"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 28 mars 2015

OLGA LUNKOVA: COMMENT SAINTE XENIA A AIDE UNE MUSULMANE A DEVENIR ICONOGRAPHE (1)

Alla Mescherova

Tout était mis en place dans la vie d’Alla Mestcherova, apparemment comme il se doit: classes d'audit à l'Académie Repin des Arts deSaint-Pétersbourg, puis apprentissage de l'iconographie à "l’Ecole de Arts Ecclésiastiques" de Tver, si ce n’était pour une chose: Alfia (comme ses parents l'ont nommée) a grandi dans une famille musulmane, qui tenait pour sacrées les traditions de ses ancêtres. Néanmoins, son âme a trouvé sa demeure dans le christianisme orthodoxe.

-Peu de musulmans, en particulier de femmes musulmanes, se résolvent à changer de religion contre la volonté de leur famille. Qu'est-il arrivé pour que la roue de l'histoire de votre famille opère un si fort virage?

-Je suis née dans une famille musulmane. Mes deux grands-mères étaient croyantes et priaient le namaz [nom persan de la prière musulmane]. La mère de mon père était particulièrement pieuse-elle priait plusieurs fois par jour selon la coutume musulmane, et elle m'a appris les prières musulmanes. Malheureusement, les prières ne me touchaient  pas parce que je devais les répéter en langue arabe, que je ne comprenais pas. Grand-mère ne connaissait pas la traduction. Comme je m’en souviens, je cherchais une foi consciente, et c’est pourquoi une relation de confiance avec Dieu n’est jamais devenue tangible alors.

-Quand cela a-t-il commencé?

-Après avoir fini l'école,  j’ai continué avec détermination à rechercher le sens de la vie, en commençant par [lire] l'ensemble du Coran. Mais je n’ai pas trouvé les réponses à mes questions dans ce livre sage, et j’ai donc commencé à lire divers philosophes: marxistes, idéalistes, puis Soloviev, Berdyaev et Rozanov. Le dernier de ceux-ci me poussa vers le Christ. Mais mon chemin vers Lui fut très épineux: 

A la fin des années 1980, dans le contexte d'un intérêt général pour toutes les choses paranormales, certaines "capacités" se sont ouvertes en moi, et pendant plusieurs années j’ai été coincée dans le bourbier de l'ésotérisme, puis par l'acquisition d'une masse de phobies diverses. Dans ma tête, il y avait alors, selon les paroles du Père André Kouryaev, le plat favori de l'intelligentsia russe -une casserole avec du bouddhisme, de l'ésotérisme, et de la théosophie. Tout était aromatisé à la sauce islamique et poivré avec une vague idée de christianisme. 

C’est alors que j’ai commencé à lire les Évangiles, et je les mettais sous mon oreiller la nuit, car alors seulement je pouvais dormir paisiblement; sans eux j’étais tourmentée par des cauchemars. 

En 1987, ma grand-mère est tombée malade du cancer et en automne, elle était alitée, se souciant avant tout du fait qu’elle serait très probablement morte en hiver et qu’on l'enterrerait dans le sol froid. Puis j’ai eu une conversation purement fortuite avec mon professeur pendant que je dessinais sur les rives de la rivière Smolenka, et je lui ai dit comment ma grand-mère était proche de la mort depuis plus de deux semaines, et que les médecins avaient dit qu'elle ne vivrait pas. Il m’a offert de m’emmener à sainte Xénia [de Saint-Pétersbourg], dont la chapelle n’était pas loin dans le cimetière de Smolensk, parce que Xénia aide tout le monde. 

Quand nous sommes arrivés, il m'a montré où acheter un cierge et où le placer. Il était environ quatre heures. J’ai prié dans mon cœur, demandant à [sainte] Xénia d’aider ma grand-mère et de soulager sa souffrance. Pour une raison étrange, j’avais tellement confiance dans une sainte orthodoxe que je ne connaissais même pas, que lorsque je rentrais à la maison ce soir-là, je ne fus même pas surprise de voir ma grand-mère marcher dans l'appartement, ni du fait qu'elle avait commencé à se sentir mieux à précisément quatre heures.

-Après cela,  vous êtes venue à l'Orthodoxie sans aucun doute?

Icon of the Descent into hades

Icône de la Descente aux enfers de Novgorod
  
-Ce n’était pas si simple. A ce moment, j’avais lu les Evangiles et je me rendais à l'église régulièrement, mais je n'avais pas eu la volonté de me faire baptiser. Après tout, c’est une étape sérieuse que de changer de foi. J’ai compris que ce serait un coup dur pour mes parents, et je craignais pour leur santé. J’ai seulement demandé au Seigneur de me donner un signe clair et compréhensible pour que je puisse comprendre si c’était sa volonté que je sois baptisée. 

Et un jour je suis venue à l'église sur la Smolenka. Il y avait encore deux heures avant le début des offices, pas beaucoup de gens présents, et je me tenais debout dans l'église adjaçante de sainte Xénia de Saint-Pétersbourg, en  m'appuyant sur la colonne. 

Soudain, l'espace autour de moi a changé, tout a disparu. Il n'y avait pas de plancher, pas de plafond, et rien du tout; mais ce n’était pas le vide, mais un bleu foncé épais, presque noir. C’était le noir que l’on voit dans la mandorle sur l'icône de Novgorod, "Descente aux enfers." 

Pendant longtemps, je ne pouvais pas comprendre pourquoi l'espace était sombre et seulement quelques années plus tard, j’ai lu dans les écrits de Denys l'Aréopagite que les gens voient la Divine Lumière Incréée comme obscurité. Eh bien, elle était incroyablement belle, absolument incompréhensible, et mes sentiments étaient comme ce que l'enfant doit ressentir au sein de la protection et de l'amour de sa mère. 

Puis depuis la brume enveloppant toute la zone, une main s’est tendue vers moi, tenant une croix sur une chaîne. Je tendis la main avec la paume de ma main, et quand ils ont placé cette croix en elle, je suis immédiatement retournée à la réalité. Le lendemain, je suis allée pour être baptisée, sans doute aucun.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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