LA CHRONIQUE DE SAINT SERAPHIM
Peu de gens savent que l’épouse de Nicolas Alexandrovitch Motovilov, Elena Ivanovna, était encore en vie au moment de la glorification du saint Staretz de Sarov. La compagne de celui à qui saint Séraphim révéla le « but de la vie chrétienne » vivait encore en effet lorsqu’en l’an 1903, l’Eglise Russe reconnut la ferveur populaire qui depuis longtemps entourait la mémoire sacrée du thaumaturge bien aimé. Elle naquit au ciel le 27 décembre 1910 à l’âge vénérable de huitante-huit ans. Depuis la mort de son époux, elle vivait au monastère de Diviyevo.
Saint Séraphim l’avait guéri et Motovilov souffrait et pensait que sa souffrance était inconnue du saint. Mais un jour soudain, le père lui demanda : « Vous voulez me parler de quelque chose, mais c’est comme si vous n’arriviez pas à rassembler tout votre courage. Parlez avec moi simplement, avec le pauvre Séraphim. Je suis prêt à vous dire , avec l’aide de Dieu, ce que Dieu révèlera. »
Nicolas Alexandrovitch lui dit qu’il était très amoureux d’une jeune femme de la noblesse, une de ses voisines au village de Simbirsk et qu’il souhaitait que Père Séraphim prie Dieu pour que Dieu la lui donne comme épouse.
« Quel âge a cette épouse qui vous est destinée par Dieu ? » demanda le saint.
Nicolas Alexandrovitch répondit : « Elle a perdu son père à l’âge de cinq ou six ans, elle a vécu dix ans avec sa mère ; il y a un an et demi ou plus que sa mère est morte…Je pense qu’elle a seize ou dix-sept ans. »
« Que me dites-vous là, votre Grâce ? Non, non, votre épouse selon Dieu a maintenant huit ans et plusieurs mois, peut-être trois ou quatre, peut-être plus de cinq mois. Mais par décret du Synode, un homme ne peut se marier avant l’âge de dix-huit ans, ni une femme avant l’âge de seize ans. Donc vous devez attendre huit ou dix ans votre épouse promise par Dieu. Sinon, comment pourriez-vous l’épouser ? Ce n’est pas possible, elle est beaucoup trop jeune. »
« S’il vous plaît, Père Séraphim, dit Motovilov qui pensait encore à sa jeune femme noble,, Comment peut-elle être trop jeune ? Selon la loi, je puis l’épouser maintenant. »
« De qui parlez-vous au pauvre Séraphim ? »
« De Yezikova ! répondit Nicolas Alexandrovitch, de Catherine Mikhaïlovna Yezikova ! »
« Ah, dit Père Séraphim, de Yezikova… Eh bien, je ne parlais pas d’elle. Moi, pauvre de moi, je parlais de l’épouse que Dieu entend vous donner, et je vous jure par Dieu, qu’elle ne peut pas avoir plus de huit ans et plusieurs mois. »
Motovilov fut très déçu. Saint Séraphim lui parla longuement en faisant à plusieurs reprises de grandes prosternations, aussitôt imitées par Nicolas Alexandrovitch. Il réussit à le convaincre de se consacrer à cette future épouse. Puis il lui annonça « comme si ses yeux le scrutaient à l’intérieur de lui-même » dit Motovilov, qu’elle était une simple petite paysanne. Mais il ajouta. « Mais ne soyez pas honteux de cela, votre Grâce. Son ancêtre est Adam, et par notre Seigneur Jésus-Christ, elle est votre sœur. »
Nicolas Alexandrovitch Motovilov
Motovilov aimait beaucoup le père Séraphim, mais malgré la prophétie du saint, il s’entêta dans sa passion pour Yazikova. Il lui proposa donc le mariage, mais elle refusa tout net. Elle était déjà fiancée à l’admirable poète Khomiakov. Nicolas Alexandrovitch fut à nouveau malade et ses jambes furent à nouveau paralysées. Il se fit transporter à Sarov le 3 septembre 1832. Les reliques de saint Mitrophane de Voronej venaient d’être inventées. Nicolas Alexandrovitch décida d’aller les vénérer en passant par Sarov. Saint Séraphim lui dit qu’il prierait pour savoir s’il devait être guéri à Sarov ou à Voronej. Et devant Motovilov étonné, il lui déclara le lendemain : Dieu n’a pas voulu que je vous guérisse votre Grâce, vous serez guéri par les reliques de Saint Mitrophane. Maintenant petit père, le Seigneur et la Mère de Dieu me sont apparus cette nuit, à moi l’humble Séraphim, pour la dix-septième ou dix-huitième fois, et Ils ont daigné me révéler toute votre vie, de la naissance à la dormition. Et si Dieu lui-même n’avait pas placé mes doigts sur les blessures des clous et sur Son Saint Côté percé par la lance, je n’aurais pas cru qu’il pouvait y avoir des vies aussi étranges sur terre. Et votre vie sera remplie de telles merveilles et d’étrangetés, simplement parce que pour vous, les réalités du monde sont liées si fermement avec le spirituel et le spirituel avec le monde, qu’il est impossible de les séparer. »
Nicolas eut peur que saint Séraphim ne lui annonce sa mort prochaine. Le père le rassura.
« Non, votre Grâce, vous êtes supposé devenir mon assistant dans l’accomplissement de la Très Sainte Volonté de Dieu. Par « dormition », j’entends votre fin chrétienne paisible, dont le Seigneur vous rendra digne durant le cours de votre vie terrestre. »
Motovilov voulut alors connaître cette révélation de toute sa vie. Mais le saint n’avait pas le droit de lui révéler cette vie. Mais il le mit au service de la communauté de Diviyevo et solennellement devant trois moniales de la communauté, dont Irina Semyonovna Zelyonogorskaya, qui allait devenir higoumène de la troisième communauté, il leur demanda qu’après sa mort, elles lui disent tout ce qui concernait la communauté, et qu’elles le considèrent comme leur protecteur.
Il l’envoya à Voronej où il fut guéri. Mais Nicolas Alexandrovitch ne devait plus revoir le saint qui eut sa bienheureuse dormition pendant son pèlerinage. Et revenu guéri par la grâce de Dieu et de Son saint hiérarque, il se mit au service de la communauté de Diviyevo. (à suivre)
Claude Lopez-Ginisty
Une première version de ce texte a été publiée
dans La Chronique de Saint Séraphim de Sarov
dans la revue Diakonia
Fraternité Orthodoxe-Tous les Saints de Belgique
Orthodoxe Broederschap van Alle Heiligen van Belgïe
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