Dimanche 17 avril. Aujourd’hui à trois heures du matin, le
père Sébastien s’est senti très mal. Il a fait appeler le père Alexandre, s’est
confessé et a communié. Après le déjeuner, le père Sébastien m’a fait appeler.
Je suis entrée et je me suis agenouillée devant le lit. Il m’a supplié :
– Aidez-moi. Je
me sens très mal. Je souffre beaucoup…
Mon cœur se
déchirait, mes yeux se voilèrent. Je lui demandai où il avait mal. Il m’indiqua
ses poignets bandés : à cause des perfusions et des piqûres, on ne
trouvait plus les veines facilement. Je le rassurai : je vais vous faire
une piqûre et cela ira mieux.
Le père Sébastien
m’avoua alors :
– Ce n’est pas la souffrance physique
qui est la plus douloureuse. Je souffre, car mon âme est tourmentée.
– Pourquoi ?-- demandai-je
– Pensez-vous que
la mort soit une plaisanterie ? J’ai sur la conscience beaucoup de péchés
et peu de bonnes actions.
– Mais vos péchés ne seront pas scrutés
au microscope. Et vos bonnes actions sont suffisamment nombreuses pour remplir
une mer totalement. Personnellement vous m’avez sauvé trois fois de la mort. Et
combien d’autres encore ?
– Mais qu’ai-je
fait ? poursuivit-il. Je voulais mener une vie ascétique, cachée. Rendre
grâces à Dieu. Cela est une grâce, un don de Dieu. Pour ma part, je n’ai aucun
mérite. L’homme vit, et souvent de façon impardonnable, sans ascèse. Et moi, qu’ai-je
donné à Dieu ?
– Mon père, vous
dites cela pour moi ?
– Non je le dis pour moi-même, bien
qu’évidemment cela concerne tout le monde. Personne n’évitera ce grand passage.
Tout ici-bas est éphémère. L’homme doit consacrer sa vie terrestre à aimer et à
faire le bien, c’est pourquoi il doit supporter patiemment la souffrance, pour
accéder à la joie et la vie éternelle et non aux tourments.
Et voilà, tu dis
que j’ai vécu en faisant le bien ; mais ensuite j’ai péché. L’homme se
trompe cruellement et cela ne lui sera pas pardonné. Il perdra tout ce qu’il
avait acquis. J’ai beaucoup souffert, j’ai porté ma croix qui n’était pas
légère ; la vie monastique est difficile. Cependant, parfois je me suis
plaint et cette unique plainte ôte mon mérite. Et au lieu de la joie, l’âme
reçoit le tourment.
– Mon père, je comprends quelle est la
force du repentir. Et je comprends également que vous dites tout ceci pour moi.
Merci pour tout ce que vous avez fait pour moi. Pardonnez-moi mon indignité,
mon ingratitude, ma désobéissance. Dites-moi comment je devrais vivre.
Le père Sébastien
s’est-tu. Puis il a dit :
– Tu demandes comment mener ta
vie ? Vis comme tu le fais. Nous sommes tous pécheurs. Garde-toi seulement
de commettre un grand péché.
Ensuite, il posa
sa main sur ma tête et me bénit trois fois. Puis il ajouta :
– Voilà, nous
avons discuté ensemble comme tu me l’avais demandé. Que le Seigneur soit avec
toi !
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