"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 31 mai 2017

Paroisse orthodoxe de la sainte Transfiguration ( Ile Maurice): L'Église du Christ et l'œcuménisme



Archiprêtre Michael Pomazansky

Les attributs de l'Église indiqués dans le symbole de la foi, «une, sainte, catholique et apostolique», se réfèrent à l'Église militante. Cependant, ils reçoivent leur pleine signification avec la conscience de l'unité de cette Église avec l'Église céleste dans le seul Corps du Christ: l'Église est une, avec une unité à la fois céleste et terrestre; elle est sainte avec une sainteté céleste et terrestre; elle est catholique et apostolique par son lien ininterrompue avec les apôtres et tous les saints. 

L'enseignement orthodoxe de l'Église, qui en soi est assez clair et repose sur l'Écriture Sainte et la sainte Tradition, doit être contrasté avec un autre concept répandu dans le monde protestant contemporain et qui a pénétré même dans les milieux orthodoxes. Selon ce concept différent, toutes les diverses organisations chrétiennes existantes, les soi-disant «confessions» et «sectes», même si elles sont séparées l'une de l'autre, comprennent encore une «Église invisible» unique, dans la mesure où chacune d'entre elle confesse le Christ comme Fils de Dieu et accepte son évangile. La diffusion d'un tel 2 point de vue est aidée par le fait que, côte à côte avec l'Église orthodoxe, il existe en dehors d'elle un certain nombre de chrétiens qui dépasse largement le nombre de membres de l'Église orthodoxe. 

Souvent, nous pouvons observer dans ce monde chrétien à l'extérieur de l'Église une ferveur et une foi religieuse, une vie morale digne, une juste conviction – qui va parfois jusqu'au fanatisme -, une organisation et une vaste activité caritative. Quelle est la relation de toutes ces organisations avec l'Église du Christ? Bien sûr, il n'y a aucune raison de voir ces confessions et ces sectes au même niveau que les religions non chrétiennes. 

On ne peut pas nier que la lecture de la Parole de Dieu a une influence bénéfique sur tous ceux qui en cherchent l'instruction et le renforcement de la foi, et cette réflexion dévote sur Dieu le Créateur, Providence et Sauveur, a aussi un pouvoir élévateur parmi les protestants. Nous ne pouvons pas dire que leurs prières sont totalement infructueuses si elles proviennent d'un cœur pur, car tout homme, de n'importe quelle nationalité, qui le respecte et fait ce qui est juste lui est agréable. (Actes 10:35). 

La bonne providence omniprésente de Dieu est sur eux, et ils ne sont pas privés des miséricordes de Dieu. Ils aident à restreindre la folie morale, les vices, et les crimes; et ils s'opposent à la propagation de l'athéisme. Mais tout cela ne nous donne aucun motif de les considérer comme appartenant à l'Église. Déjà le fait qu'une partie de ce vaste monde chrétien en dehors de l'Église, à savoir l'ensemble du protestantisme, nie le lien avec l'Église céleste, c'est-à-dire la vénération en prière de la Mère de Dieu et des saints, ainsi que la prière pour les morts, indique qu'ils ont eux-mêmes détruit le lien avec le seul Corps du Christ qui unit en lui-même ce qui est céleste et terrestre. 

En outre, il est un fait que ces confessions non orthodoxes ont «rompu» sous une forme ou une autre, directement ou indirectement, avec l'Église orthodoxe, avec l'Église dans sa forme historique; elles ont elles-mêmes détruit le lien, elles l'ont «quittée». Ni elles ni nous n'avons le droit de fermer les yeux sur ce fait. Les enseignements des confessions non orthodoxes contiennent des hérésies qui ont été décisivement rejetées et condamnées par l'Église dans ses conciles œcuméniques. Dans ces nombreuses branches du christianisme, il n'y a pas d'unité, ni vers l'extérieur, ni vers l'intérieur, ni avec l'Église orthodoxe du Christ, ni entre elles. 

L'unification supra-confessionnelle (le «mouvement œcuménique») qui doit maintenant être observée n'entre pas dans les profondeurs de la vie de ces confessions, mais a un caractère extérieur. 

Le terme «invisible» ne peut se référer qu'à l'Église céleste. L’Église sur la terre, même si elle a son côté 3 invisible, comme un navire dont une partie est cachée dans l'eau et qui est invisible aux yeux, reste visible, car elle se compose de personnes et a des formes visibles d'organisation et d'activité sacrée . Par conséquent, il est tout à fait naturel d'affirmer que ces organisations religieuses sont des sociétés «proches» ou «à côté», voire même «adjacentes» à l'Église, mais parfois «contre»; mais elles sont toutes "en dehors" de l'unique Église du Christ. 

Certaines se sont séparées, d'autres sont parties. Certaines, en sortant, ont tout de même gardé des liens historiques de sang avec elle; d'autres ont perdu toute parenté, et en eux l'esprit même et les fondements du christianisme ont été déformé. Aucune d'entre elles ne se trouve sous l'activité de la Grâce qui est présente dans l'Église, et surtout la Grâce qui est donnée dans les Mystères de l’Église. Elles ne sont pas nourries par cette table mystique qui mène par étapes à la perfection spirituelle. 

La tendance de la société culturelle contemporaine à placer toutes les confessions à un même niveau ne se limite pas au christianisme; sur ce même niveau tout égal, on place aussi les religions non chrétiennes, au motif qu'elles «conduisent toutes à Dieu», et, en outre, prises ensemble, elles dépassent largement le monde chrétien par le nombre de membres qui leur appartiennent. 

