Devrions-nous être indifférents à ceux qui pèchent? Pas selon saint Basile le Grand, qui fonde cette opinion sur l'Écriture. Selon saint Basile, le Seigneur a donné des instructions explicites, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, à ce sujet.
Dans le Lévitique, le Seigneur ordonne: "Réprimandez franchement votre prochain afin que vous ne partagiez pas sa culpabilité" (19, 17). Et dans l'Évangile aussi, le Seigneur commande: "Si ton frère a péché, va et reprends-le entre toi et lui seul. S'il t'écoute, tu as gagné ton frère. Mais, s'il ne t'écoute pas, prends avec toi une ou deux personnes, afin que toute l'affaire se règle sur la déclaration de deux ou de trois témoins. S'il refuse de les écouter, dis-le à l'Église; et s'il refuse aussi d'écouter l'Église, qu'il soit pour toi comme un païen et un publicain."(Matthieu 18, 15-17).
Il est donc évident à partir de ces textes bibliques que non seulement nous ne devrions pas être indifférents à ceux qui sont dans le péché, mais nous devrions même les réprimander. Sinon, nous pécherons aussi et nous serons punis pour ne pas avoir blâmé notre frère ou notre soeur en Christ.
Saint Basile fonde cette opinion sur d'autres passages de l'Écriture, soulignant que si vous voulez savoir combien un chrétien sera condamné pour ne pas avoir réprimandé un pécheur (avec amour et douceur, bien sûr), vous n'avez pas besoin de chercher plus loin que la réponse du Seigneur, qui est de nature générale, selon laquelle: "Celui qui croit au Fils a la vie éternelle; celui qui ne croit pas au Fils ne verra point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui." (Jean 3, 36).
Et puis nous pouvons apprendre d'histoires narrées dans l'Ancien et le Nouveau Testament. Saint Basile mentionne, par exemple, le cas d'Achar, qui a volé une part d'or et un manteau. Dieu a puni tout le peuple d'Israël, même s'il ne savait pas qu'il était coupable, ou ce dont il était coupable, jusqu'à ce qu'Achar ait été découvert et ait subi un sort terrible, avec toute sa famille (Josué 6-7).
Après le cas d'Achar, saint Basile se réfère à celui du prêtre, Eli. Eli savait que ses fils étaient en train de pécher et il leur en parla (I Rois 2), mais il ne les punit pas et ne poursuivit pas vraiment l'affaire. Cela irrita Dieu à tel point qu'il détruisit le peuple, avec ses fils. Même l'arche de l'alliance passa entre des mains étrangères, tandis qu'Éli lui-même mourut d'une mort misérable.
Après avoir mentionné ces deux exemples caractéristiques, saint Basile conclut que si la colère de Dieu s'exprimait si fortement contre ceux qui n'étaient pas d'accord avec les pécheurs et contre ceux qui s'opposaient au péché et protestaient contre lui, que dirions-nous de ceux qui connaissent les gens qui pèchent, connaissent le péché, mais sont indifférents aux deux. Ils seront certainement punis sévèrement pour leur manque d'intérêt. C'est ce que Saint Paul dit quand il dit: "...Et vous n'avez pas été plutôt dans l'affliction, afin que celui qui a commis cet acte fût ôté du milieu de vous!" (I Corinthiens 5, 2). Ceci est confirmé par saint Paul quand, s'adressant de nouveau aux Corinthiens qui se préoccupaient du pécheur, il dit: "Voyez ce que cette tristesse divine a produit en vous: quel sérieux, quelle empressement à vous vaincre, quelle indignation, quelle alarme, quel désir, quel souci, quelle disposition à voir la justice rendue. À chaque instant, vous avez prouvé votre innocence dans cette affaire" (II Corinthiens 7, 11).
Un autre Père de la Sainte Église, saint Jean Chrysostome, adopte une vision différente, très humaine et ecclésiastique: celle de l'expression de l'amour pour le Seigneur Jésus et pour ceux qui sont dans le péché. Il dit que l'indifférence de notre part envers ceux qui pèchent démontre que nous ne les aimons pas et que nous n'aimons pas non plus le corps de l'Église dont les pécheurs sont membres. Il nous appelle à nous intéresser à nos frères et sœurs qui ont péché et à les réprimander, mais calmement et avec bon sens, pas dans un esprit de colère.
Nous ne devrions pas dire que nous ne sommes pas intéressés par ce que les autres font, ni dire que chacun de nous portera le fardeau de ses propres péchés. (Cf. Galates 6, 5). Nous sommes également coupables si nous voyons les autres s'égarer et que ne les ramenons pas sur le bon chemin. En effet, si, selon la loi mosaïque, nous ne devons pas être indifférents même envers un animal appartenant à notre ennemi, comment serons-nous pardonnés par Dieu si nous ne sommes pas indifférents envers un animal, ni même envers l'âme d'un ennemi qui est perdu, mais envers l'âme d'un ami (et notre frère ou soeur en Christ)?
Nous ne pouvons donc pas utiliser l'excuse de Caïn quand il dit à Dieu: "Suis-je le gardien de mon frère?" et que nous disons que nous ne sommes pas intéressés par les gens qui pèchent. Saint Jean Chrysostome considère cette attitude non seulement comme inacceptable, mais inhumaine et en conflit avec celle de l'Église.
Il souligne que toute méchanceté provient du fait que nous considérons comme étranger quelque chose qui appartient à notre propre corps. Il poursuit en disant: "Donc, ne soyez pas inhumain, insensible ou indifférent. Parce que les paroles que vous prononcez sont des paroles d'une grande dureté et d'une grande indifférence.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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