"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

dimanche 5 février 2023

DIMANCHE DU PUBLICAIN ET DU PHARISIEN


Aujourd'hui, non seulement nous commençons le Triode avec le premier dimanche précédant le Carême, mais nous commémorons également les nouveaux martyrs et confesseurs de la persécution bolchevique en Russie. Il serait impossible de rendre justice à ce vaste sujet en quelques paragraphes, mais nous pouvons nous pencher sur un représentant des multitudes qui ont souffert pour le Christ dans la première moitié du 20e siècle. 

Sts Nouveaux-Martyrs Russes


Saint Patriarche Tikhon

Vasily Ivanovich Bellavin est né en 1865 (l'année où cette maison a été construite) et il a été tonsuré comme moine en 1891, recevant le nom monastique de Tikhon, en l'honneur de St Tikhon de Zadonsk. Il fut élevé à l'épiscopat en 1897 et l'année suivante, il fut affecté à l'Amérique.

 À cette époque, il y avait des paroisses orthodoxes immigrées dispersées dans toute l'Amérique du Nord mais, en raison de leur diversité ethnique, elles n'étaient pas bien organisées. En tant qu'archipasteur, l'évêque Tikhon a beaucoup voyagé, visitant des communautés isolées. Dans son zèle missionnaire, il s'est rendu compte qu'un facteur commun serait la langue et a donc approuvé la traduction des services et des sacrements de l'Église en langue vernaculaire. C'est ainsi qu'est né le livre connu sous le nom de Hapgood Service Book, du nom de la traductrice, Isobel Hapgood. Le format est basé sur le Book of Common Prayer anglican, mais tenter de rassembler les services byzantins en un seul volume n'est pas très satisfaisant en raison de leur complexité. Pourtant, au tout début du XXe siècle, promouvoir l'utilisation de l'anglais dans les services religieux était une idée clairvoyante et plutôt révolutionnaire, non seulement pour le bénéfice de la jeune génération qui grandissait avec l'anglais comme première langue, mais aussi pour rendre plus largement accessible le riche trésor des services de l'Église. L'approbation de St Tikhon publiée dans le livre de service comprend le paragraphe suivant :

Avec la sincérité de la prière et de l'âme, nous invoquons la bénédiction de Dieu sur cette pieuse entreprise, qui a pour objet de répandre sur terre la foi du Christ et de favoriser la communion vivante des croyants dans le Christ avec notre Seigneur et Sauveur, qui est admirable dans Ses saints ; et nous souhaitons un succès et une joie abondants dans l'Esprit Saint à tous ceux qui travailleront à cette grande œuvre.

Après un interrègne de 217 ans, saint Tikhon fut élu patriarche de Moscou en novembre 1917, devenant ainsi le 11e patriarche. Bien qu'il soit qualifié de confesseur plutôt que de nouveau martyr, on peut dire que les souffrances qu'il a endurées aux mains des bolcheviks qui haïssaient Dieu ont constitué un lent martyre. Ce grand et saint homme a rejoint sa récompense éternelle le jour de la fête de l'Annonciation en 1925. Notre église a récemment été bénie par le don d'une icône du patriarche St Tikhon.  En outre, nous possédons une petite icône n bois, sculptée en bas-relief, dans lequel est encastré un fragment du cercueil original de St Tikhon. 

Saint Patriarche Tikhon, prie Dieu pour nous.

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La lecture de l'Évangile de ce dimanche est la parabole du publicain et du pharisien (Luc 18, 10-14) dans laquelle le Seigneur nous met tous en garde contre le péché d'orgueil.

Dans cette parabole, nous voyons deux prototypes. Le pharisien était le gardien de la loi, combinant les caractéristiques d'avocat, de policier et de magistrat. En tant que tel, il cultivait l'image publique de droiture et de vertu. Le publicain (collecteur d'impôts) était un objet de méfiance, voire de haine, dont on ne disait jamais rien de bon. Il nous est montré que l'amour de soi est la cause première du problème. Il se manifeste sous de nombreuses formes : présomption, arrogance, vanité, mais surtout orgueil. La parabole est une leçon pour tous ceux qui ont confiance en eux-mêmes et n'attribuent pas tout à Dieu.

