Le
Patriarche Bartholomée et Petro Porochenko.
Photo
: UOJ
Ce que le chef du Phanar n'a pas pris en compte, en
passant un accord avec Petro Porochenko et en reconnaissant les schismatiques
ukrainiens.
Le
Patriarcat de Constantinople, à travers les efforts de ses hiérarques et de ses
théologiens, tente ouvertement d'imposer au monde orthodoxe tout entier le
concept du "premier sans égal". Cette idéologie prétend que le Phanar
exprime l'essence même de l'Orthodoxie, que l'Église du Christ elle-même ne
peut exister sans cela.
Certes,
pour le moment, il n'y a pas de déclarations sur l'absence de péché du patriarche
de Constantinople ou du patriarcat dans son ensemble, mais cela découle
logiquement de la notion précitée de "premier sans égal".
"Le
patriarche de Constantinople n'est pas sans péché, mais il a toujours raison
puisqu'il est le patriarche de Constantinople", semble être l'idée des
bienfaits dont bénéficie le chef du Phanar.
C'est
exactement ce que disent les monastères de l'Athos qui entrent en communion
avec les schismatiques ukrainiens de l'Église orthodoxe d'Ukraine. Ils ne
comprennent pas ou prétendent qu'ils ne veulent pas aller en profondeur dans
l'essence des décisions prises par le Phanar mais simplement montrer de
l'obéissance à leur patriarche.
C'est
vrai, dit l'apôtre Paul : "Mais si nous, ou un ange du Ciel, vous
annonçons un autre évangile que celui que nous vous avons prêché, qu'il soit
maudit" (Galates 1, 8). Mais il s'agit d'un autre sujet de discussion.
Analysons ici les actions et les décisions du Phanar et du patriarche
Bartholomée et réfléchissons à la question de savoir si une personne qui
prétend être la plus sage et la plus juste dans le monde orthodoxe peut agir de
cette manière.
L'épopée
avec le Tomos et l'OCU [« église ukrainienne » schismatique] a
commencé le lundi 9 avril 2018, avec la visite du président de l'époque, Petro
Porochenko, à Istanbul, et avec les négociations avec le patriarche
Bartholomew.
patriarche
Bartholomée et Petro Porochenko, Istanbul, 09.04.2018
Photo
: president.gov.ua
Le
service de presse du Président a rendu compte très rapidement des résultats des
négociations. Il n'y avait qu'une seule ligne sur la création de l'Église
autocéphale en Ukraine : "Le Président de l'Ukraine a également noté l'importance
de l'introduction d’une église
orthodoxe locale unique en Ukraine, à laquelle le peuple ukrainien
aspire." Mais malgré cela, comme cela s'est avéré plus tard, c'est alors
que le patriarche Bartholomée a pris une décision de principe - de jouer la
carte ukrainienne. Et c'est là qu'il a fait la première erreur.
Erreur
1
Le
patriarche Bartholomée a fait un pari essentiellement perdant-perdant dans son
jeu - premièrement, sur la politique, et deuxièmement, sur l'homme politique
qui s'était discrédité pendant quatre ans de règne et avait très peu de chance
d'être réélu pour un second mandat.
Dans
presque tous les domaines des relations internationales, les pays préfèrent ne
pas mener de négociations sérieuses et ne pas signer d'accords avec les
dirigeants des États au cours de la dernière année de leur mandat. Un tel
leader est appelé le "canard boiteux" en raison de la mise en œuvre
douteuse des accords avec lui.
Le
patriarche Bartholomée n'avait qu'à attendre les résultats de l'élection
présidentielle en Ukraine et à prendre des mesures concrètes. Mais il a préféré
négliger cette règle élémentaire des relations internationales et risquer un de
ses principaux atouts - le respect des Églises locales orthodoxes. Il a pris un
risque et a perdu.
La
conséquence de la visite de Porochenko au Phanar fut que la Verkhovna Rada
d'Ukraine adopta un appel au Patriarcat de Constantinople avec une demande
d'autocéphalie. L'appel fut signé par le Président de l'époque, les parlementaires
et les "hiérarques" du « patriarcat de Kiev » et de « l'église
orthodoxe autocéphale ukrainienne » toutes deux schismatiques. Les médias publièrent de fausses nouvelles prétendant
que dix évêques de l'Eglise
Orthodoxe ukrainienne [canonique du Métropolite Onuphre] avaient apposé leur
signature, mais seulement deux hiérarques ont confirmé l’avoir fait plus tard.
