Le Père Gheorghe Calciu Dumitreasa est un confesseur roumain du XXème siècle. Il est né le 23 novembre 1925 à Mahmudia, en Roumanie. Etudiant en médecine, il est arrêté et envoyé au goulag roumain où il passe de nombreuses années. Il appartenait à une famille de paysans fermiers et il était le dernier des onze enfants d'un couple chrétien pieux et fervent. Il fut le seul à faire des études. A la faculté de médecine de Bucarest, il rencontra des fidèles du mouvement hésychaste "Le Buisson Ardent". Arrêté après deux ans d'études, pour avoir protesté contre l'introduction des cours de marxisme dans les écoles, il fut envoyé en rééducation jusqu'en 1952, puis jusqu'en 1964, date de sa libération, fut transféré de prisons en prisons. Il y rencontra des prêtres et Constantin Oprisan, martyr pour la foi orthodoxe. Il devint professeur de français à l'Institut de Théologie de Bucarest, fit ses études théologiques, et en 1973 fut ordonné prêtre. Ses causeries et ses réunions de prière le soir eurent un grand succès auprès des étudiants. Ses Sept Homélies pour la Jeunesse lui valurent d'être arrêté, emprisonné pour la seconde fois, condamné à mort pour avoir "révélé des secrets d'état". Il faillit mourir de faim mais Dieu lui permit de voir la Lumière Incrée. A cause de la grande agitation causée par son arrestation et son emprisonnement, et surtout à cause de la pression internationale, il fut libéré en 1984, assigné à résidence et empêché d'exercer son ministère. En 1985, il fut expulsé de Roumanie avec sa famille vers les USA où il vécut jusqu'à sa naissance au ciel le 21 novembre 2006. Il repose selon son vœu au monastère des Archanges de Petru Voda en Roumanie.
Père Gheorghe, Mémoire Eternelle!
Question: Pourriez vous dire quelques mots sur votre attitude envers les ennemis? Il me semble que votre attitude envers vos ennemis a beaucoup changé pendant que vous étiez en prison?
Père Gheorghe CALCIU: Oui, sous la torture, dans les conditions de la prison, il est difficile d'aimer son ennemi. C'est très difficile, mais je vous ai dit que je n'étais pas théologien au début. J'étais étudiant en médecine. J'étais très fidèle. Je tenais cela de ma mère. Mais j'étais un homme jeune, et de nombreuses fois, je me suis emporté contre ceux qui me torturaient, mes ennemis...
En prison, j'ai rencontré des prêtres, des moines et d'eux ( Et surtout en ayant vécu avec Constantin Oprisan dans ma cellule), j'ai appris ce que cela signifie d'aimer ses ennemis. Quand ils vous laissent sortir de prison, chacun, tout prisonnier, essaie de mettre sur le papier ses souvenirs de prison. La Securitate ( Police politique communiste roumaine) connaissait très bien notre psychologie, parce qu'il y avait dans ses rangs de très bons psychologues. Ils avaient l'expérience de cinquante ans en Russie et de vingt ans en Roumanie. Ils connaissaient chaque mécanisme de notre âme. Je veux dire chaque mécanisme psychologique, pas spirituel. Et ils savaient qu'après la libération, chacun essaierait de rédiger ses souvenirs. Ils ont commencé à fouiller nos maisons. Ils ont tout confisqué, mais ils ne m'ont pas fouillé. J'ai commencé à jeter mes souvenirs sur le papier et toute la rage à commencé à monter en moi. La torture, mon emprisonnement, et les blessures, les blessures spirituelles devinrent très présentes en mon âme et je comnmençai à haïr. J'ai commencé à haïr mes ennemis. J'ai écrit huitante pages et parce que j'ai senti que la haine avait commencé à croître en moi, j'ai détruit ces pages.
