"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 27 juin 2020

Moniale Ekaterina : UNE MONIALE DU MÊME ÂGE QUE LE STARETZ PAÏSSIOS PARLE DU BONHEUR

Nun Ekaterina
Moniale Ekaterina
   
"Connaissez-vous le staretz Païssios l'Athonite ? Nous avons le même âge ! Je suis même un peu plus âgée : il est né en été [le 25 juillet 1924], alors que je suis née au début de l'année, en février." 

En effet, la moniale Ekaterina (Catherine) et saint Païssios sont nés la même année, en 1924. Elle a maintenant quatre-vingt-seize ans, mais si l'on compte son âge à partir de sa tonsure monastique (elle a été tonsurée  en 2019), elle n'a qu'un an. La religieuse est pleine de vivacité spirituelle, de joie et de gratitude envers Dieu, et elle est prête à dire à tout le monde ce qu'est le bonheur.

Tous les gens veulent être heureux. Tout dans le monde se passe dans ce but. Même les guerres et les révolutions ont lieu parce que les gens luttent pour le bonheur. Mais une révolution a-t-elle jamais rendu quelqu'un heureux ? Non ! Et alors ? Peut-être que le bonheur n'existe pas ? Non, il existe !

"Qu'est-ce que le bonheur ? Je sais ce que c'est. J'ai eu beaucoup de bonheur tout au long de ma vie. Vous savez, je suis née il y a très longtemps, en 1924, exactement deux semaines après la mort de Lénine." raconte la moniale Ekaterina.

L'histoire de sa vie est à la fois simple et étonnante, tout comme l'histoire de toute âme qui a trouvé Dieu après de nombreuses années sans Lui.

Tout arrive non sans raison

Malgré son âge, la moniale Ekaterina a des souvenirs très clairs et détaillés des lointaines années 1920, de sa famille et de son enfance. Son père était issu d'une famille de tailleurs et sa mère s'occupait du ménage. En 1923, ses parents ont déménagé à Ekaterinbourg.

"C'est là que je suis née : à Ekaterinbourg et non pas à Sverdlovsk", la moniale Ekaterina montre son acte de naissance décoloré par le temps avec le mot "Ekaterinbourg" à peine lisible, bien que discernable.

With a sister in her childhood.
Avec une sœur dans son enfance.

Mais la nouvelle Galina (nom dans le siècle de la moniale Ekaterina) n'était pas destinée à vivre longtemps à Ekaterinbourg. Lorsqu'elle eut plusieurs mois, les autorités décidèrent de rebaptiser la ville. Des noms très différents furent proposés, parmi lesquels Krasnouralsk, Krasny Oural et même Revancheburg (une allusion à l'exécution de la famille royale dans cette ville). Finalement, en novembre 1924, Ekaterinbourg fut officiellement rebaptisée Sverdlovsk. Ainsi, la ville perdit non seulement son nom d'origine mais aussi presque toutes ses églises. Dans les années 1920, le couvent de Novo-Tikhvin, l'église de l'Ascension et l'église "Maly Zlatoust" ("Petit Chrysostome") furent fermées. Rien qu'en 1930, les cathédrales de la Théophanie et de Sainte-Catherine, ainsi que l'église "Bolchoï Zlatoust" ("Grand Chrysostome") furent démolies, et les églises de la Sainte-Trinité et de la Dormition furent fermées. Les nouvelles autorités firent de leur mieux pour effacer la mémoire de Dieu de la conscience du peuple soviétique.

"A cette époque, les gens ne parlaient pas du tout de la foi", se souvient Mère Ekaterina. Mais un jour, alors que ma mère et moi marchions (je me souviens même de cet endroit !), elle a soudain dit : "Ô Génitrice de Dieu et Vierge, réjouis-toi!"; puis "Notre Père Qui es aux cieux..." ; et elle s'est tue sans rien dire d'autre... Tant d'années ont passé, mais je m'en souviens encore ! Maintenant je comprends que cela n'a pas été dit par hasard, et que le Seigneur a alors allumé une étincelle dans mon cœur."

