30 janvier / 12 février
Dimanche du Fils prodigue
Synaxe des saints Hiérarques Basile le Grand, Grégoire
le Théologien et Jean Chrysostome
Saint Hippolyte de
Rome, martyr avec ses compagnons saints Censorin et Sabin, sainte Chrysie,
vierge, et 20 autres martyrs (IIIème s.) ; saint Zenon, disciple de saint
Basile le Grand (Vème s.) ; saint Théophile le Nouveau, martyr (784) ; saint
Pierre, roi de Bulgarie (967) ;
saint Zenon le jeûneur, des Grottes de Kiev (XIVème s.) sainte
bienheureuse Pélagie de Diveevo (1884) ; saint Théodore de Mytilène,
néomartyr (1784) ; saints néomartyrs de Russie : Vladimir
(Khrichtchenovitch), prêtre (1933) et Étienne (Nalivaïko),
martyr (1945).
Lectures :
1 Cor. VI, 12–20. Lc. XV, 11–32.
AU
SUJET DU FILS PRODIGUE
C
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e n’est que lorsqu’il fut rentré en lui-même et qu’il eut compris en
quelle misérable situation il
était tombé, que ce fils qui s’était coupé de son Père, pleura sur lui-même en
disant : «Combien de
mercenaires de mon père ont du
pain en abondance et moi je meurs de faim ». Qui sont ces
mercenaires ? Ce sont ceux qui pour la sueur de leur repentir et leur
humilité reçoivent comme un salaire – le salut. Tandis que les fils, ce sont
ceux qui, par amour pour Lui se soumettent à Ses commandements; comme dit
aussi le Seigneur : « Celui qui
m’aime gardera ma parole » (Jn XIV, 23). Ainsi ce plus jeune fils,
privé de sa dignité filiale et qui s’était volontairement exclu de la patrie
sacrée et était tombé dans la famine, se condamne lui-même, s’humilie et dans
le repentir dit : «Je me lèverai,
j’irai et je tomberai aux pieds du Père et je dirai : Père, j’ai
péché contre le ciel et contre toi » (…) Ce père [dans la parabole du
fils prodigue], c’est Dieu ; en effet comment ce fils qui s’était séparé
de son père, aurait-il péché contre le ciel, s’il ne s’agissait pas du Père
céleste. Ainsi il dit : « J’ai
péché contre le ciel », c'est-à-dire contre les saints du ciel et ceux
dont l’habitation est au ciel, « et
devant Toi », qui vis au ciel avec Tes saints. St Grégoire Palamas
Tropaire du dimanche, 1er ton
Кáмени
запеча́тану отъ Iyде́й и во́иномъ стрегу́щымъ пречи́стое Tѣ́ло Tвое́,
воскре́слъ ecи́ тридне́вный, Cпа́ce, да́руяй мípoви жи́знь. Ceго́ ра́ди
си́лы небе́сныя вопiя́xy Tи, Жизнода́вче : сла́ва Bocкреcéнію Tвоемý
Xpисте́ ; сла́ва Ца́рствiю Tвоему́ ; сла́ва cмотре́нiю Tвоему́,
еди́не Человѣколю́бче.
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La pierre
étant scellée par les Juifs et les soldats gardant Ton corps immaculé, Tu es
ressuscité le troisième jour, ô Sauveur, donnant la Vie au monde ; aussi, les Puissances des
cieux Te crièrent : Source de Vie, ô Christ, gloire à Ta Résurrection, gloire
à Ton règne, gloire à Ton dessein bienveillant, unique ami des hommes!
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Tropaire des saints
Hiérarque, ton 4
Я́ко апо́столовъ единонра́внiи, и вселéнныя
учи́телiе, Влады́ку всѣ́хъ моли́те ми́ръ вселéннѣй дарова́ти и душа́мъ
на́шимъ вéлiю ми́лость.
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Emules des Apôtres dans leur vie et docteurs de
l'univers, intercédez auprès du Maître de l'Univers pour qu'Il accorde la
paix au monde et qu'Il fasse à nos âmes grande miséricorde.
