"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 11 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)b

Crypte de la Cathédrale: tombeaux des Hiérarques

4. Sous la protection des croix du cimetière ( suite)

Prenons comme exemple Michael Pomazansky. Il ne prononça jamais de vœux monastiques; pourtant, vivant dans le monastère, il fut un modèle pour les moines. Voici ce dont se souvient celui qui partageait sa cellule, le moine Benjamin.

" Tout homme juste a une vertu particulière. Père Michael avait une humilité infinie. Protopresbytre, un des plus éminents théologiens de notre église, merveilleux professeur, auteur de nombreux articles, de quatre livres et d'un manuel de théologie domagtique, dernier diplômé survivant d'une académie de théologie russe, Père Michael vivait sans mettre en avant quoi que ce soit. Ayant accompli tout ce qui lui avait été assigné par l'esprit de l'Evangile, il se considérait encore comme un "serviteur inutile."

Le maelstrom sanglant de la révolution affecta à la fois son pays natal et sa famille. Au temps de la révolution, les parents de Michael était hors de la ville avec leurs enfants. Il rendaient visite à une de leurs filles qui avait déménagé de l'autre côté du Dniepr pendant la guerre. Quand ils revinrent, ils ne trouvèrent que des cendres là où autrefois se trouvait leur maison. Pourtant ce ne fut pas la dernière épreuve qui allait arriver aux parents de Père Michael...

" Un jour, j'ai apporté à Père Michael le livre intitulé " Les nouveaux Martyrs et Confesseurs de Russie" écrit par Père Michael Polsky. Il le lit attentivement, et plus particulièrement la partie consacrée au clergé du diocèse de Kiev massacré, et il trouva beaucoup de ses camarades de classe, de ses professeurs, de ses amis, de ses connaissances parmi eux. Et humble comme à son habitude, il trouva une raison d'être critique vis-à-vis de lui-même. " Ils ont tous souffert, ils sont devenus martyrs et quel bien ai-je fait? Je ne fais rien si ce n'est exister. Je suis un fardeau pour les autres, et je ne fais du bien à personne." Pourtant Père Michael ne souffrit pas moins que les autres, bien que la croix qu'il eut à porter ait été différente. Quand il était jeune, il contracta une paralysie faciale. Seuls ceux qui ont eu cette épreuve savent quelle douleur cela représente. Quelquefois, ses nerfs enflammés sur le visage tremblaient sans cesse pendant plusieurs jours, ne s'arrêtant que quelques instants de trembler. Quelquefois la douleur était si vive que ne pouvant plus la supporter, Père Michael se tapait la tête contre le mur afin d'assourdir la douleur. Je l'ai trouvé dans cet état un jour. C'était un martyr vivant. " C'est pour mes péchés" dit-il et jamais une plainte ne s'échappa de ses lèvres.

A l'exemple du hiérarque Tikon de Zadonsk, Père Michael savait comment trouver le "trésor spirituel" en toute chose. Il trouvait toujours une raison et une voie pour passer de la contemplation des choses terrestres aux choses célestes: dans la nature qui l'entourait, dans les choses banales de la vie de tous les jours, dans ses rencontres avec les gens. C'est probablement la raison pour laquelle saint Grégoire le Théologien lui était si cher, et pourquoi il se sentait si proche de lui... Père Michael ne se lassait jamais de lire ses livres. Pendant les promenades que nous faisions ensemble, il répétait sans cesse: La nature peut nous apprendre à aimer le Créateur, parce qu'Il l'a créée avec amour." Père Michael était un contemplatif, un théologien et un ardent pratiquant de la prière hésychaste. Il était aussi proche en esprit de saint Théophane le Reclus. " Je comprends saint Théophane le Reclus", disait Père Michael" parce qu'il ne voulait pas quitter sa réclusion même à Pâques." Il aurait été plus facile pour moi aussi de célébrer seul dans ma cellule, d'avoir l'expérience de la nuit de la joie pascale dans la quiétude.

Quand Père Michael arriva en Amérique en 1949, l'archevêque Vitaly le nomma Professeur de séminaire de théologie de la Sainte Trinité. Père Michael rejoignit l'équipe enseignante et il enseigna le grec, le salvon d'église et la théologie dogmatique. Ce fut un éminent professeur. Il n'y avait généralement pas de discussion pendant ses cours, non parce que Père Michael était contre, mais parce que personne n'osait interrompre son dicours profond et dynamique.. Père Michael parlait des dogmes de l'Eglise: il parlait d'une manière simple, humble, mais exhaustive, si bien que les questions n'avaient pas lieu d'être, et même si elles faisaient surface, il y avait pour elles des réponses adéquates. Néanmoins, Père Michael disait souvent " Beaucoup de choses restent cachées pour nous, et il est impossible pour nous de tout comprendre."

Après la maladie de son épouse, Père Michael déménagea dans une cellule du monastère. Là, il vécut comme l'un des frères. Il essayait toujours de ne pas être remarqué et pour cela, il choisit une vie de semi-réclusion: il n'allait que dans sa cellule, à l'église, au séminaire et au réfectoire et durant les sept dernières années de sa vie, il alla nulle part si ce n'est de l'église à sa cellule. Il menait une vie ascétique. Un jour durant la première semaine du Grand Carême, je lui demandai, "Père, quelle nourriture dois-je vous apporter?"
" Rien, je veux vivre comme les frères."
" Mais les frères mangent des pommes de terre."
" Rien, merci..."
En dépit de ses paroles, je lui apportai deux pommes de terre en robe des champs. Le lendemain je lui demandai à nouveau, "Père, que dois-je vous apporter?"
" Rien, merci, J'ai encore une pomme de terre du repas d'hier midi."
Père Michael trouvait dans la prière une source d'illumination pour son intellect et pour son cœur. Par la prière, qui attire à nous la grâce purifiante du Saint Esprit, Père Michael devint un théologien véritable, en renonçant aux mortels oripeaux du vieil homme, il put s'embarquer sur la mer de la théologie. Je le trouvai souvent entrain de prier, et involontairement, je ne pouvais m'éloigner de la porte entr'ouverte. Il semblait si digne alors. Son regard était candide et brillant, ses lèvres murmuraient des paroles de la prière et de remerciement. Ils connaissait beaucoup de prières par cœur. ( fin de la deuxième partie) A suivre...

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
Русскiй Инокъ (На главную)

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