison de la mise en œuvre douteuse des accords avec lui.
Le patriarche Bartholomée n'avait qu'à attendre les résultats de l'élection présidentielle en Ukraine et à prendre des mesures concrètes. Mais il a préféré négliger cette règle élémentaire des relations internationales et risquer un de ses principaux atouts - le respect des Églises locales orthodoxes. Il a pris un risque et a perdu.
La conséquence de la visite de Porochenko au Phanar fut que la Verkhovna Rada d'Ukraine adopta un appel au Patriarcat de Constantinople avec une demande d'autocéphalie. L'appel fut signé par le Président de l'époque, les parlementaires et les "hiérarques" du « patriarcat de Kiev » et de « l'église orthodoxe autocéphale ukrainienne » toutes deux  schismatiques. Les médias publièrent de fausses nouvelles prétendant que  dix évêques de l'Eglise Orthodoxe ukrainienne [canonique du Métropolite Onuphre] avaient apposé leur signature, mais seulement deux hiérarques ont confirmé l’avoir fait plus tard.
En réponse, le 22 avril, le Phanar a annoncé l'ouverture de la procédure d'octroi de l'autocéphalie à l'église en Ukraine.
Capture d'écran du site web du Patriarcat de Constantinople
Un message sur le site web du Patriarcat de Constantinople disait que son Synode, "ayant reçu de quelques personnalités ecclésiastiques et politiques représentant plusieurs millions d'Ukrainiens orthodoxes une demande d'autocéphalie, a décidé de rester en contact étroit avec d'autres Eglises orthodoxes sœurs afin de les informer et de les coordonner". En effet, les représentants du Phanar commencèrent à faire le tour des Églises locales. Et puis le Patriarcat de Constantinople commit une autre erreur.
Erreur 2
Il n'y eut pas d'accord sur la question de l'autocéphalie ukrainienne. Comme les phanariotes eux-mêmes le déclarèrent plus tard, ils n'étaient pas du tout intéressés par l'opinion des Églises locales sur la question ukrainienne, ils les ont simplement informés de la décision déjà prise. Qui pourrait aimer cela?
Le Patriarcat de Constantinople n’avait pas l'autorité pour accorder l'autocéphalie en Ukraine. Même aux yeux des partisans du Phanar, cette autorité semble discutable car, quoi qu'on en dise, l'Église orthodoxe ukrainienne canonique a plus de relations avec l'Église russe que l'Église de Constantinople. Et même le « patriarcat de Kiev » et « l'église orthodoxe autocéphale ukrainienne »  schismatiques, qui revendiquaient l'autocéphalie, n'avaient pas rompu avec elle, mais avec l’Eglise orthodoxe russe.
Dans ces conditions, quand la justesse des actions de Constantinople n'était pas évidente, il aurait dû coordonner ses actions avec les Églises locales, et pas seulement les informer. Le Phanar s'est avéré agir d'une manière très non-diplomatique, c'est le moins qu'on puisse dire.
Et bien sûr, un tel comportement des phanariotes ne pouvait que provoquer le rejet dans les Églises locales. Il est possible que Constantinople veuille vraiment coordonner ses actions, et pas seulement informer tout le monde, mais cela aurait pris beaucoup de temps. Mais le Phanar a manqué de temps parce qu'il a agi dans le cadre de l'agenda de Porochenko, qui avait besoin d'autocéphalie pour l'élection présidentielle de 2019.
Erreur 3
Après le début de la "procédure d'octroi de l'autocéphalie" par Constantinople, le 23 juin 2018, une délégation de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] conduite par le Chancelier de celle-ci, le métropolite Antoine (Pakanich), a visité Phanar afin de connaître les intentions des phanariotes et de les prévenir de possibles erreurs irréparables.
Après la rencontre, l’évêque Antoine a dit : "A plusieurs reprises il a été mentionné l'impossibilité de légaliser le schisme, la question du traitement devait être posée. Au sens figuré, parfois les médicaments n'aident pas, et maintenant nous sommes à la recherche de quelque chose qui aidera à unir nos frères, qui sont derrière la clôture de l'Eglise depuis longtemps, et nous voyons que le désir du patriarche de Constantinople, l'Eglise dont nous avons reçu le baptême, est d'aider dans ce domaine. Sa Sainteté le patriarche Bartholomée a déclaré qu'il ne voulait pas intervenir dans cette situation, mais qu'en tant que personne responsable et premier parmi les hiérarques égaux du monde orthodoxe tout entier, il voulait aussi aider à résoudre un problème très difficile, et nous voyons que cette ouverture découle de la recherche d'une décision basée sur nos règles canoniques, et non comme certains hauts responsables disent dans nos médias que le problème aurait été résolu.