Tous ces points de vue "unifiant" et "égalisant" indiquent un oubli du principe selon lequel il peut y avoir beaucoup d'enseignements et d'opinions, mais il n'y a qu'une seule vérité. Et l'unité chrétienne authentique - unité dans L'Église - peut être basée uniquement sur l'unité de l'esprit, et non sur les différences d'esprit. L'Église est la colonne et le soutien de la Vérité (I Timothée 3:15).

Source:
Paroisse orthodoxe de la sainte Transfiguration 
La Voix de l’Évangile Numéro 19, juin 2017
Tiré de : 
Théologie dogmatique orthodoxe, 
par le protopresbytre Michael Pomazansky,
Fraternité St Herman of Alaska, 2015.
pp 248-250,

mardi 30 mai 2017

Sur orthodoxie.com:Suite à sa canonisation, dix mille personnes sont venues vénérer saint Jacques de Tuman (Serbie), un saint qui vécut en France dans les années 1930


Saint Jacques de Tuman

Environ dix mille personnes sont venues le 28 mai 2017 au monastère de Tuman (Serbie centrale) vénérer la mémoire de saint Jacques. Au cours de la sainte Liturgie a été lu l’acte de canonisation. L’office était présidé par l’archevêque de Michalovce et Košice Georges (Église des Terres tchèques et de Slovaquie), assisté de l’évêque de Braničevo Ignace et de l’évêque de Timok Hilarion (tous deux hiérarques de l’Église orthodoxe serbe). Saint Jacques (dans le monde Radoje Arsović) naquit en 1894 dans le village de Kušići, près de la ville d’Ivanjica. À l’issue de l’enseignement secondaire, assoiffé de science et de connaissances, il partit en France, où il obtint deux doctorats, l’un de philosophie à la Sorbonne, et l’autre de droit à Montpellier. Il travailla ensuite dans les services diplomatiques du Royaume de Yougoslavie en France. Alors qu’il prenait du repos dans les années 1930 en Serbie, dans la ville thermale de Vrnjačka Banja, la Providence fit qu’il se trouvât au rassemblement du mouvement de la fraternité des « priants Dieu » (Bogomoljački pokret). Admirant les prédications de saint Nicolas Vélimirovitch et des prêtres du mouvement, mais ému plus encore par la discussion qu’il eut avec un simple paysan serbe, il fut touché par la grâce Divine et quitta ses fonctions et sa vie mondaine, puis partit auprès de saint Nicolas Vélimirovitch, lui demandant de devenir novice. Après une longue période de mise à l’épreuve, saint Nicolas l’accepta. Il passa par toutes les obédiences du noviciat. Bien que titulaire de deux doctorats, il ne rechignait pas à nettoyer les toilettes, éplucher les pommes de terre, etc. Vivant dans une stricte ascèse, il prenait peu de nourriture, et il n’était pas rare qu’il se nourrisse des déchets de la table. Ne possédant que deux soutanes usées, il ne dormait jamais sur un lit, mais se reposait, la prière sur les lèvres. Il avait un don exceptionnel pour rester silencieux. Avant la seconde guerre mondiale, il fut rédacteur du périodique de l’Église orthodoxe serbe « Le missionnaire chrétien ». Avant et pendant la guerre, il fut un prédicateur enflammé de la foi, déployant un zèle apostolique. Disposant de nombreux dons spirituels, il avait entre autres le don de clairvoyance. C’est ainsi qu’il avait prévu le bombardement de Belgrade et du monastère de Žiča… Pendant la guerre, il vécut au monastère de Ljubostinja, où l’on a gardé son souvenir comme celui d’un grand ascète. Torturé par les communistes, il termina sa vie en confesseur, des suites des coups reçus dans le village de Rabrovo en février 1946. Conformément à son testament, il fut inhumé au monastère de Tuman, en Serbie centrale, en février 1946. Ses saintes reliques ont été exhumées le 21 octobre 2014. Lors de cet événement, nombreux sont ceux qui ont été guéris de leur maladies alors que l’on invoquait dans la prière ce nouveau saint de Dieu. Les écoliers et les étudiants reçoivent une aide particulière près de ses reliques. Il a été canonisé lors de l’Assemblée ordinaire des évêques de l’Église orthodoxe serbe au mois de mai 2017. Sa mémoire a été fixée au 21 juillet / 8 août.
Sources 1 et 2

Glorification des saints de Putna: Saint Jacob of Putna et ses disciples Silas, Païssi et Nathan.


Merci à Père Ambrozie de Putna qui m'a transmis ces liens! 








lundi 29 mai 2017

Sir Steven Runciman: Dans le siècle prochain, l'Orthodoxie sera la seule Eglise historique!