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Kondakion du dimanche, 1er ton
Воскpécлъ
ecи́́ я́ко Бо́гъ изъ гро́ба вo сла́вѣ и мípъ coвоскpecи́лъ ecи́, и eстество́
человѣ́ческое я́ко Бо́гa воспѣва́етъ Tя́, и сме́рть изчезе́: Aда́мъ же
лику́ет, Влады́ко, Éва ны́нѣ отъ у́зъ избавля́ема ра́дуется зову́щи: Ты́ ecи́
и́же вcѣ́мъ подая́, Xpисте́ Bocкреcéніe.
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Ô
Dieu, Tu es ressuscité du tombeau dans la gloire, ressuscitant le monde avec
Toi ! La nature humaine Te chante comme son Dieu et la mort s’évanouit. Adam
jubile, ô Maître, et Ève, désormais libérée de ses liens, Te crie dans sa
joie : « C’est Toi, ô Christ, qui accordes à tous la Résurrection ! »
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Kondakion des saints
Hiérarques, ton 2
Cвящéнныя и боговѣща́нныя пpoповѣ́дники,
вéрхъ учи́телей, Го́споди, прiя́лъ ecи́, въ наслаждéніе благи́хъ Tвои́хъ и
yпокоéніе ; труды́ бо о́нѣxъ и cмéрть прiя́лъ ecи́ па́че вся́кaго
всепло́дія, eди́не прославля́яй святы́я Твоя́.
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Seigneur, tu as offert le repos, la jouissance de
tes biens aux prédicateurs
sacrés du message divin, l'élite des Docteurs; à tout holocauste, en effet,
c'est leurs peines et leurs épreuves que tu as préférées, toi qui seul
procures la gloire à tes Saints.
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Kondakion du fils prodigue, ton 3
Оте́ческія cлáвы Tвоея́ удали́хся безу́мно, въ злы́хъ pacточи́въ éже ми́ пре́далъ ecи́ бога́тство ; тѣ́мже Tи́ блу́днаго гла́съ приношу́ : coгрѣши́xъ пре́дъ Tобо́ю Óтче щéдрый, прiими́ мя кáющacя, и coтвopи́ мя я́ко eди́наго отъ нае́мникъ Tвои́xъ.
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M’étant
écarté, comme un insensé, de Ta gloire paternelle, j’ai dilapidé en mal la
richesse dont Tu m’avais comblé. C’est pourquoi je fais monter vers Toi le
mot du Prodigue : « J’ai péché contre Toi, Père
miséricordieux : accueille-moi, repenti, et compte-moi comme l’un de Tes
journaliers ».
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AU BORD DES FLEUVES DE BABYLONE…
Afin de rappeler aux
chrétiens, de façon plus vive, leur éloignement de leur Patrie céleste et leur
asservissement au péché, l’Église, aux matines, après les psaumes du Polyéléos,
chante le psaume 136. Celui-ci était chanté par les Juifs lors de leur
captivité à Babylone, après la chute de Jérusalem et la destruction du premier
Temple. La première partie du psaume (versets 1-6) manifeste l’affliction des
Juifs pour la perte de leur patrie, tandis que la seconde (versets 7-9),
exprime l’espoir du châtiment des agresseurs. Les
« fleuves de Babylone » mentionnées dans le texte sont l’Euphrate, le
Tigre et, peut-être, le Chobar (mentionné par Ezéchiel), sur les rives desquels
les Juifs affligés se rappelaient du Temple de Jérusalem et des offices qui y
étaient célébrés. Les Juifs refusaient de « chanter un cantique au
Seigneur sur une terre étrangère » parce qu’il était interdit de chanter
les cantiques sacrés hors du Temple. St Jean Chrysostome commente: « Les Juifs refusèrent de chanter.