En
réponse, le 22 avril, le Phanar a annoncé l'ouverture de la procédure d'octroi
de l'autocéphalie à l'église en Ukraine.
Capture d'écran du site web du Patriarcat de
Constantinople
Un
message sur le site web du Patriarcat de Constantinople disait que son Synode,
"ayant reçu de quelques personnalités ecclésiastiques et politiques
représentant plusieurs millions d'Ukrainiens orthodoxes une demande
d'autocéphalie, a décidé de rester en contact étroit avec d'autres Eglises
orthodoxes sœurs afin de les informer et de les coordonner". En effet, les
représentants du Phanar commencèrent à faire le tour des Églises locales. Et puis
le Patriarcat de Constantinople commit une autre erreur.
Erreur
2
Il
n'y eut pas d'accord sur la question de l'autocéphalie ukrainienne. Comme les
phanariotes eux-mêmes le déclarèrent plus tard, ils n'étaient pas du tout
intéressés par l'opinion des Églises locales sur la question ukrainienne, ils
les ont simplement informés de la décision déjà prise. Qui pourrait aimer cela?
Le
Patriarcat de Constantinople n’avait pas l'autorité pour accorder
l'autocéphalie en Ukraine. Même aux yeux des partisans du Phanar, cette
autorité semble discutable car, quoi qu'on en dise, l'Église orthodoxe
ukrainienne canonique a plus de relations avec l'Église russe que l'Église de
Constantinople. Et même le « patriarcat de Kiev » et « l'église
orthodoxe autocéphale ukrainienne » schismatiques, qui revendiquaient l'autocéphalie, n'avaient
pas rompu avec elle, mais avec l’Eglise orthodoxe russe.
Dans
ces conditions, quand la justesse des actions de Constantinople n'était pas
évidente, il aurait dû coordonner ses actions avec les Églises locales, et pas
seulement les informer. Le Phanar s'est avéré agir d'une manière très
non-diplomatique, c'est le moins qu'on puisse dire.
Et
bien sûr, un tel comportement des phanariotes ne pouvait que provoquer le rejet
dans les Églises locales. Il est possible que Constantinople veuille vraiment
coordonner ses actions, et pas seulement informer tout le monde, mais cela
aurait pris beaucoup de temps. Mais le Phanar a manqué de temps parce qu'il a
agi dans le cadre de l'agenda de Porochenko, qui avait besoin d'autocéphalie
pour l'élection présidentielle de 2019.
Erreur
3
Après
le début de la "procédure d'octroi de l'autocéphalie" par
Constantinople, le 23 juin 2018, une délégation de l'Eglise orthodoxe
ukrainienne [canonique] conduite par le Chancelier de celle-ci, le métropolite
Antoine (Pakanich), a visité Phanar afin de connaître les intentions des phanariotes
et de les prévenir de possibles erreurs irréparables.
Après
la rencontre, l’évêque Antoine a dit : "A plusieurs reprises il a été mentionné
l'impossibilité de légaliser le schisme, la question du traitement devait être
posée. Au sens figuré, parfois les médicaments n'aident pas, et maintenant nous
sommes à la recherche de quelque chose qui aidera à unir nos frères, qui sont
derrière la clôture de l'Eglise depuis longtemps, et nous voyons que le désir
du patriarche de Constantinople, l'Eglise dont nous avons reçu le baptême, est
d'aider dans ce domaine. Sa Sainteté le patriarche Bartholomée a déclaré qu'il
ne voulait pas intervenir dans cette situation, mais qu'en tant que personne
responsable et premier parmi les hiérarques égaux du monde orthodoxe tout
entier, il voulait aussi aider à résoudre un problème très difficile, et nous
voyons que cette ouverture découle de la recherche d'une décision basée sur nos
règles canoniques, et non comme certains hauts responsables disent dans nos
médias que le problème aurait été résolu.
En
d'autres termes, le patriarche Bartholomée a assuré la délégation de l'Eglise
orthodoxe ukrainienne [canonique] qu'il n'agirait pas au détriment de l'Eglise
orthodoxe ukrainienne [canonique] et ne s'immiscerait pas dans les affaires ukrainiennes mais
se comporterait exactement dans le sens inverse.