En d'autres termes, le patriarche Bartholomée a assuré la délégation de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] qu'il n'agirait pas au détriment de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique]  et ne s'immiscerait pas dans les affaires ukrainiennes mais se comporterait exactement dans le sens inverse.
Cette tromperie est devenue encore plus évidente lors de la visite du Patriarche Cyrille au Phanar le 31 août 2018.
Les Patriarches Kirill et Bartholomée lors des négociations à Istanbul le 31.08.2018
Photo : AFP
Voici de brèves déclarations que les journalistes ont entendues du Patriarche Cyrille et du Métropolite Hilarion (Alfeyev) l'accompagnant :
L'ambiance était très bonne.
J'espère que nous continuerons à travailler ensemble pour rendre le monde meilleur.
Nous sommes simplement programmés pour l'interaction et la coopération.
Il n'y avait rien à la réunion qui produirait une sorte d'explosion dans la conscience.
L'entretien était très correct, une conversation entre les deux chefs des Eglises, qui sont conscients de la responsabilité de l'état de l'Orthodoxie Œcuménique.
Un échange de vues très fructueux.
Du début à la fin, la discussion a été très sincère et très fraternelle, nous avons quitté Constantinople avec un sentiment très lumineux.
Comme le Métropolite Hilarion l'a admis plus tard, le patriarche Bartholomée les a assurés de l'impossibilité de ce que le Phanar a fait par la suite et a donc commis l’erreur suivante.
Le patriarche Bartholomée a trompé à la fois les hiérarques ukrainiens et le Patriarche Cyrille. Tout mensonge aide à résoudre le problème actuel mais discrédite le menteur. Le Phanar a fait preuve d'astuce et de malhonnêteté, et ces qualités sont difficilement incluses dans la liste des vertus chrétiennes et sont peu susceptibles d'être inhérentes chez quelqu'un qui prétend être le "premier sans égal".
Erreur 4
En mai 2018, un événement que l'Église grecque et les médias proches de l'Église ont préféré minimiser l'importance a eu lieu aux États-Unis. Lors d'une cérémonie de remise des diplômes pour les étudiants du Collège grec et de l'École de théologie orthodoxe grecque Sainte-Croix de Boston, Efstathios Valiotis, un grand homme d'affaires et l'un des principaux sponsors de l'archidiocèse américain, a parlé publiquement dans son discours après avoir reçu le titre de docteur honoris causa de l'idée qui plane aux Etats-Unis - la séparation du patriarcat de Constantinople de l'archidiocèse.
Il a dit au Phanar : "Nous ne pouvons pas être contrôlés par un petit groupe de personnes qui se trouvent en Turquie, qui n'ont ni troupeau ni but, sans travail et avec un agenda différent. Que se passera-t-il en cas de conflit gréco-turc, qui aidera notre Église ?"
Le Patriarcat de Constantinople n'avait pas l'autorité d'accorder l'autocéphalie en Ukraine. Même aux yeux des partisans du Phanar, cette autorité semble discutable.
Valiotis proposa deux options pour résoudre le problème : soit l'autocéphalie complète de l'archidiocèse américain, soit le transfert du trône de Constantinople du Phanar aux Etats-Unis. Aucun des hiérarques et laïcs présents à la cérémonie n'a exprimé d'objection.
Dans ce contexte, l'effusion d'autocéphalie du Phanar en Ukraine est un catalyseur de sentiments autocéphales non seulement dans les autres Églises locales, mais aussi dans le patriarcat de Constantinople lui-même. Le temps nous dira si l'archidiocèse américain mettra en œuvre ou non le scénario de la séparation, mais en accordant l'autocéphalie en Ukraine, le patriarche Bartholomée a donné un très bon atout aux partisans de la séparation à l'étranger. Et c'est sa grosse erreur.
Erreur 5
L’erreur suivante du patriarche Bartholomée est l'intervention non seulement évidente, mais aussi provocante et claire du Département d'Etat américain dans l'octroi de l'autocéphalie en Ukraine.
