"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

lundi 14 mars 2011

Père Daniel Syssoev: Les entretiens Serbes (II) Première partie


Prêtre Daniel Syssoev et Youri Maximov
« Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche publiera ta louange »

Stanoj Stankovitch : Première question – Qu’est-ce que vous pensez de la mission dans le monde entier : en Afrique, en Russie et dans les Balkans ?
Le père Daniel : Je pense que le Seigneur a créé une situation dans laquelle la planète entière est ouverte à la mission orthodoxe. En fait, une telle situation n’existait pas il y a même vingt ans. La globalisation que nous voyons aujourd’hui est en fait l’œuvre de Dieu, afin que l’Evangile soit diffusé jusqu’au bout du monde, pour que le message pur et non altéré des saints apôtres puisse atteindre tous les peuples de la planète. Et si nous, les chrétiens, ne saisissons pas cette occasion, le Seigneur nous châtiera sévèrement pour n’avoir pas converti des gens à la lumière orthodoxe. En ce qui concerne la mission aujourd’hui, elle commence à s’agrandir. On sait que l’église russe et l’église grecque ont des missions actives ; l’église d’Alexandrie mène aussi une mission active. Youri Maximov vous racontera tout cela en détail, et moi, je vais vous parler de la mission en Russie.
Il existe deux types de missions en Russie : il y a la mission interne, dirigée vers les orthodoxes titulaires, elle s’appelle plus précisément le catéchisme, et il y a aussi la mission externe. Malheureusement, la mission externe est moins active, mais elle commence à s’intensifier. Analysant l’expérience de nombreux missionnaires, Youri Maximov et moi avons conclu qu’il est nécessaire de créer le mouvement missionnaire du saint prophète Daniel. Nous l’avons créé et il existe ce plan suivant, qui est l’expérience généralisée de l’église russe : chez nous, on donne des cours préparatoires pour les missionnaires orthodoxes ; pendant une année ils apprennent à prêcher dans les rues, dans les sectes, et chez des gens d’autres religions, et aussi chez les orthodoxes titulaires.
Par quel moyen? Ils proposent aux gens de parler de Dieu, les invitent tous à visiter l’église, ceux qui n’y ont pas été depuis longtemps, et ceux qui n’y ont jamais mis les pieds. Ils les invitent à la confession et à la Communion et proposent le baptême à ceux qui ne sont pas baptisés. En même temps, nos missionnaires distribuent des feuilles spéciales qui expliquent pourquoi il faut être baptisé, et pourquoi il faut se confesser et communier. En outre, ils donnent aux gens les coordonnées de l’église car c’est très important d’avoir un endroit où l’on peut inviter les gens.
Ensuite, il y a la deuxième étape, le catéchisme. Il existe plusieurs systèmes de catéchisme. Dans notre église, nous utilisons un système qui consiste en cinq entretiens : sur Dieu, sur la Création, sur le Christ, sur les Sacrements et sur la Loi de Dieu. Chaque entretien dure deux heures et demie et au cours de ces cinq entretiens la personne se prépare au baptême, ou si elle vient d’une secte religieuse, à l’entrée dans l’Eglise. Elle lit aussi les quatre Evangiles et les Actes des Apôtres, et enfin, après tout cela, la personne s’unit solennellement à l’Eglise ; d’habitude on baptise les gens pendant une Liturgie baptismale.
Après le baptême on commence l’étape finale : les gens entrent dans la vie de l’Eglise en étudiant la Sainte Ecriture. Pour cela chez nous, il y a des cours constants où on étudie la Bible. Chaque semaine dans notre paroisse et dans quelques autres paroisses de Moscou, on étudie la Parole de Dieu en détail. C’est aussi très important, car une des raisons pour lesquelles beaucoup de protestants ne veulent pas se joindre à l’Eglise, c’est que nous n’étudions pas assez la Sainte Ecriture. Je pense que nous, ayant une telle richesse en littérature patristique, nous devons absolument utiliser cette source.