Au moment où j'ai détruit ces pages, mon âme est devenue calme, libre de toute haine envers mes ennemis. Après, je suis venu en Amérique. J'ai été invité à parler dans de nombreuses villes et états d'Amérique, dans des églises en Amérique, en Europe, partout. Je n'ai jamais prononcé ler nom de mes tortionnaires. Je considérai que prononcer le nom d'un quelconque de mes tortionnaires, équivalait à le livrer à la haine des gens. Dieu connaît le nom de tout le monde. Dieu sait ce qu'Il doit faire d'eux. Je n'avais pas le droit de les juger ou de les livrer à la rage des gens puisque j'étais déjà un homme libre. Souvent, j'étais un homme libre en prison, plus libre que maintenant, parce que je connaissais la Vérité et que la Vérité me donnait la liberté. Alors il est simple de comprendre pourquoi je n'ai pas haï mon tortionnaire et pourquoi je ne hais point mes ennemis maintenant. J'essaie d'être bon. Quelquefois j'y parviens, quelquefois je...de toutes façons, j'essaie d'être bon.
Question: Père, une autre question. En Amérique quand nous entendons des confessions, en tant que confesseurs, nous entendons de nombreuses fois: " Je pardonnerai, mais je n'oublierai pas." Je vous entends dire qu'en brûlant le manuscrit de ce qui vous était arrivé, vous essayez d'oublier. Vous devez aussi pardonner, mais j'imagine que vous avez encore le souvenir de ce qui vous est arrivé...
Père Gheorghe CALCIU: Cela ne me gêne pas. Je considère que mes souffrances en prison ont été à mon avantage... J'avais beaucoup de péchés, mais les souffrances ont purifié mon âme. Mais concernant ce thème. "pardonner, mais ne pas oublier", il y avait un moine appelé Nicolae Steinhardt. Il était juif. Il fut arrêté, et en prison, il se convertit à l'orthodoxie. Il fut baptisé par un moine en prison, et son parrain fut un autre prisonnier. Il écrivit un livre intitulé le Journal du Bonheur qui parlait de ses souffrances en prison. Quel paradoxe que de donner un tel titre à un livre qui parlait des souffrances par lesquelles il était passé en prison. Néanmoins, il considérait toutes ses souffrances comme un bonheur pour lui. Il disait: "J'ai rencontré beaucoup de gens en prison qui disaient, je pardonne , mais je ne puis oublier. Imaginez que vous êtes avec le prêtre en confession, vous êtes en face de lui et vous lui dites: Père, je ne peux pas oublier, mais je pardonne. Le prêtre vous donne l'absolution, mais à ce moment, le Christ vient devant vous et dit au prêtre: Père, vous pouvez lui pardonner, mais je ne peux pas oublier ses péchés. Je lui pardonne, mais je ne puis oublier ses péchés. Quel sorte de sentiment auriez-vous si Dieu vous disait: Je pardonne, mais je ne puis oublier? Il en va de même pour soi. Donc, il y a un problème. Vous ne pouvez pas pardonner sans oublier, parce que le souvenir est toujours dans votre esprit et aux moments difficiles, vous vous souvenez de cette haine. Et j'en ai moi-même l'expérience.
Père Gheorghe CALCIU: Oui, sous la torture, dans les conditions de la prison, il est difficile d'aimer son ennemi. C'est très difficile, mais je vous ai dit que je n'étais pas théologien au début. J'étais étudiant en médecine. J'étais très fidèle. Je tenais cela de ma mère. Mais j'étais un homme jeune, et de nombreuses fois, je me suis emporté contre ceux qui me torturaient, mes ennemis...