Cette
tromperie est devenue encore plus évidente lors de la visite du Patriarche Cyrille
au Phanar le 31 août 2018.
Les
Patriarches Kirill et Bartholomée lors des négociations à Istanbul le
31.08.2018
Photo
: AFP
Voici
de brèves déclarations que les journalistes ont entendues du Patriarche Cyrille
et du Métropolite Hilarion (Alfeyev) l'accompagnant :
L'ambiance était très bonne.
J'espère que nous continuerons à travailler ensemble
pour rendre le monde meilleur.
Nous sommes simplement programmés pour l'interaction
et la coopération.
Il n'y avait rien à la réunion qui produirait une
sorte d'explosion dans la conscience.
L'entretien était très correct, une conversation entre
les deux chefs des Eglises, qui sont conscients de la responsabilité de l'état
de l'Orthodoxie Œcuménique.
Un échange de vues très fructueux.
Du début à la fin, la discussion a été très sincère et
très fraternelle, nous avons quitté Constantinople avec un sentiment très
lumineux.
Comme
le Métropolite Hilarion l'a admis plus tard, le patriarche Bartholomée les a
assurés de l'impossibilité de ce que le Phanar a fait par la suite et a donc
commis l’erreur suivante.
Le
patriarche Bartholomée a trompé à la fois les hiérarques ukrainiens et le
Patriarche Cyrille. Tout mensonge aide à résoudre le problème actuel mais
discrédite le menteur. Le Phanar a fait preuve d'astuce et de malhonnêteté, et
ces qualités sont difficilement incluses dans la liste des vertus chrétiennes
et sont peu susceptibles d'être inhérentes chez quelqu'un qui prétend être le
"premier sans égal".
Erreur
4
En
mai 2018, un événement que l'Église grecque et les médias proches de l'Église
ont préféré minimiser l'importance a eu lieu aux États-Unis. Lors d'une
cérémonie de remise des diplômes pour les étudiants du Collège grec et de
l'École de théologie orthodoxe grecque Sainte-Croix de Boston, Efstathios
Valiotis, un grand homme d'affaires et l'un des principaux sponsors de
l'archidiocèse américain, a parlé publiquement dans son discours après avoir
reçu le titre de docteur honoris causa de l'idée qui plane aux Etats-Unis - la
séparation du patriarcat de Constantinople de l'archidiocèse.
Il a
dit au Phanar : "Nous ne pouvons pas être contrôlés par un petit groupe de
personnes qui se trouvent en Turquie, qui n'ont ni troupeau ni but, sans
travail et avec un agenda différent. Que se passera-t-il en cas de conflit
gréco-turc, qui aidera notre Église ?"
Le
Patriarcat de Constantinople n'avait pas l'autorité d'accorder l'autocéphalie
en Ukraine. Même aux yeux des partisans du Phanar, cette autorité semble
discutable.
Valiotis
proposa deux options pour résoudre le problème : soit l'autocéphalie complète
de l'archidiocèse américain, soit le transfert du trône de Constantinople du
Phanar aux Etats-Unis. Aucun des hiérarques et laïcs présents à la cérémonie
n'a exprimé d'objection.
Dans
ce contexte, l'effusion d'autocéphalie du Phanar en Ukraine est un catalyseur
de sentiments autocéphales non seulement dans les autres Églises locales, mais
aussi dans le patriarcat de Constantinople lui-même. Le temps nous dira si
l'archidiocèse américain mettra en œuvre ou non le scénario de la séparation,
mais en accordant l'autocéphalie en Ukraine, le patriarche Bartholomée a donné
un très bon atout aux partisans de la séparation à l'étranger. Et c'est sa
grosse erreur.
Erreur
5
L’erreur
suivante du patriarche Bartholomée est l'intervention non seulement évidente,
mais aussi provocante et claire du Département d'Etat américain dans l'octroi
de l'autocéphalie en Ukraine.