Sir Steven Runciman 
avec l'higoumème Ephraim
de Vatopaidi


C'est le dernier entretien mené par le magazine PEMPTOUSIA avec le grand byzantologue Sir Steven Runciman au Saint et Grand Monastère de Vatopaidi, le 14 juillet 2000, au cours duquel il a été accueilli pendant son séjour de trois jours sur le Mont Athos pour l'arrivée du patriarche œcuménique Barthélemy, qui devait inaugurer la nouvelle sacristie du monastère et la sainte communauté du Mont Athos. Comme d’autres[1], il voit clairement la disparition des églises chrétiennes occidentales venir rapidement.
*
PEMPTOUSIA: Quand êtes-vous venu la première fois au Mont Athos?
Sir Steven Runciman: En 1936 il arriva que je voyageais sur un navire vers Kavala, navire qui s'approchait d'une des rives de l'Athos. Les moines se sont approchés de nous dans des bateaux ayant l'intention de nous aider. J'aurais pu descendre sur le rivage, mais le capitaine du navire a insisté pour que nous continuions notre route vers Kavala, et il m'a arrêté. Je me suis énervé contre lui et je lui ai parlé en parfait grec. Vous voyez, quand je me fâche, je parle parfaitement grec...
En 1952, j'ai visité le mont Athos pour la première fois, très brièvement. Une deuxième fois a suivi cette même décennie, mais j'étais en colère parce que tout semblait être en état de détérioration. Plus tard, c’était merveilleux de voir en direct le renouvellement, quand je suis revenu ici; C'est maintenant une grande joie et une grande satisfaction pour moi d'être ici, car ce fait rétablit la confiance dans la nature humaine respectueuse de Dieu.
PEMPTOUSIA: Quel était précisément le motif qui vous a mené pour la plus grande partie de votre vie dans l'étude de la civilisation byzantine?
Sir Steven Runciman: Diverses raisons m'ont conduit à cela. Quand j'avais 7-8 ans, j'ai commencé à apprendre le grec ancien parce que j'aimais la langue grecque classique. Dans le même temps, j'étais assez captivé par le moyen âge et presque personne n'était intéressé par la Grèce médiévale. Et j'ai donc décidé de faire de l'hellénisme médiéval mon intérêt principal: la Grèce et les États balkaniques voisins, ainsi que les croisades, qui furent totalement destructrices, entraînant la dévastation de l'État romain oriental et l'asservissement du christianisme oriental.
PEMPTOUSIA: Avez-vous rencontré quelqu'un en particulier qui vous a aidé à vous spécialiser dans les études byzantines?
Sir Steven Runciman: Lorsque j'ai commencé mes études, le meilleur Byzantologue était le professeur Bury, un universitaire qui a d'abord étudié la Grèce classique, puis Byzance. Mais  c’était une personne solitaire et il ne souhaitait avoir aucun élève. En outre, il n'aimait pas le fait qu'il était forcé de faire que je sois son élève. J'ai eu du mal à le rencontrer. Je l'ai rencontré pour la première fois à son bureau de Cambridge. C’était le professeur d'histoire le plus célèbre, et il a essayé très fort de me décourager. À la fin, il m'a dit que je perdrais mon temps à étudier l'Europe de l'Est et le moyen âge, à moins que je ne parle les langues slaves. Il se trouvait que je connaissais le russe. En fin de compte, il a été obligé de m'accepter.
En dépit de tout cela, il n'était pas toujours facile de l'approcher. En raison de sa vieillesse et de sa faiblesse, il était absent de son bureau. C'est pourquoi je lui ai envoyé des notes et des questions écrites chez lui, mais elles ne sont  jamais arrivées entre ses mains. Plus tard, quelqu'un m'a mentionné que Mme Bury croyait que M. Bury ne devait pas être dérangé par de telles choses, et elle a détruit tout ce que je lui avais envoyé. Avec le temps, j'ai découvert que chaque matin, il se promenait dans Cambridge et j'attendais qu'il passe. En fait, il aimait que quelqu'un l'accompagne pendant sa promenade. Je l'accompagnais avec un cahier pour prendre des notes et en lui demandant des choses pertinentes. En effet, il avait un esprit intelligent et une grande connaissance. Il n'avait presque jamais besoin de se référer à des textes et à des études, car il savait toujours quoi répondre. Au cas où il ne se souvenait pas ou ne savait pas, il m'envoyait sa réponse scientifique après un certain temps. Malheureusement, il fut mon premier et unique tuteur. Après un certain temps, je suis tombé malade et je suis parti de Cambridge. Quand je suis revenu plus tard, il était mort. Dès lors, j'ai dû m’occuper seul  de ce sujet.

PEMPTOUSIA: Qu'est-ce que l'Européen moyen connait aujourd'hui de Byzance?
Sir Steven Runciman: L'Europe moyenne commence à en apprendre davantage, car aujourd'hui, il y a quelques byzantinologues. Chaque année, en Grande-Bretagne, nous organisons une conférence byzantinologique avec un grand nombre de personnes intéressées qui y participent. En outre, dans nos universités, les étudiants s'y intéressent de plus en plus. Et sur le continent européen, en France et en Allemagne, il y a toujours eu des écoles concernées par Byzance, qui étaient limitées, mais je suis convaincu que l'intérêt y grandit aussi. En Amérique, il existe une institution de recherche très « douée », à Washington D.C., à Dumbarton Oaks. Cet institut a été fondé par une millionnaire américaine, littéralement «amoureuse» de l'église Saint-Sophie à Constantinople. Quand je l'ai rencontrée pour la première fois, c’était la femme d'un ambassadeur américain. Plus tard, nous nous sommes rencontrés à Londres lors d'un déjeuner avec mes parents. Elle m'a demandé quelle était ma profession et je lui ai répondu «Byzantinologue». Et puis elle m'a dit que c'était quelque chose qui l'intéressait profondément et qu'elle prévoyait de fonder cette institution à Dumbarton Oaks. A cause de tout cela, je pense que pendant ma longue vie, j'ai vu Byzance être considéré comme un sujet obscur et presque inconnu, alors que, aujourd'hui, ayant beaucoup d'étudiants, je suis convaincu qu'il deviendra de plus en plus connu.

