Mont Athos
La répartition géographique
du monachisme
Aujourd'hui la vie monastique s'est propagée dans le monde entier; mais de
nombreuses années d'efforts ont été nécessaires pour atteindre cet objectif. Le
mouvement a commencé, comme nous l'avons vu, en Egypte, où les centres
monastiques importants, avec des milliers de moines, se développa rapidement,
les moines vivant dans les cellules, laures et monastères. Ceux-ci étaient
situés à la Thébaïde, à Nitrie, à Scété, à Tabennèse et au mont Sinaï. Le
monastère de Sainte-Catherine du Sinaï, fondée à l'époque de Justinien, a
survécu avec la même détermination jusques à nos jours. De l'Egypte il s'est
propagé très rapidement à la Palestine. Ce pays, qui fut sanctifié par la vie
et la mort du fondateur de la foi chrétienne, a suscité l'intérêt des ascètes
de tous les coins de l'Empire, parmi les Latins, Jérome et Rufin sont devenus
célèbres. Plus tard, de grandes laures y furent établies, au nombre de cinq
cents, par Théodose le Coenobiarque, Sabbas le Sanctifié, et Euthyme le Grand.
Les ascètes apparurent en Syrie au cours des premières décennies du IVe siècle.
C’étaient généralement des hommes et des femmes itinérantes, ces dernières
s'habillaient comme les hommes. Ils cherchaient à abolir toutes les différences
entre les sexes, et évitaient le travail. En raison de la position dominante
qu’ils donnaient à la prière, ils furent appelés Euchites (de ευχή prière en grec), ou, en syriaque,
Massaliens (Messalien ou Massalien : celui qui prie, en langue syriaque).
Ils furent critiquées par l'Eglise à cause de certaines déviations. Dans le
même temps, la forme organisée de monachisme plus douce, atteignit également la
Syrie. Le grand hymnographe et théologien Ephrem le Syrien fit également fait
des efforts fructueux pour organiser les moines.
Le monachisme a commencé à perdre du terrain dans ces trois pays depuis le
début du septième siècle, c'est-à partir du moment de la conquête [musulmane];
mais il n'a jamais complètement disparu. Aujourd'hui, outre les orthodoxes, les
coptes, les jacobites, les arméniens, les nestoriens y ont aussi des
monastères.
Par la Cappadoce et l'Asie Mineure, le monachisme atteignit la capitale de
l'empire, Constantinople. Beaucoup de monastères qui furent établis dans les banlieues
des deux côtés du Bosphore devinrent des organisations florissantes, et par
leurs activités, ils influencèrent le cours des affaires politiques et parfois
ecclésiales. Le monastère des Ascémètes [ceux qui ne dorment pas en grec/
ακοίμητο sans sommeil], qui a été fondée par Alexandre aux environs de 430, reçut
son nom du fait que les moines louaient Dieu toute la journée et la nuit, étant
divisée en trois groupes qui se succédaient dans l'église. Le monastère de Studion,
fondé de même au Ve siècle, par le patricien romain Studius, devint le centre
de l'évolution liturgique de l'Église orientale et le champion de
l'indépendance de l'intervention étatique. Théodore le Studite, qui fleurit au
début du IXe siècle, devint par son comportement héroïque un exemple pour tous
les moines.
Dans ces régions, le monachisme a été définitivement détruit au cours de la période
de la conquête turque.
Cependant,
des centres forts du monachisme avaient déjà été formés, en Grèce. Parmi
ceux-ci, le Mont Athos s’est distingué depuis le Xe siècle, et fut désormais
appelé la "Sainte Montagne". En 963, l'empereur Nicéphore Phocas publia
un décret accordant au moine Athanase le droit d’y fonder une grande laure, ce
qu'il fit. Dans un court laps de temps, là, d'autres communautés de moines furent
fondées, et celles-ci furent placées sous la supervision générale du Protos [La
Sainte Epistasie (composée de 4 moines), gouvernement du Mont Athos, a à sa
tête le Protos] . Afin d’y promouvoir la diffusion du monachisme, Alexis
Comnène plaça tous les établissements de l'Athos sous la juridiction de
l'évêque le plus proche, celui de Iérissos. Mais une friction compréhensible eut
lieu entre lui et les Protos, et pour cette raison, il devint nécessaire de
supprimer la juridiction de l'évêque de Ierissos. Cela fut fait vers la fin du
XIVe siècle.