Le représentant du département d'État, l'ambassadeur itinérant pour la liberté religieuse internationale, Sam Brownback, le secrétaire d'État adjoint aux affaires européennes et eurasiennes, A. Wess Mitchell, l'ancien ambassadeur des États-Unis en Ukraine et maintenant ambassadeur en Grèce, Jeffrey Payette, l'ancienne ambassadrice des États-Unis en Ukraine, Marie Yovanovitch et d'autres responsables américains, sans rien cacher, ont négocié directement la création de « l’église orthodoxe autocéphale [schismatique] » à Istanbul, Kiev et au Mont Athos, et avec les églises locales orthodoxes.
Sam Brownback et Jeffrey Payette avec Mgr Jerome II, archevêque de Grèce.
Photo : pravoslavie.ru
Ces visites et ces discussions ne pouvaient tout simplement pas passer inaperçues. En conséquence, il est devenu clair : premièrement, le projet de « l’église orthodoxe autocéphale [schismatique] » n'est pas religieux mais politique ; deuxièmement, il est créé dans l'intérêt des États-Unis ; et troisièmement, le Phanar n'est pas un décideur indépendant mais est contrôlé par le Département d'État américain. La question rhétorique est la suivante : le "premier sans égal" peut-il être gouverné par des fonctionnaires américains, dont la religion n'est nullement orthodoxe ?
Ignorant les demandes de la délégation de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique], le 7 septembre 2018, le Patriarche Bartholomée a envoyé ses exarques en Ukraine – l’évêque Daniel de Pamphylia (USA) et l’évêque Hilarion d'Edmonton (Canada) - et a ainsi commis une autre erreur.
Erreur 6
Le patriarche Bartholomée envoya des exarques sur le territoire canonique de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] sans le consentement de Sa Béatitude le Métropolite Onuphre de Kiev et ferma ainsi la possibilité des négociations avec l'Eglise orthodoxe ukrainienne. Le Phanar a clairement indiqué que dans le cas de l'autocéphalie ukrainienne, il s'appuierait sur l’église schismatique mais pas sur l'Église canonique. Et ce n'est pas seulement une erreur, mais une grosse erreur.
Le Phanar a d'abord déclaré que toutes ses actions en Ukraine visaient à unir les fidèles orthodoxes. Et même avant le Tomos, avant la décision de revenir à sa structure, la métropole de Kiev de 1686, Constantinople a montré à tout le monde qu'il traiterait avec les schismatiques et il n'était pas question d'unification avec l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique]. Ceci est prouvé non seulement par l'envoi des exarques sans être d'accord avec Sa Béatitude Onuphre, mais aussi par les personnalités des exarques eux-mêmes.
Si les phanariotes étaient un peu plus intelligents, ils enverraient en Ukraine des anciens nobles grecs qui auraient une certaine autorité pour les évêques de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique], sinon pour persuader l'Église canonique de participer à l'entreprise de l’autocéphalie, au moins pour essayer de gagner d'autres évêques canoniques à leur cause.
Mais au lieu de cela, le patriarche Bartholomée a envoyé deux jeunes émigrants d'Ukraine occidentale, issus des structures américaines de l'église autocéphale ukrainienne, qui sont aussi hostiles à l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] et aussi tolérants que possible envers les schismatiques.


Mgr Hilarion, évêque d'Edmonton, et
 Mgr Daniel, archevêque de Pamphylie.
Photo : vk.com
Pour les évêques de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] qui, peut-être, envisageaient de se joindre au projet de la nouvelle « église », les personnalités de ces exarques ont servi de signal clair : obéissez au patriarche Bartholomée - et vous serez dirigés par de telles figures.
Erreur 7
Le 11 octobre, le Synode du patriarcat de Constantinople prit une décision finale sur la question ukrainienne. Et c'était juste une énorme erreur. Cette décision comporte cinq points :
1. Accorder l'autocéphalie à l'Église en Ukraine (église qui à l'époque n'existait pas du tout).
2. Restaurer la stavropégie de Constantinople en Ukraine, c'est-à-dire prendre les principaux monastères et temples dans sa soumission directe.
3.  Accepter en communion les schismatiques du « patriarcat de Kiev et de « l’église autocéphale ukrainienne [schismatique] sans repentir.
