"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mardi 13 juillet 2010

Six rencontres avec saint Jean de Changhai


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Vladika Jean

SIX RENCONTRES AVEC SAINT JEAN

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Par l’archiprêtre Serge Poukh

Le Père Serge avec l'icône de Kourdk

En 1928, mes parents ont déménagé de Bulgarie au Luxembourg. J'avais alors deux ans. Mon père a passé toute sa vie comme chef de chœur et Lecteur, ne portant pas en vain le nom de Romain le Mélode. Je me souviens comment je venais à l'église avec ma mère et comment je me tenais droit «comme un cierge" jusques à la fin du service. Je me souviens comment j'ai commencé à servir à l'autel pour le Père Evgenii: je lui ai donné l'encensoir, je suis sorti avec le cierge. Je me souviens de ma lecture et de mon chant au kliros. Et je me souviens de 1956.

Je décidais de devenir un bon Lecteur. À cette époque, le recteur de l'église Mémorial à Bruxelles était l'archevêque Jean de Changhai. Je lui ai révélé mon désir avant les vigiles. Vladyka fut rayonnant et il me dit: "C’est une bonne intention que tu as eue. Viens à la Liturgie de demain et je te tonsurerai Lecteur."

Après les vigiles, je m'allongeai pour dormir, mais je ne pouvais pas m'endormir.Je me tournai d'un côté à l'autre, mais je ne pus trouver aucun repos. Quelqu'un m'empêchait de dormir. À l’époque je ne pouvais pas savoir qui ce pouvait être; je ne l’ai découvert que le lendemain. Une voix intérieure me chuchotait : "Pourquoi devrais-tu devenir Lecteur? Pourquoi devrais-tu être attaché à l'Eglise?Tu ne pourras plus dormir le dimanche! Tu devras aller à l'église plus tôt! Tu devras trouver et lire l'épître! Tu devras lire sur le kliros, et tu ferais mieux de passer ton samedi soir au cinéma ou au théâtre! " Toutes ces pensées ne me quittèrent pas de toute la nuit.

Le lendemain, je suis allé à l'église le matin avec l'intention de renoncer à la tonsure. Je venais à peine d’entrer dans l'église quand j'ai entendu des pas frappés du côté gauche de l'autel. Je me suis tranquillement dirigé vers les portes, les ai ouvertes, et je vis Vladyka qui me tournait le dos. Il frappa du pied droit d'abord ici, puis là, et, se tournant légèrement vers moi, s'écria: "Le vois-tu "? Il est là, il est! Il y a "sa" queue! " Et, en continuant à taper du pied: "Tu as, quoi ?, changé d'avis? Tu ne veux pas être Lecteur? Je reculai. Comment Vladyka pouvait-il avoir connu ma décision? Et là, je compris soudain" qui" m'avait empêché de dormir. "Qui" avait mis en moi avec ces pensées sinistres. "Je veux, je veux!" - M'écriai-je en d'une voix qui n’était en quelque sorte pas la mienne.

Les yeux de Vladyka s'éclairèrent, comme ils l'avaient fait plus tôt et, se tournant vers moi, avec une voix affectueuse et approbatrice, il a déclaré: "Regarde! Il a disparu et ne reviendra pas à nouveau! Rappelle-toi une fois pour toutes: il ne faut jamais se détourner d'une bonne intention!

Par l’higoumène Goury (1999)

Ma première rencontre avec Vladyka Jean fut un jour à l'automne 1959. Vladyka Averky vint du Synode et demanda d'envoyer deux diacres au Synode, les évêques étant affectés dans les paroisses avant le Concile et il n'y aurait pas assez de diacres. Je suis allé avec le père Pimène; j'ai été affecté à Paterson avec Vladyka Savva d'Australie. Arrivé dans le Bronx, Vladyka Nikon m'a appelé et m'a dit: «Nous vous enverrons avec Vladyka Jean à Washington, un moine, c’est mieux pour lui." Vladyka Nikon m'a prévenu que, dès notre retour, Vladyka Jean devait servir un moleben [service de supplication] avant la réunion du Synode et que je devrais rappeler ceci Vladyka, de sorte qu'il ne serait pas en retard, et car il a toujours l’habitude, chaque fois qu’il va quelque part, de se mettre à écrire des "discours".