Le Protos de l'Athos fut installé après que l'approbation ait été obtenue du Patriarche
de Constantinople. Au début, il était nommé à vie, et vivait à Karyès, capitale
de la république monastique. Il ne s’occupait que des problèmes d'ordre général
de la communauté, parce que les monastères restaient en autonomie interne.
Les lieux d'habitation de la montagne sont placés dans un environnement à la
fois impressionnant et serein. L'augmentation des raids de pirates après
l'affaiblissement de l'empire byzantin et la conquête turque ont influencé leur
construction architecturale. Les monastères sont construits comme des
forteresses puissantes, avec des tours et des embrasures. Les cellules sont
construites au-dessus du mur de la forteresse, sur trois, et même six étages.
Au milieu de la cour il y a une église "Catholikon", ou centrale,
avec des chapelles sur les côtés.
La longue occupation étrangère a causé beaucoup de fluctuations dans la
puissance et la vigueur de ces établissements. Aujourd'hui, la terre de cette
région autonome est répartie entre vingt monastères autonomes. Un représentant
de chaque monastère, élu chaque année, est envoyé à Karyes, où la Sainte
Communauté, une sorte de parlement, se réunit. Les monastères sont répartis en
cinq groupes de quatre, chacune dirigée par un des monastères les plus forts:
Lavra, Vatopédi, Iviron, Hilandar, et Dionysiou. Chaque groupe prend à tour de
rôle exercer l’administration pour une année à la fois. Ainsi, des vingt
représentants, quatre constituent l'organe exécutif, le comité de surveillants,
tandis que le représentant du premier monastère du groupe qui a l'initiative
administrative est le surveillant en chef. Chaque surveillant garde un quart du
sceau de la république monastique.
Onze des monastères de la Sainte Montagne, la plupart du temps sur son côté ouest,
sont cénobitiques, et sont régis par un higoumènequi est élu à vie et a un conseil
des anciens pour le conseiller. Neuf, pour la plupart, sur la côte orientale,
sont idiorrhythmiques, régis par un comité de trois supérieurs (proistamenoi)
qui sont élus pour un an. Le monastère de Hilandari est serbe; celui de
Zographos, bulgare; celui de Pantéléimon, russe. Il y a aussi un skite roumain.
Le monastère d'Iviron, qui est maintenant grec, était autrefois géorgien
(ibérique). Jusques au treizième siècle, il y avait le monastère latin des
Amalfitains. Ainsi, la Sainte Montagne est devenue un symbole de la catholicité
et de l'unité de l'Orthodoxie; et elle est toujours le centre monastique principal
du Patriarcat œcuménique, et elle est unique en son genre dans tout le monde
chrétien. Malheureusement, il y a eu une baisse du nombre de moines pendant de
nombreuses années, ce qui y réduit la vigueur de la vie monastique.
Pendant les années du Despotat de l’Épire, les Météores sont devenus un centre
monastique célèbre. D’impressionnants monastères ont été construits au-dessus
de falaises abruptes, semblables de loin à des nids d'aigles; et de nombreux
petits ermitages ont été creusées dans la roche. Il y a encore quelques
décennies, l'accès à certains de ces monastères n’était possible que par un
treuil et un filet. Sur les vingt-quatre anciens monastères de cette région seulement
quatre fonctionnent aujourd'hui, avec un petit nombre de moines. Beaucoup de
monastères demeurent et continuent de fonctionner dans toute la Grèce, mais
avec un nombre sans cesse décroissant de moines.
De l'Orient, la vie monastique fut amenée à l'Occident, dès le IVe siècle. Elle
y a fleuri en particulier au
Moyen-Age, quand de forts ordres monastiques furent organisés. Ceux-ci ont joué
un grand rôle dans la christianisation et la civilisation des peuples du nord
de l'Europe. Le monachisme fut également été transmis, avec le christianisme, aux
pays du nord de la Grèce: aux Slaves, aux Roumains, et aux autres peuples. Les guides
monastiques russes Antoine et Serge sont devenus célèbres. Les ascètes et pères
spirituels de la Russie, les startsy, jouissaient d'un grand renom, et
d'innombrables foules de gens recherchaient leurs conseils.
Version française Claude
Lopez-Ginisty
d’après
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