PEMPTOUSIA: Comment les différentes personnes d'Europe et d'Amérique voient-elles la civilisation byzantine?
Sir Steven Runciman: pour l'instant, cette civilisation n'a pas trop pénétré leur conscience. Mais maintenant, à dans diverses universités, ce n'est plus un sujet ignoré ou méprisé. Au contraire, c'est quelque chose qui se développe vivement alors que de mon temps, il était presque inconnu. Cette réalisation me plaît et m'encourage pour l'avenir.
PEMPTOUSIA: Comment les gens avec une perspective occidentale réagissent par rapport au Mont Athos? Comment le voient-ils?
Sir Steven Runciman: Je pense que pour eux, c'est un endroit déroutant, et certainement les femmes ne comprennent presque rien au mont Athos. Bien sûr, les visiteurs qui viennent ici deviennent enthousiastes, et vous avez maintenant le prince Charles comme admirateur, qui désire séjourner chez vous et qui en est heureux.
PEMPTOUSIA: C'est pourquoi il est resté récemment à Vatopedi pendant trois nuits.
Sir Steven Runciman: Oui, il a prétendu qu'il était bloqué à cause du mauvais temps sur la Montagne. Mais les choses étaient tout autres. Il avait dit aux gens sur le yacht qui l'ont transporté de l'attendre à Thasos, parce qu'il avait prétendument vu une grande tempête. Et, en effet, il a passé un bon moment.
PEMPTOUSIA: Que pensez-vous de la présence de l'Orthodoxie dans l'Europe moderne?
Sir Steven Runciman: Parfois - que puis-je dire - je me sens très déçu par les autres églises d’Occident. Cependant, je suis content de penser qu'au cours des 100 prochaines années, l'Orthodoxie sera la seule Eglise historique existante. L'Église anglicane est en très mauvais état. L'Église catholique romaine continue de perdre du terrain. Mais, heureusement, il y a l'Église orthodoxe. Le nombre croissant de personnes adoptant l'Orthodoxie est impressionnant, surtout en Grande-Bretagne. Je crois qu'elle offre une vraie spiritualité que les autres Églises ne peuvent plus transmettre. Tout cela m'amène à conclure que l'Orthodoxie se maintiendra, contrairement aux autres.
PEMPTOUSIA: Que pensez-vous que l'Orthodoxie pourrait offrir à une Europe unie et en général au monde entier?
Sir Steven Runciman: Je dirais que je doute beaucoup que nous ayons jamais une Europe ou un monde uni. Je crois cependant qu'elle offre une solution merveilleuse au problème de l'unité parmi les peuples orthodoxes, car, pour commencer, cela n’est pas concerné par le nationalisme. Mais aussi parce que, par le biais de ces derniers, on a des vues plus larges et plus libérales par rapport à l'Église catholique-romaine. Tout cela me remplit de la conviction que l'Orthodoxie a un avenir certain et très bon devant elle.
PEMPTOUSIA: Quelle figure byzantine admirez-vous le plus et pourquoi?
Sir Steven Runciman: C'est une question très difficile...! Je suis intéressé par tant de personnalités. Mais surtout, j'admire certains hommes religieux. Généralement, les personnes non spirituelles, mais importantes de Byzance, ne sont généralement pas dignes d'admiration, certaines d'entre elles ont certainement offert quelque chose. Mais je crois que certaines valeurs spirituelles sont plus admirables. Elles ont offert beaucoup de choses et de services à la civilisation européenne.
PEMPTOUSIA: Dans le monastère de Vatopedi, le saint renommé et grand défenseur de l'Orthodoxie Grégoire Palamas, a débuté comme moine en restant ici pendant trois ans. L'Église et surtout les Pères du Mont Athos l'admirent beaucoup et l'honorent grandement. Que dit l'Occident de lui?
Sir Steven Runciman: Il existe encore un préjugé contre les Palamites, ceux qui acceptent sa théologie. Personnellement, je trouve le réconfort dans ses dogmes, malgré le fait que d'autres soient contre.

PEMPTOUSIA: Etes-vous favorable à l'idée que (Hagia) Sophia [i.e. Sainte Sophie]soit utilisée à nouveau dans la Ville[2] (Istanbul) comme lieu de culte orthodoxe?
Sir Steven Runciman: J'aimerais beaucoup, mais je doute que quelque chose comme cela puisse arriver. Mais cela me rendrait très heureux.
PEMPTOUSIA: Que pensez-vous de la quintessence de l'empire byzantin tout au long de sa très longue histoire?

Sir Steven Runciman: Je pense que je devrais donner une réponse qui prendrait beaucoup de temps. En bref, les Byzantins ont toujours maintenu, même si, dans certains cas, ils ne l'ont pas complètement atteint, un haut niveau de spiritualité, et je pense que c'est probablement la quintessence, leur élément le plus important. Et je voudrais souligner que c'est un état religieux large et libre. Par exemple, les missions byzantines en Europe encouragèrent la publication de textes saints dans la langue des chrétiens nouvellement formés. Rome n'aurait jamais fait une telle chose. C'est quelque chose, entre autres, que j'admire beaucoup chez les Byzantins.

PEMPTOUSIA: Nous croyons que le mont Athos constitue en général la continuation de cette tradition byzantine.

Sir Steven Runciman: Certainement.

PEMPTOUSIA: Et nous sommes très satisfaits des progrès du monachisme moderne sur le Mont Athos.

Sir Steven Runciman: Certes, le «renouveau» de ce site sacré justifie les espoirs de beaucoup d'entre nous. Ici, on sent ce que l'Orthodoxie signifiait vraiment pour les dirigeants byzantins et leur peuple. Quoi qu'il en soit, il y a ici une renaissance.

PEMPTOUSIA: Certains prétendent - et nous aimerions avoir votre opinion qui fait autorité - que la Grèce antique était une civilisation glorieuse et merveilleuse, sans doute, alors que la civilisation byzantine était une période sombre du Moyen Âge qui leur répugne. Pouvez-vous nous dire quelque chose à ce sujet?

