"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 21 novembre 2013

Jean-Claude LARCHET/ Recension: Jean Chrysostome , « L’impuissance du diable »




Jean Chrysostome , « L’impuissance du diable ». Introduction, texte critique, traduction et notes par Sœur Adina Peleanu, Éditions du Cerf, 2013, 240 p. (« Sources chrétiennes » n° 560).
Ce nouveau volume de la collection « Sources chrétiennes » est la publication d’une thèse de doctorat soutenue en 2007 à l’EPHE par œur Adana Peleanu, moniale du monastère de la Protection de la Mère de Dieu à Limours (patriarcat de Roumanie).
Le volume est doté d’une longue introduction qui présente le texte dans son histoire et son contenu.
On considérait, depuis l’édition de Montfaucon au début du XVIIIe siècle, qu’il existait une série de trois homélies sous le thème De la tentation du diable. Sœur Adina montre la première homélie de cette série doit en réalité se rattacher à la série De l’obscurité. Elle édite donc ici les homélies 2 et 3 en les regroupant sous un nouveau titre: L’impuissance du diable.
Ces deux homélies ont été prononcées par Jean Chrysostome à Antioche peu après le début de son sacerdoce en 386. Saint Jean Chrysostome, partant d’une analyse de ce qu’est le diable, justifie l’existence de celui-ci en montrant le profit spirituel que l’on peut tirer en vainquant ses tentations ; mais il souligne en même temps que le pouvoir du diable est limité. D’une part, celui-ci ne peut accomplir que ce que Dieu lui permet de faire ; d’autre part il n’a pas d’accès dans l’âme du chrétien dont la volonté n’entre pas en connivence avec lui.

Saint Jean Chrysostome montre que les véritables causes du mal ne sont pas le diable ni la nature (sur ce second point, il vise le manichéisme), mais la négligence (rathumia) et le mauvais choix. Dieu a créé l’homme libre, et c’est la façon dont ce dernier use de son libre arbitre qui est déterminante pour l’accomplissement du bien ou du mal. Pour cette raison le diable est impuissant devant le libre choix humain, et son existence n’a d’autre but que de l’éprouver, ce dont le fidèle peut tirer un grand profit spirituel en faisant, chaque fois qu’il est tenté, le choix de Dieu. Parmi les exemples bibliques  que fournit saint Jean Chrysostome, se détache la figure de Job, qui, contrairement à Adam et Ève, a fait le bon choix. Il propose alors, sur ces bases, à ses auditeurs, des moyens d’obtenir le pardon et la purification de leurs péchés. Il énonce à cet effet cinq voies de conversion: la reconnaissance de ses propres péchés; le pardon des ennemis; la prière zélée et attentive; l’aumône; la modération et l’humilité. Il invite aussi ses auditeurs à la vigilance intérieure(nepsis) qui est un moyen essentiel pour remarquer et affronter les tentations, et pour faire en toutes circonstance le bon choix. Il leur propose enfin de prendre exemple sur la grande figure biblique de Job, pour y puiser consolation et patience face aux épreuves, mais aussi constance dans la confiance en Dieu.
Ces deux courtes homélies sont d’une grande richesse: elle sont à la fois un traité de démonologie, une réflexion sur la nature du mal ainsi que sur la liberté et la responsabilité de l’homme, et un traité de vie spirituelle. La réflexion de l’auteur est subtile et profonde, mais comme d’habitude le souci pastoral l’emporte chez lui sur la spéculation théologique; on n’y trouve donc aucune complication; la forme de sa pensée, toujours concrète et en rapport avec les questions et les besoins spirituels de ses auditeurs, est accessible au plus large public.

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