Il y a deux mois, j'ai appris avec amertume que le calligraphe du tomos d'autocéphalie de l'église ukrainienne (sic) était un moine athonite. [1] Selon l'appel de ma conscience, étant moi-même athonite, je voulais écrire à ce sujet. Ainsi, j'ai lu le texte du tomos après sa publication sur le site du patriarcat œcuménique et j'ai écrit les remarques suivantes. Mais en fin de compte, je ne les ai pas publiées, en attendant que d'autres (plus compétents et mieux informés) s'expriment oralement et par écrit sur ce thème. Beaucoup de choses ont été écrites et dites sur le tomos récemment, et je n'aurais pas lancé ma propre "obole" si on n'avait pas su récemment que quatre ou cinq monastères athonites avaient répondu positivement à l'invitation d'Epiphane [le "primat"-schismatique] d'envoyer une délégation à son intronisation [2] et si deux ou trois Athonites (y compris l'higoumène du hiéromoine qui a écrit le tomos) étaient membres de la délégation du Patriarcat de Constantinople à l'intronisation.
Je présente donc mes observations et mes appréhensions découlant d'une étude du tomos.
Après le premier paragraphe d'introduction du tomos, les mots suivants, concernant le thème principal de l'autocéphalie ukrainienne, commencent par une erreur (et une grossière erreur en plus) : Le texte dit que les dirigeants de léEglise d'Ukraine ont supposément demandé avec ferveur l'indépendance de l'église pour leur pays depuis trente ans (verbatim : "L'Ukraine a été fortifiée et magnifiée par la providence céleste, tout en acquérant une totale indépendance politique, et dans la mesure où ses dirigeants civils et ecclésiastiques ont cherché avidement son auto-administration ecclésiastique pendant plus de trente ans..."), ce qui n'est pas vrai, dans la mesure où ceux qui sont déposés et excommuniés de l'Eglise ou non ne peuvent être appelés les dirigeants ecclésiastiques de leur pays, surtout quand ils ne sont suivis par une partie des fidèles.
Poursuivant avec le texte "nous déterminons et déclarons", il est écrit "que toute l'église orthodoxe se trouve dans les limites de l'État de l'Ukraine, avec son siège sacré métropolitain, archidiocésain et épiscopal, ses monastères et paroisses, ainsi que toutes les institutions ecclésiastiques qui s'y trouvent... existeront par la suite comme canoniquement autocéphales... ayant et reconnaissant comme son premier hiérarque dans toutes les affaires ecclésiastiques son primat canonique président," dont le dernier paragraphe du texte explique que c'est Epiphane !
Sans même se demander si le patriarche a le droit de définir et de résoudre unilatéralement la question complexe de l'Ukraine, n'importe qui se demanderait : Les métropoles et les diocèses des quatre-vingt-dix évêques, qui comptent environ 12 500 paroisses, 250 monastères et 5 000 monastères, ainsi que de nombreuses autres institutions de l'Église autonome ukrainienne (canonique), sous la direction du Patriarcat de Moscou, ont-ils vraiment disparu ? Ou se sont-ils unis aux schismatiques d'Epiphane ? Nous savons que ce n'est pas ce qui s'est passé. Qu'est-ce qui s'applique alors à eux conformément aux dispositions introduites par le tomos ? Seront-ils soumis à Epiphane ou deviendront-ils maintenant anti-canoniques et illégaux du point de vue ecclésiastique ? En effet, une telle conclusion se dégage de la lecture du texte ! Et donc, pour ceux qui reconnaissent la validité du tomos, l'Église qui était jusqu'à récemment "la seule Église canonique d'Ukraine" (selon la déclaration du Patriarcat de Constantinople lui-même), est maintenant illégale !
Quelqu'un se demande-t-il quel crime canonique ces gens ont commis pour que le Patriarche de Constantinople les ait traités de cette façon ? Peut-être qu'ils sont coupables de ne pas vouloir devenir autocéphales et d'entrer en communion avec des schismatiques impénitents ?
Le texte des tomos poursuit en disant que "nous reconnaissons et déclarons cette église autocéphale nouvellement créée comme notre fille spirituelle, et nous recommandons que toutes les Églises orthodoxes du monde entier la reconnaissent" comme une sœur. Mais ce que signifient ces relations entre Églises autocéphales n'est pas expliqué. Cela signifie-t-il qu'en plus des autres obligations que la nouvelle église assume devant le patriarcat (dont les statuts parlent plus clairement), elle sera aussi moralement obligée d'obéir ? Et que les autres Églises autocéphales sont comme des filles pour Constantinople (et des sœurs entre elles) ?