Nous ne nous sommes assis à table pour manger qu’à 12h30, le taxi est venu, et à 1:00 le train devait partir, je courus vers Vladyka dans sa cellule. La porte était un peu ouverte. Vladyka était assis sur une chaise, une jambe à découvert, et j'ai remarqué que la jambe était couverte de sang jusqu'au genou, sans doute à cause de sa longue station debout. Un peu plus tard, je frappai à la porte afin de ne pas le déranger. Allant à la voiture, je me suis assis, mais Vladyka est allé au bureau de poste. Une aide, Sofia N., accourut vers lui: «Vladyka, pour l'amour de Dieu, je vous emmène. Allez, vous allez être en retard." Nous allons à la gare. Vladyka demanda quelque chose à un homme, qui ne comprenait pas, tourna les talons et partit, puis il a demandé à un autre, qui haussa les épaules et partit. Vladyka se tourna vers moi et me dit: "Ils ne comprennent même pas l'anglais!" Mais Vladyka ne se pressait pas, il marchait comme s'il était sorti pour se promener. Une jeune fille nous a aidés, a poinçonné notre ticket, et nous avons pris à temps celui d’une heure. Vladyka s'assit et posa son klobouk sur l’étagère à bagages. Le voile pendait, alors j'ai pris le klobouk et j’ai mis le voile dans le klobouk, mais la croix sur le klobouk est sortie de sa place. Vladyka s’est levé, sans rien dire, a mis le doigt à son front et m’a regardé. J'ai compris: Tu vois que la Croix n’est pas à sa place? Vladyka se mit à lire un livre, puis ferma les yeux. L'Américain, assis à côté de moi me pousse - il dort ...

Au cours des Vigiles, le Lecteur lut un cathisme et s'arrêta, et Vladyka se tenait silencieusement sur le kliros. L’archimandrite Nicolas est venu vers moi.Que se passe-t-il, dis-je, lisez le second cathisme. C'est alors seulement que Vladyka entra dans le maître-autel, vénéra la Sainte Table, et fut habillé sur le kliros de gauche, temps pendant lequel il a lu l’exapsalme sans livre. À la liturgie, le choeur a chanté l'Hymne des chérubins lentement trois fois, tandis que Vladyka tirait des morceaux de papier de sa poche pour les vivants et pour les défunts.

Après la liturgie, nous sommes restés assis dans l'avion près d'une heure en raison d'un problème avec l'avion, puis nous avons été transférés dans un autre avion, et nous sommes arrivés tard au Synode. En sortant de la voiture, j'ai demandé à Vladyka: «Devrais-je apporter vos vêtements dans votre cellule? Vladyka dit à haute voix: "Apporte mes vêtements au sanctuaire."

Nous entrons dans l'église. L'église est pleine, toutes les lumières électriques sont allumées, les Portes Royale sont ouvertes, et Vladyka Savva d'Australie est debout revêtu des ornements à la Sainte Table. À ma grande surprise, Vladyka, plutôt que d'aller directement dans l'autel, alla à l'ambon pour mettre son bâton épiscopal dans le coin. Je suis tout de suite entré et j’ai dit en deux mots: "Vladyka Jean est arrivé." Le Métropolite Anastase, debout à la porte, tressaillit et échangea des regards avec Vladyka Savva. Vladyka Savva s'éloigna de la Sainte Table. Il me dit: «Donne-moi les vêtements de Vladyka Jean." Maintenant, me souvenant de tout cela, je pense avec quel calme Vladyka Jean lui-même se comportait. Non seulement les Américains, mais beaucoup de Russes ne le comprenaient pas...

