Le troisième dimanche après Pâques est consacré non pas aux apôtres ou à des saints célèbres glorifiés pour leurs grandes œuvres et leurs exploits acétiques [podvigs], mais aux femmes les plus ordinaires, dont l'histoire et le service ne sont contenus que dans quelques lignes de l'Évangile.
Ces femmes ont suivi sans relâche leur Maître bien-aimé et ont accompli un travail féminin ordinaire et routinier, bien connu de toute femme moderne au foyer: Elles faisaient la lessive, nettoyaient la maison, préparaient la nourriture et achetaient tout le nécessaire. Parmi elles se trouvaient Marie, dite de Magdala, d'où sortirent sept démons, Jeanne, la femme de l'intendant d'Hérode Chuza, et Suzanne, et bien d'autres, qui le servaient de leurs biens (Lc. 8:2-3).
Jeanne, la femme de l'intendant d'Hérode, servait son maître bien-aimé avec ses biens ; c'est elle qui préserva le chef de saint Jean le Précurseur, qui fut exécuté à l'instigation d'Hérodiade, et elle la conserva sur le Mont des Oliviers. Marie de Cléopas, parente du Christ, serait l'épouse de Cléopas, frère de Joseph le Fiancé. Quant à Suzanne, nous savons seulement qu'elle servit le Christ de sa substance, c'est-à-dire qu'elle était une femme riche qui aidait les apôtres avec de l'argent. Et Marie-Madeleine a également été glorifiée pour son travail d'égale aux apôtres. Comme nous le savons par les évangiles, c'est pour sa foi ardente que le Seigneur ressuscité lui est apparu en premier.
Leur service au Christ diffère peu de ce qu'ils faisaient chez eux, mais l'Église les glorifie à égalité avec les apôtres et les thaumaturges. De plus, ce n'est pas aux apôtres et aux ascètes que le plus grand mystère de la nouvelle foi a été révélé - la résurrection du Christ - mais à ces femmes simples, qui ont tranquillement accompli leur service humble et sans artifice.
Le jour des femmes myrrhophores est le triomphe de l'amour sacrificiel et non critique des femmes sur la raison masculine pragmatique. C'était à ce jour, les circonstances les plus douloureuses et les plus effrayantes de la vie de l'Église qui était en train de naître. Le Maître fut crucifié, les apôtres dispersés et le Corps du Christ a été caché dans un tombeau, scellé par une énorme pierre sur laquelle veillait un garde armé.
Qu'auraient fait les hommes dans une situation similaire ? Ils seraient allés chercher leurs camarades et se seraient armés jusqu'aux dents pour vaincre les gardes. Et ils auraient apporté des outils pour rouler l'énorme pierre hors de la tombe. Mais il n'y avait pas d'hommes autour - les hommes avaient oublié la bravoure et le devoir et s'étaient simplement enfuis, et ces femmes ordinaires et faibles savaient simplement qu'elles devaient aller oindre le corps de leur bien-aimé Maître avec de la myrrhe précieuse. Tout le reste ne les intéressait guère. Elles allèrent discutant entre elles : "Qui va rouler la pierre hors du tombeau pour nous ?" Sans trouver de réponse, elles croyaient simplement, à leur manière de femmes, que tout irait bien.
Tout homme qui aurait pu se trouver en leur compagnie se serait lassé d'essayer de les ramener à la raison et aurait perdu la tête. Mais elles ont simplement cru et sont parties [au jardin]. Et lorsqu'elles arrivèrent au tombeau, la garde s'avéra dormir, la pierre roula et sur le tombeau était assis... un ange, qui leur dit de courir annoncer aux apôtres la grande nouvelle de leur Maître ressuscité. Et cette nouvelle suprêmement importante de notre foi fut acquise avec un amour de femme inébranlable, qui s'est avéré être plus grand que toute la logique et la sagesse masculine du monde ! En ce jour, le monde a appris que le véritable amour est déraisonnable - il est au-dessus de la raison. À l'amour brûlant et au cœur déraisonnable se sont révélés les Cieux et tous les mystères de l'univers, et ce cœur appartenait aux femmes ordinaires.
Le jour des femmes myrrhophores nous révèle les sommets du service féminin quotidien, que nous, les hommes, ne remarquons souvent même pas. Après tout, le travail domestique tranquille de toute femme sur terre a acquis en ce jour une importance sans précédent, grande et universelle. Dans l'épître de l'apôtre Pierre se trouvent ces paroles remarquables, qui en parlent directement :
Femmes, soyez de mêmes soumises à vos maris, afin que, si quelques-uns n'obéissent point à la parole, ils soient gagnés sans parole par la conduite de leurs femmes, en voyant votre manière de vivre chaste et réservée.(1 Pierre 3, 1-2).
Nos grands-mères qui se lèvent à l'aube pour préparer des tartes pour leurs petits-enfants bien-aimés et qui sont prêtes à nous donner leurs dernières ressources, sont des myrrhophores.
Nos mères qui se tenaient jour et nuit à notre chevet lorsque nous étions malades, se réjouissaient de nos plus petits succès et priaient pour nous lorsque nous n'avions pas réussi, sont des myrrhophores.
Nos épouses fatiguées par le travail, qui ne pensent pas à elles tandis qu'elles se hâtent de rentrer à la maison pour nous préparer le dîner et laver nos chaussettes, sont des ascètes spirituelles [podvijnitsi]. Leur amour sacrificiel sans limite, leur patience et le port humble de leur croix tous les jours rendent nos vies trépidantes et malades déformées par les passions plus brillantes et meilleures; et la seule chose que nous pouvons faire est d'être aimants, attentionnés et infiniment reconnaissants.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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