Sir Steven Runciman: Je m'oppose toujours à cette attitude! A Byzance, il y avait une grande éthique! En ce qui concerne l'art byzantin, il n'y eut presque jamais d’appréciation correcte. Personnellement, je crois que certaines mosaïques byzantines sont plus précieuses que toutes les anciennes statues de l'âge classique. Il y a beaucoup de bruit autour des marbres d'Elgin. Ils n'évoquent pas chez moi une telle admiration; Je préférerais d'anciennes œuvres d'art comme par exemple les «Korês»[3]. Je ne voudrais jamais posséder des statues de nature réaliste, complètement humaines. Je serais ravi si elles avaient une dimension spirituelle en elles, comme les créations byzantines (expressionnistes) si expressives qui sont uniques et presque inégalables. Quelque chose s'est passé pendant ma vie, c’est l'appréciation des différents arts byzantins et la diminution de l'accent exclusif mis sur les arts de l'âge d'or d'Athènes.

PEMPTOUSIA: Monsieur, nous vous remercions beaucoup pour votre aimable disposition à nous parler et nous espérons que la sainte Providence vous accordera plus d'années de vie, afin que vous puissiez transmettre vos connaissances à ceux qui suivent vos pas, qui à leur tour prouveront que la vie et le cœur de Byzance étaient, sont et seront l'Orthodoxie.

Sir Steven Runciman: Oui. Bien sûr,  j'ai déjà 97 ans et je ne sais pas si je peux encore offrir quelque chose d'autre. Mais je me sens ressuscité par cette visite au Mont Athos.

PEMPTOUSIA: Avant de terminer, une dernière question, qu’avez-vous pensé de la chorale de Vatopaidi?

Sir Steven Runciman: J'ai aimé leur chant. Il se distingue par l’absence de musique mondaine, et crée en moi une qualité transcendante, qui devrait exister dans la musique byzantine.

PEMPTOUSIA: Nous vous remercions encore une fois de votre peine et de votre bonne intention de nous parler, en tant qu'expert en byzantinologie, et de votre appréciation de l'Orthodoxie comme quintessence de la brillante civilisation byzantine.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après

NOTE BIOGRAPHIQUE [4]

L'éminent Byzantologue Sir Steven Runciman est né le 7 juillet 1903. Il était le petit-fils du magnat Sir Walter Runciman (1847-1937) et fils du politicien Sir Walter. Il fait ses études à Eton et au Trinity College de Cambridge, où il a étudié avec le célèbre professeur d'histoire moderne et byzantologue John Bagnell Bury. Il a enseigné dans cette université de 1927 à 1938 et en est resté membre honoraire jusqu'à sa mort. Il a également enseigné dans de nombreuses universités d'Amérique et d'Europe et à l'Université de Constantinople de 1942 à 1945, où il a enseigné l'histoire et l'art byzantins. Il a occupé plusieurs postes diplomatiques (assistant de l'ambassade britannique à Sofia et au Caire) et a été représentant du British Council en Grèce de 1945 à 1947. Il a été membre de l'Académie britannique d'Athènes et il a été honoré par de nombreux diplômes universitaires. Voyageant en Grèce, il a eu l'occasion de rencontrer, entre autres, Georges Seferis, Angelos Sikelianos et Dimitris Horn.

Cet historien prolifique a écrit de nombreuses œuvres qui sont rapidement devenues aussi célèbres au niveau académique que parmi le grand public des lecteurs. Ses premières œuvres sont: L'empereur romain Lekapenos et son règne (1929), Etude sur le 10ème siècle de Byzance, Le premier état bulgare (1930) et La civilisation byzantine (1933), qu'il a écrit lorsqu'il était professeur à l'Université de Cambridge. Le manichéisme du moyen âge est une étude sur les sectes dualistes au moyen âge. Un de ses travaux importants est également L'histoire des Croisades (1951-1954) complétées par les Vêpres siciliennes, histoire détaillée des pays méditerranéens et des civilisations de cette époque et des conflits des intérêts politiques et nationaux d’alors. Mais tout aussi importantes sont d'autres oeuvres: La chute de Constantinople (1965), La Grande Église du Christ en captivité (1968), La Dernière Renaissance Byzantine (1970), L’Église Orthodoxe et l'état séculier (1972), le Rythme Byzantin Et Civilisation (1975), Theocratie byzantine (1977). Beaucoup ont été traduits en grec. Sir Steven Runciman a, par ses études et son travail relancé la civilisation byzantine, hors  de l'indifférence scientifique et de la recherche qui l’avait laissée de côté. Grâce à son travail L'histoire des croisades, il a essentiellement modifié les croyances de l'Occident sur les croisades. Le journal The Times a écrit concernant la contribution du grand scientifique sur ce sujet particulier: "Cartographier la période du moyen âge écartée sans fin entre l'Est et l'Ouest au Moyen-Orient, Runciman s'est certainement penché vers le côté byzantin, contre les préjugés et le pillage dont l'Occident s’était occupé".

Notre pays l'a honoré par la médaille d'or de la ville d'Athènes (1990) et le prix Onassis (1997).

Sir Steven Runciman est décédé le 10 novembre 2000 alors que nous préparions la publication de son entretien avec nous.
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Cf. http://journeytoorthodoxy.com/2011/03/herman-tristram-engelhardt-how-i-became-orthodox/
[2] 
La ville par excellence pour les grecs, c’est-à-dire Constantinople.
[4] 
Les ouvrages cités ci-après, sont en anglais. En français furent publiés les livres suivants :
·       Le Manichéisme médiéval, (l'hérésie dualiste dans le christianisme), Payot, Paris 1949 - Traduction de Simone Pétrement et Jacques Marty.
·       Le Grand Schisme d'Orient, Les Belles Lettres, 2005 (ISBN 978-2251380728)
·       Histoire des croisades, Tallandier, T1, 2006 (ISBN 979-1021000827), T2, 2013 : (ISBN 979-1021000834) - Traduction de Denis-Armand Canal et Guillaume Villeneuve.
·       La Chute de Constantinople 1453, Tallandier, collection Texto, 2007 (ISBN 978-2847344271).

dimanche 28 mai 2017

Quand peut-on acheter des cierges, les allumer ou les éteindre dans l'église?