Il est aussi très utile de mener la mission dans les hôpitaux. A Moscou, par exemple, des prêtres servent dans presque tous les hôpitaux, ils sont aidés par des sœurs de charité qui préparent les malades à la première confession. C’est une grande œuvre et nous devons l’intensifier. Cette pratique existe dans d’autres diocèses aussi. En ce qui concerne l’église russe dans son ensemble, il y a des régions où la mission est active et réussie, et puis il y a d’autres régions où c’est le contraire, les prêtres ont peur de prêcher l’Evangile, par exemple, à cause de l’Islam rampant. Alors la situation change en fonction de la région. Il est très important évidement que non seulement les prêtres, mais aussi les fidèles participent à la mission. L’expérience de l’église russe montre que la mission menée par des laïcs réussit très bien. Pour cela il faut, bien sûr, que les fidèles soient bien préparés, qu’ils agissent sous le contrôle des prêtres, mais qu’ils prêchent eux-mêmes.
Il est également très important que maintenant existent des programmes bien développés par des laïcs pour étudier le Saint Evangile. Sur la base de ces programmes, et sur l’enseignement des Pères de l’Eglise, les fidèles forment des cercles d’études et lisent l’Evangile en profondeur. Ces cercles d’études existent déjà. Après quelques échecs dans ce domaine, nous voyons actuellement de vraies réussites. J’ai vu un groupe des fidèles non loin d’Oulianovsk qui étudiaient les Evangiles, sur le fondement patristique, et tout marchait très bien, les jeunes s’entraidaient spirituellement, et mais pas seulement les jeunes. On parle souvent de la mission parmi les jeunes, mais il ne faut pas oublier que la mission devrait exister pour tous les âges et dans toutes les couches de la société. La mission existe pour les adultes, pour les personnes âgées et pour les enfants ; un témoignage évangélique doit exister pour tout le monde.
Justement, mon expérience personnelle au Kirghizstan montra qu’un des meilleurs programmes d’évangélisation consiste à inviter des protestants et des occultistes aux entretiens, et à ne pas commencer par critiquer leur foi, non, mais à commencer simplement à parler de notre foi orthodoxe telle qu’elle est, comme les Pères de l’Eglise l’enseignaient, comme le Christ l’enseignait par Ses apôtres. Et c’est à ce moment que les gens commencent à changer, parce que la Sainte Parole de Dieu elle-même change la personne. C’est très important. En ce qui concerne l’apostolat dans l’église russe, il est bon, assez bon. Nous voudrions qu’il soit encore meilleur. Mais au moins il y a quelque chose, au moins il y a une mission. A Moscou et dans la région centrale du pays, l’évangélisation est bien formée. Même si, évidement, il pourrait y avoir des progrès. L’évangélisation est bien organisée dans le diocèse de Kemerovo et en Sibérie où se trouve le père Igor Kroptchev et d’autres prêtres de la section missionnaire. Là-bas il y a une évangélisation active parmi les peuples indigènes, par exemple, parmi les Chors. Il y a des régions où on ne mène presque pas du tout la mission, c’est en Asie centrale. Au moins il y a des gens actifs au Kazakhstan, et j’espère que bientôt l’évangélisation se fera dans le pays entier. En ce qui concerne l’Extrême Orient, le patriarche Cyrille s’est très bien concentré sur la région, donc dans plusieurs diocèses, il y a une évangélisation active, en premier lieu dans le diocèse de Sakhalin et aussi dans les diocèses de Khabarovsk, de Kamtchatka et dans le Primorie, et maintenant une mission vient de s’organiser à Tchoukotka. La mission en Iakoutie est très active. La territoire de Iakoutie est énorme, il est aussi vaste que l’Europe, mais là-bas il y a très peu de prêtres.