Le
représentant du département d'État, l'ambassadeur itinérant pour la liberté
religieuse internationale, Sam Brownback, le secrétaire d'État adjoint aux
affaires européennes et eurasiennes, A. Wess Mitchell, l'ancien ambassadeur des
États-Unis en Ukraine et maintenant ambassadeur en Grèce, Jeffrey Payette,
l'ancienne ambassadrice des États-Unis en Ukraine, Marie Yovanovitch et
d'autres responsables américains, sans rien cacher, ont négocié directement la
création de « l’église orthodoxe autocéphale [schismatique] » à
Istanbul, Kiev et au Mont Athos, et avec les églises locales orthodoxes.
Sam
Brownback et Jeffrey Payette avec Mgr Jerome II, archevêque de Grèce.
Photo
: pravoslavie.ru
Ces
visites et ces discussions ne pouvaient tout simplement pas passer inaperçues.
En conséquence, il est devenu clair : premièrement, le projet de
« l’église orthodoxe autocéphale [schismatique] » n'est pas religieux
mais politique ; deuxièmement, il est créé dans l'intérêt des États-Unis ; et
troisièmement, le Phanar n'est pas un décideur indépendant mais est contrôlé
par le Département d'État américain. La question rhétorique est la suivante :
le "premier sans égal" peut-il être gouverné par des fonctionnaires
américains, dont la religion n'est nullement orthodoxe ?
Ignorant
les demandes de la délégation de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique], le
7 septembre 2018, le Patriarche Bartholomée a envoyé ses exarques en Ukraine – l’évêque
Daniel de Pamphylia (USA) et l’évêque Hilarion d'Edmonton (Canada) - et a ainsi
commis une autre erreur.
Erreur
6
Le patriarche
Bartholomée envoya des exarques sur le territoire canonique de l'Eglise
orthodoxe ukrainienne [canonique] sans le consentement de Sa Béatitude le
Métropolite Onuphre de Kiev et ferma ainsi la possibilité des négociations avec
l'Eglise orthodoxe ukrainienne. Le Phanar a clairement indiqué que dans le cas
de l'autocéphalie ukrainienne, il s'appuierait sur l’église schismatique mais
pas sur l'Église canonique. Et ce n'est pas seulement une erreur, mais une
grosse erreur.
Le
Phanar a d'abord déclaré que toutes ses actions en Ukraine visaient à unir les fidèles
orthodoxes. Et même avant le Tomos, avant la décision de revenir à sa
structure, la métropole de Kiev de 1686, Constantinople a montré à tout le
monde qu'il traiterait avec les schismatiques et il n'était pas question
d'unification avec l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique]. Ceci est prouvé
non seulement par l'envoi des exarques sans être d'accord avec Sa Béatitude
Onuphre, mais aussi par les personnalités des exarques eux-mêmes.
Si
les phanariotes étaient un peu plus intelligents, ils enverraient en Ukraine
des anciens nobles grecs qui auraient une certaine autorité pour les évêques de
l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique], sinon pour persuader l'Église
canonique de participer à l'entreprise de l’autocéphalie, au moins pour essayer
de gagner d'autres évêques canoniques à leur cause.
Mais
au lieu de cela, le patriarche Bartholomée a envoyé deux jeunes émigrants
d'Ukraine occidentale, issus des structures américaines de l'église autocéphale
ukrainienne, qui sont aussi hostiles à l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique]
et aussi tolérants que possible envers les schismatiques.
Mgr
Hilarion, évêque d'Edmonton, et
Mgr Daniel, archevêque de Pamphylie.
Photo
: vk.com
Pour
les évêques de l'Eglise orthodoxe ukrainienne [canonique] qui, peut-être,
envisageaient de se joindre au projet de la nouvelle « église », les
personnalités de ces exarques ont servi de signal clair : obéissez au patriarche
Bartholomée - et vous serez dirigés par de telles figures.
Erreur
7
Le
11 octobre, le Synode du patriarcat de Constantinople prit une décision finale
sur la question ukrainienne. Et c'était juste une énorme erreur. Cette décision
comporte cinq points :
1.
Accorder l'autocéphalie à l'Église en Ukraine (église qui à l'époque n'existait
pas du tout).
2.
Restaurer la stavropégie de Constantinople en Ukraine, c'est-à-dire prendre les
principaux monastères et temples dans sa soumission directe.
3. Accepter en communion les schismatiques
du « patriarcat de Kiev et de « l’église autocéphale ukrainienne
[schismatique] sans repentir.
