Le fruit de l'acquisition de la grâce divine n'est pas seulement les bonnes œuvres et la vertu, mais une véritable union avec Dieu. Tout d'abord, la grâce agit pour purifier le cœur de toutes les passions et inclinations pécheresses. Ceux qui atteignent cet état spirituel sont appelés des êtres dépassionnés. Cela ne signifie pas que l'on est indifférent ou déconnecté, mais que les énergies de l'âme ont été détournées de tout ce qui est mauvais et redirigées vers Dieu. L'homme dépassionné n'est pas contraint par une quelconque impulsion pécheresse. Au contraire, il est libre d'aimer et de choisir d'aimer Dieu et les autres sans se soucier de soi-même ou de ce que les autres peuvent penser.
Lorsque le cœur a été purifié, la grâce illumine alors le cœur, donnant le discernement et la compréhension ou la connaissance spirituelle. Celui qui est illuminé a une vision et une clarté spirituelles et est capable de reconnaître la vraie nature des choses créées et la présence de l'Incréé. Saint Paul fait généralement référence à cette condition spirituelle lorsqu'il écrit que "les yeux de votre intelligence sont éclairés, afin que vous sachiez quelle est l'espérance de son appel, quelles sont les richesses de la gloire de son héritage dans les saints" (Cf. Ephésiens 1:18).
Enfin, la grâce agit davantage sur le cœur de ceux qui sont illuminés pour compléter l'union avec Dieu, de sorte que "ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi" (Galates 2:20). Les Pères de la Sainte Église utilisent le terme de théosis ou déification pour décrire cet état spirituel exalté d'union avec Dieu par la grâce. De même que la nature humaine de Jésus-Christ a été pleinement infusée et saturée par les énergies divines émanant de Sa nature divine, de même il est possible par grâce pour les êtres humains de devenir des réceptacles de la grâce divine.
Les saints utilisent l'analogie du fer et du feu, le fer représentant la nature humaine et le feu, la Nature Divine. Lorsque le fer est placé dans le feu pendant un certain temps, il devient rouge et chaud, ayant acquis les propriétés du feu. Cependant, le fer n'est pas devenu du feu par nature mais par contact continu avec le feu.
De même, celui qui, par la grâce de Dieu, a été pleinement uni à Lui est imprégné de Sa vie Divine de telle manière qu'il manifeste des dons spirituels, et des fruits semblables à Dieu Lui-même. De même que le fer placé dans le feu conserve les propriétés du feu lorsqu'il en est retiré, de même l'humanité de celui qui est spirituellement parfait est unie et se mêle au feu de la vie divine. Il s'est uni à Dieu de façon permanente et durable et fait l'expérience de Sa Lumière Incréée comme une réalité continue (et parfois visuelle). Cependant, comme le fer ne devient pas le feu lui-même, mais participe et partage les propriétés du feu, ainsi la nature humaine participe à Dieu par la grâce, et non par la nature. Seule l'humanité du Christ a reçu la déification (théosis) par la nature à la suite de son union avec sa Nature Divine.
Ces étapes spirituelles ne sont pas mutuellement exclusives ou parfaitement compartimentées ; il y a progression (ou digression) et chevauchement. Les Pères de la Sainte Église enseignent que la grâce de Dieu est unique ; il existe différentes sortes de grâce. Cependant, la grâce agit en chaque personne en fonction de sa condition spirituelle actuelle.
La grande majorité des chrétiens luttent encore pour la purification du cœur et ne devraient jamais s'imaginer ou se mesurer comme ayant atteint de grands sommets spirituels. Ceux qui ont atteint une grande sainteté sont toujours caractérisés par une extrême humilité.
LES SAINTS PERES DE L'ÉGLISE SUR LA GRÂCE
Saint Jean Cassien (360-435 après J.C.), commentaire de 1 Corinthiens 15:10.
"Quand il dit "j'ai travaillé", il montre l'effort de sa propre volonté ; quand il dit encore non pas moi, mais la grâce de Dieu, il souligne la valeur de la protection divine ; quand il dit avec moi, il affirme que la grâce coopère avec lui quand il n'est pas oisif ou négligent, mais travaille et fait un effort".
Dans toutes ces [citations bibliques], il y a déclaration à la fois de la grâce de Dieu et de la liberté de notre volonté, car même de sa propre activité, un homme peut être conduit à la recherche de la vertu, mais il a toujours besoin de l'aide du Seigneur.
Car ces deux éléments, c'est-à-dire la grâce et le libre arbitre, semblent en effet opposés l'un à l'autre ; mais ils sont en harmonie. Et nous en concluons que, par piété, nous devrions accepter les deux, de crainte qu'en les assumant loin de l'homme, nous ne semblions violer la règle de foi de l'Église".
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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