"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 4 janvier 2012

Le deuil de Dieu



Malgré la foule funèbre et noire
Ils partent irrémédiablement seuls
Nos amis morts
Sans offices ni prières

La compagnie des vivants
Les abandonne au bord de la fosse

Une pelletée de terre
Un discours qui sonne faux
Et les futurs défunts repartent
Pour vite oublier cette tristesse
Et s'ancrer dans une vie
Qui finira malgré tout
Dans cette horreur qu'ils fuient

Dans leur enfance lointaine
Ils connaissaient l'école et l'Eglise
La terre et le Ciel

Le monde alors ne s'arrêtait pas
A la béance de glèbe
Qui enferme le cercueil
Dans son linceul brun d'oubli

Il y avait la porte du cœur
Et l'huis merveilleux de l'âme
Qui permettaient l'espérance
Et magnifiaient l'existence

La beauté dérisoire des fleurs
Simule à présent une cérémonie
Autour de mots vides et convenus
Mais le Nom Ineffable
Ne sera pas prononcé

Il faut respecter
Le refus obstiné de Dieu
Que manifestent les survivants

Nos lèvres resteront closes
Recouvertes du suaire noir
Du silence des mots
Du mutisme douloureux
Des paroles de la terre et du cœur
Qui montent vers le Ciel

Nous serons muets
Par simple respect
Malgré la clameur orante
Qui déborde de notre âme

Un insondable poids macabre
Plombe les visages
Et emprisonne les pensées
Dans l'horreur du néant à venir
Qu'ils assignent à toute âme en ce monde

Ce serait infamant à présent
Même au moment où la détresse
Vrille les cœurs d'une douleur lancinante
D'admettre qu'une prière s'impose

L'ami mort s'en va
Lent et immobile à jamais
Dans son pays d'oubli
A l'horizon sans fin de tristesse
De silence pesant
Et de regret

Seigneur Christ miséricordieux
Accorde à nos morts qui T'ont perdu
Dans l'orgueil de la vie
Et la bêtise du monde vain
L'entrée dans Ton Royaume

Reçois pour eux de nos lèvres indignes
Nos prières muettes
Le Psautier de nos larmes
L'encens de nos soupirs
Et accueille-les tendrement
Dans le Sein d'Abraham

Et la foule hébétée de sombre chagrin
Porte sans le savoir 
Le deuil immense et tragique
De Dieu qui reste attentif
A la porte des cœurs désespérément clos


Claude Lopez-Ginisty

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