"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 5 novembre 2015

Laurence Guillon: La Croix (Gammée) et la Bannière (Orthodoxe)



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1455
Laurence Guillon

Au début du conflit ukrainien, quand on en était seulement à l’Euromaïdan, un cosaque avait écrit une lettre pour préciser que les cosaques zaporogues n’avaient rien en commun avec les Ukrainiens de l’ouest ni les uniates galiciens, qui cherchaient à s’approprier leur gloire, les uniates n’étant rien de plus que des renégats, et que si un cosaque pouvait éventuellement épargner un polonais, il ne faisait pas grâce à un uniate, traître par définition. En effet, l’Eglise gréco catholique ou uniate a été le résultat d’une politique de conversion forcée des serfs orthodoxes des nobles polonais. Si je fais mémoire de cette opinion cosaque sévère et de cet événement historique, c’est que j’ai d’abord lu un article sur la déclaration pleine de retenue du Métropolite Onuphre, chef de l’Eglise Ukrainienne orthodoxe Canonique, et que m’est tombé sous les yeux, dans la rubrique « articles connexes » d'un site, celui de la Croix consacré au chef des Uniates d’Ukraine, Mgr Sviatoslav Shevchuk
Je vous invite à comparer les deux articles, l’exercice étant plein d’enseignements.


Nous n’avons pas le droit de justifier la guerre par des slogans religieux, proclame le métropolite Onuphre, primat de l’Eglise Orthodoxe Ukrainienne canonique. Et sans faire référence ni au pseudo patriarche Philarète autoproclamé qui va réclamer des armes aux USA, ni au monseigneur des Uniates, ni aux persécutions réelles dont sa propre Eglise est l’objet, il cite en exemple deux princes de ce qui n’était alors ni l’Ukraine ni la Moscovie, mais la Rous originelle dont sont issues toutes les Russies, la grande Russie, la petite Russie et la Biélorussie, Boris et Gleb, qui se sont laissé assassiner par leur frère félon plutôt que de se dresser contre lui au prix d’une guerre civile. Il appelle à la paix, à la réconciliation, sans un mot de reproche à l’égard des formations « concurrentes » :
La mort abrupte efface toutes les différences entre les vivants. Dans les tombes, il n’y a ni hommes de droite, ni hommes de gauche. Dans les tombes reposent aujourd’hui les enfants de notre Église, tant dans l’est, que dans le centre, ou dans l’ouest de l’Ukraine. Si nous n’arrêtons pas la guerre dans nos cœurs, elle éclatera à l’extérieur. En ces jours, le Seigneur nous donne la possibilité d’éprouver notre foi et notre attachement à l’enseignement du Christ. Je suis convaincu que ce n’est que dans le service de la paix et de l’amour qui pardonne tout, que nous trouverons la force pour la renaissance rapide de notre Patrie sous la protection de la sainte Église orthodoxe.

Le métropolite Onuphre


Le métropolite Onuphre, primat de l’Eglise Orthodoxe d’Ukraine


« L’Europe doit tout faire pour ramener la paix en Ukraine » dit Monseigneur Viatcheslav Shevchuk, le primat des Uniates, à la Croix, qui lui offre une tribune. «Tout », c’est-à-dire quoi, monseigneur, dans le contexte ? Le métropolite Onuphre a-t-il déclaré que « Moscou devait tout faire pour rétablir la paix en Ukraine » ? Non, il n’en a pas parlé, lui, il a parlé de ramener la paix dans le cœur de chacun, afin de la ramener aussi dans le pays, ce qui est une démarche plus spirituelle et plus chrétienne, convenons-en.


Monseigneur Viatcheslav Shevchuk

Monseigneur Viatcheslav Shevchuk, primat de l’Eglise gréco-catholique d’Ukraine


Monseigneur Viatcheslav Shevchuk dénonce une « persécution ethnique ». Où ça, au Donbass, où les gens prennent des bombes sur la tête depuis des mois, où l’armée ukrainienne vise systématiquement les églises, les monastères, les hôpitaux et les écoles, où les enfants vivent dans des caves, où les prisonniers novorussiens sont crucifiés et brûlés vifs par des néonazis en goguette ? Non, pas du tout, des persécutions ethniques en Crimée ! Les Ukrainiens uniates sont persécutés en Crimée ! Ah bon. Première nouvelle, heureusement qu’il est venu la révéler à la Croix. Cette publication a-t-elle, soit dit en passant, vérifié l’info ? En Crimée, et au Donbass lui-même, a-t-il le front de dire, où les uniates fuient épouvantés les persécutions des russophones ! Pourtant le Donbass n’est pas précisément l’endroit où, traditionnellement, grouillaient les populations uniates, principalement galiciennes et situées dans la partie occidentale de l’Ukraine, autrefois polonaise et autrichienne, et principal soutien des nazis de Bandera lors de la seconde guerre mondiale, et des néonazis de Kiev, aujourd’hui. Mais il nous l’affirme, dans ce conflit, c’est l’Ukraine, qui souffre, enfin la sienne, l’uniate. Les sous-hommes orthodoxes du Donbass comptent pour du beurre.
Pour Monseigneur, le patriarcat de Moscou est « enfermé dans le déni et l’agression verbale ». Le Métropolite Onuphre fait preuve d’une « attitude de repli et de surdité à l’égard de la société ukrainienne ». D’après lui le pape sait que ce qu’il dit « correspond à la réalité et n’a rien d’idéologique ».
Quand des politicards et des journaleux faux-culs ordinaires mentent effrontément, c’est répugnant mais on s’y fait. Quand une publication appelée « la Croix » répercute les menteries d’un prélat retors, ça fait drôle…