*
Il ne faut pas se promener dans l'église, acheter, allumer et placer des cierges, ou vénérer les icônes pendant les moments suivants des Offices Divins:

Aux Vigiles:
Lorsque le prêtre ou le diacre sort de l'autel avec un encensoir pendant les Vêpres.

Pendant les lectures des Six Psaumes (lorsque tout l'éclairage de l'église est éteint).

Lorsque le prêtre (ou le diacre) sort de l'autel avec les Saints Evangiles et pendant la lecture de l'Evangile à Matines.

Pendant le chant à la Mère de Dieu "Plus honorable que les Chérubins..." et pendant la Grande Doxologie ("Gloire à Dieu au plus haut des cieux...").

A la Divine Liturgie:

Pendant la Petite Entrée (avec l'Évangile) et pendant la Grande Entrée (avec le calice).

Pendant les lectures de l'Epître et de l'Evangile.

Pendant le chant de l'Hymne des chérubim (à partir des mots "Nous qui mystiquement représentons les Chérubim..." et pendant "l'Alléluia" trois fois répété.)

Au cours du Canon eucharistique - depuis l'exclamation "Les portes, les portes, avec sagesse, soyons attentifs", tout au long du chant du Symbole de Foi ("Je crois en Un seul Dieu..."), et pendant tout le Canon, depuis "l'offrande de paix ..." et jusques à la conclusion du Théotokion "Il est digne en vérité...", ou dans le cas d'une Fête, jusques à l'hymne chanté à la place de ""Il est digne en vérité..."

Pendant le chant du "Notre Père ..."

Idéalement, vous devriez venir tôt et compléter vos prières personnelles avant que les Services Divins ne commencent, ce qui vous permet de participer de manière attentive à la prière commune.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
PARISH LIFE

A Monthly Publication

of the
Russian Orthodox Cathedral of St. John the Baptist 

Washington, DC
USA
June 2017 Issue

FEUILLETS LITURGIQUES DE LA CATHÉDRALE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX

15/28 mai
7ème dimanche de Pâques
Après-fête de l’Ascension et
Dimanche des Saints Pères du 1er Concile Œcuménique (325)

Saint Pacôme le Grand, fondateur du cénobitisme en Haute-Égypte (348) ; saint Achille, évêque de Larissa en Thessalie (vers 330) ; saints Barbare, guerrier, Callimaque et Denis, martyrs à Méthone (361) ; saint Isaïe, évêque de Rostov, thaumaturge (1090) ; saint Isaïe des Grottes de Kiev (1115) ; saint Pacôme de Nerekhta (1384) ; saint Euphrosynius de Pskov et son disciple Sérapion (1481) ; saint Dimitri, tsarévitch d’Ouglitch et de Moscou, enfant assassiné (1591).


Lectures : Actes XX, 16-18, 28-36  / Jn. XVII, 1-13


DIMANCHE DES SAINTS PÈRES
L
es fondements de l’hérésie arienne étaient les suivants : « Il fut un temps où n’existait que Dieu le Père, qui créa une essence entre Lui et le monde, le Fils de Dieu ». En un mot, l’hérésie reconnaissait le Christ, le Fils de Dieu, non comme Dieu, mais comme une essence intermédiaire créée, bien que plus parfaite que toutes les essences créées. Cette hérésie tire son nom de son fondateur, Arius, né en 256 en Lybie. Ordonné diacre par Pierre, évêque d’Alexandrie, Arius fut excommunié par son ordinant pour collusion avec une faction ecclésiastique locale, pénétrée d’aspirations schismatiques. Le successeur de l’évêque Pierre, Achille, reçut Arius dans la communion de l’Eglise et l’ordonna à la prêtrise. A la mort d’Achille, Arius pensait devenir son successeur, mais ce fut Alexandre, qui fut élu évêque d’Alexandrie. Arius accusa injustement Alexandre d’hérésie, alors que lui-même enseignait sa doctrine hérétique concernant le Fils de Dieu. L’évêque Alexandre s’efforça de raisonner le prêtre Arius, mais celui-ci resta inflexible. C’est alors qu’Alexandre excommunia Arius, qui trouva le soutien de plusieurs évêques et prêtres. Voyant que le mal se répandait, l’évêque Alexandre convoqua un concile d’évêques locaux en 320, qui confirmèrent l’excommunication d’Arius. En ce temps, celui-ci répandait partout son hérésie en Orient, à tel point que cette situation attira l’attention de l’Empereur Constantin, qui convoqua à Nicée, en 325, un Concile d’Evêques, qui devait devenir le 1er Concile Œcuménique. Selon l’historien ecclésiastique Socrate, « L’Esprit de Dieu établit l’accord des évêques », qui instituèrent le Credo de Nicée, exposant l’enseignement orthodoxe sur la Divinité de la Deuxième Personne de la Sainte Trinité – le Seigneur Jésus-Christ - et condamnant comme hérésie les réflexions blasphématoires d’Arius. L’enseignement orthodoxe des Saints Pères, ainsi que les Saints Pères eux-mêmes sont commémorés par la Sainte Eglise après l’Ascension, parce que celle-ci constitue une preuve irréfutable de l’union inséparable des deux natures dans le Christ, de la Divinité et de l’humanité. Dans ses hymnes, la Sainte Eglise chante :   « Célébrons fidèlement en ce jour, dans la piété, la mémoire annuelle des Pères Théophores, rassemblés de tout l’univers en la cité illustre des Nicéens, ainsi que les assemblées des orthodoxes. Ils rejetèrent, dans un esprit de piété,  le dogme athée de l’infortuné Arius, et exclurent conciliairement celui-ci de l’Eglise catholique, enseignant à tous à confesser clairement le Fils de Dieu consubstantiel et coéternel, existant avant les siècles ».    