Vois-tu la force que donne l’affliction ? La componction, la contrition
qu’elle opère ? Ils pleuraient, et ils observaient la Loi ; ils
avaient vu les larmes des
prophètes, ils en avaient ri, ils s’en étaient joués, ils s’en étaient moqués ; et maintenant, sans
personne pour leur adresser des exhortations, ils versaient des larmes et
faisaient entendre des gémissements. Les ennemis, de leur côté, retiraient, de
cette conduite, de précieux avantages ; ils voyaient, en effet, que ces
captifs ne pleuraient pas, parce qu’ils étaient captifs, parce qu’ils étaient
en servitude, parce qu’ils habitaient une terre étrangère, mais parce qu’ils
étaient privés du culte de leur Dieu. Voilà pourquoi le Psalmiste ajoute :
« Au souvenir de Sion ». Ils ne pleurent pas en effet seulement par
hasard ; mais pleurer est leur principale occupation ; voilà pourquoi
le Psalmiste dit en commençant : « Nous étions assis et nous
pleurions » (…) Mais pourquoi ne leur était-il pas permis de chanter sur
la terre étrangère ? C’est parce que des oreilles profanes ne devaient pas
entendre ces cantiques secrets. « Comment chanterions-nous un cantique du
Seigneur, sur la terre étrangère ? » (v. 4) Ce qui veut dire :
Il ne nous est pas permis de chanter ; quoique nous soyons déchus de notre
patrie, nous voulons observer toujours la Loi, avec une scrupuleuse fidélité.
Vous avez beau exercer votre domination sur nos corps, vous ne triompherez pas
de notre âme ». La Droite qui abandonnera celui qui oublie Jérusalem
est, selon les Pères, l’aide Divine qui vient des hauteurs. Celui qui oubliera
Jérusalem et, par voie de conséquence, l’alliance entre Dieu et Son peuple,
sera lui-même oublié par Dieu. Les Iduméens et les Édomites, sont les
descendants d’Esaü, frère de Jacob (Israël), surnommé Édom. Ils entretenaient une haine
particulière à l’endroit des Juifs, considérant que par leur faute, ils avaient
été privés des magnifiques terres de Canaan. Pour cette raison, à chaque
occasion, ils se vengeaient et ce de la façon la plus violente. Ils ne
prenaient pas seulement part à toutes les guerres conduites contre les Juifs,
mais ils achetaient aux Assyriens et aux autres peuples des prisonniers juifs,
qu’ils enfermaient dans leurs forteresses pour les torturer. Avec les
Babyloniens, les Iduméens participèrent au siège et à la destruction de
Jérusalem. Selon le commentaire des Saints Pères, les différents qualificatifs
appliqués, dans l’Ancien Testament (notamment le Psautier) au combat physique
contre l’ennemi, dont l’assassinat de qui que ce soit ou l’appel à le faire, ou
encore la description admirative de ce qui est fait aux ennemis du peuple
d’Israël, sont appliqués non à des personnages concrets, mais aux passions et
aux vices qui affectent la nature humaine. C’est ainsi que les «petits
enfants » dont il est ici question sont les pensées pécheresses qui sont
brisées par la Pierre de la Foi, le Christ Sauveur.
Sous le règne de l’empereur Alexis Comnène
(1081-1118), une querelle vint à diviser à Constantinople les hommes instruits
dans les choses de la foi et zélés pour la vertu, au sujet des trois saints
hiérarques et éminents Pères de l’Église : Basile le Grand, Grégoire le
Théologien et Jean Chrysostome. Les uns disaient préférer saint Basile aux deux
autres, car il a su expliquer les mystères de la nature comme aucun autre et il
s’est élevé au rang des anges par ses vertus. Organisateur du monachisme, chef
de l’Église entière pour lutter contre l’hérésie, pasteur austère et exigeant
quant à la pureté des mœurs, il n’y avait en lui rien de bas ni de terrestre.
C’est pourquoi il était, disaient-ils, supérieur à saint Chrysostome qui, par
nature, était plus facilement porté à pardonner aux pécheurs
D’autres, prenant le parti de l’illustre
archevêque de Constantinople, rétorquaient que saint Chrysostome n’avait été en
rien moins zélé que saint Basile pour combattre les vices, porter les pécheurs
au repentir et élever tout le peuple à la perfection évangélique. Insurpassable
par son éloquence, ce pasteur à la « bouche d’or » a arrosé l’Église
d’un véritable fleuve de discours, dans lesquels il a interprété la parole de
Dieu et a montré comment l’appliquer dans la vie courante, avec une maîtrise
supérieure aux deux autres saints Docteurs.
Un troisième groupe soutenait que saint
Grégoire le Théologien leur était supérieur, à cause de la majesté, de la
pureté et de la profondeur de son langage. Maîtrisant en souverain toute la
sagesse et toute l’éloquence helléniques, il avait atteint, disaient-ils, un
tel degré dans la contemplation de Dieu que personne comme lui n’a su exprimer
si parfaitement le dogme de la Sainte Trinité.
