Le saint a également écrit que "le bouddhisme a
créé pour ses disciples des règles de morale, qui étonnent parfois par leur
pureté et leur austérité, et parfois par leur monstruosité; il a également créé
des légendes et des prodiges aussi incroyables et monstrueux."[10]
Le hiérarque décrit les écoles les plus importants du
bouddhisme japonais. La première d'entre elles, il détermine que c’est l'école
du Zen, qui, "comme secte qui est venue de Chine, aime à se vanter de son
exactitude et de sa pureté." Il définit les enseignements zen comme "la
prédication de l'auto-mortification dans le but d’atteindre la capacité de
contemplation", et il souligne qu’ici "une personne l’entreprend -seulement
à travers l'exemple de Bouddha et non par sa co-opération pour atteindre la
plus haute béatitude," et elle doit s’exercer dans la méditation et observer
"les prescriptions les plus austères en matière d'alimentation et de
comportement extérieur." [11]
Saint Nicolas observa véridiquement l’inclinaison
caractéristique du Zen vers des pratiques de yoga; cependant, il ne reflèta pas
une telle particularité caractéristique de l'enseignement sur la transmission
d'un état "d’éveil" directement à partir du maître à l'élève, "n’utilisant
ni l'instruction orale ni celle écrite." [12]
Dans sa critique du Zen, saint Nicolas note que la
méthode qu'il suppose ne peut être pleinement réalisée et n'est pas applicable
pour les gens ordinaires. Il était connu de lui que c'était seulement dans
quelques monastères bouddhistes au cours de quelques jours sur l'année que la
pratique de zazen était réalisée dans toute sa mesure, et que les moines s'endormaient
souvent simplement pendant le
processus de méditation.
La deuxième école du bouddhisme japonais que saint Nicolas
note est le montosu. Il le définit comme complètement à l'opposé du Zen. Il
"se débarrasse de toute ascèse bouddhiste et considère seulement l'idée de
l'amour de Bouddha pour le monde. Il n'y a aucune trace d'auto-mortification
ici: le bonze se marie et mange de la viande... tous les travaux ascétiques
humains sont considérés comme négligeables... Une personne peut être un terrible méchant, mais si elle dit une seule fois, je m'incline devant Bouddha Amida, elle
est sauvée. L'enseignement du Bouddha d'amour, de sa promptitude à sauver une
personne au premier appel, de l'insuffisance des propres pouvoirs d'une
personne pour être sauvée, en étonne involontairement plus d’un.
Lorsque vous
entendez un tel prêche dans un temple, vous pouvez oublier où vous êtes et penser
que vous entendez un sermon chrétien. Vous croyez peut-être cet enseignement
est emprunté du christianisme? Mais avec ce noble enseignement sur l'amour de
Bouddha pour le monde, Bouddha lui-même ne change pas le moins du monde: il
reste la même personnalité mythiquement scandaleuse et improbable."
Critiquant cette école, saint Nicolas écrit qu'elle a apporté au Japon beaucoup
plus de mal que les autres sectes.
"[13] " Il n'est jamais venu à l’idée de quiconque combien cette
expression venant de la bouche d'un bonze pouvait être terrible: "Peu
importe combien vous péchez, dites simplement, "namu Amida Butzu" et
tout est pardonné." Au XVIe siècle, le bonze de montosiu motiva ainsi
des armées entières... et produisit des batailles terribles, de terribles pillages
et démolitions." [14]
La troisième école du bouddhisme japonais est le hokkesiu
[15], que saint Nicolas définit comme "tribut de louange et d'admiration
pour un homme de prière," par lequel on entend le "Sutra du
Lotus". Il écrit que son idée principale est que "toutes les
personnes deviendront des bouddhas; et cet enseignement est si important que
l'on a besoin simplement d’invoquer le nom de l'homme de prière qui l’enseigne,
et on est sauvé."
Les motifs nommés vraiment caractéristiques du
"Sutra de Lotus", par exemple ceux qui furent écrits au dix-huitième
chapitre, sont que, si quelqu'un se dirige vers le monastère avec le désir de
l'entendre", et l’écoute au moins momentanément, alors après, il renaîtra
parmi les dieux. "[16] Quant à son concept de "salut total", à la
fin du sixième chapitre du Sutra, il est dit que " tout le monde va devenir
un bouddha". Cependant, à en juger par le contexte, ils parlent de ceux
qui suivent l'enseignement prévu dans le "Sutra du Lotus", que
Bouddha utilise pour attirer vers son enseignement (et, en conséquence, au
salut) ceux qui n’y étaient pas autrement intéressés.
Dans sa critique de hokkesiu, le saint écrit que,
"le livre de prières est rempli de récits de miracles absurdes comme suit:
Tandis le Bouddha donnait cet enseignement, deux autres bouddhas vinrent en volant
depuis le ciel... ils se sont assis les uns à côté des autres, et le Bouddha vivant
a prêché. Quand il eut fini, les disciples étaient naturellement étonnés...
Pour confirmer la vérité, trois Bouddhas étendirent leur langue, qui s'avérèrent
être si longues qu'elles percèrent dix mille sphères du monde; ils se sont
assis devant les disciples dans cette position pendant dix mille ans; puis ils fait
revenir leurs langues dans leur bouche et ils ont grogné aussitôt ensemble, ce qui
fit trembler tous les mondes... Comment les auditeurs pouvaient-ils avoir un
doute après avoir entendu cela, ou ne pas adorer le livre avec un enseignement attesté
par de tels miracles? "[17]
Cet épisode est dans le vingt et unième chapitre du "Sutra
du Lotus" [18] et il est raconté par saint Nicolas, presque mot pour mot.
Après lui, Kojevnikov citait cette histoire comme exemple d'un autre miracle
étrange dans les textes bouddhistes. A un autre endroit, Saint Nicolas écrit
que, "dans le bouddhisme, nous sommes parfois surpris par l'épaisseur des
livres de prières remplis de rien d'autre que d’éloges pour les titres de ces
livres mêmes de prière". [19] C’est vrai la plupart des vers du "Sutra du Lotus" contiennent une louange dirigée vers le livre lui-même.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
NOTES
[15] Nitiren-siu, L'une des écoles les plus répandues au Japon actuellement.
[16] Le Sutra du Lotus du merveilleux Dharma, d'après la traduction en russe du texte japonais d'A.N. Ignatovitch.
[17] Saint Hiérarque Nicolas (Kasatkine), “Le
Japon du point point de vue de la Mission Chrétienne”, œuvres choisies de
saint Nicolas, Archevêque du Japon (Moscou, 2006), p.53. (en russe)
[18] Voir Saddharma-Pundarîka ou, The Lotus of The True Law ( Le Lotus de la loi véritable), Traduit ( en anglais) by H. Kern, Sacred Books of the East. Vol. XXI. (Cambridge, 1884), 364-365.
[19] Saint Hiérarque Nicolas (Kasatkine), “Le Japon du point point de vue de la Mission Chrétienne”, œuvres choisies de saint Nicolas, Archevêque du Japon (Moscou, 2006), p.45. (en russe)
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