Si on parle des territoires appartenant à l’église russe, mais qui sont en dehors de la Communauté des Etats indépendants, bien sûr il faut dire que l’évangélisation de la Chine est très difficile. Le père Dionisius Pozdniaev et quelques autres prêtres font de leur mieux, mais malheureusement, à cause des lois chinoises, et surtout à cause d’un manque des missionnaires laïcs qui pourraient annoncer l’Evangile aux chinois, la mission est en difficulté. On y fait quand même un grand travail, une énorme quantité de traductions en langue chinoise sont en train de se réaliser. Enfin, les gens font ce qu’ils peuvent à l’heure actuelle. Au Japon la mission s’agrandit grâce au travail actif du nouvel évêque Daniel. Si on parle de la mission en Ukraine on doit dire que là-bas ça va très mal. A cause du schisme et de la profusion de la mission uniate, la mission orthodoxe s’est pratiquement complètement arrêtée et les protestants sont en train de d’obtenir une grande réussite. Le maire de Kiev, par exemple, est protestant, il est pentecôtiste. Tandis qu’en Crimée l’influence islamique augmente. Malheureusement, à cause des schismes, beaucoup de gens en Ukraine ont quitté l’Eglise. Maintenant, on parle de la nécessité de renforcer la mission en Ukraine, mais malheureusement là-bas la mission se heurte souvent à une sorte de nationalisme au lieu de rappeler aux gens que nous sommes tous chrétiens. Et l’appartenance à l’Eglise du Christ prévaut sur la nationalité. En gros, la mission dans un climat nationaliste ne marche jamais. L’expérience nous le montre.
Oui, on peut donner du sens au patriotisme d’un point de vue orthodoxe et plusieurs s’y sont essayés. Nicolas de Serbie disait qu’un vrai Serbe, c’est celui qui imite les saints Serbes dans leur façon de plaire au Christ. Oui, on peut dire cela et ces paroles toucheront les cœurs des Serbes, mais elles ne toucheront pas les cœurs des Croates, des Hongrois et des Albanais etc. Chez nous, par exemple, un des plus grands problèmes pour l’évangélisation des Tatars, c’est qu’ils croient qu’en devenant orthodoxes, ils doivent rejeter leur nationalité tatare. Mais ce n’est pas le cas. Un vrai chrétien comprend qu’il ne change pas de nation, il s’élève au-dessus de la nation. Le meilleur de sa nation, il l’emporte avec lui. Par le baptême, il devient chrétien et non russe, serbe ou grec. C’est un point très important à saisir.
Encore une chose qui empêche la mission, c’est la lenteur avec laquelle on réagit aux attaques. Maintenant il y a plusieurs nouvelles attaques contre le christianisme : Le Da Vinci Code, l’Evangile selon Judas et beaucoup d’autres mensonges qui sont dirigés contre le Christ. Ce sont des mensonges qui sont diffusés à travers le monde entier, y compris en Serbie.
Nous pouvons réfuter ces mensonges en utilisant la littérature apologétique occidentale, orthodoxe et hétérodoxe, mais le plus important bien sûr, c’est de savoir répondre à ces attaques nous-mêmes, et de le faire vite. Il est très important de ne pas tarder. Par exemple, quand «Le Da Vinci Code » est sorti, il fallait avoir notre réponse déjà prête. D’ailleurs, il est important que nous ne répondions pas simplement avec un livre que nous nous contentons de publier ,et de mettre en vente. Il faut faire du bruit, il faut utiliser l’internet, des blogs et des sites sociaux. Il faut présenter la réponse orthodoxe comme un événement médiatique. Pour la culture moderne, qui est complètement dépendante de l’information, il est très important de donner des coups médiatisés. On ne peut pas appeler ces moyens la mission, mais cela peut mener à la mission. Pour les gens du monde, il est très important de savoir comment les intéresser, comment attirer leur attention. Après on peut déjà passer à une étude plus approfondie, constante et tranquille de l’Orthodoxie. Voilà mon point de vue sur la situation actuelle.
