"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

vendredi 20 septembre 2019

Maria Saradzjichvili : UN HOMME QUI REVINT DE LA MORT A LA VIE

Archimandrite Parthène (Aptsiauri) 

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In Memoriam : Archimandrite Parthène (Aptsiauri) 

Aujourd'hui, le village de Doumatskho, dans la municipalité de Tianeti [dans la région de Mtskheta-Mtianeti, principalement en Géorgie orientale et en partie en Ossétie du Sud] est un endroit insignifiant sur la carte, et il n’est pas étonnant que dès 1904, c'était déjà un endroit négligeable. Le paysage est le même dans toute la région : à perte de vue des montagnes, des montagnes, et encore des montagnes. Rien ne change d'année en année, de siècle en siècle. Le seul point de repère remarquable à proximité est l'église de la Sainte-Trinité de Gergeti. L'église est visible de tous les côtés. Elle se dresse au sommet d'une montagne, et les rayons du soleil levant dorent sa coupole conique et son clocher d'une manière différente à chaque fois. 

C'est alors, à l'aube du XXe siècle, que la nouvelle suivante se répandit dans le village montagnard. Le fils tant attendu d'AlexisAptsiauri était né. Il n'avait pas d'enfants depuis longtemps, mais maintenant l'homme était béni de cette joie. Il fut même dit que le père avait fait un vœu : 

"Seigneur, rends-moi digne d'avoir un enfant, même un seul enfant ; alors je te le dédierai !" 

Ainsi naquit le petit Jean (Ioane). Les villageois se réjouirent du bonheur d'Alexis, le félicitèrent et continuèrent à mener leur vie normale en faisant paître leur bétail et en cueillant les fruits, qui sont rares dans les régions montagneuses où la terre est pauvre. Trois ans plus tard, la nouvelle se répandit à nouveau autour de Doumatskho : Le petit fils d'Alexis Aptsiauri (qui avait été littéralement "obtenu par la prière" de nombreuses années) tomba soudainement malade et mourut. 

Tout le village rendit visite à la famille en deuil pour la réconforter. 

Au milieu du chagrin et de la lamentation générale, un certain moine aveugle entra dans la maison et s'adressa au père inconsolable : 

"Alexis, tu te souviens de la promesse que tu as faite, à savoir que ton fils deviendrait moine ? 

"Je n'aurais pas rompu la promesse. Mais que puis-je faire maintenant ? Comment puis-je ramener mon fils mort à la vie ?" répondit Alexis en pleurant. 

"Lève-toi et fais ce serment : si ton fils revient à la vie, tu le ressusciteras vraiment comme un serviteur de Dieu. Et, comme c'est la coutume chez les Mtiuli [un ancien groupe ethnique dans cette région montagneuse de Géorgie] fais une encoche sur le pilier principal de la maison en témoignage !" 

Alexis se leva, tenant son fils sans vie dans ses bras. Et dès qu'il eut fait une encoche sur le pilier de bois avec son poignard, l'enfant ouvrit les yeux. Aussitôt, il se mit à faire une autre entaille à côté avec joie. 

Quand Jean eut cinq ans, il fut envoyé dans une école locale. Le garçon réussissait bien à l'école, mais il se démarquait de ses camarades : il était très spirituel et gardait les jeûnes depuis la petite enfance.... 

Alexis s'occupait de moutons pour subvenir aux besoins de sa famille. En 1917, son troupeau de moutons fut volé par des Kistes [un petit groupe ethnique apparenté aux Tchétchènes, vivant principalement dans les gorges de Pankisi au nord-est de la Géorgie], la famille dût donc déménager à Vladikavkaz [la capitale de la République autonome de Russie, dans le Caucase, à la frontière avec la Géorgie]. Plongé dans les soucis du monde, Alexisa oublia son serment et décida de trouver une femme convenable pour son fils de seize ans. C'est dans ce but qu'il envoya Jean dans une famille géorgienne pour lui présenter sa future fiancée potentielle, mais le jeune homme s' enfuit soudainement. 

Quand Alexis l'apprit, il se mit en colère et commença à crier après son fils : 

"Soit tu m'obéis, soit tu quittes notre maison !" 

Jean devint d’abord triste, mais ensuite il fut heureux : 

"Maintenant je serai libre, et personne ne m'empêchera de devenir moine !" 

Il demanda la bénédiction de sa mère mourante et aquitta la maison de ses parents. 

Alexei faillit devenir fou quand il rentra chez lui et n’y trouva pas son fils. Il fit participer de nombreuses personnes à la recherche de son fils perdu. Enfin, l'homme comprit quels moines auraient pu abriter Jean. Alexeï fit donc appel à George Chiolachvili, le père d'Ilia II, l'actuel Catholicos-Patriarche de toute la Géorgie : 

"Et s'il écoute ton conseil et décide de ne pas devenir moine ?" 

Cependant, la réalité ne fut pas à la hauteur de ses attentes. 

