Pâque/ Yulia Kuzenkova, 2002
Homélie pour le congé de Pâque
St. Innocent de Chersonèse
En passant d'une fête à l'autre, nous sommes déjà imperceptiblement arrivés au pied du Mont des Oliviers, et nous proclamons pour la dernière fois : Christ est ressuscité ! Beaucoup d'entre nous seront sans aucun doute hâtés de voir à nouveau et e chanter des hymnes le jour de la Résurrection ; mais certains d'entre nous - et cela ne fait aucun doute - célébreront, si nous sommes jugés dignes, la prochaine Pâque au « jour sans déclin» dans le Royaume du Christ. Qui sont les premiers et qui sont les derniers ? Nous ne savons pas. Nous savons seulement que chacun de nous peut appartenir à ces derniers. Et c'est pourquoi beaucoup de gens passent ce jour présent dans une sorte de découragement. Il serait préférable que le chant joyeux ne se termine jamais, si nous ne nous séparons jamais de cette célébration lumineuse !
Mais est-ce vraiment impossible, frères ? Y a-t-il vraiment aucun moyen de continuer, en pleine force, non pas le jour mais la joie de la Résurrection du Christ ? C'est précisément ce vers quoi tout dans le christianisme est dirigé ; en cela réside le christianisme le plus authentique. En quoi consiste-t-il ? N'est-ce pas dans le renouvellement de l'esprit, dans la réception d'un nouveau cœur d'en Haut, dans la résurrection avec le Christ ? Celui qui est vraiment ressuscité en esprit, pour lui, tout le reste de sa vie est une célébration de la Résurrection ; chaque jour est brillant pour lui, et il dit constamment de toutes ses œuvres : « En effet, le Christ est ressuscité ! » Par conséquent, quiconque ne veut pas se separer du triomphe de la Résurrection, faites-lui savoir qu'il n'a pas à le faire, qu'il devrait y avoir une résurrection constante en lui ! À cette fin, la sainte Église renouvelle la mémoire de la Résurrection du Christ tous les six jours [id est le dimanche], faisant comprendre à tous que cette célébration, tôt ou tard, doit devenir continue pour un chrétien.
« Mais les moyens de cela », peuvent penser certains, « sont si grands et complexes que seuls quelques-uns peuvent en faire un usage actif. Y en a-t-il beaucoup qui peuvent se vanter de leur co-résurrection spirituelle avec le Christ ? » Vraiment, frères, il y en a peu. Mais c'est notre faute, et la plus grande faute, car cette résurrection doit nécessairement appartenir à chacun d'entre nous. En cela, comme nous l'avons dit, se trouve l'essence même du christianisme. Sans cela, il n'y a pas et cela ne peut pas être un véritable christianisme.
Ce ne sont pas mes pensées et mes conclusions, frères. Parcourez les écrits des apôtres du Christ : Vous y trouverez sur chaque page qu'un chrétien est un homme renouvelé, ressuscité et nouvellement créé. Par conséquent, lorsque les moyens que nous avons proposés à quelqu'un pour prolonger la joie de la résurrection par le renouvellement de tout l'esprit en Christ semblent être hors de portée, seulement pour quelques-uns, c'est un signe clair qu'un tel homme n'est pas simplement pas un vrai disciple du Christ, mais ne sait pas non plus ce qui est nécessaire pour cette suite - que c'est complètement impossible sans le renouvellement de l'esprit. Un tel homme doit donc ne pas essayer de perpétuer la joie pour lui-même, quelle qu'elle soit, mais de produire en lui-même un esprit de contrition pour le fait qu'il a jusqu'à présent porté le nom de chrétien sans se soucier d'être chrétien ; c'est-à-dire d'acquérir un nouveau cœur et un nouvel esprit - le cœur de Dieu, l'esprit du Christ.
C'est la fête. Ainsi, nous devons maintenant célébrer, selon les paroles de l'Église, la « prise de congé » de la Résurrection de notre Seigneur. En quoi devrait consister cette prise de congé ? Clairement pas simplement dans la répétition abrégée du service divin festif et pas simplement dans la fin de l'hymnographie joyeuse : ce serait un congé des lèvres, mais le Seigneur veut notre cœur. Ce n'est pas ce qu'Il a donné pour nous, et ce n'est pas ce que nous devons Lui donner. Donnons-Lui notre esprit, pour qu'il soit celui du Christ ; qu'il n'y ait aucune chose élevée qui s'exalte contre la connaissance de Dieu (2 Cor. 10:5), pas un seul fragment d'obscurité sous le couvert de la lumière. Donnons-lui notre cœur, qu'il soit celui du Christ : libre de partialité pour le monde et pour ses bénédictions, en s'efforçant toujours de trouver Son éternel « trésor » (Mt. 6:21). Donnons-lui notre volonté, afin qu'elle soit celle du Christ : enfermée dans Son saint Évangile, prompte à toute bonne œuvre, mais immobile envers le mal. Donnons-lui notre âme et notre corps et toute notre vie, afin qu'elle soit également cachée avec le Christ en Dieu (Col 3:3) ; ne vivons pas tant en nous-mêmes que le Christ en nous.
Donnons-nous, car peu importe combien nous nous donnons au Christ, notre Roi et Dieu, nous ne pourrons jamais nous donner à Lui comme Il s'est donné pour nous, et continue de se donner à nous tous dans le Sacrement de l'Eucharistie. Un tel don de nous-mêmes au Christ sera la meilleure préparation pour la célébration de l'Ascension du Christ. Si notre esprit et nos pensées appartiennent au Christ, alors ils ne resteront pas sur Terre ; nous ne regarderons pas les choses qui sont vues, mais les choses qui ne sont pas vues (2 Cor 4:18), et mettrons [notre] affection sur les choses d'en Haut (Col. 3:2). Si nos cœurs et nos esprits appartiennent au Christ, ils n'erreront pas le long de la terre, mais chercheront les choses qui sont au-dessus, où le Christ est assis à la droite de Dieu (Col 3:1).
Notre chair même, appartenant au Christ, commencera à oublier sa fragilité, à s'élever le matin à la Jérusalem céleste, à aspirer aux demeures célestes. Et le Christ très miséricordieux ne perdra pas Son peuple pour toujours sur Terre. Il viendra à eux, selon Sa promesse immuable, et les emmenera là où Il est maintenant (Jn. 14:3), et Il sera avec nous tous par Sa grâce et Son amour pour les hommes !
Amen!
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


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