Par Père Peter Perekrestov


Une paroissienne de la cathédrale, Vera Ignatevna Romanov, relata l'incident ci-dessous pour moi. Dans les années 1960, elle s'approcha de la croix à la fin de la Liturgie, qui avait été célébrée par l'archevêque Jean (Maximovitch). Vladyka Jean, d’une manière inattendue lui a demandé (elle n'avait pas vu qu'il avait demandé ceci à qui que ce soit d’autre): "Avez-vous mangé aujourd'hui avant la Liturgie? Vera Ignatevna a répondu: "Oui." Puis Vladyka John éloigna d'elle sa main avec la Croix et ne lui permit pas de la baiser. Vera Ignatevna fut d'abord dans un état de choc du fait que Vladyka ne lui permettait pas d'embrasser la croix. Cependant, à partir de ce moment-là, elle n'a jamais mangé quoi que ce soit avant la Divine Liturgie, y venant toujours à jeun.

Par l’archimandrite Ambroise (Pogodine) (2004)

Saint Jean

Vladyka Jean avait l'habitude de visiter les églises hétérodoxes, où quelque grâce de l'orthodoxie pouvait toujours être présente, c’est-à-dire sous la forme de reliques de saints qui avaient été glorifiés avant la division des Églises. Vladyka Jean exprima le souhait de visiter l'abbaye de Westminster. L'abbaye de Westminster peut un jour avoir été un lieu très saint. Il a été miraculeusement sauvé comme église paroissiale de la destruction générale, sous Henri VIII, et maintenant ces objets sacrés que l'on aurait pu s'attendre à trouver dans une ancienne église ne sont plus là. Nous sommes allés tout simplement jeter un œil comme pour l'une des attractions touristiques de Londres. Vladyka vint avec nous. Après un certain temps, le plus court possible, il est parti. "Ici, dit-il," il n'y a pas de grâce." En effet, on y trouve les reliques de nombreux grands personnages de l'Angleterre, des grands constructeurs politiques du pays, des écrivains, des savants, mais pas de saints.

Par l’évêque Danilo (Krstic) de Buda (2002)

Evêque Danilo

Un jeune Serbe était étudiant en théologie à l'Institut de théologie orthodoxe de Paris. Il était partagé dans son cœur: devait-il se marier ou devenir moine? Il se rendit à Bruxelles, où l'archevêque Jean vivait alors, et demanda à Vladyka: dois-je devenir moine? Vladyka Jean avait vécu pendant longtemps en Serbie et avait bien compris les manières et le caractère des jeunes Serbes. Il savait qu'ils ont tendance à être tenace et irascible, et il a répondu à l'étudiant: non !

Ce Serbe devint moine, malgré tout. Lorsque ce même Serbe, déjà moine, eut le plaisir de rencontrer l'archevêque Jean en Amérique, Vladyka le bénit avec le visage rayonnant d'un connaisseur clairvoyant des Serbes... Vladyka savait que s'il avait dit à ce Serbe: "Oui, deviens moine, ce Serbe ne l'aurait jamais fait..."



Par le Métropolite Laure d'Amérique de l'Est et de New York (2008)

Synode des évêques en 1953 à Jordanville

En 1953, le Synode des Évêques visita le monastère de la Sainte Trinité de Jordanville. J'étais alors hiérodiacre. Après la Liturgie de fête, je suis entré dans l'autel et je suis allé vers Saint Jean, qui était à la recherche de quelque chose. Je suis allé jusqu'à Vladyka Jean et lui ai demandé: "Puis-je vous aider à trouver quelque chose?" Saint Jean n'a pas répondu à ma question, et en silence il a continué sa recherche. Alors moi, pensant que Vladyka Jean n'avait pas entendu ma question, je lui ai à nouveau demandé. Saint Jean me prit par la main, me fit sortir du sanctuaire, et dit: "Dans le sanctuaire, je ne converse pas".

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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Saint John Maximovitch

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Saint Jean avec sainte Marie et sainte Paraskevie (Pacha),
Folles-en-Christ de Diviyevo

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