L'expérience
du paradis ou de l'enfer est au-delà des mots ou des sens. C’est une réalité
incréée, et non pas créée. Les Latins ont inventé le mythe par lequel le
paradis et l'enfer sont deux réalités créées. C’est un mythe selon lequel les
damnés ne seront pas en mesure de regarder vers Dieu; tout comme "l’absence
de Dieu” est aussi un mythe.
Les
Latins avaient également perçu les feux de l'enfer comme quelque chose de créé.
La Tradition orthodoxe est restée fidèle à l’enseignement des Écritures où les
damnés verront Dieu (comme l'homme riche de la parabole), mais ils le percevront
seulement comme “un feu dévorant". Les scolastiques latins ont accepté l’enfer
comme punition et privation d'une vision concrète de l'essence divine.
Bibliquement et patristiquement cependant, "l'enfer" est compris
comme l'incapacité de l'homme à coopérer (synergie) avec la Grâce divine, afin
d'atteindre la vision illuminatrice de Dieu (qui est le paradis) et l'amour
désintéressé (1Cor. 13: 8): "l'amour... ne demande pas de
réciprocité." Par conséquent, il n'ya pas une telle chose comme “absence de Dieu”, mais seulement
Sa Présence. Voilà pourquoi Sa seconde venue est désastreuse ("Ô, quelle
heure, ce sera alors", chantons-nous dans les Laudes des Matines). C’est
une réalité irréfutable, vers laquelle l'Orthodoxie est orientée de façon
permanente ("J’attends la résurrection des morts ... [dit le Credo]”)
Les damnés - ceux qui ont le cœur endurci, comme les pharisiens (Marc 3:
5: "dans l'insensibilité de leur cœur”) - perçoivent éternellement le bûcher
de l'enfer comme leur salut! C’est parce que leur état n’est pas sensible à
toute autre forme de salut. Ils sont trop "finalisés" - ils
atteignent la fin de leur route - mais seulement les justes [sincèrement pieux]
atteignent la fin en tant que personnes rachetées. Les autres finissent dans un
état de condamnation. Le "salut" pour eux est l'enfer, puisque dans
leur vie, ils ont recherché le seul plaisir.
L'homme riche de la parabole avait “apprécié l'ensemble de ses
richesses". Le pauvre Lazare, sans se plaindre avait enduré "toute
souffrance." L’apôtre Paul exprime ceci (1Cor. 3: 13-15): " l'œuvre
de chacun sera manifestée; car le jour la fera connaître, parce qu'elle se
révèlera dans le feu, et le feu éprouvera ce qu'est l'œuvre de chacun. Si
l'œuvre bâtie par quelqu'un sur le fondement subsiste, il recevra une
récompense. Si l'œuvre de quelqu'un est consumée, il perdra sa récompense; pour
lui, il sera sauvé, mais comme au travers du feu."
Les justes et les impénitents passeront tous deux par le “feu” de la Présence
divine incréée, cependant, l'un passera au travers indemne, tandis que l'autre
sera brûlé. Il est “sauvé” aussi, mais seulement de la manière dont on passe
par un incendie. Efthimios Zigavinos (12ème siècle) observe à cet égard: “Dieu
comme le feu qui éclaire et illumine le pur, et brûle et obscurcit
l'impur." Et Theodoritos Kyrou concernant cette "économie",
écrit: "On est également sauvé par le feu, étant testé par lui, tout comme
lorsque l'on passe par le feu. S’il a une couverture de protection appropriée,
il ne sera pas brûlé, sinon, il peut être "sauvé”, mais il sera carbonisé!
"
Par
conséquent, le feu de l'enfer n'a rien de commun avec le “purgatoire” latin, ni
créé, ni punition, ou étape intermédiaire. Un point de vue comme celui-ci est
pratiquement un transfer de sa responsablité à Dieu. Mais la responsabilité est
entièrement nôtre, si nous choisissons d'accepter ou de rejeter le salut, la
guérison, qui est offerte par Dieu.
"La
mort spirituelle" est la vision de la Lumière Incréée, de la gloire
divine, comme un bûcher, comme le feu. Saint Jean Chrysostome, dans sa neuvième
homélie sur la première Epître aux Corinthiens, note: “L'enfer est sans fin... Les
pécheurs doivent être amenés dans une souffrance sans fin. Comme pour le fait d’être
brûlés complètement. Cela signifie qu’il ne résiste pas à la force du
feu." Et il poursuit: “Et il (Paul) dit, cela signifie ceci: qu'il ne doit
pas être brûlé, comme ses œuvres, jusques au néant, mais il doit continuer à
exister, mais à l'intérieur du feu. Il considère donc cela comme son salut. Car il est de coutume pour nous
de dire `sauvés dans le feu," en se référant à des matériaux qui ne sont
pas totalement brûlés."
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
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