15. Tonsure
Lorsque les orphelins ont grandi, ils ont quitté
cette maison. Matouchka était très étroitement liée à la Laure de la Sainte
Trinité-Saint-Serge à Serguiev
Possad.
Un jour, elle alla vers le moine du grand schème,
l’higoumène Koukcha à Odessa. Quand elle arriva vers lui, il porta une
accusation contre elle, se demandant pourquoi elle n'avait pas reçue la
tonsure, et dit qu'il était grand temps [de le faire]. Ce staretz la bénit pour
recevoir la tonsure monastique. Elle fut tonsurée avec le nom d’Arsène, d’après
saint Arsène, évêque de Tver. Son premier nom monastique était masculin, Arsène,
et dans le schème elle fut Nikodima (venant de Nicodème, nom également
masculin).
16. "Martha"
Plus
tard Matouchka travailla dans la Laure pour nourrir les moines. Elle avait
toujours été bonne cuisinière. La cuisine était sa vocation. Elle disait:
"Je suis Marthe." Mais en réalité, elle était toujours aussi une
femme de prière profonde. Dans la Laure il n'y avait que deux ou trois moniales,
et elles nourrissaient l'ensemble du monastère, et le Patriarche quand il venait
en visite. Elles nourrissaient respectivement tous les pèlerins et les visiteurs,
le tout avec très peu de mains.
C’était
un grand travail, mais Matouchka le faisait avec beaucoup d'amour. Elle aimait beaucoup
la Laure, et elle y travaillait sans repos pour l'amour de saint Serge de
Radonège. Elle a dit que plus d’une fois, elle vit saint Serge sur les coupoles
de la cathédrale de la Dormition. Même à notre époque, elle venait à la Laure
et pleurait parce que le saint n’était pas là, qu’il était parti.
"Peut-être que tu ne le vois pas à cause de tes péchés," demandaient les
gens. "Je ne sais pas, il n'est tout simplement pas ici, le saint est
parti." Père Séraphim lui prédit: "Tu ne vivras pas pour voir la
réouverture de Diviyévo, mais tu auras un métochion."
Je
suis venue pour voir Matouchka quand Mère Susanne est morte. Elle était restée
toute seule. Elle était triste, elle priait la Mère de Dieu, car la compagne de
sa vie, Mère Susanne, lui manquait. Donc, elle a de nouveau demandé à la Reine
Céleste de la prendre, elle vieille et infirme, sous son voile de protection.
Elle était déjà assez âgée, septante-neuf ans.
Matouchka
fut paralysée sept fois différentes, et à la surprise de tous les médecins (en
fonction de leur pronostic, elle aurait dû mourir la première fois), elle n'est
pas morte de paralysie.
Elle
faisait de très nombreux travaux. Elle était très capable de travailler, et ne
savait pas ce que cela signifiait que d'être fatiguée. Dans le monastère, comme
à l'usine, elle travaillait jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce qu'elle tombe. Les
gens venaient constamment à la maison où le Père Séraphim avait vécu, et elle devait
préparer de la nourriture pour eux, les accueillir, les conduire et les nourrir
et, en même temps, elle avait onze enfants.
Maintenant,
parlons de la douzième fille. Matouchka était dans le doute, en disant que
Maria Ivanovna s’était trompée, car elle n'avait que onze enfants. Elle avait
une nièce, Marthe, qui était à demi orpheline. Sa mère était morte et son père
remarié, et sa seconde épouse n'aimait pas ces enfants. Elle et son mari décidèrent
secrètement d’abandonner les enfants dans un orphelinat. Marthe vint vers Matouchka
et dit: "Grand-mère Pacha, j'ai vu un rêve dans lequel tu me tirais d'un
fossé par la main." Matouchka était sage, et elle écouta cette petite
fille et lui dit: "Tu sais quoi, Marthe, ne va nulle part; reste ici avec
moi aujourd'hui." Elle pria, apparemment, et le Seigneur lui révéla ce que
les parents avaient décidé de faire avec l'enfant. Elle y resta un jour, deux
jours, et les parents naturellement entreprirent une recherche de la fille
disparue. Alors ils vinrent vers Matouchka et lui demandèrent: "Pacha, sais-tu
où est notre Marfoucha [petite Marthe] ?" "Votre Marfoucha est
ici. Et qu'avez-vous décidé de faire d’elle?" Le père de l'enfant, le
frère de Matouchka, comprit tout et se repentit aussitôt, en disant: "Tu
sais, Pacha, nous avons voulu la mettre à l'orphelinat." "Ah!"
dit-elle, "c'est donc ça. Eh bien, j'ai onze enfants, un douzième ne sera
pas plus mal. Je ne vais pas la rendre. Qu'elle reste vivre avec moi."
Cela
les a tellement touchés que, sans jugement, mais en même temps avec calme et
respect, ils ont repris la jeune fille, faisant à Matouchka la promesse que
l'enfant serait élevée comme leurs propres enfants. Ils dirent qu'ils ne
l’abandonneraient pas, et l'aimeraient comme leur propre enfant. L'action de Matouchka
les poussa à une profonde repentance. Vraiment, cette jeune fille fut bien traitée
dans la famille, et elle reçut même une éducation, mais elle mourut très jeune.
Apparemment, c’était une élue de Dieu. C'est ainsi que le Seigneur la préserva
de l'orphelinat, et peut-être même ainsi sauva son âme. Puis Matouchka se rappela
et dit: "Eh bien, Maria Ivanovna, pardonne-moi, c'était le douzième
morceau de bonbon." Ici, elle parlait du salut de l'âme de la jeune fille.
Il
faut dire qu'ils avaient une grande cour et un grand jardin, et quand Matouchka
était encore forte, tous les chemins étaient nettoyés et saupoudrés de sable,
et tout était comme dans le monastère pendant la vie de Père Séraphim, en dépit
du fait qu'il y avait les persécutions. On pourrait penser, comment
pourraient-ils avoir des chemins et du sable [dans ces conditions
défavorables], mais il y avait toujours des fleurs, et les déchets étaient toujours
jetés derrière les arbres. Et tout dans la maison devait être fait pour la
gloire de Dieu. Elle devait travailler à l'usine, et faire des offices, et
chanter, et recevoir des invités, mais elle avait assez d’énergie pour tout cela.
Il s'agit clairement d'un miracle de Dieu. Le Seigneur lui donnait des forces.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
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