Chacun défendant ainsi l’un des Pères contre
les deux autres, la querelle gagna bientôt tout le peuple chrétien de la
capitale et, loin de favoriser la dévotion pour les saints, il n’en sortait que
troubles, discordes et disputes sans fin entre les trois partis. C’est alors
qu’une nuit les trois saints hiérarques apparurent en songe à saint Jean Mauropos,
métropolite d’Euchaïta [5 oct.], d’abord séparément puis tous les trois
ensemble. Et, d’une seule voix, ils lui dirent : « Comme tu le vois,
nous sommes tous les trois auprès de Dieu et aucune discorde ou rivalité ne
nous séparent. Chacun d’entre nous, selon les circonstances et selon
l’inspiration qu’il avait reçue du Saint-Esprit, a écrit et enseigné ce qui
convenait pour le salut des hommes. Il n’y a ni premier, ni second, ni
troisième entre nous ; et si tu invoques l’un de nous aussitôt les deux
autres sont présents avec lui. Aussi ordonne à ceux qui se disputent de ne pas
créer de divisions dans l’Église à cause de nous, car lorsque nous étions en
vie tous nos efforts ont été consacrés à rétablir l’unité et la concorde dans
le monde. Puis réunis en une fête nos trois mémoires et composes-en l’office en
y insérant les hymnes dédiées à chacun d’entre nous, selon l’art et la science
que Dieu t’a donnés, et transmets-le aux chrétiens en leur ordonnant de le
célébrer chaque année. S’ils nous honorent ainsi, comme étant un auprès de Dieu
et en Dieu, nous leur promettons d’intercéder dans notre commune prière pour
leur salut. » Sur ces mots, les saints furent enlevés au ciel dans une
lumière indicible, en s’adressant l’un à l’autre par leurs noms.
Saint Jean rassembla alors sans retard le
peuple et lui communiqua cette révélation. Comme il était respecté de tous pour
sa vertu et admiré pour la force de son éloquence, les trois partis firent la
paix et tout le monde l’exhorta à se mettre sans retard à la composition de
l’office de la fête commune. Avec un fin discernement, il choisit de consacrer
le trentième jour de janvier à cette célébration, comme pour sceller ce mois
pendant lequel on commémore séparément chacun des trois hiérarques[1].
Comme l’évoquent de nombreux tropaires de cet
office magnifique, les trois Hiérarques, « trinité terrestre »,
distincts par leurs personnes mais unis par la grâce de Dieu, nous ont
enseigné, tant par leurs écrits que par leur vie, à adorer et à glorifier la
Sainte Trinité, le Dieu unique en trois Personnes. Ces trois luminaires de
l’Église ont répandu par toute la terre la lumière de la vraie foi, au mépris
des dangers et des persécutions, et ils nous ont laissé, à nous leurs
descendants, ce saint héritage par lequel nous pouvons atteindre aussi la
béatitude suprême et la vie éternelle en présence de Dieu, avec tous les
saints.
En clôturant le mois de janvier, pendant
lequel nous célébrons la mémoire de tant de glorieux hiérarques, confesseurs et
ascètes, par la fête commune des trois grands Hiérarques, l’Église récapitule
en quelque sorte la mémoire de tous les saints qui ont témoigné de la foi
orthodoxe par leurs écrits et par leur vie. Avec cette fête, c’est tout le
ministère d’enseignement, d’illumination de l’intelligence et des cœurs des
fidèles par la parole, que nous honorons. La fête des trois Hiérarques est donc
en définitive la commémoration de tous les Pères de l’Église, de tous ces
modèles de la perfection évangélique que le Saint-Esprit a suscité d’époque en
époque et de lieu en lieu, pour être de nouveaux prophètes et de nouveaux
apôtres, les guides des âmes vers le Ciel, les consolateurs du peuple et des
colonnes de prière incandescentes qui soutiennent l’Église et la confirment
dans la vérité.
[1]. S. Basile le ler, S. Grégoire le 25, et la translation des
reliques de S. Jean Chrysostome le 27.
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