En prison, j'ai rencontré des prêtres, des moines et d'eux ( Et surtout en ayant vécu avec Constantin Oprisan dans ma cellule), j'ai appris ce que cela signifie d'aimer ses ennemis. Quand ils vous laissent sortir de prison, chacun, tout prisonnier, essaie de mettre sur le papier ses souvenirs de prison. La Securitate ( Police politique communiste roumaine) connaissait très bien notre psychologie, parce qu'il y avait dans ses rangs de très bons psychologues. Ils avaient l'expérience de cinquante ans en Russie et de vingt ans en Roumanie. Ils connaissaient chaque mécanisme de notre âme. Je veux dire chaque mécanisme psychologique, pas spirituel. Et ils savaient qu'après la libération, chacun essaierait de rédiger ses souvenirs. Ils ont commencé à fouiller nos maisons. Ils ont tout confisqué, mais ils ne m'ont pas fouillé. J'ai commencé à jeter mes souvenirs sur le papier et toute la rage à commencé à monter en moi. La torture, mon emprisonnement, et les blessures, les blessures spirituelles devinrent très présentes en mon âme et je comnmençai à haïr. J'ai commencé à haïr mes ennemis. J'ai écrit huitante pages et parce que j'ai senti que la haine avait commencé à croître en moi, j'ai détruit ces pages.
Au moment où j'ai détruit ces pages, mon âme est devenue calme, libre de toute haine envers mes ennemis. Après, je suis venu en Amérique. J'ai été invité à parler dans de nombreuses villes et états d'Amérique, dans des églises en Amérique, en Europe, partout. Je n'ai jamais prononcé ler nom de mes tortionnaires. Je considérai que prononcer le nom d'un quelconque de mes tortionnaires, équivalait à le livrer à la haine des gens. Dieu connaît le nom de tout le monde. Dieu sait ce qu'Il doit faire d'eux. Je n'avais pas le droit de les juger ou de les livrer à la rage des gens puisque j'étais déjà un homme libre. Souvent, j'étais un homme libre en prison, plus libre que maintenant, parce que je connaissais la Vérité et que la Vérité me donnait la liberté. Alors il est simple de comprendre pourquoi je n'ai pas haï mon tortionnaire et pourquoi je ne hais point mes ennemis maintenant. J'essaie d'être bon. Quelquefois j'y parviens, quelquefois je...de toutes façons, j'essaie d'être bon.
Question: Père, une autre question. En Amérique quand nous entendons des confessions, en tant que confesseurs, nous entendons de nombreuses fois: " Je pardonnerai, mais je n'oublierai pas." Je vous entends dire qu'en brûlant le manuscrit de ce qui vous était arrivé, vous essayez d'oublier. Vous devez aussi pardonner, mais j'imagine que vous avez encore le souvenir de ce qui vous est arrivé...
Père Gheorghe CALCIU: Cela ne me gêne pas. Je considère que mes souffrances en prison ont été à mon avantage... J'avais beaucoup de péchés, mais les souffrances ont purifié mon âme. Mais concernant ce thème. "pardonner, mais ne pas oublier", il y avait un moine appelé Nicolae Steinhardt. Il était juif. Il fut arrêté, et en prison, il se convertit à l'orthodoxie. Il fut baptisé par un moine en prison, et son parrain fut un autre prisonnier. Il écrivit un livre intitulé le Journal du Bonheur qui parlait de ses souffrances en prison. Quel paradoxe que de donner un tel titre à un livre qui parlait des souffrances par lesquelles il était passé en prison. Néanmoins, il considérait toutes ses souffrances comme un bonheur pour lui. Il disait: "J'ai rencontré beaucoup de gens en prison qui disaient, je pardonne , mais je ne puis oublier. Imaginez que vous êtes avec le prêtre en confession, vous êtes en face de lui et vous lui dites: Père, je ne peux pas oublier, mais je pardonne. Le prêtre vous donne l'absolution, mais à ce moment, le Christ vient devant vous et dit au prêtre: Père, vous pouvez lui pardonner, mais je ne peux pas oublier ses péchés. Je lui pardonne, mais je ne puis oublier ses péchés. Quel sorte de sentiment auriez-vous si Dieu vous disait: Je pardonne, mais je ne puis oublier? Il en va de même pour soi. Donc, il y a un problème. Vous ne pouvez pas pardonner sans oublier, parce que le souvenir est toujours dans votre esprit et aux moments difficiles, vous vous souvenez de cette haine. Et j'en ai moi-même l'expérience.
Traduction française Claude Lopez-Ginisty
d'après:
THE ORTHODOX WORD,
July-August 2007
Platina, California, USA
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