Staretz Séraphim (Batioukov)
1880-1942
8. Le staretz Séraphim (Batioukov)
Un homme est venu à Diviyévo, le futur ascète, le staretz Séraphim (Batioukov). Il vint à Diviyévo parce qu'il y avait là-bas des
moniales qui avaient de l'expérience dans la vie spirituelle. Il était très
jeune à l'époque, comme l'a raconté Matouchka. Il était issu d'une famille très
noble et très pieuse. Il était très jeune et il reçut un enseignement spirituel des moniales de Diviyévo.
Avant la révolution, il était venu au monastère, et
bien sûr, il en avait reçu un grand bienfait. La plupart du temps, il allait voir Mère
Michaela. Quand la révolution avait déjà eu lieu, cet homme, qui a toujours eu tout
ce qu'il fallait dans la vie, a pris le rang sacerdotal pendant le temps de la
persécution, ce qui en dit déjà beaucoup sur lui. Les détails de sa vie peuvent
être appris à partir des souvenirs de Julia Yakovlevna Vasilevskaya, la tante
d'Alexandre Men, que le staretz baptisa. Il connaissait le staretz Nectaire d'Optina qui
lui avait donné une instruction spirituelle, et il était le fils spirituel du staretz Zacharie (Zossime dans le schème), qui fut enterré dans le
cimetière allemand [à Moscou]. Père Séraphim reçut la tonsure monastique, il était était prêtre, Supérieur de l'église des saints Cyr et Jean à Solyanka, le métochion serbe.
Les moniales de Diviyévo qui avaient été près de Mère
Michaela et qui étaient maintenant dispersées, vinrent à lui pour être instruites spirituellement en ces temps orageux. Matouchka était proche du staretz et le
connaissait bien. Un jour, elle pensa: "Il serait bon pour moi de vivre
avec Batiouchka." Eh bien, c'était une pensée venant de sa simplicité
d'âme. Alors Père Séraphim l'a appelée et lui a dit: "Voilà, Pacha, Tu vas à Sergeyev Posad et tu cherches une maison." Alors, elle et sa sœur
Susanne (Xénia) ont acheté une maison à Sergeyev Posad. Puis vint la
déclaration du Métropolite Serge. Père Séraphim ne l'a pas acceptée, et il est parti de là où il vivait, et il est parti avec un autre prêtre pour vivre dans cette maison. Comme Batiouchka le dit lui-même "pour l'amour de la pureté de l'Orthodoxie."
Il est allé pratiquement dans l'Eglise des Catacombes et Matouchka partit
avec lui. Père Séraphim a vécu douze ans dans cette maison. Les offices divins
et la Liturgie étaient célébrés tous les jours, tous les jours les Vêpres…Les offices
n'ont jamais été sautés, et Père Séraphim servait tous les jours. C'était
une petite maison avec deux chambres, un petite avec un couloir étroit, et l'autre un
peu plus grande, avec une petite cuisine. C'est étrange, mais cette petite
maison a accueilli jusqu'à soixante personnes.
Lorsque nous vivions là-bas, nous étions dix ou douze, et elle était bondée. Mais comment une
soixantaine de personnes pouvaient y tenir, cela s'apparente au miracle
évangélique des pains et des poissons, lorsqu'il eut cinq pains pour cinq mille
personnes. Matouchka dit que beaucoup de gens venaient, et c'était au cours de
la période de persécution féroce de l'Église. Mais, et cela est intéressant, Père Séraphim disait: "Tant que je vivrai, personne ne vous touchera, mais
après ma mort, ils le feront, mais tant que je suis vivant, vous, vous n'avez rien à
craindre."
Et vraiment c'était très inexplicable et très étrange que tant de gens
viennent, ils étaient suivis par le NKVD, mais même ainsi [ils n'ont pas été
arrêtés]. Il arrivait même, comme Matouchka le raconte, que l'office soit en cours, et que nous chantions (ils avaient un autel qui était consacré). Nous savons que le NKVD se promène sous les fenêtres, on pourrait
même les voir à travers la fenêtre, mais ils ne pouvaient pas entrer, et donc
le Seigneur nous gardait. Ils se promenaient pendant un moment, puis ils partaient.
Rien ne s'est passé alors tant que Père Séraphim était vivant. Les
persécutions sont venues plus tard."
Au moment où elle vivait avec le père Séraphin, pendant
douze ans, elle a travaillé dans une usine, une usine de jouets semble-il,
et elle a été comptée parmi les travailleurs exemplaires. Elle devait se cacher. Dans
la rue, elle était "tante Pacha," et tous ses voisins la respectaient beaucoup, la traitaient avec grand respect. Beaucoup de gens venaient en
permanence dans sa maison, ne s'intéressant pas à qui elle était. Mais en tout cas, on ne savait pas que le Père Séraphim y vivait.
Peut-être que
quelqu'un le savait, mais c'était si secret qu'il était impossible de
comprendre. Elle allait travailler comme une ouvrière du monde ordinaire. C'était difficile: offices quotidiens, travail très lourd, mais le
Seigneur lui donnait des forces. " Je revenais à la maison,"
disait-elle, " et je ne pouvais plus sentir mes bras et les jambes, mais
je devais chanter et assister aux offices. Malgré cela, elle travaillait si consciencieusement que ses patrons la respectaient beaucoup, et même ils l'envoyèrent dans certains cercles de haut rang de Moscou comme travailleuse exemplaire.
Puisqu'elle ne mangeait pas de viande, la question s'est naturellement posée
de savoir ce qu'il fallait faire quand ils en offraient. Elle demanda à Père Séraphim: "Que dois-je faire au sujet de la viande? Je n'en mange
pas, je suis moniale." Père Séraphim lui dit: " Le Seigneur en prendra
soin, Pachenka... Ne refuse pas; mange tout ce qu'ils te donnent."
Quand ils ont mis de la viande devant elle, elle a essayé d'en manger un peu,
elle n'en avait pas eu dans sa bouche pendant de nombreuses années, et elle s'est immédiatement sentie malade. Tout le monde a dit: "Oh, qu'est-ce que c'est, notre
travailleuse exemplaire, comment cela se peut-il? Eh bien, sans doute, qu'elle a besoin de manger cet autre plat." Ainsi, elle a échappé à la
nécessité de manger de la viande.
Elle ne nous a pas dit grand-chose sur la vie de Père Séraphim, car il y avait déjà un livre écrit sur lui. Comme elle nous l'a
dit, Père Séraphim l'appelait " Bienheureuse Pashenka." Il disait
même: "Bienheureuse Pachenka, viens ici, apporte-moi ceci ou cela, Bienheureuse Pachenka." En outre, l'obéissance qu'elle lui témoignait était intouchable; si Père Séraphim disait quelque chose, il devait en être ainsi."
Vladyka Athanase (Sakharov) vint les voir et se confessa au Père Séraphim. Leur Eglise des Catacombes était sous la juridiction de
l'évêque Athanase. C'était aussi un grand staretz. Père Séraphim était aussi
préparé pour la consécration comme évêque, mais comme le staretz était très
profond, il a apparemment vu que l'Eglise des Catacombes finirait sa mission
et que sa raison d'être cesserait. Peut-être même qu'il demanda au Seigneur de
le guider sur le chemin de sa vie.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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