Youri Maximov : J’aimerais ajouter quelque chose aux remarques du père Daniel. En effet, même quand nous répondons à ces attaques, même si nos réponses sont bonnes, nous avons encore le problème de contacter le lecteur de tous les jours. Prenons le film « Le Da Vinci Code », là où il a été vu par mille personnes, notre réponse au film n’a été lue que par une seule personne. Nous avons des grandeurs incomparables. Le message du film reste la vérité de neuf cent quatre vingt dix-neuf personnes, qui n’ont pas entendu notre réponse. Il faut beaucoup travailler pour que notre voix soit entendue.
En Russie vous avez des chaines de télévision orthodoxes et des émissions de radio orthodoxes. En Serbie nous avons une ou deux émissions de radio orthodoxes dans lesquelles on parle souvent de choses qui n’ont rien à voir avec l’Orthodoxie.
Youri Maximov : Oui, nous avons le même problème chez nous. Je ne veux pas dire qu’il sera simple de réaliser tout ce dont nous sommes en train de discuter aujourd’hui. Ce n’est pas simple, mais nous devons le faire, il faut que nous réfléchissions encore beaucoup et que nous essayions de trouver une solution. Le Seigneur nous aidera. En ce qui concerne la mission, il convient de clarifier un malentendu. Il y a des gens qui pensent que la mission est une sorte de hobby. Quelqu’un collectionne des timbres, un autre cultive des fleurs rares, et un autre s’intéresse à la mission, comme s’il s’agissait d’un moyen de s’exprimer. Mais ce n’est pas le cas. La mission est une vertu, l’accomplissement du commandement du Christ. Le Seigneur a dit : « Allez donc et instruisez les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. » Voilà le commandement que nous devons accomplir, le commandement que malheureusement les orthodoxes ne veulent pas accomplir. Qu’est-ce qui nous arrive quand nous ignorons les commandements ? Rien de bon. Jusqu’au début du dernier siècle la vaste majorité des orthodoxes ne voulait partir nulle part en mission. Et qu’est-ce qui nous est arrivé au début du vingtième siècle ? De telles souffrances ont frappé toutes les églises orthodoxes, sans exception, que des Russes, des Serbes, des Grecs, des Roumains, des Bulgares, des Géorgiens et des Arabes orthodoxes ont tous été obligés de s’enfuir dans des pays étrangers. Et là-bas ils ont dû construire des églises, traduire la littérature orthodoxe dans les langues locales, etc. Voilà comment le vingtième siècle est devenu le siècle de la diffusion de l’Orthodoxie à travers la planète. Le Seigneur lui-même a chassé les orthodoxes qui ne voulaient pas partir pour annoncer l’Evangile dans les autres pays. Et ils étaient obligés, de gré ou de force, de faire au moins quelque chose pour que des peuples indigènes viennent à l’église et se convertissent à l’Orthodoxie. Ceux qui sont contre la mission devraient bien réfléchir aux malheurs qui les visiteront, eux et leurs enfants à cause de leur cruauté et de leur refus persistant d’accomplir la volonté de Dieu.
On entend de la bouche de ces gens des discours, affirmant qu’il n’est pas possible de convertir une autre personne à l’Orthodoxie, par exemple, sur l’impossibilité de convertir un musulman à l’Orthodoxie. Mais si on leur demande, « Avez-vous essayé de le faire? » Ils avouent, « Non ». Les gens qui disent que c’est impossible, sont ceux qui n’ont jamais essayé de le faire. En fait ils disent cela pour éviter d’essayer.
