"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mardi 15 novembre 2016

Deux évêques défendirent les Juifs face aux nazis en Bulgarie.


Métropolite Stéphane
 Métropolite Cyrille

En 1941, après une période de neutralité, la Bulgarie s'allia à l'Allemagne nazie. C'était une décision partiellement motivée par le désir du gouvernement bulgare de reprendre les territoires voisins qu'il avait perdus dans les guerres précédentes. Au début de 1943, le gouvernement de Sofia signa un accord secret avec les nazis pour expulser 20.000 juifs. Les déportations commencèrent avec les juifs dans les territoires annexés.

Entre le 4 mars et le 11 mars de cette année-là, des soldats ont rassemblé des milliers de Juifs et ont préparé des wagons pour les amener au camp d'extermination de Treblinka en Pologne occupée, où environ 850.000 personnes presque toutes juives, périrent.

La nouvelle de la déportation projetée fut éventée, déclenchant des protestations dans toute la Bulgarie. S'opposant à la déportation, le vice-président du Parlement Dimitar Peshev réussit à forcer son annulation temporaire; Mais ce fut seulement un bref répit.

Le 10 mars, les wagons furent chargés de 8.500 juifs, dont 1.500 de la ville de Plovdiv. L'évêque de Plovdiv, le métropolite Cyrille (plus tard Patriarche de l'Église orthodoxe bulgare), ainsi que 300 membres de l'église, se présentèrent à la gare où les Juifs attendaient le transport. Cyrille s'ouvrit un passage parmi les officiers SS gardiens de la zone, et son autorité et son courage étaient tels que personne n'osa l'arrêter, et il se fraya un chemin vers les Juifs à l'intérieur des wagons.

D'après certains récits, il arriva à eux, il dit à haute voix un texte du Livre de Ruth: "Où tu iras j'irai, où tu demeureras je demeurerai; ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon Dieu;" (Ruth 1)

Cyrille, dont la protestation avait la bénédiction du métropolite Stéphane de Sofia, le plus haut fonctionnaire bulgare de l'église bulgare pendant les années hitlériennes, ouvrit un des wagons dans lequel les Juifs avaient été entassés comme des sardines et essaya de pénétrer à l'intérieur, mais alors, les officiers SS l'arrêtèrent  Cependant, lorsqu'une porte est verrouillée, souvent une autre est laissée ouverte. Cyrille se dirigea ensuite vers l'avant du train, déclarant qu'il allait s'allonger sur les rails si le train commençait à bouger.

Les nouvelles de l'acte de désobéissance civile du métropolite Cyrille se propagèrent rapidement. Quelque 42 députés se rebellèrent contre le gouvernement. Les dirigeants de tous les partis politiques envoyèrent des protestations au gouvernement et au roi. Le lendemain, les Juifs furent libérés et retournèrent chez eux.

La lutte n'était pas terminée. Le 15 avril, le roi Boris organisa une réunion du Saint-Synode à son palais pour persuader les évêques de soutenir la politique anti-juive et les plans de déportation nazis. 

"Après tout," dit-il, "d'autres pays ont traité de la même manière le problème juif". Il a fait appel au patriotisme de l'Église pour accepter les lois promulguées par le Parlement, mais son conseil fut rejeté par les métropolites Stéphane, Cyrille et d'autres membres du synode.

En mai, les juifs de Sofia reçurent des ordres de déportation vers la campagne. Les deux principaux rabbins de la communauté juive, Daniel Zion et Asher Hannanel, demandèrent au métropolite Stéphane de leur donner refuge et plaidèrent pour l'annulation de l'ordre d'expulsion. Stéphane envoya un certain nombre de messages au roi, l'implorant pour qu'il ait pitié des Juifs. "Ne persécutez pas, écrivit-il, afin que vous, vous-même, ne soyez pas persécuté. La mesure que vous donnez sera la mesure qui vous sera retournée. Je sais, Boris, que Dieu dans le Ciel veille sur vos actions."

La mort soudaine du roi Boris en septembre 1943, arrêta les tentatives de déportation une fois pour toutes.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, la population juive de Bulgarie était de 48.000. À la fin, elle était de 50.000, faisant de la Bulgarie le seul pays sous le pouvoir nazi qui  finit la guerre avec plus de Juifs qu'au début.

Le métropolite Stéphane est entré dans la vie éternelle en 1957, et le métropolite Cyrille en 1971. En 2003, le mémorial de l'Holocauste Yad Vashem à Jérusalem a reconnu les deux évêques comme Justes parmi les Nations.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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