Regardez les premiers mots du pharisien : "Dieu, je Te remercie". Cela ressemble à l'attitude d'un homme reconnaissant qui remercie Dieu de l'avoir sauvé de l'erreur. Il ne le fait pas, mais au contraire, il s'attribue les vertus qu'il imagine et en informe Dieu. S'il croyait avoir reçu un don de Dieu, il n'aurait pas jugé les autres mais aurait fait preuve de pitié. Au contraire, confiant dans sa propre justice, il a regardé les autres hommes de haut en les jugeant et en les méprisant. Notez que le pharisien et le publicain se tenaient tous deux dans le temple, mais il y avait une différence. Le premier se tenait droit, avec une attitude [disant] "regardez-moi", tandis que le second s'inclinait humblement, les yeux baissés, conscient de son indignité. 

Le pharisien était si égocentrique qu'il dressait la liste de ses vertus imaginaires en ajoutant qu'il respectait exactement la lettre de la loi, en jeûnant deux fois par semaine (le lundi et le jeudi, ce qui était la coutume à l'époque) et en donnant la dîme. L'Église nous enseigne à jeûner deux fois dans la semaine, mais le mercredi (le jour où le Christ fut vendu pour trente pièces d'argent) et le vendredi (le jour où le Christ fut crucifié). La semaine prochaine, pour nous rappeler de ne pas être orgueilleux comme le pharisien, nous sommes libérés du jeûne le mercredi et le vendredi. 

Le publicain était beaucoup moins loquace. Il ne murmura qu'une seule phrase : "Dieu ait pitié de moi, pécheur". Si cela vous semble familier, c'est le cas. C'est le sentiment de la Prière de Jésus, Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur. Cette expression d'humilité de la part du publicain attira sur lui la bénédiction de Dieu, car Dieu résiste aux orgueilleux et fait grâce aux humbles (Première épître générale de Pierre 5:5).

La Prière de Jésus occupe une place très particulière dans la spiritualité orthodoxe. Dans le classique russe, Les récits du Pèlerin russe, nous rencontrons un homme dont le cœur a été touché par une phrase qu'il a entendue à l'église, Priez sans cesse (1 Thessaloniciens 5:17). Il s'est ensuite mis en quête de savoir comment une telle chose pouvait être possible. Dans sa quête, il rencontra un staretz (père spirituel) qui lui fit découvrir la Prière de Jésus et la Philocalie. Le tchotki (chapelet de prière de laine nouée) peut être considéré comme un dispositif de comptage. Dans les siècles passés, de nombreux chrétiens pieux étaient analphabètes et ne pouvaient donc pas utiliser de livres de prière. Une règle de prière conçue pour eux consistait à réciter la prière de Jésus un nombre déterminé de fois, par exemple 600 prières à la place des vêpres et 400 pour les petites complies. Par ailleurs, le tchotki peut être une aide à la concentration, mais il n'est pas indispensable à cette fin. Le staretz explique qu'il s'agit d'une prière intérieure qui n'a pas besoin d'être dite à haute voix. Il cite le conseil de saint Siméon le Nouveau Théologien de se taire et de laisser ses pensées aller de la tête au cœur en disant la prière, dans son esprit, tout en expirant. Vous pouvez le faire quelques fois ou continuellement. Tout en étant avertis d'éviter l'orgueil du pharisien par l'exemption du jeûne, nous sommes encouragés à cultiver une âme humble en utilisant la prière de Jésus, en particulier lorsque la tentation nous assaille.   

Dans l'introduction du Triode, nous lisons : La faute du pharisien est qu'il n'a aucun désir de changer sa façon de voir les choses ; il est complaisant, satisfait de lui-même, et ainsi il ne laisse aucun espace à Dieu pour agir en lui. Le publicain, par contre, aspire vraiment à un "changement d'attitude" : il est insatisfait de lui-même, "pauvre en esprit", et là où il y a cette insatisfaction salvatrice de soi, il y a de la place pour que Dieu agisse.

Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après


in Mettingham. 

ENGLAND

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