Un long voyage vers le bonheur

Ensuite, elle a eu la vie d'une jeune femme soviétique typique. Galina a terminé ses études, puis a suivi des cours d'anglais et a obtenu un emploi de professeur à l'école du bâtiment. C'est là qu'elle a rencontré son futur époux Igor Dudine qui  était son élève. Bien qu'ils aient été séparés de six ans, il est immédiatement tombé amoureux de son professeur. Mais il a longtemps hésité à la demander en mariage ou à révéler ses sentiments. Il décida d'abord de recevoir une solide éducation et, après une école technique, il se rendit à Leningrad pour étudier à l'école d'artillerie. Auparavant, c'était l'académie militaire "du Corps des Pages" et dans les années 1940, certains professeurs qui avaient enseigné sous le tsar y travaillaient encore.

Igor Dudine sortit du collège en véritable officier russe : noble et aux manières raffinées. Il rêva de retourner à Sverdlovsk et d'épouser Galina à l'église. Un jour, il vit un couple lors du sacrement de mariage dans une église de Leningrad et fut perdu d’admiration pour eux... Igor fréquentait l'Eglise depuis son enfance ; sa grand-mère lui avait appris qu'en entrant à l'église, il devait faire le signe de Croix et vénérer les icônes.

A son retour à Sverdlovsk, Igor demanda finalement Galina en mariage, et elle accepta. Ensemble ils eurent deux filles

"Tout allait bien dans ma vie. Il est vrai qu'il y eut des hauts et des bas dans notre vie, mais il y eut beaucoup de choses très bonnes et très heureuses. Le Seigneur m'a guidé toute ma vie", raconte la moniale Ekaterina. "Bien sûr, alors je n'ai pas compris qu'Il me guidait. Je nageais juste avec la marée. J'aimais tout et je me sentais bien partout... Et nous avons survécu à la Grande Guerre Patriotique [1939-1945]; et bien que ce fut une période difficile et terrible, mes souvenirs sont lumineux ; nous avons beaucoup travaillé, mais cela nous a apporté de la joie".

La famille et les amis de Galina ne se souviennent pas qu'elle se soit jamais disputée avec quelqu'un, pas même une fois. Elle a toujours aimé tout le monde et a vécu en paix et en harmonie avec tous les gens autour d'elle. Elle avait tout : un mari aimant, de gentils enfants et un travail qu'elle aimait. De quoi d'autre pouvait-elle avoir besoin ? Mais il s'est avéré que son bonheur suprême était encore à venir.

 
   
"J'ai toujours beaucoup lu ; je connaissais tous les classiques de la littérature et d'autres genres aussi. Comme beaucoup d'autres Soviétiques, j'aimais la fantaisie", raconte la moniale Ekaterina avec un sourire.

On dit que Dieu cherche le chemin qui mène au cœur de chaque être humain. Parfois, cela se produit à travers les livres et la musique ; c'est précisément ce qui est également arrivé à Galina. Elle a toujours admiré l'harmonie des mots dans les livres et l'harmonie des sons dans ses mélodies préférées. Parfois, lorsqu'elle entendait une belle mélodie à la radio, elle appelait ses filles :

"Ecoutez, comme c'est beau ! C'est la Sonate au clair de lune de Beethoven !"

Les Dudine avaient une riche bibliothèque. Les temps changèrent aussi : les années 1940 et 1950, marquées par la faim, furent suivies des années 1960 et 1970, plus stables, qui furent suivies de la perestroïka et de la démocratie...

À cette époque, des livres et des magazines sur la foi apparurent. Galina continua à beaucoup lire et c'est par ce passe-temps que Dieu se révéla à elle un jour.

"Un  jour, j'ai lu quelque chose sur la foi, bien que je ne me souvienne pas exactement de quoi il s'agissait", a déclaré la moniale Ekaterina. "Et soudain, je me suis rendu compte que Dieu existe ! [elle pleure]. Et j'ai dit à ma famille, "Les filles, courez rapidement vous faire baptiser!"

À partir de ce moment, leur famille a commencé à fréquenter l'église Saint-Alexandre Nevski qui venait d'être rendue aux fidèles (et qui est devenue bientôt l'église principale du couvent Novo-Tikhvin qui a été ressuscité). Une vie absolument nouvelle commença pour Galina.

"J'étais alors encore très jeune. Je n'avais que soixante-dix ans !"

" ô Seigneur, comme il est facile de vivre avec Toi,!"