Comment faut-il aborder la mission ? Quelle en est la première exigence ? Certains disent qu’il faut prêcher dans les stades et dans les boites de nuit, tandis que d’autres insistent sur l’importance de la prière. Ils nous rappellent les paroles de saint Séraphim de Sarov : « Acquiers la paix intérieure et des âmes, par milliers, trouveront auprès de toi le salut. » Alors, que faut-il d’abord pour que la mission réussisse ? Peut-être chacun devrait-il lui-même devenir bon chrétien et après cela sa vie aurait valeur de témoignage ? J’ai lu un article dans lequel on dit qu’on peut conduire la mission de ces deux façons. Quelle est, selon vous, celle qui sera la plus efficace ?
Youri Maximov : Il me semble que la plupart des gens qui font de telles distinctions n’ont jamais mené la mission, ils connaissent la mission uniquement sur le plan théorique. C’est seulement sur le plan théorique qu’on peut penser, d’abord je deviendrai un bon chrétien et ensuite je partirai et parlerai aux autres. Pour devenir un bon chrétien il faut suivre les commandements du Seigneur, et parmi les commandements du Christ il y a : « Allez et instruisez ». Et donc comment peux-tu devenir un bon chrétien, si tu n’es pas missionnaire ? Si tu as accompli tous les commandements sauf un seul, comment peux-tu dire que tu es devenu un bon chrétien, puisque tu as méprisé ce commandement du Christ ? Le Seigneur n’a pas donné ce commandement pour que tu l’écrives, l’accroches au mur et l’oublies, il t’a donné ce commandement pour que tu l’accomplisses dans la vie. Une personne qui aime Dieu annonce l’Evangile. Peut-on penser que les Apôtres n’étaient pas des chrétiens parfaits ? Peut-on croire qu’ils n’ont pas acquis la paix intérieure ?
Pour répondre à votre première question, la chose la plus importante dans la mission c’est de se confier uniquement en Dieu, et de ne pas compter sur nos forces, sur nous-mêmes ni sur nos amis et sponsors, mais de dépendre uniquement de Dieu. La prière et l’amour pour le Christ et pour la personne à qui tu annonces l’Evangile, c’est cela le plus important pour un missionnaire. Il est aussi important de répudier fermement nos propres désirs. Qu’est-ce qui nous empêche d’annoncer l’Evangile à notre ami ? Il ne faut pas aller dans les boites de nuit et dans les stades, puisqu’à côté de nous il y a notre voisin ou notre collègue du travail. Il arrive qu’on a des voisins, on sait qu’ils sont catholiques ou protestants, on les connait depuis dix ans, on leur dit bonjour, on les félicite à l’occasion de grandes fêtes, mais malgré cela on ne leur demande jamais, « Mon ami, pourquoi n’es-tu pas encore orthodoxe ? Ne veux-tu pas que je te parle de l’Orthodoxie ? » On ne dit pas un mot sur la foi. Pourquoi ? Peut-être est-ce parce qu’on veut acquérir la paix intérieure ? Bien sûr que non, on a peur de faire confiance à Dieu. Nous pensons, «Et si je lui demandais, veux-tu parler de l’Orthodoxie ? Mon voisin ne va-t-il pas se vexer et dire « Non, je ne veux pas. Et je ne veux plus parler avec toi. » Voilà ce qui est à l’intérieur des opposants à la mission : le scepticisme et la peur.
Ces gens ne pensent pas à Dieu. Quelqu’un qui fait confiance à Dieu, Lui consacre toute sa vie. Il se dit, les gens peuvent m’écraser, ils peuvent me lapider, mais je n’arrêterai pas de glorifier le Christ et d’annoncer Son Evangile. Tels étaient les saints apôtres, ils ne ressemblaient pas à ceux qui ont peur de partir en mission et rationalisent leur peur par des arguments contre la mission : ceux-ci n’ont pas la joie du Saint-Esprit dans leur cœur. Or, quand quelqu’un a les dons de l’Esprit Saint, il est rempli d’une telle joie, qu’il a envie de partager sa joie avec tout le monde. Il est comme la lampe dont a parlé le Seigneur, la lampe qu’on ne couvre pas d’un vase, mais qu’on met sur le lampadaire, pour que ceux qui entrent voient la lumière. Il a envie de dire, « Mon ami, regarde comme je suis heureux. Je veux te parler de mon bonheur. » Voilà ce qui inspire le missionnaire. Or si quelqu’un n’a pas envie de partager cela, qu’est-ce qu’on pourrait dire de son état spirituel ?
