L'apôtre saint Paul nous dit aussi que nous serons jugés d'après nos pensées : « Nos pensées nous accuseront ou nous défendront au jour où Dieu jugera les secrets des hommes selon l'Évangile.» (Romains 2:15)
La perfection d'une âme sous ce rapport est admirablement figurée par le centurion de l'Évangile Sa vertu et sa constance ne lui font pas accepter toutes les pensées qui se présentent; mais il les juge pour admettre les bonnes, et chasser les mauvaises. « Moi, dit-il, je suis un homme soumis à l'obéissance et j'ai des soldats sous mes ordres. Je dis à l'un : Va, et il va ; à l'autre: Viens, et il vient, et à mon serviteur : Fais ceci, et il le fait. » (Saint Matthieu, 8:9) Si, à son exemple, nous combattons courageusement les tentations et les vices, nous pourrons les soumettre à notre volonté, éteindre dans notre chair les passions qui nous tourmentent, et vaincre par la raison cette foule de pensées qui l'agitent. Nous chasserons de notre âme, par la vertu de la Croix du Sauveur, ces armées d'ennemis qui nous font une guerre si cruelle, et nous obtiendrons cette puissance du centurion que Moïse désigne mystérieusement dans l'Exode: «Établissez des officiers qui commandent à mille hommes, à cent, à cinquante et à dix. » (Exode, 18:21)
Lorsque nous serons parvenus à un état si élevé, nous aurons le pouvoir et la vertu de commander à nos pensées. Nous ne nous laisserons pas entraîner à celles qui nous déplaisent, et nous pourrons nous arrêter et nous fixer à celles qui réjouissent nos âmes. Nous dirons aux mauvaises : Allez, et elles s'en iront; nous dirons aux bonnes: Venez, et elles viendront. Nous commanderons à notre serviteur, c'est-à-dire à notre corps, de garder la continence et la chasteté, et il nous obéira sans résistance; il nous servira fidèlement sans exciter en nous les mouvements de la concupiscence. Écoutez l'Apôtre nous dire quels sont les armes et les combats de ce centurion : « Les armes de notre milice ne sont pas charnelles, mais elles sont puissantes en Dieu.» Il dit ce qu'elles sont; elles ne sont pas charnelles et faibles, mais spirituelles et puissantes par la force de Dieu ; puis il indique à quels combats on les emploie pour renverser les remparts, détruire les pensées et toutes les hauteurs qui s'élèvent contre la science de Dieu, captiver toute intelligence sous l'obéissance du Christ, en punissant toute révolte lorsque nous aurons accompli ce qu'il demande de nous. (II Corinthiens 10: 4)
Nous aurons à examiner toutes ces choses en détail, mais dans un autre moment. Je vais seulement vous expliquer le genre et les propriétés des armes que nous devons prendre , si nous voulons, comme des centurions de l'Évangile, combattre les combats du Seigneur : « Prenez, dit l'Apôtre, le bouclier de la foi pour éteindre les traits enflammés de l'ennemi. » Ainsi la foi est un bouclier qui reçoit les traits ardents de la concupiscence, et qui les repousse par la crainte du jugement et par la pensée du ciel. « Prenez, dit saint Paul, la cuirasse de la charité. » (Éphésiens, 6:16) C'est elle qui entoure et protége notre poitrine et les organes de la vie; c'est elle qui nous préserve des blessures mortelles, en ne laissant pas les traits du démon atteindre l'homme intérieur, car elle supporte tout avec patience et résignation. (I Corinthiens, 13:7) Prenez le casque de l'espérance; le casque est la défense de la tête.
Le Christ est notre tête, notre chef. C'est cette tête que nous devons toujours défendre par l'espérance des biens futurs comme avec un casque inaltérable, dans toutes les tentations et les persécutions, sans jamais laisser faiblir et altérer notre foi. Nous pouvons perdre les autres membres et conserver la vie ; mais sans la tête , il est impossible de vivre. « Recevez le glaive de l'Esprit, qui est la parole de Dieu. » (Éphésiens 6:17) « Ce glaive pénètre mieux qu'une épée à deux tranchants dans les profondeurs de l'âme et de l'esprit, dans les jointures et la moelle, et elle discerne les pensées et les mouvements du coeur » (Hébreux, 4:12), divisant et retranchant tout ce qu'elle trouve en nous de terrestre et de charnel. Quiconque est muni de ces armes peut toujours se défendre contre les traits de l'ennemi. Il ne se laissera pas vaincre et emmener captif dans la région des pensées mauvaises, et il n'entendra pas ce reproche du Prophète. a Pourquoi avez-vous vieilli sur la terre étrangère?» (Baruch, 3:11) Mais toujours vainqueur et triomphant, il choisira le pays, c'est-à-dire les pensées où il voudra s'arrêter.
Voulez-vous connaître la force principale de ce centurion, revêtu de ces armes qui ne viennent pas de la chair, mais de la puissance de Dieu? écoutez le Roi tout-puissant qui appelle les hommes de coeur à cette milice spirituelle, et qui choisit et marque les élus : « Que le faible dise : Je suis fort, et que le patient combatte. » (Joël, 3:10) Vous voyez qu'il n'y a que les faibles et les patients qui puissent combattre les combats du Seigneur.
C'était de cette faiblesse que parlait saint Paul, le centurion par excellence : « Quand je suis faible, c'est alors que je suis fort; car la vertu se perfectionne dans la faiblesse. » (II Corinthiens, 12:10.) Un des prophètes parlait ainsi de cette faiblesse, lorsqu'il disait : « Celui d'entre vous qui est faible sera comme la maison de David, et c'est le patient qui soutiendra les combats » (Zacharie, 12); et il est dit de cette patience : « La patience vous est nécessaire, afin qu'en accomplissant la volonté de Dieu, vous receviez la récompense. » (Hébreux, 10:36)
Nous reconnaîtrons par notre propre expérience que nous devons et que nous pouvons nous attacher inséparablement à Dieu, si nous mortifions nos convoitises et si nous éloignons tout ce qui excite nos désirs en ce monde. Nous le savons par le témoignage des amis de Dieu qui lui disent avec confiance : « Mon âme s'attache fortement à vous, Seigneur » (Ps. LXII, 9), « et j'adhère à tous vos commandements.» (Psaume 118:31) « Il m'est bon de m'attacher à Dieu. » (Psaume 72:28) « Celui qui s'attache au Seigneur est un même esprit avec Lui. » (I Corinthiens, 6:17)
Il ne faut donc pas céder à ces distractions fatigantes de notre âme et ralentir nos efforts : car « celui qui cultive son champ aura du pain en abondance, mais celui qui cherche le repos souffrira de l'indigence. » ( Proverbes, 28:19)
Ne nous laissons jamais aller à un découragement pernicieux , c'est par le travail qu'on acquiert davantage, et celui qui aime le plaisir et qui fuit la douleur
Saint Jean Cassien
Conférences
d'après l'édition française de 1868
traduction
E. Cartier
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qui a beaucoup d'autres ressources orthodoxes intéressantes
(Il faut seulement adapter les citations de l'Ecriture qui utilisent le vouvoiement en usage dans les antiques traductions françaises)
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