4. Remettre la métropole de Kiev de 1686 dans la structure du Patriarcat de Constantinople.
5. Exhortez tout le monde à éviter la violence.
Le Phanar ne s'est même pas donné la peine de justifier ses décisions, d'indiquer les motifs de telles actions.
La décision d'accepter les schismatiques dans la communion et de reconnaître leurs "sacrements", y compris les "ordinations" après 26 années consécutives de déni d'une telle possibilité, comme en témoignent de nombreux documents [de Constantinople !], semble particulièrement cynique.
Mais le plus stupide, c'est le retour de la métropole de Kiev. Le fait n'est pas seulement que l'Eglise russe aurait violé quelque chose, ni même que le Phanar croit qu'il n'a rien accordé à personne, mais que la métropole de Kiev telle qu'elle était il y a 300 ans n'existe plus aujourd'hui. Inverser l'histoire ne relèvera probablement pas de la compétence du patriarcat de Constantinople.
Par la décision du 11 octobre 2018, Constantinople s'est fait la risée de tous et a montré que non seulement les paroles de l'Évangile sur la nécessité de se repentir des péchés, non seulement les témoignages des saints Pères sur l'impossibilité de la communion avec les schismatiques, mais ses propres documents, modernes et anciens, ne signifient rien pour elle.
Le "premier sans égaux" peut-il dire une chose aujourd'hui et une autre demain ?
Erreur 8
Après les décisions absurdes du Synode de Constantinople du 11.10.2018, le patriarche Bartholomée a signé un accord de coopération avec le Président de l'Ukraine, qui a été immédiatement classé. Et cela a immédiatement conduit à douter de l'honnêteté des intentions tant du côté du Phanar que du côté ukrainien.
Trois mois plus tard, le document a été déclassifié. Le point principal était que le Phanar donnait l'autocéphalie en échange de la stavropégie. Le texte se lit comme suit : L'Ukraine devrait faciliter <...> l'acquisition, conformément à la législation ukrainienne, par la mission du patriarcat oecuménique en Ukraine, à savoir la "Stavropégie du Patriarcat oecuménique en Ukraine", des bâtiments et locaux, autres biens nécessaires au fonctionnement de la Mission de "Stavropégie du patriarcat oecuménique en Ukraine" Mission (article 3 de l'Accord).
C'est devenu clair : premièrement, le projet de « l’église orthodoxe ukrainienne [schismatique] » n'est pas religieux mais politique ; deuxièmement, il est créé dans l'intérêt des États-Unis ; et troisièmement, le Phanar n'est pas un décideur indépendant mais est contrôlé par le Département d'État américain.
Le président de la Verkhovna Rada de l'époque, Andrei Parubiy, a déclaré que les "propriétés" ont été discutées : "Selon les historiens, le Patriarcat œcuménique comptait à différentes époques jusqu'à 20 stavropégies différentes (une église ou un monastère exempté de la juridiction de l'évêque local et directement soumis à l'autorité suprême de l'église territoriale, le patriarche ou Synode - Ed.) sur son territoire canonique d'Ukraine-Rus'. La plus célèbres d'entre eux est la Dormition de la Laure de Kiev-Pechersk, la Fraternité de Dormition de Lviv, le Monastère de Transfiguration de Mejigorye, la Fraternité de l'Epiphanie de Kiev, le Monastère Maniava, etc. L'église Saint-André reste la propriété de l'Etat, je le souligne, nous restaurons la justice historique et rendons la stavropégie de l'Eglise Mère, le patriarcat Œcuménique de Kiev."
La stupidité du contrat est qu'il ne peut pas être exécuté en principe - il est en contradiction avec la Constitution et les lois de l'Ukraine. Et même si Porochenko a accepté de se soucier de la Constitution, il n'a tout simplement pas eu le temps de le faire avant les élections présidentielles. Et il avait très peu de chance de gagner les élections.
En outre, le patriarche Bartholomée a montré par cet accord qu'il n'était pas du tout désintéressé et a accordé le Tomos non pas pour la "paix de l'Eglise" mais pour des biens matériels très concrets.
