Higoumène Païssi
(1957-2003)
En 1982, le mardi de la Semaine Lumineuse, après la procession et la bénédiction des eaux au port du monastère, deux startsy vénérables de la Sainte et Grande Laure (Chrysostome, plus tard évêque de Rodostolos, et le staretz Bissarion), prirent le bateau pour Iérissos et débarquèrent au port du monastère serbe de Hilandar. Ils furent ensuite emmenés au monastère par un tracteur qui avait été envoyé pour les chercher, et ils firent leur visite et y passèrent la nuit.
Le regretté higoumène Païssi, qui était alors un hiéromoine très vertueux et très zélé, les accueillit chaleureusement et avec beaucoup d'amour.
Dans la soirée, tandis qu'ils parlaient, la conversation vint sur le sujet des ascètes invisibles de la Sainte Montagne, dont, ces derniers temps, il y avait pénurie.
Rebondissant dans la direction dans laquelle la conversation était dirigée, Père Païssi raconta aux Pères lavriotes l'histoire suivante:
"Quand j'étais plus jeune, avec un autre moine le monastère m'envoya à la frontière entre Hilandar et Esfigmenou pour débrousailler un chemin. Nous avons travaillé jusqu'à très tard et sommes rentrés tard dans l'après-midi pour les vêpres, les complies et nos obligations spirituelles.
Dans la soirée, alors que je dormais, je vis un moine que je ne connaissais pas qui me donnait des coups de coude dans le côté en me disant que, si nous avions débroussaillé quelques 20 à 30 mètres plus loin, nous l'aurions trouvé, car c'est là qu'il était."
Il s'est ensuite réveillé et s'est interrogé sur le rêve, sur ce que le moine inconnu avait voulu lui révéler. Le lendemain matin, après l'office, les deux moines repartirent poursuivre leurs travaux.
Tandis qu'ils cheminaient, le Père Païssi raconta à l'autre moine le rêve qu'il avait eu, et ce dernier lui dit que le moine inconnu qui était apparu, devait être un saint ascète qui avait vécu dans ce lieu. Quand ils arrivèrent, ils défrichèrent 20 à 30 mètres plus loin et ne ne trouvèrent rien. Ils pensaient alors chercher dans un rayon de 20 à 30 mètres à gauche et à droite du chemin, pour voir s'ils pouvaient trouver le moine inconnu.
Comme ils cherchaient à travers un endroit presque impénétrable, ils aperçurent quelque chose de noir derrière les branches du sous-bois. Quand ils réussirent finalement à se frayer leur chemin à travers les branches, ils furent assez près pour voir qu'il y avait une grotte. Ils entrèrent et, à leur grand étonnement, ils virent les reliques d'un homme étendu sur le sol. Ils récitèrent un trisaghion (un court office pour les défunts) pour son âme, terminèrent leur travail et retournèrent à leur monastère, étonnés de l'étrange révélation de ce saint ascète inconnu.
*
Le Père Païssi mentionné dans cette anecdote était une personne charmante. Il était de Bosnie et je me souviens de la première fois où je l'ai rencontré. J'avais une chemise jaune que je n'aimais pas beaucoup et j'avais décidé de la teindre en noir pour assister aux offices sur le Mont Athos. Malheureusement, elle en était sortie plutôt tachetée et Père Païssi éclata de rire et la déclara 'furgovano', terme dont aucun des autres Serbes n'avait jamais entendu parler. Il avait été clarinettiste dans un ensemble de jazz avant de devenir moine et quand il vint nous rendre visite un jour, il fut fasciné par une cassette de ragas indiens et en demanda une copie. C'était également un moine très sérieux et c'est sans surprise qu'à un jeune âge, il fut élu comme premier higoumène après que Hilandar soit revenu au système du cœnobium.
Hélas, sa famille fut massacrée par des musulmans bosniaques et il sembla ne jamais vraiment récupérer. Il s'endormit dans le Seigneur en 2002. Puissions-nous avoir ses prières et sa bénédiction.
Hilandar est un monastère très important. Quand le Père Païssi y était, quelques-uns des autres moines étaient Grégoire, qui avait été patrouilleur à moto à Belgrade et qui devint higoumène d'un monastère en Terre Sainte; Père Chrysostome qui avait une débauche de géraniums en dehors de sa kelli et déclarait qu'il ne voulait jamais quitter la Sainte Montagne parce que c'était si beau… il a pourtant fini comme évêque à San Francisco puis à Novi Sad; Père Arsène, qui a fui en Angleterre après la Seconde Guerre mondiale et a travaillé comme maraîcher à Birmingham. Il n'a jamais parlé jusqu'à ce qu'il prenne le Grand Habit et n'a jamais cessé ensuite; et le Père Luc, un ancien steward sur Canadian Pacific Airlines, un des trois linguistes vraiment doués que j'ai rencontrés, et un cuisinier formidable.
Maintenant, il y a une fraternité florissante avec un autre jeune higoumène, frère Méthode.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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