"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 6 novembre 2013

Père Stephen Freeman: Ce que voulait dire saint Séraphim


St. Seraphim of Sarov


"Acquiers l'Esprit de Paix et mille âmes autour de toi seront sauvées." C'est peut-être la citation la plus célèbre du grand saint russe, Séraphim de Sarov. Beaucoup de ses icônes portent ces paroles. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui n'aimait pas cela. D'autre part, je pense qu'il y a beaucoup de gens qui ne le comprennent pas. Et comprendre ce qu'il voulait dire, peut vous emmener au cœur même de l'Orthodoxie.

"Acquérir l'Esprit de paix," fait penser à quelque chose de merveilleux, et la plupart d'entre nous suppose que c'est le fruit de longues années de stricte pratique monastique de ce grand saint. Sans doute beaucoup de dons de saint Séraphim se sont manifestés de cette manière puissante, en raison de ses années de silence et de prière.

Mais sa déclaration sur l'acquisition de l'Esprit de Paix, n'est pas aussi compliquée ou mystérieuse que certains pourraient le penser.

À bien des égards, c'est simplement une extension de la parabole évangélique des talents:


Il en sera comme d'un homme qui, partant pour un voyage, appela ses serviteurs, et leur remit ses biens.
Il donna cinq talents à l'un, deux à l'autre, et un au troisième, à chacun selon sa capacité, et il partit.
Aussitôt celui qui avait reçu les cinq talents s'en alla, les fit valoir, et il gagna cinq autres talents.
De même, celui qui avait reçu les deux talents en gagna deux autres.
Celui qui n'en avait reçu qu'un alla faire un creux dans la terre, et cacha l'argent de son maître.
Longtemps après, le maître de ces serviteurs revint, et leur fit rendre compte.
Celui qui avait reçu les cinq talents s'approcha, en apportant cinq autres talents, et il dit: Seigneur, tu m'as remis cinq talents; voici, j'en ai gagné cinq autres.
Son maître lui dit: C'est bien, bon et fidèle serviteur; tu as été fidèle en peu de chose, je te confierai beaucoup; entre dans la joie de ton maître.
Celui qui avait reçu les deux talents s'approcha aussi, et il dit: Seigneur, tu m'as remis deux talents; voici, j'en ai gagné deux autres.
Son maître lui dit: C'est bien, bon et fidèle serviteur; tu as été fidèle en peu de chose, je te confierai beaucoup; entre dans la joie de ton maître.
Celui qui n'avait reçu qu'un talent s'approcha ensuite, et il dit: Seigneur, je savais que tu es un homme dur, qui moissonnes où tu n'as pas semé, et qui amasses où tu n'as pas vanné;
j'ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre; voici, prends ce qui est à toi.
Son maître lui répondit: Serviteur méchant et paresseux, tu savais que je moissonne où je n'ai pas semé, et que j'amasse où je n'ai pas vanné;
il te fallait donc remettre mon argent aux banquiers, et, à mon retour, j'aurais retiré ce qui est à moi avec un intérêt.
Otez-lui donc le talent, et donnez-le à celui qui a les dix talents.
Car on donnera à celui qui a, et il sera dans l'abondance, mais à celui qui n'a pas on ôtera même ce qu'il a.
Et le serviteur inutile, jetez-le dans les ténèbres du dehors, où il y aura des pleurs et des grincements de dents.
(Matthieu 25:14-30).


Cette parabole très familière est assez bizarre. Le Christ fait allusion à quelque chose dans l'imagerie des "talents" d'argent (ou d'or). Quoi qu'il en soit, [ce talent] a été donné librement aux serviteurs, mais les serviteurs sont censés faire quelque chose avec le don. Il doit être rendu, avec un bénéfice.

