Sur le plan spirituel, nous sommes souvent le jeune homme riche de l’Evangile. Nous voulons suivre le Christ comme saint Séraphim et tous les saints, mais ne rien abandonner de nos biens et de nos vies, oubliant que celui qui ne donne pas sa vie (son âme) la perdra irrémédiablement.
La parole de Vie du Christ, à cette ombre frêle et velléitaire du jeune homme riche, est forte. Ce dernier en sent le caractère très précieux, mais il préfère ses possessions en grand nombre qu’il n’emportera pas avec lui dans la tombe, plutôt que l’immédiateté de la Vie en Christ qui lui ouvrirait dès à présent et à jamais la richesse éternelle du Royaume des Cieux. Il a l’intuition terrible et fantastique des Biens éternels et de la Vérité qui s’incarne en Christ, il en ressent le caractère authentique, mais il ne peut se résoudre à abandonner ce qu’il a actuellement pour le bref instant de sa vie terrestre qui ne lui appartient pas véritablement et sur lequel il n’a nulle prise. Il ne veut pas troquer la jouissance éphémère et illusoire des biens putrescibles pour entrer vivant dans l’Eternité avec le Maître saint Qui en est le garant et la porte vive. Il repart triste, dit l’Evangile, et même son nom est oublié aujourd’hui du monde qu’il aima tant, c’est dire l’échec de son existence qui n’a pas accédé à la mémoire de Dieu. Il a rencontré la Vie et L’a refusée, refusant aussi la Vérité et la Voie Qui étaient devant lui en la personne du Christ Dieu.
Le Christ nous tend un miroir dans lequel nous nous voyons encore et nous sentons que c’est Lui que nous devons y voir, mais nous nous agrippons à notre image terrestre et nous ne retrouverons pas la ressemblance qui nous réintègrerait dans le Royaume à jamais. Nous n’avons pas le sens véritable de l’Eternité que nous recevrons en héritage.
"Oh, si seulement tu pouvais savoir, dit le starets [Séraphim] au moine, quelle joie, quelle douceur attend les âmes des justes au Ciel, alors tu serais déterminé à supporter dès cette vie passagère, toute épreuve, persécution et calomnie avec gratitude " (in Chroniques du Couvent de Diviyévo, publiées à Saint Péterbourg en 1903, année de la glorification parmi les saints du Starets Séraphim de Sarov)
Tous les podvigs du saint moine visaient à vivre sans discontinuer dans l’amour ineffable de Dieu et ainsi il retrouva à sa mesure l’image et la ressemblance qu’avaient nos premiers ancêtres au Jardin d’Eden avant leur douloureux exil terrestre. L’ours qu’il nourrissait au désert de Sarov n’avait pas peur de l’ermite béni car le père Séraphim avait retrouvé la bonne odeur d’innocence d’Adam au paradis avant la Chute. Puissions-nous par l’ascèse en retrouver une partie pour ne plus sans raison traiter comme des bêtes nos propres frères !
Parce qu’il était entré vivant dans le Royaume par ses podvigs, qu’il rencontra souventes fois la Mère de Dieu Toute Pure et de nombreux saints, il ne demeurait plus seulement dans notre temps matériel linéaire et apparemment fini par la mort : il était dans l’éternité et la Vie véritable qui n’a ni commencement ni fin. Il voyait le passé et l’avenir dans cette même dimension de l’Amour pour Qui ni le temps ni la distance n’existent. Il était devenu Amour et sa recommandation que nous acquerrions le Saint Esprit afin que des milliers autour de nous soient sauvés, il l’a manifestée dans sa vie. Et à l’instar de son maître, il continue à greffer à l’Amour tous ceux qui le suivent sur le chemin du Christ.
Claude Lopez-Ginisty
Une première version de ce texte a été publiée
dans La Chronique de Saint Séraphim de Sarov
dans la revue Diakonia
Fraternité Orthodoxe-Tous les Saints de Belgique
Orthodoxe Broederschap van Alle Heiligen van Belgïe
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