4.
Remettre la métropole de Kiev de 1686 dans la structure du Patriarcat de
Constantinople.
5.
Exhortez tout le monde à éviter la violence.
Le
Phanar ne s'est même pas donné la peine de justifier ses décisions, d'indiquer
les motifs de telles actions.
La
décision d'accepter les schismatiques dans la communion et de reconnaître leurs
"sacrements", y compris les "ordinations" après 26 années
consécutives de déni d'une telle possibilité, comme en témoignent de nombreux
documents [de Constantinople !], semble particulièrement cynique.
Mais
le plus stupide, c'est le retour de la métropole de Kiev. Le fait n'est pas
seulement que l'Eglise russe aurait violé quelque chose, ni même que le Phanar
croit qu'il n'a rien accordé à personne, mais que la métropole de Kiev telle
qu'elle était il y a 300 ans n'existe plus aujourd'hui. Inverser l'histoire ne
relèvera probablement pas de la compétence du patriarcat de Constantinople.
Par
la décision du 11 octobre 2018, Constantinople s'est fait la risée de tous et a
montré que non seulement les paroles de l'Évangile sur la nécessité de se
repentir des péchés, non seulement les témoignages des saints Pères sur
l'impossibilité de la communion avec les schismatiques, mais ses propres
documents, modernes et anciens, ne signifient rien pour elle.
Le
"premier sans égaux" peut-il dire une chose aujourd'hui et une autre
demain ?
Erreur
8
Après
les décisions absurdes du Synode de Constantinople du 11.10.2018, le patriarche
Bartholomée a signé un accord de coopération avec le Président de l'Ukraine,
qui a été immédiatement classé. Et cela a immédiatement conduit à douter de
l'honnêteté des intentions tant du côté du Phanar que du côté ukrainien.
Trois
mois plus tard, le document a été déclassifié. Le point principal était que le
Phanar donnait l'autocéphalie en échange de la stavropégie. Le texte se lit
comme suit : L'Ukraine devrait faciliter <...> l'acquisition,
conformément à la législation ukrainienne, par la mission du patriarcat
oecuménique en Ukraine, à savoir la "Stavropégie du Patriarcat oecuménique
en Ukraine", des bâtiments et locaux, autres biens nécessaires au
fonctionnement de la Mission de "Stavropégie du patriarcat oecuménique en
Ukraine" Mission (article 3 de l'Accord).
C'est
devenu clair : premièrement, le projet de « l’église orthodoxe ukrainienne
[schismatique] » n'est pas religieux mais politique ; deuxièmement, il est
créé dans l'intérêt des États-Unis ; et troisièmement, le Phanar n'est pas un
décideur indépendant mais est contrôlé par le Département d'État américain.
Le
président de la Verkhovna Rada de l'époque, Andrei Parubiy, a déclaré que les
"propriétés" ont été discutées : "Selon les historiens, le
Patriarcat œcuménique comptait à différentes époques jusqu'à 20 stavropégies
différentes (une église ou un monastère exempté de la juridiction de l'évêque
local et directement soumis à l'autorité suprême de l'église territoriale, le
patriarche ou Synode - Ed.) sur son territoire canonique d'Ukraine-Rus'. La
plus célèbres d'entre eux est la Dormition de la Laure de Kiev-Pechersk, la
Fraternité de Dormition de Lviv, le Monastère de Transfiguration de Mejigorye,
la Fraternité de l'Epiphanie de Kiev, le Monastère Maniava, etc. L'église
Saint-André reste la propriété de l'Etat, je le souligne, nous restaurons la
justice historique et rendons la stavropégie de l'Eglise Mère, le patriarcat
Œcuménique de Kiev."
La
stupidité du contrat est qu'il ne peut pas être exécuté en principe - il est en
contradiction avec la Constitution et les lois de l'Ukraine. Et même si
Porochenko a accepté de se soucier de la Constitution, il n'a tout simplement
pas eu le temps de le faire avant les élections présidentielles. Et il avait
très peu de chance de gagner les élections.
En
outre, le patriarche Bartholomée a montré par cet accord qu'il n'était pas du
tout désintéressé et a accordé le Tomos non pas pour la "paix de
l'Eglise" mais pour des biens matériels très concrets.
