S’adressant à l’archevêque d’Athènes Jérôme par une lettre datée du 18 novembre 2016 publiée ces derniers jours dans les médias grecs, le patriarche œcuménique menace de cesser la communion avec deux hiérarques de l’Église de Grèce qui critiquent le Concile de Crète, à savoir les métropolites Ambroise de Kalavryta et Aigialea et Séraphim du Pirée. Nous publions ci-dessous la traduction intégrale de cette lettre :
« Votre Béatitude l’Archevêque d’Athènes et de toute la Grèce, Frère très aimé et affectionné dans le Christ Dieu et concélébrant de Notre Humilité, seigneur Jérôme, Président du Saint-Synode de l’Église de Grèce, embrassant fraternellement Votre vénérable Béatitude, nous vous saluons avec une joie extrême.
Il est confessé par tous que notre Sainte Église orthodoxe, l’Église, Une, Sainte, Catholique et Apostolique, se prononce et décide, pour se qui concerne son dogme et son administration, lors des saints Conciles, locaux, élargis, Majeurs ou Grands et Saints, et des Conciles œcuméniques. Quant aux décisions conciliaires prises par l’invocation du Saint-Esprit et en Lui, elles constituent une seule voix, comme saint Chrysostome le déclare en écrivant qu’ « il convient qu’il y ait toujours une seule voix dans l’Église » (Homélies sur la Ière épître aux Corinthiens 36, PG 61, 3315).
Ce principe ecclésiologique et canonique de la consultation et de la décision conciliaires étant la pierre d’angle dans la vie, la mission salvatrice, et le témoignage de notre Église orthodoxe dans le monde, nous communiquons avec Votre Très aimée et Très chère Béatitude et avec la très sainte Église de Grèce et, eu égard à notre responsabilité de Patriarche œcuménique et Président du Saint et Grand Concile qui s’est réuni en Crète, ainsi que gardien du dogme et de l’ordre canonique de l’Église d’Orient, nous attirons votre attention sur notre sérieuse préoccupation personnelle et celle du Synode de l’Église-Mère réuni autour de nous.
Des informations émanant de différentes sources d’information parviennent chaque jour à notre Patriarcat œcuménique et à Notre Humilité personnellement, selon lesquelles le protopresbytre Théodore Zisis [professeur émérite de la Faculté de théologie de Thessalonique, ndt] avec les clercs et laïcs partageant ses opinions, atteignant par l’internet et les divers moyens d’information les autres Églises orthodoxes sœurs, appellent les frères Primats et pasteurs et particulièrement le pieux peuple orthodoxe, à se rebeller contre et à mettre en doute les décisions du saint et grand Concile de notre Église orthodoxe qui s’est réuni avec bénédictions et succès en Crète, et durant lequel la contribution de Votre très chère Béatitude et de la délégation de la très sainte Église de Grèce a été constructive et utile.
Comme si cette corruption des consciences et la provocation de scandales par cette œuvre impie de ces nombreux clercs et de laïcs dans la juridiction de la très sainte Église de Grèce ne suffisait pas, ces informations, non démenties à ce jour, mentionnent que des délégations dirigées par le clerc susmentionné, a visité les très saintes Églises de Bulgarie et de Géorgie, ainsi que l’éparchie ecclésiastique de Moldavie [c’est-à-dire l’Église orthodoxe de Moldavie, auto-administrée au sein du Patriarcat de Moscou, ndt], où elle en a soulevé le plérôme, tout en étant malheureusement reçue par les frères Primats et hiérarques desdites Églises. En outre, selon cette information, ce groupe s’est présenté lui-même pendant sa présence en Géorgie comme y transmettant la conscience de l’Église de Grèce.
Votre Béatitude et le Saint Synode de la très sainte Église de Grèce approuvent aussi, assurément, que les choses diffusées et propagées à dessein et de façon scandaleuse par ces clercs et laïcs constituent, selon les paroles de saint Basile le Grand, « … les poisons des âmes (…) et que ces cerveaux… » des personnes mentionnées « … crient, pleins d’imagination provoquée par leur passion » (Lettre 210 aux premiers citoyens de Néocésarée P.G. 32,777Α). En outre « … diviser l’Église, se tenir dans des dispositions querelleuses, faire naître des dissensions, se priver constamment soi-même du concile [il s’agit ici du Concile de Nicée, ndt] : voilà ce qui est impardonnable, digne d’accusation et puni d’une grande peine » (St Jean Chrysostome, Contre les Juifs 3, PG 48,872).