Cependant, les choses sont énoncées un peu différemment par la suite : "En plus de ce qui précède, nous déclarons que l'église autocéphale d'Ukraine connaît comme chef le très saint trône œcuménique apostolique et patriarcal, tout comme le reste des patriarches et des primats." Personne ne se demande vraiment comment une Église autocéphale a une autre Église à sa tête, après tout (comme nous le savons), la tête de l'Église orthodoxe est notre Seigneur Jésus Christ et non un siège patriarcal (cf. Ephésiens 5, 23 ; Col 1, 18).
De plus, le texte dit que les paroisses existant déjà en dehors de l'Etat sont désormais soumises "à l'ordre du Trône œcuménique, qui a autorité canonique dans la diaspora". Mais à quelle diaspora cela se réfère n'est pas expliqué : à la diaspora ukrainienne ou à la diaspora orthodoxe en général ? Si elle s'applique à la diaspora orthodoxe (très probablement), alors pourquoi tant d'autres Patriarcats (Antioche, Moscou, Serbie, Roumanie, etc.) ont-ils des évêques et des paroisses à l'étranger, dans des pays qui n'appartiennent à aucune autre Église autocéphale ? Peut-être que l'ordre et la juridiction auxquels le tomos fait référence concernant la diaspora ne sont pas généralement reconnus ?
Mais le couronnement de tous les problèmes énumérés ci-dessus est la disposition suivante. Le texte parle de la manière dont les hiérarchies et les autres membres du clergé de la nouvelle Église auront le droit "d'adresser des pétitions d'appel au patriarche œcuménique, qui a la responsabilité canonique de juger irrévocablement les questions relatives aux évêques et aux autres membres du clergé des Églises locales, conformément aux Canons sacrés 9 et 17 du quatrième Concile œcuménique de Chalcédoine". Cependant, quiconque a la chance d'ouvrir et de lire Le Pédalion [Le gouvernail/ Recueil des Canons et de leurs commentaires] de saint Nicodème de la Sainte Montagne constatera que les deux règles mentionnées ci-dessus par le tomos ne s'appliquent qu'au clergé du Patriarcat œcuménique, et non à celui des autres patriarcats. Actuellement, les Églises locales autocéphales ne reconnaissent pas ce privilège du patriarcat de Constantinople. [3] Ainsi, la reconnaissance de la légitimité du tomos implique la reconnaissance d'un très grand " privilège " pour le patriarcat de Constantinople, qui, au contraire, ne devrait être digne que du pape de Rome prétendument infaillible, et non d'une hiérarchie orthodoxe.
Ainsi, sur la base de ce qui précède, je pense que la "calligraphie" du tomos d'autocéphalie ressemble à une charte pour la division des orthodoxes. Bien sûr, j'espère que le Seigneur transformera cette division en unité dans la vérité.
Le texte des tomos poursuit en disant que "nous reconnaissons et déclarons cette Église autocéphale nouvellement créée comme notre fille spirituelle, et nous recommandons que toutes les Églises orthodoxes du monde entier la reconnaissent" comme une sœur. Mais ce que signifient ces relations entre Églises autocéphales n'est pas expliqué. Cela signifie-t-il qu'en plus des autres obligations que la nouvelle église assume devant le Patriarcat (dont les statuts parlent plus clairement), elle sera aussi moralement obligée d'obéir ? Et que les autres Églises autocéphales sont comme des filles avant Constantinople (et des sœurs entre elles) ?
Cependant, les choses sont énoncées un peu différemment par la suite : "En plus de ce qui précède, nous déclarons que l'Église autocéphale d'Ukraine connaît comme chef le très saint trône œcuménique apostolique et patriarcal, tout comme le reste des patriarches et des primats." Personne ne se demande vraiment comment une Église autocéphale a une autre Église à sa tête, après tout (comme nous le savons), la tête de l'Église orthodoxe est notre Seigneur Jésus Christ et non un siège patriarcal (cf. Ep 5, 23 ; Col 1, 18).
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
NOTES:
[1] Un moine de Xénophont
[2] Finalement, une délégation athonite n'a pas été envoyée en raison de l'attitude négative de la majorité des monastères.
[3] voir http://orthochristian.com/118371.html (en anglais)
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