Parlons-en, des persécutions ethniques et religieuses :
J’aborderai maintenant un troisième article instructif publié par le blog « Parlons d’orthodoxie » qui n’est pas particulièrement « pro Poutine ». Cet article, intitulé « Réflexions sur l’Eglise Gréco-catholique d’Ukraine et la déclaration de Balamand », permettra à toute personne ignorante des tenants et aboutissants de la question uniate en Ukraine de se faire une idée : ‪Réflexions sur l'Eglise gréco-catholique d'Ukraine et "La déclaration de Balamand"

Voici quels furent les débuts de l’Eglise uniate :
L'Eglise "uniate" d'Ukraine fut créée en 1596 quand l'Ukraine faisait partie du royaume Lituano-polonais; sous la pression des autorités catholiques, le métropolite de Kiev et 6 évêques sur 8 signèrent l'Union de Brest-Litovsk qui reprenait les conclusions du Concile unioniste de Florence-Ferrare (1439-1440), rejetées par Moscou et Constantinople. Les Orthodoxes réfractaires (clergé paroissial, monastères, Cosaques qui créèrent un éphémère état indépendant (1646) avant de passer sous protectorat russe en 1654) furent privés de tous droits religieux et une sévère répression s'abattit sur ceux qui résistaient; les églises, monastères et biens de l'Eglise, passèrent aux "Uniates". Ces persécutions contre les Orthodoxes devinrent alors un abcès permanent entre Rome et l'Orthodoxie.
Cette Eglise fut supprimée par Staline, nous informe l’article, sous l’accusation d’avoir collaboré avec les nazis et encouragé les revendications nationalistes. Puis elle fut rétablie et reconnue par Gorbatchev en 1989, et reprit ses vielles habitudes :
Dès leur reconnaissance par les autorités en 1989 (M. Gorbatchev, Secrétaire général du PCUS), les communautés gréco-catholiques s'emparèrent de leurs anciennes églises, où officiaient des communautés orthodoxes, souvent avec violence, et les Orthodoxes se retrouvèrent sans lieux de culte. En effet, de nombreuses églises et monastères avaient été confisqués après l'annexion et durant les répressions Khrouchtchéviennes (7) et les Orthodoxes officiaient donc dans les églises qui leur avaient été laissées. Ce sont à elles que les Gréco-catholiques s'attaquèrent en premier, avec la complicité des autorités, et non à celles, transformées en ¨divers établissements laïcs, que les autorités protégeaient.

"L’uniatisme a commencé une expansion active en Ukraine, cherchant à dépasser les limites de l’Ukraine occidentale et à s’implanter dans les régions orientales où il n’était guère présent auparavant. La preuve la plus triste de cette orientation fut le transfert en 2005 de l’archevêché majeur des gréco-catholiques de Lvov à Kiev et le projet de l’élever au rang de patriarcat qu’elle n’a jamais eu dans l’histoire. Ainsi, l’uniatisme n’est pas seulement un fait douloureux du passé qui, pendant des siècles, a divisé l’Orient et l’Occident, mais demeure un grave obstacle sur le chemin du rétablissement de l’unité perdue entre les Églises" écrit Mgr Hilarion en 2009 (ibid. note 1).
Car, nous dit l’article : « Les Gréco-catholique d’Ukraine considèrent que leur Eglise est élue par Dieu pour apporter la vraie foi aux Eglises d'Orient, avec une vision messianique qui s'affirma particulièrement entre les deux guerres. »

