Vyatcheslav Klykov (sculpteur), hiéromoine Tikhon (Chevkounov)
et Vladyka Basile
Vladyko
Basile est apparu dans ma vie et dans la vie de mon ami, le sculpteur
Viatcheslav Mikhaïlovitch Klykov, en raison d'une rencontre étonnante et
inattendue. C'est arrivé en 1987, juste avant le 17 Juillet, anniversaire de la
mort de la famille du tzar. Viatcheslav Mikhaïlovitch et moi-même avions voulu
auparavant faire servir une pannikhide pour le repos de Sa Majesté Impériale,
mais au cours des années précédentes, c'était impossible, et l'idée même
représentait un problème insoluble. Aller dans une église à Moscou et demander
simplement à un prêtre un office de pannikhide pour le tzar Nicolas II était
clairement impensable. Tout le monde savait que la nouvelle se répandrait, et
la moindre sanction à laquelle ce prêtre courageux pourrait s'attendre pour un
tel acte serait le renvoi de l'Eglise. Avoir des offices dans une maison privée
était impraticable, car beaucoup d'amis auraient voulu y assister.
Il se
trouve que pendant ces jours Viatcheslav Mikhaïlovitch Klykov venait de
terminer la pierre tombale monumentale pour Alexandre Prerevet et André
Oslyabya, deux célèbres guerriers et moines du grand habit qui furent
envoyés se battre pour l'armée victorieuse de Dmitri Donskoï à la bataille
du Champ de Koulikovo en 1380, dans laquelle la Russie se libéra du joug des
Tatars. Après une longue confrontation avec les autorités soviétiques locales
une pierre tombale fut finalement placée sur la tombe de ces moines
héroïques dans l'ancien monastère Simonov, le site de l'usine Dynamo célèbre à
l'époque soviétique.
Et
soudain, j'ai eu une pensée: puisqu'il avait déjà eu la promulgation d'une approbation
officielle pour sanctifier la pierre tombale pour Peresvet et Oslyabya, nous
pourrions insérer une pannikhide pour la famille du Tzar pendant le service. Ils
enverraient certainement quelqu'un du KGB pour nous espionner, mais les
espions ne seraient pas susceptibles de comprendre les subtilités de la cérémonie
commémorative en slavon d'église de toute façon, pour eux, ce serait tout simplement un long office ecclésial.
Viatcheslav
Mikhaïlovitch aima cette idée. Maintenant, il n'y avait qu'un seul petit
problème: essayer de trouver un prêtre assez courageux pour être prêt à
officier le service commémoratif. Parce qu'il y avait, après tout, des risques
très graves. Peut-être pas les plus grands risques, mais des risques tout de même.
Et si l'un des espions et mouchards comprenait ce que c'était que nous avions
l'intention de faire... nous avons préféré ne pas même penser à ce sujet. D'un
autre côté, nous ne voulions pas que l'un des prêtres que nous
connaissions ait des ennuis.
Et puis, une de mes
connaissances m'a dit que l'évêque Basile Rodzianko venait d'arriver à Moscou venant d'Amérique. Beaucoup d'entre nous avaient entendu parler de cet évêque,
et certains d'entre nous connaissait même ses émissions de radio par les "voix
de l'ennemi." En y réfléchissant, nous sommes arrivés à la
conclusion que nous ne serions jamais en mesure de trouver un meilleur candidat
pour servir la pannikhide pour la famille impériale.
Tout d'abord c'était un émigré russe blanc. Deuxièmement, puisqu'il était citoyen étranger, le risque qu'il encourait, serait moindre que celui auquel nos prêtres autochtones devraient faire face. Le KGB ne pourrait pas faire quoi que ce soit contre lui-probablement. Au minimum, nous pensions qu'il lui serait plus facile pour lui de se sortir de n'importe quelle situation délicate, car après tout il était américain. C'est ce que nous nous disions. Enfin, comme on le disait dans le vers un peu cynique mais populaire d'un poème de cette époque: " Grand-père est vieux et il s'en fiche." En fait quand nous fûmes au pied du mur, nous n'avions de toute façon aucun autre candidat.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Archimandrite Tikhon
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