"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 13 février 2020

Saint Père Païssios et la mort


Saint Païssios (1924-1994), né Arsenios Eznepidis, était un ascète bien connu du Mont Athos. Il était très respecté et aimé pour ses conseils spirituels et sa vie d'ascète. 

De nombreuses personnes dans le monde entier vénèrent le staretz Païssios, en particulier en Grèce et en Russie, et ses dits, documentés par ses disciples dévoués, sont devenus omniprésents dans les maisons orthodoxes. Les paroles de saint Païssios, inhabituelles par leur simplicité, leur chaleur et leur réalisme, semblent être exactement ce dont les gens modernes ont désespérément besoin. 

- Geronda ["geronda" est le mot grec pour "staretz"], le diagnostic final a été établi. Ta tumeur est cancéreuse et elle est agressive.

- Apportez-moi un mouchoir pour que je puisse danser sur l'air : "Je te dis adieu, ô pauvre monde !" Je n'ai jamais dansé de ma vie, mais je vais maintenant danser de joie à l'approche de ma mort.

- Geronda, le médecin a dit qu'il voulait d'abord utiliser des radiations pour réduire la tumeur et ensuite faire une opération.

- Je comprends ! L'armée de l'air bombardera d'abord l'ennemi, puis l'attaque commencera ! Je monterai alors et je vous apporterai des nouvelles ! Certaines personnes, même les personnes âgées, lorsque le médecin leur dit : "Vous allez mourir" ou "Vous avez cinquante pour cent de chances de survivre", sont très angoissées. Elles veulent vivre. Et puis quoi ? Je me le demande ! Maintenant, si quelqu'un est jeune, eh bien, c'est justifiable, mais si quelqu'un est vieux et essaie encore désespérément de s'accrocher, eh bien, je ne comprends pas. Bien sûr, c'est tout à fait différent si quelqu'un veut suivre une thérapie pour gérer la douleur. Il n'est pas intéressé par la prolongation de la vie, il veut seulement rendre la douleur un peu plus supportable afin de pouvoir prendre soin de lui jusqu'à sa mort - c'est logique.

- Geronda, nous prions pour que Dieu te donne une prolongation de ta vie.

- Pourquoi ? Le psalmiste ne dit-il pas : "Les jours de nos années sont soixante ans et dix ans" ?

- Mais le psalmiste ajoute : "Pour les plus robustes , quatre-vingts... "

- Oui, mais il ajoute : "Et le surplus n'est que peine et douleur..."  auquel cas il vaut mieux avoir la paix de l'autre vie.

- Geronda, quelqu'un peut-il, par humilité, se sentir spirituellement non préparé pour l'autre vie et souhaiter vivre plus longtemps pour s'y préparer ?

- C'est une bonne chose, mais comment peut-il savoir que, même s'il vit plus longtemps, il ne deviendra pas spirituellement pire ?

- Geronda, quand peut-on dire que quelqu'un est réconcilié avec la mort ?

- Quand le Christ vit en lui, alors la mort est une joie. Mais il ne faut pas se réjouir de mourir simplement parce qu'on s'est lassé de cette vie. Quand on se réjouit de la mort, au sens propre, la mort s'en va pour trouver quelqu'un qui a peur ! Quand on veut mourir, on ne le fait pas. Celui qui vit la vie facile a peur de la mort parce qu'il se réjouit de la vie mondaine et ne veut pas mourir. Si les gens lui parlent de la mort, il réagit par le déni : "Va-t'en d'ici !" Cependant, celui qui souffre, celui qui est dans la douleur, voit la mort comme une libération et dit : "Quel dommage, Charon n'est pas encore venu me prendre... Il a dû être retenu !"

Rares sont les personnes qui accueillent la mort. La plupart des gens ont une affaire inachevée et ne veulent pas mourir. Mais le Bon Dieu pourvoit à la mort de chaque personne lorsqu'elle a atteint sa pleine maturité. En tout cas, une personne spirituelle, qu'elle soit jeune ou âgée, devrait être heureuse de vivre et de mourir, mais ne devrait jamais poursuivre la mort, car c'est un suicide.

Pour quelqu'un qui est mort aux affaires du monde et qui a été spirituellement ressuscité il n'y a jamais d'agonie, de peur ou d'anxiété, car il attend la mort avec joie parce qu'il sera avec le Christ et se réjouira de Sa présence. Mais il se réjouit aussi d'être en vie, encore une fois parce qu'il est uni au Christ dès maintenant et qu'il éprouve une partie de la joie du Paradis ici sur terre et se demande s'il n'y a pas une joie plus grande au Paradis que celle qu'il ressent sur terre. De telles personnes luttent avec philotimo et abnégation ; et parce qu'elles placent la mort devant elles et s'en souviennent chaque jour, elles se préparent plus spirituellement, en luttant avec audace et en vainquant la vanité.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après


NOTE:

Philotimo Sur le blog de Maxime:



Dans une note extraite du livre St Arsène de Cappadoce par le père Païssios traduit et édité par le monastère St Jean le Théologien Souroti de Thessalonique (où repose Père Païssios) on peut lire cette définition plus spécifiquement chrétienne orthodoxe :

φιλότιμο = noblesse d’âme, bonté, reconnaissance, amour purifié exempt de tout retour sur soi, de celui qui ne regarde jamais son propre intérêt mais ne cherche qu’à être agréable à Dieu, le Père Païssios considérait cette vertu comme le fondement du progrès dans la vie spirituelle. 

À propos de philotimo, Père Païssios disait :

"Le juste chrétien ne pratique pas de bonnes actions pour son propre bénéfice, c’est-à-dire pour être récompensé ou pour éviter l'enfer et gagner le paradis, mais plutôt parce qu'il préfère le bien au mal. Tout le reste est une conséquence naturelle du bien qui remplit notre âme sans l’avoir demandé. De cette façon, le bien a de la dignité, sinon, il provient de l'attitude à bas prix du 'donner et prendre'." (Version française par Maxime le minime)

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