Tout d'abord, la parabole n'est pas à propos des talents [au sens particulier de capacité insigne], comme le fait de bien jouer du piano, etc.  Ce n'est pas à propos de parler en public, ou même d'être un bon enseignant pour les enfants. Il ne s'agit pas de talents [dans cette acception du terme]. Il s'agit d'une somme d'argent, mais ce n'est pas une parabole de "l'intendance" dans le sens que le Christ n'est pas en train de nous dire d'être convaincus de faire de l'argent.

C'est une parabole sur la Grâce, sur l'Esprit Saint.

Saint Séraphim, dans son propre enseignement, était presque rustre. Il dit à ses disciples "d'acquérir l'Esprit Saint", et il utilisa les comparaisons approximatives d'un homme d'affaires qui investit son argent pour en avoir plus. Son propre père était négociant. Il savait de quoi il parlait, mais l'imagerie a été reportée à la vie spirituelle, et son but fut suprêmement décrit comme "l'acquisition de l'Esprit Saint."

La question plus large alors (et cela s'applique ainsi à la parabole) est la suivante: Comment acquérons-nous la Grâce, ou le Saint-Esprit?

Veuillez noter que je ne parle pas de gagner plus de grâce et d'accomplir des œuvres afin de gagner le Saint-Esprit.

La grâce n'est rien d'autre que la vie de Dieu. En termes théologiques corrects (de l'Eglise d'Orient), la Grâce est l'énergie divine incréée. Mais cette phrase, à moins qu'elle ne soit bien comprise, peut même mener à la confusion. Je préfère parler soit de la Grâce, soit de la vie de Dieu, donnée librement à nous.

Tout d'abord, la Grâce est un don. Vous n'avez pas à aller quelque part, pour obtenir ce qui vous a déjà été donné. Ce que nous devons faire, c'est permettre à la Grâce de Dieu d'œuvrer en nous selon ce que Dieu entend pour nous.

Saint Paul prie instamment: "Nous vous supplions de ne pas recevoir la Grâce de Dieu en vain!" (2 Corinthiens 6:01 )

Chacun d'entre nous (certainement par notre baptême et notre chrismation) a reçu la grâce de Dieu pour son salut, c'est-à-dire pour donner le fruit de l'Esprit et se conformer à l'image de Dieu en Christ. La question est: qu'en faisons-nous?

Il s'agit d'une question. plus particulièrement pertinente sur ​​les petites choses de la journée. Prions-nous? Commençons-nous la journée en nous signant avant même que nos pieds aient jamais touché le sol? Lorsque nous sommes tentés de nous plaindre, au lieu de cela,  nous en abstenons-nous, et rendons-nous grâce? Condamnons-nous les autres, même si nous aurions pu être silencieux? Pardonnons-nous quand nous avons nourri une rancune ?

Il y a Grâce pour chacune de ces choses et pour des milliers d'autres. Nous sommes en mesure d'agir ainsi, parce que Dieu nous en a rendus capables. La Grâce qui est mise à profit dans nos vies produit des dividendes de Grâce. Saint Séraphim n'est pas devenu ce qu'il est grâce à un don momentané, mais à travers une vie d'ascèse et de "réinvestissement" de la Grâce qui lui a été donnée.

Quelques paroles de ce grand saint pour les petites choses de la journée :

Vous ne pouvez pas être trop doux, trop gentil. Evitez même de sembler sévère dans votre traitement de l'autre. La joie, une joie rayonnante, ruisselle du visage de celui qui donne et qui attise la joie dans le cœur de celui qui la reçoit.
*
Toute condamnation vient du Diable. Ne vous condamnez jamais les uns les autres... au lieu de condamner les autres, efforcez-vous de parvenir à la paix intérieure.
*
Restez silencieux, abstenez-vous de jugement. Cela vous élèvera au-dessus des flèches mortelles de la calomnie, de l'insulte, et de l'indignation et cela protégera vos cœurs rayonnants de tout mal.

C'est ce que saint Séraphim voulait dire!

Version Française  Claude Lopez-Ginisty
d'après

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