Tropaire du dimanche du 6ème ton
нгельскія си́лы на гро́бѣ Твое́мъ, и стрегу́щіи омертвѣ́ша : и стоя́ше Mapíя во гро́бѣ, и́щущи пречи́стаго Тѣ́ла Tвоего́. Плѣни́лъ еси́ а́дъ, не искуси́вся отъ него́ ; срѣ́тилъ еси́ дѣ́ву, да́руяй живо́тъ. Bоскреcы́й изъ ме́ртвыхъ Го́споди, сла́ва Tебѣ́.

Les puissances angéliques vinrent à Ton Sépulcre, et ceux qui le gardaient gisaient comme des morts. Marie se tenait près du Tombeau, cherchant Ton Corps immaculé. Toi qui as dépouillé l’enfer, Tu n’as pas été dominé par lui ; Tu es allé à la rencontre de la Vierge, Toi qui donnes la Vie. Ressuscité d’entre les morts, Seigneur, gloire à Toi !
Tropaire de l’Ascension, ton 4

Возне́слся ecи́ во cла́вѣ Христе́ Бо́же на́шъ, ра́дость сотвори́вый уче-нико́мъ обѣтова́ніемъ Свята́го Дýxa, извѣще́ннымъ и́мъ бы́вшимъ благослове́ніемъ, я́ко Ты́ ecи́ Сы́нъ Бо́жій, изба́витель мі́ра.
Tu t’es élevé dans la gloire, ô Christ notre Dieu, réjouissant Tes disciples par la promesse de l’Esprit Saint, et les affermissant par Ta bénédiction, car Tu es le Fils de Dieu, le Rédempteur du monde.

Tropaire des Saints Pères, ton 8
Препросла́вленъ ecи́ Xpисте́ Бо́же на́шъ, cвѣти́ла на земли́ Отцы́ на́ши основа́вый, и тѣ́ми ко и́стиннѣй вѣ́рѣ вcя́ ны́ наста́вивый : много-благоутро́бне, cла́ва Тебѣ́.
Infiniment glorifié es-Tu, Christ notre Dieu, car Tu as établi nos Père comme des luminaires sur terre. Par eux, Tu nous as amenés vers la vraie foi. Très miséricordieux, gloire à Toi !

Kondakion des Saints Pères, ton 8
Апо́столъ проповѣ́даніе, и Oте́цъ догма́ты, Цépкве eди́ну вѣ́ру запечатлѣ́ша, я́же и ри́зу нося́щи и́стины, истка́ну отъ е́же свы́ше богосло́вія, исправля́етъ и сла́витъ благоче́стія вели́кое та́инство.
La prédication des Apôtres et les dogmes des Pères ont donné à l’Église la foi une ; portant la tunique de la vérité, tissée par la théologie qui vient d’en haut, elle confirme et glorifie le grand mystère de la piété.


Kondakion de la fête, ton 6
Е́же о на́съ испо́лнивъ смотре́ніе, и я́же на земли́ coeдини́въ небе́снымъ, возне́слся ecи́ во cла́вѣ Христе́ Бо́же на́шъ, ника́коже отлуча́яся, но пребыва́я неотсту́пный, и вопія́ лю́бящимъ Тя́ : а́зъ е́смь съ ва́ми, и никто́же на вы́.
Ayant accompli Ton dessein de Salut pour nous, et uni ce qui est sur terre à ce qui est aux cieux, Tu T’es élevé dans la gloire, ô Christ notre Dieu, sans nullement T’éloigner, mais en demeurant inséparable et clamant à ceux qui T’aiment : Je suis avec vous et personne ne prévaudra contre vous.

Au lieu de « il est digne en vérité », ton 5
Велича́й душе́ моя́, возне́cшагося отъ земли́ на не́бо, Xpиста́ жизнода́вца. Tя́ па́че ума́ и cловecé Ма́тepь Бо́жію, въ лѣ́то безлѣ́тнаго неизpeче́нно ро́ждшую вѣ́pніи единoму́дpeнно велича́емъ.
Ô Toi qui es au-delà de l’entendement et de l’expression, Mère de Dieu, Toi qui, d’une manière inénarrable, as enfanté dans le temps le Dieu intemporel, nous, fidèles, d’une seule voix, nous Te louons.



