De la catégorie de ses vertus habituelles et de son
autodiscipline monastique, je me souviens d'un incident où il avait entièrement
le droit de prendre une décision de façon indépendante dans une situation ou
une autre, mais où il a appelé la Laure pour demander la bénédiction du père
supérieur.
Un jour, quand le père supérieur était absent, le Père Kirill se
rendit à l'église de Peredelkino pour demander la permission au recteur. Quand
le recteur s'est avéré absent et qu'il ne pouvait recevoir ni réponse positive
ni négative, le Père Kirill a décidé de refuser l'événement proposé; et ceci
indépendamment du respect avec lequel le supérieur de la Laure considérait le Père Kirill.
Au cours des huit premiers mois après l'accident vasculaire
cérébral, alors que sa vie était littéralement suspendue à un fil, les
conversations sur la mort, au sujet de sa visite peut-être imminente devint une partie incontournable de notre vie hospitalière. Il fut un temps où nous devions demander à Batiouchka encore vivant où il voulait être
enterré. N'est-il pas étrange de demander de telles choses à un moine
obéissant? Et il nous a fait savoir que c'était vraiment une question étrange.
"J'ai des supérieurs pour prendre cette décision", a répondu Batiouchka.
En 2009 est arrivé non seulement le
quatre-vingt-quinzième anniversaire de Kirill, mais aussi la
cinquante-cinquième année depuis sa tonsure dans le monachisme et son ordination
au diaconat, puis au sacerdoce. Ce sont des chiffres sérieux.
Nous devons
également considérer que le sort des générations comme la sienne a été marqué par trop de
lourdes épreuves. Un homme avec sa biographie, qui a vécu de telles années, ne
peut qu'inspirer l'étonnement.
Il y eut la collectivisation, ses amis et sa
famille furent amenés à souffrir, sa jeunesse à demi affamée dans une
atmosphère de dénonciations totalitaires et d'arrestations partout, la Seconde
Guerre mondiale et les difficultés sans précédent des années d'après-guerre. Et
ceci sans oublier de mentionner ce que c'était que d'étudier dans des écoles de théologie et de se sauver dans des monastères sous un gouvernement athée...
Quelquefois je pense,
qu'est-ce qui doit prévaloir dans le caractère d'un homme qui a traversé de
telles épreuves et qui pourtant a préservé non seulement son humanité mais aussi son
amour enfantin de la vie? Une forte volonté et une fermeté de caractère? Oui, ces deux choses étaient là, sans aucun doute. Foi et résolution? Elles étaient aussi là. Mais
tout de même, il n'y a rien de plus ferme ou de plus fort qu'un cœur tendre,
rempli de compassion pour le monde entier.
Il ne se considérait pas comme un bienfaiteur de l'humanité; au contraire, il était heureux de sa possibilité de faire le bien. Il sentait qu'il en avait reçu le bénéfice. Il y a environ trois ans, déjà alité, il a dit: "Je remercie Dieu d'avoir pu servir les gens..."
Il ne se considérait pas comme un bienfaiteur de l'humanité; au contraire, il était heureux de sa possibilité de faire le bien. Il sentait qu'il en avait reçu le bénéfice. Il y a environ trois ans, déjà alité, il a dit: "Je remercie Dieu d'avoir pu servir les gens..."
Version française Claude Lopez-Ginisty
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