Erreur 9
L’erreur tactique suivante du patriarche Bartholomée est qu'il a permis de facto le double pouvoir dans l'église schismatique. Lors du soi-disant "Concile d'unification" à Kiev le 15 décembre 2018, il a été décidé que « l'église orthodoxe ukrainienne [schismatique] » aurait deux primats : l'externe - Epiphane Doumenko "métropolite" - et l'interne – le "patriarche honoraire" Philarète Denisenko. Ainsi, une bombe à retardement a été posée sous « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique], qui a explosé dès que Porochenko a perdu l'élection présidentielle.
Presque immédiatement après l'annonce des résultats des élections, l'inimitié soigneusement dissimulée des deux chefs de l’église schismatique a commencé à se manifester. La démarche du "patriarche honoraire", son retrait démonstratif de « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique],  et l'accusation du patriarche Bartholomée disant qu'au lieu de créer une église autocéphale en Ukraine, il avait créé « l'église orthodoxe ukrainienne » contrôlée par le Phanar, a prouvé une fois encore l'aventurisme de tout le projet de « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique] et l'absence de scrupulosité de ses participants.
Erreur 10
Le 8 août, le président nouvellement élu Vladimir Zelensky a rencontré le patriarche Bartholomée à Istanbul dans le cadre d'une visite de deux jours du dirigeant ukrainien en Turquie. Selon le site web "Strana.ua", l'initiateur officiel de la réunion était la partie ukrainienne. Cependant, le Département d'Etat américain était le véritable client de l'événement, ce qui était très important pour démontrer la continuité de la politique religieuse sous les nouvelles autorités ukrainiennes.
La réunion s'est déroulée dans le calme mais sans résultat. A la suite de quoi, Zelensky a dit qu'"ils avaient parlé de tout" : du Donbass, de la Crimée, de la situation en Ukraine, etc. Le seul sujet que le président ukrainien n'a pas mentionné était « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique de Constantinople]. Ils n'en ont pas parlé ? Ou bien Zelensky a-t-il préféré ne pas le mentionner dans la discussion ?
Mais l'erreur du Patriarche Bartholomée n'est pas celle-ci. Il n'est pas clair pourquoi l'information sur la prétendue signature d'une déclaration conjointe par le patriarche et le Président a été diffusée lors de la réunion. Ils ont même précisé le sujet de cette déclaration - l'écologie, ce qui en soi semble étrange. Avec la tragédie que le Phanar a provoquée en Ukraine, il ne se préoccupe plus que de l'écologie ?


Rencontre entre Vladimir Zelensky et le patriarche Bartholomée à Istanbul le 08.08.2019
Photo : APE
Cependant, ici, le Patriarche Bartholomée a réussi à faire une erreur. Il commença à insister pour que le texte de la déclaration confirme les obligations que Porochenko avait assumées devant le Phanar.
"Strana.ua" cite sa source dans les cercles religieux : "Les Grecs se sont mis d'accord avec Kiev sur un document de nature purement environnementale, et y ont ensuite apporté un certain nombre d'ajouts importants. Parmi eux figurent le consentement de Vladimir Zelensky à assurer la continuité de la politique de Petro Porochenko dans le domaine religieux, la reconnaissance du rôle clé du Tomos dans le développement de la sphère ecclésiastique en Ukraine, la reconnaissance par le Président de « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique] comme seule Eglise orthodoxe canonique d'Ukraine".
Naturellement, Zelensky a refusé de signer et a dit une fois de plus qu'il n'interviendrait pas dans les affaires de l'Eglise. Pourquoi le patriarche Bartholomée s'est-il exposé comme un politicien si myope et si incompétent ? Pourquoi était-il nécessaire d'imposer à Zelensky un document délibérément inacceptable pour lui ? Ils auraient pu laisser des phrases insignifiantes sur l'écologie - et il y aurait eu au moins quelque chose.
Probablement, en y regardant de plus près, on peut compter un plus grand nombre d'erreurs, mais ce qui précède est suffisant pour comprendre que "la gestion de l’Orthodoxie" ne peut en aucun cas ressembler à l’action du patriarcat de Constantinople en relation avec les affaires ukrainiennes. La seule chose que le Phanar a accomplie au cours de l'année écoulée est de se discréditer aux yeux du monde orthodoxe. Eh bien, en cela le patriarche Bartholomée s'est avéré être vraiment "le premier sans égal".
Version française Claude Lopez-Ginisty
D’après

NB: Pour les lecteurs italophones du blog, une version dans la langue de Dante a été publiée par le site orthodossoatorino

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