Le Christ nous a donné le salut. Le salut ne vient pas de nous-mêmes, nous l’avons reçu gratuitement et sans le salut nous périssons. Dieu nous fit ce cadeau non seulement pour notre bien, mais aussi pour le bien de ceux qui nous entourent, pour que nous allions partager ce cadeau avec ceux qui sont en train de périr et qui désirent le salut. Et quand nous partageons le salut avec les autres, nous faisons preuve de notre amour pour eux, nous ressemblons à Dieu Qui est amour. Or où est notre amour, notre charité, si pendant dix ans nous disons bonjour à notre voisin, lui sourions, mais ne lui avons pas parlé de Dieu une seule fois. Et après nous entrons dans notre maison et, voyant nos icônes et nos livres sur l’Orthodoxie, nous croyons que nous sommes des chrétiens orthodoxes. Ce n’est pas l’Orthodoxie.
Et ce même Séraphim de Sarov prêchait aux vieux-croyants quand ils venaient chez lui, il leur disait ouvertement, « Je vous demande et vous prie d’entrer dans l’Eglise gréco-russe. Elle est dans toute la gloire et la force de Dieu ! Comme un bateau qui a beaucoup de cordages, de voiles et un grand gouvernail, Elle est dirigée par le Saint-Esprit. » Saint Séraphim les invitait à entrer dans l’Eglise orthodoxe. Il persuada aussi une autre femme, une vieille-ritualiste, de se convertir à l’Orthodoxie, d’amener toute sa famille à l’Eglise orthodoxe. Cela est bien la mission, n’est-ce pas ?
Récemment le père Daniel m’a raconté l’histoire extraordinaire d’un autre missionnaire: Saint Siméon le Stylite. Saint Siméon n’allait nulle part, il vivait au sommet d’une colonne. Par contre, il contenta Dieu à un tel point que le Seigneur le glorifia. Les païens venaient en grand nombre auprès de saint Siméon et lui demandait, « Prie Dieu, pour qu’Il nous guérisse. » Ils importunaient saint Siméon avec toute cette attention. Saint Siméon cherchait le silence et la solitude, mais il était entouré par les cris de la foule. Finalement il leur dit, « D’accord, vous pouvez venir, je vais prier pour vous, mais quand Dieu vous guérira, il faudra recevoir le baptême. » La foule accepta ces conditions. Et les baptisés furent si nombreux que l’Eglise a spécialement désigné un évêque qui devait vivre à côté de la colonne de saint Siméon et baptiser les gens. Le père Daniel vient de faire un voyage au cours duquel il a vu cette colonne et les ruines de l’église qui l’entourait.
Le père Daniel : Quand saint Siméon était encore vivant, il y avait une énorme église à côté de sa colonne. On y trouvait des fonts baptismaux pour enfants et pour adultes. On faisait vraiment des baptêmes « à la chaine » à l’époque.
Youri Maximov : On voit là que même un grand ermite pensait d’une façon purement missionnaire, et qu’il était prêt à modifier sa règle de vie pour accomplir le commandement de Dieu. L’exemple de ces saints, montre que l’opposition supposée entre la vie spirituelle et la mission est fausse. Si nous voulons sincèrement accomplir les commandements de Dieu, cette division n’existe pas pour nous. Car ils sont liés l’un à l’autre. La mission orthodoxe n’est pas possible sans une vie spirituelle riche. Et on n’aura pas une vie spirituelle riche sans la prédication de l’Evangile.

Version française
Aviv SALIOU-DIALLO et Charles HABEL
que nous remercions

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