Malheureusement, le groupe connu constituant le front contre l’Église canonique et les décisions du Saint et Grand Concile réuni en Crète est renforcé également par des frères hiérarques de la très sainte Église de Grèce, comme par exemple les très saints métropolites de Kalavryta et Aigialea Mgr Ambroise et du Pirée Mgr Séraphim, et ce au moyen d’écrits rédigés à temps et à contretemps, avant et après la convocation du Grand Concile, ainsi que par leur parole inconsidérée à tout sujet. Ceux qui agissent de cette façon oublient assurément que « ce qui a été pensé et décidé conciliairement est préférable et supérieur aux jugements portés individuellement » (Jean de Crète, Réponses à Constantin Cabasilas, archevêque de Dyrrachion, Ralli et Potli, Concordance des divins et saints canons », tome V, p. 403).
Aussi, nous prions Votre Béatitude et le Saint-Synode de l’Église de Grèce qui ont participé au Saint et Grand Concile de Crète et qui ont co-décidé et co-signé tous les textes conciliaires, de prendre, en application de la décision de ce Concile, selon laquelle ces textes sont contraignants pour tous les fidèles orthodoxes, clercs et laïcs (cf. Règlement de l’organisation et du fonctionnement du Saint et Grand Concile de l’Église orthodoxe, article 13, paragraphe 2), les mesures appropriées et de procéder aux recommandations nécessaires aux clercs mentionnés et aux dirigeants concrets de ce groupe, afin qu’ils cessent d’agir de façon anti-ecclésiale et anti-canonique ainsi que de scandaliser les âmes « pour lesquelles le Christ est mort » et de provoquer des problèmes dans l’Église orthodoxe unie. Sachant tous bien que « rien ne provoque la colère de Dieu comme le fait de diviser l’Église » (St Jean Chrysostome, Sur l’épître aux Éphésiens, PG 62,85), comme cela se produit malheureusement par la conduite des personnes mentionnées, nous n’avons aucun doute que Votre Béatitude et le Saint-Synode de la très sainte Église de Grèce agirez comme il le faut, selon l’acribie canonique, et que vous procéderez aux recommandations et aux exhortations ecclésiastiques aux clercs et laïcs mentionnés, afin qu’ils ne donnent plus lieu à des « scandales », et ce sous menace d’application, s’ils ne reviennent pas à la raison, des sanctions prévues par les divins et saints canons, pour la guérison des meurtrissures provoquées par leur conduite dans le corps de l’Église.
Aussi, nous supplions chaleureusement Votre Béatitude afin qu’elle attire particulièrement l’attention des frères hiérarques de la très sainte Église de Grèce qui ont provoqué l’agitation dans le peuple de Dieu par leurs actions, comme les métropolites susmentionnés de Kalavryta et Aigialea, et du Pirée, déclarant que s’ils ne reviennent pas eux, le Patriarcat œcuménique fera face au problème créé, par la cessation de la communion ecclésiastique et sacramentelle avec eux, comme portant atteinte à la responsabilité et au devoir de tous les Pasteurs orthodoxes envers la sauvegarde de l’unité, de la paix et du témoignage unique de l’Église orthodoxe.
Dénonçant ce qui précède avec peine dans l’âme et douleur dans notre cœur, avant que cette œuvre impie, outrepassant le droit de liberté d’expression et de critique constructive, prenne des dimensions plus grandes et difficiles à guérir, nous nous en remettons, pour ce qui a été dit, à la conscience de Votre Béatitude bien-aimée et celle de la vénérable Hiérarchie de l’Église de Grèce, et vous prions d’agréer l’expression de notre profond amour dans le Seigneur et de notre hommage approprié.
Le 18 novembre 2016
Le frère aimé en Christ de Votre respectée Béatitude,
Bartholomée de Constantinople »
et orthodoxie.com
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