HOMÉLIE DE SAINT JEAN CHRYSOSTOME SUR
L’ÉVANGILE DE CE JOUR

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« Celui qui fera et enseignera », dit Jésus-Christ, « sera grand dans le royaume des  cieux » (Matth. V, 19) ; et c'est avec raison. Il est aisé de philosopher en paroles, mais mettre en pratique les règles de la sagesse, c'est là ce qui est grand et d'une âme forte et généreuse. Voilà pourquoi Jésus-Christ, parlant de la patience, se propose Lui-même pour exemple et nous ordonne de le prendre pour notre modèle. Voilà pourquoi, après nous avoir donné cet avis et cette instruction, Il se met à prier, pour nous apprendre que dans les tentations et les afflictions, il faut se détacher de tout et mettre en Dieu son refuge et sa confiance. Car, après avoir dit à ses disciples: « Vous aurez à souffrir bien des afflictions dans le monde », et avoir ébranlé leur âme, il la relève par une prière, attendu qu'ils Le regardaient encore comme une homme. C'est aussi pour condescendre à leur faiblesse qu'Il fait cette prière, de même qu'Il en avait fait une dans la résurrection de Lazare, pour la raison qu'il indique en ces termes : « J'ai parlé à cause de la foule qui m'entoure, afin qu'ils croient que c'est Toi qui m'as envoyé ». (Jean, XI, 42) C'est fort bien, direz-vous; il était à propos que Jésus-Christ agît de la sorte devant les Juifs ; mais pourquoi fait-Il de même pour Ses disciples?  Il convenait encore qu'Il en usât ainsi à l'égard de Ses disciples. Des gens qui, après avoir vu tant et de si grands miracles, disaient : « Nous voyons bien à présent que Tu sais toutes choses » (Jean, XVI, 30), avaient plus besoin d'instructions et de preuves que tous les autres. Mais faites attention, mes frères, que l'évangéliste n'appelle pas cette action une prière, Il dit : « Jésus leva les yeux au ciel ». Par là, Il fait entendre que c'était là plutôt un entretien que le Fils avait avec Son Père, qu'une prière. Que si ailleurs Il parle de prière, tantôt se mettant à genoux, tantôt levant les yeux au ciel, ne vous en troublez point; c'est pour nous apprendre que nous devons persévérer dans la prière, que, nous tenant debout, nous devons regarder le ciel, non seulement avec les yeux de la chair, mais encore avec ceux de l'esprit ; et aussi que nous devons nous mettre à genoux et briser nos cœurs. Car Jésus-Christ n'est pas seulement venu pour se faire voir à nous, mais aussi pour nous enseigner l'ineffable vertu. Un maître ne doit pas se contenter d'enseigner du bout des lèvres, il doit enseigner aussi d'exemple et par ses œuvres. Écoutons  donc ce qu'Il dit maintenant : « Mon Père, l'heure est venue, glorifie Ton Fils, afin que Ton Fils Te glorifie ». Par ces paroles, le divin Sauveur nous montre encore qu'Il ne va point à la mort malgré lui. Comment irait-Il malgré Lui à la mort et involontairement, Lui qui la demande et prie pour cela, Lui qui l'appelle la gloire, non seulement de Celui qui doit être crucifié, mais encore de Son Père? Car c'est là ce qui est arrivé : non seulement le Fils a été glorifié, mais encore le Père. Avant la croix, les Juifs ne connaissaient même pas le Père : « Israël », dit le Seigneur, « ne m'a point connu » (Isaïe I, 3); mais après la Croix, tout l'univers a accouru. Jésus-Christ nous apprend ensuite de quel genre de gloire et de quelle manière il glorifiera Son Père : « Comme Tu lui as donné puissance sur tous les hommes, afin que nul de tous ceux que Tu Lui avais donnés ne périsse ». Faire continuellement du bien, c'est là en quoi Dieu fait consister Sa gloire. Que veut dire ceci : « Comme Tu lui as donné puissance sur tous les hommes? » Par là, le Sauveur montre que la prédication ne sera point renfermée dans la Judée seulement, mais qu'elle se répandra dans tout le monde; et Il jette les premiers fondements de la vocation des gentils. Comme Il avait dit : « N'allez « point vers les gentils » (Matth. X, 5), et comme Il devait dire par la suite : « Allez et instruisez tous les peuples (Matth. XXVIII, 19), Il fait voir que c'était aussi la volonté de son Père, attendu que cela choquait et scandalisait extrêmement les Juifs et même les disciples. En effet, quand dans la suite les gentils se joignaient à eux, ils ne les souffraient pas patiemment, «et ils ne les reçurent de bon cœur et avec joie », que lorsqu'ils eurent reçu la grâce et les instructions du Saint-Esprit; car cette union déplaisait fort aux Juifs. Après donc que le Saint-Esprit fut descendu sur les disciples avec tant d'éclat et de célébrité , Pierre, de retour à Jérusalem, eut bien de la peine à éviter les reproches des Juifs, lorsqu'il leur fit le récit de ce qui lui était arrivé et de cette nappe qu'il avait vue. (Act. X.) … Mais que veut dire cela : « Sur tous les hommes? » Tous les hommes n'ont pas cru. Mais Jésus-Christ a fait pour eux tout ce qu'Il a pu, afin qu'ils crussent tous. Que s'ils n'ont pas tous reçu Sa parole, ce n'était point la faute du Maître, c'est la faute de ceux qui n'ont pas voulu la recevoir, « Afin qu'il donne la vie éternelle à tous ceux que Tu Lui as donnés ». Si le Sauveur se sert encore ici d'expressions humaines, n'en soyez point surpris; Il en use de la sorte pour les raisons que nous avons déjà expliquées ailleurs. Et pour éviter de parler magnifiquement de soi : ce qui aurait choqué ses auditeurs, qui n'avaient pas encore de Lui une grande opinion. Saint Jean, néanmoins, quand il parle en son propre nom, n'en use pas de la sorte, il se sert de termes plus relevés et plus sublimes : « Toutes choses ont été faites par Lui » ; et: « Il était la lumière » ; et : « Il est venu chez soi ». (Jean, I, 3 et suiv.) Où l'on voit, non qu'Il n'aurait point eu la puissance, s'Il ne l'avait reçue, mais qu'Il donnait aussi aux autres « le pouvoir d'être faits enfants de Dieu ».