Nous apprenons qu’un accord a été conclu à ce propos entre le Vatican et les Eglises orthodoxes : l’accord de Balamand :
Le dialogue théologique entre les Églises, qui se développait après la première "rencontre au sommet" de 1964 (6) et la levée des anathèmes un an plus tard, fut consacré au sujet de l'uniatisme pendant la dernière décennie du siècle à la demande des délégués orthodoxes; les assemblées plénières de la Commission mixte à Freising (Allemagne, 1990), Balamand (Liban, 1993) et Baltimore (États-Unis, 2000) ont adopté plusieurs déclarations importantes à ce sujet dont la "Déclaration de Balamand", particulièrement importante puisque Rome admet pour la première fois que l'uniatisme pose problème et ne doit pas s'étendre (voir Conférence du Professeur Michel Stavrou pour l'analyse détaillée de ce texte). "Ce texte est intitulé « L’uniatisme, méthode d’union du passé, et la recherche actuelle de la pleine communion », et comporte 3 grandes décisions :
1.            La démarche de l’uniatisme est condamnée par les deux Eglises catholique et orthodoxe en tant que méthode d’union et en tant que modèle d’unité ;
2.            Les deux Eglises se reconnaissent mutuellement comme Eglises Sœurs ;
3.            Les orthodoxes s’engagent « par économie » à respecter les communautés uniates existantes.

Cet accord, nous dit-on, devait mettre fin au prosélytisme des uniates, mais il n’a jamais été signé. Et le prosélytisme actif des uniates n’a fait que croître et embellir, soutenu qu’il était par toutes sortes de forces nationales ou étrangères qui avaient intérêt à éradiquer ce qui était russe, russophone et orthodoxe en Ukraine.  
« L'Église gréco-catholique d’Ukraine se livre à des activités politiques directes, malheureusement, en utilisant des slogans russophobes tranchants et en lançant de durs jugements contre l'Église orthodoxe russe dans ses déclarations publiques » a déclaré le patriarche Cyrille, estimant qu'un tel comportement « russophobe jette une ombre très mauvaise » sur les relations entre l’Église russe et le Vatican. Il faut aussi souligner que l'Église gréco-catholique joue sur les dissensions internes à l'Orthodoxie Ukrainienne en menant des actions conjointes avec l'Eglise Orthodoxe Ukrainienne (soi- disant patriarche [b]Philarète). "Le chef de l’Église gréco-catholique d’Ukraine et le chef du soi-disant Patriarcat de Kiev ont arpenté les cabinets du Département d’état des États-Unis, incitant les autorités américaines à intervenir et à mettre de l’ordre en Ukraine" accuse Mgr Hilarion de Volokolamsk.[/b]
C’est clair, n’est-ce pas ? L’expansion politique importe beaucoup plus que la charité chrétienne et la compassion, comme on l’a vu aussi avec les exactions des catholiques croates contre les Serbes pendant la seconde guerre mondiale. C’est sans doute pour cela que monseigneur Viatcheslav Shevchuk vient demander le secours de l’Europe en se gardant bien d’évoquer les massacres commis au Donbass par son armée. On pourrait penser, au vu de la déclaration de Balamand, que les catholiques normaux, occidentaux, modernes, démocrates et œcuménistes n’encourageraient pas la conversion à coups de bombes sur la tronche, la conversion musclée du croisé ou du conquistador, si souvent stigmatisée quand elle s’exerce en tout autre endroit du monde que les pays slaves. Mais non, la Croix abonde dans son sens, couvre ses mensonges, met le pape dans le bain. Au fait, qu’en pense-t-il, le pape ? Eh bien, nous dit l’article de « Parlons d’orthodoxie »,  « le Vatican a toujours eu une attitude assez ambiguë vis-à-vis des gréco-catholiques. Ainsi, il ne leur accorde pas d'autonomie canonique et ne donne pas suite à leurs demandes d'érection en patriarcat, mais les Papes successifs soulignent à plusieurs reprises leur attachement à cette Eglise, ce qui provoque régulièrement des crises dans les relations avec l'Eglise russe (annulation d'une rencontre de théologiens orthodoxes et catholiques à Odessa en 1979, absence de la délégation de l'Eglise russe à la 4ème réunion de la Commission Théologique mixte à Bari en 1986 …) »
Evidemment…


Pour ce qui est des épurations ethniques, s’il reste un soupçon de conscience à la Croix qui n’est peut-être pas encore complètement gammée, que ses journalistes aillent se renseigner sur ce qui se passe vraiment en Ukraine et que couvre le monseigneur uniate :
              Voici ce qu’il reste du monastère orthodoxe de la Vierge d’Ibérie et de son cimetière, après les bombardements ukrainiens :
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              Voici l’un des nombreux témoignages de civils, auxquels la presse occidentale ne donne aucun écho :
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              Et plus généralement, une rétrospective de ce forfait commis avec l’assentiment occidental et la bénédiction du monsignore :
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              Et enfin, le témoignage d’un Français qui sauve l’honneur de notre triste France :
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La Croix peut sans doute organiser une collecte charitable pour aider ce juste solitaire ?
Si je continue à voir passer ce genre d’articles, eh bien la prochaine fois qu’on me convie à une réunion œcuménique, excusez-moi, mais je ne risque pas d’y aller !


Laurence Guillon,

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