Plus tard, quand Jean rencontra son père, il confessa : 

"Que puis-je faire si j'aime Dieu par-dessus tout et qu'il n'y a pas de place pour moi dans ce monde ?" 

Et il se rendit au monastère de Chio-Mgvime (le monastère de St. Chio)

A cette époque, l'higoumène du monastère était le hiéromoine Ephraim (le futur Patriarche Ephraim II). Il fut très surpris par le désir du jeune homme. A cette époque, une poignée de personnes seulement recherchaient la vie monastique. Le Père Ephraim permit à Jean de vivre au monastère et le chargea de faire paître le bétail. 

Jean travaillait toute la journée et passait toute la nuit en prière. 

Après cela, il vécut au monastère de la Sainte Trinité dans la forêt de Dzegvi pendant trois ans jusqu'à ce qu'il reçoive la tonsure. Ensuite, l’évêque Paul [Pavel Japaridze], évêque de Tsilkani, le bénit pour servir comme lecteur à la cathédrale de Svetitskhoveli. Puis il envoya Jean au monastère Zedazeni pendant deux ans pour s'occuper d'un vieux moine. En 1929, l’évêque Pavel tonsura Jean moine sous le nom de Parthène [Parten]. En 1932, l’évêque Alexis [Gersamia] l’ordonna hiérodéacre. En 1935, le Catholicos-Patriarche Callistrate [Tsintsadze] renvoya le Père Parthèneau monastère de Chio-Mgvime. 

Cinq ans plus tard, le Père Parthène retourna à Dzegvi, où ses conditions de vie furent très difficiles. Un jour, des voleurs l'attaquèrent, mais il survécut. Ensuite, un des voleurs s'est souvenu : 

"Nous avons vu un moine qui n'avait que des pommes de terre et du pain sec. Et il voulait nous offrir son repas." 

Voyant que le moine n'avait rien, la bande alla plus loin dans la forêt. 

Plus tard, les bolcheviks fermèrent le monastère et exécutèrent certains de ses moines par un peloton d'exécution. En 1940, le Père Parthène fut arrêté sur une fausse dénonciation et emprisonné. 

Archimandrite Parthène (Aptsiauri) 

D'après les souvenirs de Nino Iorachvili, fille spirituelle du Père Parthène : 

"Quelqu'un fut soudoyé pour donner de faux témoignages, et certains moines furent arrêtés. Cette même nuit, le seul fils du calomniateur (qui avait été absolument en bonne santé auparavant) mourut. Cet homme vintà la cathédrale de Svetitskhoveli en pleurant : "J'ai tué mon propre fils en faisant des accusations injustifiées contre ces hommes innocents, qui sont comme des anges !"" 

Le P. Parthène, libéré en 1946, retourna au monastère Zedazeni, mais il le trouva absolument désert... Les vieux moines étaient déjà morts à cette époque. Le Père Parthène y reprit ses offices, mais bientôt le Catholicos-Patriarche Callistrate [Tsintsadze] le convoqua à son bureau et le transféra à la cathédrale de Svetitskhoveli. Le Père Parthène refusa longtemps. Alors le Primat lui dit : 

"Au nom de l'obéissance monastique, au nom de laquelle tu as prononcé tes vœux lors de la cérémonie de la tonsure, je t’ordonne d'aller à la cathédrale de Svetitskhoveli, d'y accomplir ta règle monastique et de célébrer la Liturgie." 

Et le Père Parthène obéit humblement. 

Le vénérable higoumène mégaloschème Koukcha d'Odessa († 1964) disait aux pèlerins venus de Géorgie : 

"Pourquoi viens-tu ici, quand tu as l’archimandrite Parthène ?" 

Dans ses réminiscences, l'archimandrite Raphaël (Kareline) a écrit à propos du Père Parthène qu'il était si ingénu, doux et humble qu'il ne comprenait pas quand on le trompait... "Il ressemblait à bien des égards aux saints Pères qui ont conservé la foi dans les déserts et les cavernes." 

Avec le futur Catholicos-Patriarche Ilia II de Géorgie 

Le Père Parthène avait beaucoup d'enfants spirituels qui affluaient vers lui non seulement de toutes les régions de Géorgie, mais aussi de Russie. 

En 1951, le Père Parthène fut élevé au rang d'higoumène, et en 1962 au rang d'archimandrite. 

Le Père Parthène apporta une contribution exceptionnelle au développement du Séminaire de Mtskheta, qui venait d'ouvrir ses portes. À l'époque soviétique, l'accès aux icônes était limité ; il étudia donc la photographie pour prendre des photos d'images saintes et en diffuser des copies parmi les fidèles. 

Il avait prévu son propre repos en 1984. Sept mois avant sa mort cette année-là, il avait dit: "Je prie pour la Géorgie. S'il vous plaît, priez sans cesse !" 

Version française Claude Lopez-Ginisty 
D’après 

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