Les années passèrent vite. Les deux filles de Galina devinrent moniales. Son mari Igor fut très malade dans les dernières années de sa vie et en 2008, il reposa paisiblement dans les bras de son père spirituel. Et Galina resta... Non, pas seule - avec Dieu !

Elle n'a jamais manqué un service religieux. Les dimanches et jours de fête, on peut toujours la trouver à l'église Saint-Alexandre Nevski du couvent Novo-Tikhvin, au même endroit, près de la chapelle latérale sud. Sa conversation avec Dieu dure depuis une trentaine d'années maintenant...

"Cela fait maintenant cinq ans que je me rends à l'église en taxi. Tous les chauffeurs me connaissent. Quand ils viennent me chercher, ils me demandent quelle fête est célébrée ce jour-là. Et pendant que nous roulons, je leur parle de la fête et je les éduque", dit Mère Ekaterina.

Enfin, le moment de sa tonsure est arrivé. Dès qu'elle a commencé à envisager cette possibilité, une de ses filles l'a appelée du couvent et lui a demandé si elle souhaitait devenir moniale.

"D'abord, elles m'ont suggéré le nom d'Olga. Mais j'ai répondu : "Puis-je prendre le nom d'Ekaterina ? Je suis née à Ekaterinbourg et j'ai reçu la médaille de Sainte Catherine".


Un film de cet événement, dans lequel le métropolite Cyrille d'Ekaterinbourg et de Verkhoturye remet la médaille de Sainte-Catherine à Galina Leonidovna, 94 ans, est toujours d'actualité. La femme vénérait sainte Catherine avant même cet événement, mais elle reçut la médaille comme un signe que cette sainte était sa patronne céleste. C'est pourquoi elle demanda à être nommée Ekaterina dans le monachisme. Aujourd'hui, elle est la plus ancienne moniale du couvent de Novo-Tikhvin.

Lorsqu'on lui demande si elle se sent triste ou seule, elle répond :

"De quoi parlez-vous? J'ai tellement de choses à faire : prier, lire l'Evangile et chanter l'hymne akathiste. Et comment puis-je me sentir seule si je suis avec Dieu ? Et Dieu est joie !"

La moniale Ekaterina dit des choses que son âme connaît par expérience. Avant même sa tonsure, elle a appelé sa fille (qui vit dans un couvent) et lui a demandé de faire une belle inscription pour elle : "Il est si facile de vivre avec Toi, ô Seigneur". Ces mots sont devenus l'expression de son état intérieur. N'est-ce pas étonnant ? Une femme de quatre-vingt-seize ans, bien qu'âgée, seule et faible, est remplie de la joie que les jeunes ne peuvent pas trouver dans leur âme.

With her daughter, a nun
Avec sa fille moniale

La moniale Ekaterina chemina toute sa vie vers le bonheur. Bien qu'elle n'ait rien connu de Dieu pendant de nombreuses années, elle accepta avec gratitude tout ce qu'Il lui envoyait. Elle se réjouissait de tout - de la nature, de la beauté, de sa famille et de ses amis, et de tout type de travail. Dans les moments difficiles, elle ne désespérait pas et ne blâmait personne, au contraire, elle donnait de l'amour à tout le monde. Son âme s'est préparée pour le moment où elle allait connaître Dieu de cette façon.

"Le Seigneur m'a beaucoup donné. J'ai eu beaucoup de joie dans ma vie. J'ai même vécu pour voir un tel bonheur quand j'ai trouvé le Seigneur, et Il m'a même conféré la tonsure monastique. Le bonheur est en Dieu et dans la vie pour Lui".

« Tu es grand, Seigneur, et infiniment louable; grande est ta puissance, et il n’est point de mesure à ta sagesse. » Et c’est Toi que veut louer l’homme, chétive partie de Ta création, être de boue, promenant sa mortalité, et par elle le témoignage de son péché, et la preuve éloquente que tu résistes, Dieu que tu es, aux superbes ! 

Et pourtant il veut Te louer, cet homme, chétive partie de Ta création ! Tu l’excites à se complaire dans Tes louanges ; car Tu nous as faits pour Toi, et notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en Toi. (Bienheureux Augustin d'Hippone, Livre Premier)

Version française Claude Lopez-Ginisty
D’après
ORTHOCHRISTIAN

Aucun commentaire: