Père Vladimir Guettée
La papauté moderne condamnée par le pape saint Grégoire le Grand(VI).
Depuis plusieurs années il est évident qu’à
la tête du Patriarcat de Constantinople se dressent des hommes ayant un désir
malsain d’étendre leur prérogatives juridictionnelles sur l’ensemble de
l’orthodoxie.
Les derniers événements en Ukraine nous
montrent un passage à l’acte évident.
Ce désir d’étendre son autorité tous
azimuts a déjà infecté le corps de l’Église au cours des siècles et plus
particulièrement à Rome, avec les conséquences que nous connaissons depuis
1054.
C’est paradoxalement à Rome qu’un saint
pape, Grégoire le Grand, avait diagnostiqué cette maladie spirituelle qui est
de se prétendre de droit divin « chef » (tête) de l’Église,
infaillible, vicaire du Christ, etc..
Nous vous livrons ici quelques traductions
et commentaires réalisés par le P. Vladimir Guettée en 1861 (prêtre
catholique-romain français converti à l’orthodoxie)
*
Au commencement de son épiscopat, Grégoire
adressa une lettre de communion aux patriarches Jean de Constantinople, Euloge
d'Alexandrie, Grégoire d'Antioche, Jean de Jérusalem, à Anastase, ancien
patriarche d'Antioche, son ami;
S'il se fut considéré́ comme le chef et le souverain de l'Église, s'il
eut cru qu'il l'était de droit divin,
il se fut certainement adressé aux patriarches comme à des subordonnés, on
trouverait, dans cette circulaire, quelques traces de sa supériorité́. Il en
est tout autrement. Il s'y entend longuement sur les devoirs de l'épiscopat, et il ne songe même pas a parler des droits
que lui eut conférés sa dignité́. Il y insiste particulièrement sur le devoir,
pour l'évêque, de ne point se laisser préoccuper par le soin des choses extérieures,
et il finit sa circulaire en faisant sa profession de toi, afin de prouver
qu'il était en communion avec les autres patriarches, et, par eux, avec toute
l’Église.( S. Grégoire, épître 25, livre 1)
L'occasion de ces lettres fut l'ambition du
patriarche Jean de Constantinople, qui prétendit que sa ville épiscopale étant
devenue la capitale de l'empire, il devait être reconnu universellement comme le premier évêque de l'Église. À cette fin,
il inventa le titre de patriarche œcuménique
ou universel et se l'attribua. La
première idée d'un pouvoir central et universel dans l'Église est donc venue de
Constantinople ce fut de Rome que s'éleva la première opposition contre cette
prétention ambitieuse, et de la part d'un des plus grands papes qui se soient
assis sur la chaire apostolique de Rome.
Voici ce que dit saint Grégoire au
patriarche Jean :
« Réfléchissez donc, je vous en prie,
que, par cette présomption téméraire, la paix de l'Église entière est troublée,
et que vous êtes ennemi de la grâce qui a
été́ donnée à tous en commun. Plus vous croîtrez en cette grâce, plus vous
serez humble à vos yeux vous serez d'autant plus grand que vous serez éloigné́
d'usurper ce titre extravagant et orgueilleux. Vous serez d'autant plus riche
que vous chercherez moins à dépouiller vos frères à votre profit. Donc, très
cher frère, aimez l'humilité́ de tout votre cœur; c'est elle qui maintient la
concorde entre les frères, et qui
conserve l’unité dans la sainte Église universelle.
Qui, dites-le-moi, je vous prie, qui
imitez-vous par ce titre pervers, si ce n’est celui qui, méprisant les légions
des anges qui entaient ses compagnons, s'efforça de monter au faite pour n'être
soumis à personne et être seul au-dessus des autres. Qui dit : Je monterai dans le ciel ; j’élèverai
mon trône au-dessus des astres du ciel ; je placerai mon siège sur la
montagne de l’alliance, dans les flancs de l’Aquilon. Je monterai au-dessus des
nuées : je serai semblable au Très-Haut ?
Que sont vos frères, tous les évêques de
l'Église universelle, si ce n'est les astres du ciel ! Leur vie et leur
enseignement brillent, en effet, à travers les péchés et les erreurs des
hommes, comme les astres à travers les ténèbres de la nuit. Lorsque, par un
titre ambitieux, vous voulez vous élever au-dessus d'eux, et rabaisser leur
titre en le comparant avec le vôtre, que dites-vous, si ce n'est ces
paroles : Je monterai dans le
ciel ; j’élèverai mon trône au-dessus des astres du ciel? Tous les
évêques ne sont-ils pas les nuées qui versent la pluie de l'enseignement, et
qui sont sillonnées par les éclairs de leurs bonnes œuvres ?
Votre Fraternité́, en les méprisant, en s'efforçant
de les mettre à ses pieds, que dit-elle, si ce n'est cette parole de l'antique
ennemi : Je monterai au-dessus des
nuées Pour moi, quand je vois tout cela à travers mes larmes, je
crains les jugements de Dieu; mes larmes coulent avec plus d'abondance, mes gémissements
débordent de mon cœur, de ce que le seigneur Jean, cet homme si saint, d'une si
grande abstinence et humilité́, séduit par les flatteries de ses familiers, a
pu s'élever jusqu'à un tel degré́ d'orgueil, que, par le désir d'un titre
pervers. il s'efforce d'être semblable à celui qui, en voulant être
orgueilleusement semblable à Dieu, perdit la grâce de !a ressemblance divine
qui lui avait été́ accordée et qui perdit la vraie béatitude, parce qu’il
ambitionna une fausse gloire. »
Que celui qui a des oreilles pour entendre,
qu’il entende.
Compilation J.-L. D.
Source : bnf.fr
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire