Photios Kontoglou
-
Qu’est-ce qui est arrivé après votre première rencontre avec Kontoglou?
-Quand J'ai rencontré
Kontoglou en 1952, il vivait dans un garage qu'une certaine famille riche avait
donné à lui et à sa femme, car il avait dû vendre sa maison pour gagner sa
vie pendant l'occupation allemande.
Ensemble, Kontoglou et moi sommes allés visiter
les églises qu'il avait ornées de fresques et d’icônes. Puis nous sommes allés,
avec son éditeur Alexandre Papademetriou, au monastère du Père Philotheos
[Zervakos|, à Longovarda, sur l'île de Paros.
Kontoglou et Papademitrou avaient
l’habitude d’aller vers le Père Zervakos pour se confesser. Un être remarquable
m'a conduit aux deux autres. J'avais trouvé mon mentor, Kontoglou, et il m'a
présenté à mon futur éditeur, Papademetriou, et à une grande figure
spirituelle, le bienheureux staretz Philotheos [Zervakos]. La compagnie
d’éditions Papademetriou, Astir, est
devenue, et est restée ,mon principal éditeur grec.
-Votre
intérêt pour la Sainte Montagne ne s’est-il pas développé par ces relations?
-Je suis allé à la Sainte
Montagne pour étudier l'art, la vie, et la pensée. En ce qui concerne l'art,
j'enseignais un cours d'esthétique, c'est-à-dire la philosophie de la beauté, et les
beaux-arts, à l'Université de Caroline du Nord à Chapel Hill. J’avais besoin de
diapositives, et j’en ai empruntées beaucoup à la collection du professeur
d'histoire de l'art là-bas. Cependant, il n'en avait pas sur l'art byzantin,
pour lequel j’étais très intéressé. Je suis donc allé au Mont Athos équipé de
mon appareil photo, d’un photomètre, et d’un trépied et j’ai fait une quantité
considérable de photographies.
Quand je suis rentré à Athènes, j’ai passé de
nombreuses heures sur l'Acropole, étudiant l'architecture du Parthénon et le
photographiant. Ainsi j'ai élaboré une bonne collection de diapositives pour
ma classe d'esthétique. Puis je suis allé plus profondément dans la tradition
byzantine par Kontoglou et les Pères de la sainte Église. Au cours des années
1957-1959 J'ai eu une bourse Fulbright en tant que chercheur sur la pensée
grecque moderne. Ce fut une période très productive. Presque tous les dimanches
j'allais voir Kontoglou à son domicile et je parlais avec lui, et il m'amenait voir
des églises qu'il avait décorées. Ma relation avec Kontoglou était très intime,
très importante.
-Il
était comme un père spirituel pour vous?
Un père spirituel, oui. Il
était ce que les Russes appellent un staretz, pour moi. Il était très ouvert.
Je pouvais aller le voir à tout moment à son domicile, et il me recevait, et
nous conversions et mangions parfois ensemble. Sa femme nous rejoignait. Une
ambiance très conviviale.
La porte était toujours ouverte. Et parfois, des gens
importants venaient le dimanche pour parler avec lui. J'ai rencontré beaucoup
de gens intéressants de cette façon: des peintres, des écrivains, des professeurs, des membres
du clergé, des moines.
-Pouvez-vous
résumer le principe sur lequel cette relation fonctionnait, et ce qu'il vous a principalement
transmis?
-Cela a commencé avec mon
intérêt pour l'esthétique de l'art byzantin qui était une partie du cours que
j'enseignais à l'époque. Je voulais une connaissance de première main, et
Kontoglou était le meilleur professeur que j'aie trouvé.
Ensuite, cela s’est
étendu à la musique, parce que Kontoglou avait écrit sur la musique byzantine, et il
était compétent dans ce chant. Parfois, il amené d'excellents chantres
(psaltai) chez lui pour que je puisse enregistrer leur chant, juste pour moi!
Plusieurs des principaux chantres de la Grèce sont venus à l'invitation de
Kontoglou. Donc, beaucoup de choses se sont développées.
J'ai rencontré
beaucoup d'autres personnes par Kontoglou parce qu'il était connu par à peu
près tous ceux qui avaient quelque importance. Il a également mis à ma
disposition la totalité de ce qu'il avait écrit dans les livres, encyclopédies,
journaux et périodiques. Il me disait parfois d'aller à tel ou tel endroit pour
trouver d'autres articles. Alors Kontoglou m’a grandement grandement aidé à
rassembler des matériaux pour l'art sacré byzantin.
-Où pensez-vous qu'il ait reçu le trésor qu'il avait et qu'il vous donnait? D'où tenait-il ce trésor?
-Je dirais que d'abord il
devait beaucoup à Stephanos Kontoglou, son oncle qui était moine. Kontoglou est
né en Asie Mineure, dans la ville de Kydoniai, qui est en face de Lesbos, dont
je suis originaire. Son oncle était higoumène du monastère de Sainte-Parascève,
en dehors de Kydoniai.
-Ce
fut l'inspiration initiale de Fotis Kontoglou, un oncle moine?
-Oui, voilà comment il a
appris à chanter, par son oncle. Et comment il a appris à lire les livres saints
de l'Eglise. Il a reçu sa formation monastique avec son oncle. Il a également étudié
à l'une des meilleures écoles grecques à ce moment-là, une école d'enseignement
supérieur à Kydoniai. Ils avaient un programme très solide d'études et de
formation du caractère.
-Comment décririez-vous les premiers principes sur lesquels Kontoglou s'appuyait? Quels sont ses principes de vie ou ses valeurs de base?
- Ses racines sont dans
l'Église orthodoxe et la foi, y compris dans ses arts sacrés, en particulier
l'iconographie et le chant byzantin. Il a lu beaucoup de livres religieux. Il
est aussi allé à Paris pour étudier l'art, est allé dans des galeries d'art, a
fait des copies, et ainsi de suite.
Auparavant, il était passé de Kydoniai à
Athènes pour étudier à l'École des Beaux-Arts pendant un an ou deux. Son
éducation artistique avait plutôt un caractère profane, parce que l'art
byzantin à cette époque était méprisé, aussi bien à Athènes à l'École des
Beaux-Arts et en Europe. Il a été bien formé dans cette tradition; il
connaissait les peintres de la Renaissance et pouvait en parler d'une manière
érudite.
Puis il est retourné à Kydoniai, et a enseigné l'histoire de l'art et
de la langue française au lycée de jeunes filles. En 1922, les Turcs ont tué ou
expulsé tous les Grecs d'Asie Mineure. Il est parti, avant d’être tué par les
Turcs, et il est allé à Lesbos en voilier avec les membres survivants de sa
famille.
C’était un réfugié sans rien, sauf ce qu'il avait pu emporter. Il insista
particulièrement pour emporter ses icônes. Il les garda avec lui à la maison
jusqu'à son dernier jour. Celles-ci étaient très anciennes, des icônes
traditionnelles qui étaient parvenues à sa famille par le monastère de Sainte
Parascève.
Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Pravoslavie.ru
d'après
Pravoslavie.ru
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