"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

lundi 11 septembre 2023

Père Ioan Istrati: Le mystère sacré de l'amour perdu


L'Église du Christ s'habille de noir et partage les souffrances pour commémorer la décapitation de saint Jean-Baptiste, Précurseur et prophète du Seigneur Jésus-Christ.

C'est une fête solennelle observée avec un jeûne rigoureux et la prière, et la célébration de la liturgie. Pendant ce temps, nous ne chantons pas de joyeux chants de vie, mais au contraire, nous pleurons la mort du plus grand homme né d'une femme, comme l'a proclamé le Fils de Dieu Lui-même.

Au-delà de la signification symbolique et théologique de ses enseignements, qui révélaient la Voie id est le Christ, nous devons reconnaître que le moment et le contexte mêmes de la mort de saint Jean portent une profonde signification. Nous y assistons vraiment à l'extension du mal dans l'univers, au pouvoir de la ruse et de l'insignifiance, au vecteur destructeur de la volonté humaine pervertie, à la patience éplorée de Dieu, à l'anticipation des siècles et – pourquoi pas – à une validation de l'enfer comme mesure de liberté dans l'éloignement de Dieu.

Le prophète de la pureté rencontre sa disparition dans ce monde, dans la demeure de l'impureté préméditée. L'avocat choisi de la vertu et de la chasteté est impitoyablement tué par la mère de la débauche et ses disciples. La voix retentissante qui résonne à travers les âges est réduite au silence par les instruments de la méchanceté. L'esprit vif qui comprend l'histoire est éteint par l'ivresse et la folie des méchants. Le voyant et pieux serviteur de Dieu, dès le ventre de sa mère, devient la victime éternelle de l'aveugle et de l'insensible. Le témoignage de la manifestation glorieuse de la Sainte Trinité est maintenant étouffé sous les assauts des hommes diaboliques. L'estimé enseignant de la repentance est impitoyablement assassiné par les adeptes de la tromperie et des richesses mal acquises. La douce colombe de la solitude intérieure est massacrée par ceux qui sont consumés par une soif de pouvoir terrestre.

Tous ces événements sont autorisés par Dieu, qui a démontré à travers Jean le pouvoir de l'amour de triompher de la mort et de traverser les royaumes de la terre, de l'enfer et du ciel dans la proclamation de la Lumière surbondante.

L'homme, portant la sagesse, sa tête sanctifiée par le regard divin, est tragiquement décapité par les ignorants, dont les sens bestiaux sont devenus leur seul but. La main qui touchait autrefois la Couronne du Seigneur Éternel est maintenant immobile, incapable d'exposer la culpabilité d'une débauche excessive.

La femme, source de la débauche, aurait pu chercher des villes, des richesses illimitées, des postes élevés et de grandes promesses, de l'or et de l'argent. Au lieu de cela, elle exigea la mort du plus saint des mortels. Cet acte représente la quintessence de la méchanceté essentielle, l'absurdité de la mort et l'ignorance de la damnation. Il incarne l'éternelle futilité et la vacuité du mal, qui se tourne vers l'intérieur sur lui-même. C'est le geste autodestructeur de la ruse à long terme. De plus, il symbolise l'appel hérité de la ruse, un appel qui a été puni dans le déluge, à Sodome et en Égypte. Il révèle le pouvoir malveillant d'une femme lorsqu'un homme est asservi par de sombres passions, devenant un instrument involontaire et non libre de meurtre.

Le meurtre de Jean, servant de prophétie pour les innombrables martyrs chrétiens à travers l'histoire, devient encore plus effrayant dans son absurdité absolue. C'est l'issue tragique d'un serment ivre, assombri par des désirs lubriques, et qui aurait pu être facilement révoqué par la décision du roi à tout moment. Les vertus célestes qui résidaient divinement dans l'âme et la vie du grand Précurseur sont méprisées par les péchés les plus graves, qui portent les marques du néant et de la mort: adultère, inceste, ivresse, méchanceté et ruse.

Au milieu de toute la douleur qu'elle entraîne, la mort de saint Jean est une préfiguration prophétique de la crucifixion de l'Agneau de Dieu, proclamant l'amour sans bornes que Dieu a pour l'humanité. C'est un amour si immense qu'Il offre volontiers Sa vie pour eux, restant à leurs côtés jusqu'à la fin, et descendant dans les profondeurs de l'enfer pour le bien de Sa création déchue.

Cependant, la mort du prophète est un puissant avertissement pour chacun de nous. Où en sommes-nous? Sommes-nous dans la cellule froide de la prison, dans la prière en attente d'exécution, ou nous livrons-nous à la débauche de cet âge lors de fêtes somptueuses? Sommes-nous des témoins fidèles de la mort pour l'amour de la vérité, ou préconisons-nous astucieusement de transiger avec le mal? Embrassons-nous la solitude du désert ou l'attrait des plaisirs mondains? Sommes-nous les descendants de Jean, inébranlables dans notre dévotion, ou nous alignons-nous sur les goûts d'Hérode et d'Hérodiade? Cette célébration actuelle sert de jugement intérieur des siècles, tribunal qui distingue entre le peuple de Dieu et le peuple du Malin. La tête la plus sacrée, qui autrefois contemplait les cieux, est un reproche continuel à ceux qui piétinent l'amour sacrificiel de Dieu pour l'humanité, à travers toutes les générations.

Jean est le témoin inébranlable et fidèle qui a vécu et est mort pour voir l'Agneau de Dieu sans tache et partager Sa sainteté. Sa décapitation est un témoignage de l'amour perdu qui réside éternellement dans le cœur de Dieu et imprègne le royaume invisible, infusant les âges avec l'éclat de la lumière céleste.

Version française Claude Lopez-Ginisty

d'après

THE ATHONITE TESTIMONY

 

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