Erreur
9
L’erreur
tactique suivante du patriarche Bartholomée est qu'il a permis de facto le
double pouvoir dans l'église schismatique. Lors du soi-disant "Concile d'unification"
à Kiev le 15 décembre 2018, il a été décidé que « l'église orthodoxe
ukrainienne [schismatique] » aurait deux primats : l'externe -
Epiphane Doumenko "métropolite" - et l'interne – le "patriarche
honoraire" Philarète Denisenko. Ainsi, une bombe à retardement a été posée
sous « l'église orthodoxe ukrainienne » [schismatique], qui a explosé
dès que Porochenko a perdu l'élection présidentielle.
Presque
immédiatement après l'annonce des résultats des élections, l'inimitié soigneusement
dissimulée des deux chefs de l’église schismatique a commencé à se manifester.
La démarche du "patriarche honoraire", son retrait démonstratif de « l'église
orthodoxe ukrainienne » [schismatique], et l'accusation du patriarche Bartholomée disant qu'au lieu
de créer une église autocéphale en Ukraine, il avait créé « l'église
orthodoxe ukrainienne » contrôlée par le Phanar, a prouvé une fois encore
l'aventurisme de tout le projet de « l'église orthodoxe ukrainienne »
[schismatique] et l'absence de scrupulosité de ses participants.
Erreur
10
Le 8
août, le président nouvellement élu Vladimir Zelensky a rencontré le patriarche
Bartholomée à Istanbul dans le cadre d'une visite de deux jours du dirigeant
ukrainien en Turquie. Selon le site web "Strana.ua", l'initiateur
officiel de la réunion était la partie ukrainienne. Cependant, le Département
d'Etat américain était le véritable client de l'événement, ce qui était très
important pour démontrer la continuité de la politique religieuse sous les
nouvelles autorités ukrainiennes.
La
réunion s'est déroulée dans le calme mais sans résultat. A la suite de quoi,
Zelensky a dit qu'"ils avaient parlé de tout" : du Donbass, de la
Crimée, de la situation en Ukraine, etc. Le seul sujet que le président
ukrainien n'a pas mentionné était « l'église orthodoxe ukrainienne »
[schismatique de Constantinople]. Ils n'en ont pas parlé ? Ou bien Zelensky
a-t-il préféré ne pas le mentionner dans la discussion ?
Mais
l'erreur du Patriarche Bartholomée n'est pas celle-ci. Il n'est pas clair
pourquoi l'information sur la prétendue signature d'une déclaration conjointe
par le patriarche et le Président a été diffusée lors de la réunion. Ils ont
même précisé le sujet de cette déclaration - l'écologie, ce qui en soi semble
étrange. Avec la tragédie que le Phanar a provoquée en Ukraine, il ne se
préoccupe plus que de l'écologie ?
Rencontre
entre Vladimir Zelensky et le patriarche Bartholomée à Istanbul le 08.08.2019
Photo
: APE
Cependant,
ici, le Patriarche Bartholomée a réussi à faire une erreur. Il commença à
insister pour que le texte de la déclaration confirme les obligations que
Porochenko avait assumées devant le Phanar.
"Strana.ua"
cite sa source dans les cercles religieux : "Les Grecs se sont mis
d'accord avec Kiev sur un document de nature purement environnementale, et y
ont ensuite apporté un certain nombre d'ajouts importants. Parmi eux figurent
le consentement de Vladimir Zelensky à assurer la continuité de la politique de
Petro Porochenko dans le domaine religieux, la reconnaissance du rôle clé du
Tomos dans le développement de la sphère ecclésiastique en Ukraine, la
reconnaissance par le Président de « l'église orthodoxe ukrainienne »
[schismatique] comme seule Eglise orthodoxe canonique d'Ukraine".
Naturellement,
Zelensky a refusé de signer et a dit une fois de plus qu'il n'interviendrait
pas dans les affaires de l'Eglise. Pourquoi le patriarche Bartholomée s'est-il
exposé comme un politicien si myope et si incompétent ? Pourquoi était-il
nécessaire d'imposer à Zelensky un document délibérément inacceptable pour lui
? Ils auraient pu laisser des phrases insignifiantes sur l'écologie - et il y
aurait eu au moins quelque chose.
Probablement,
en y regardant de plus près, on peut compter un plus grand nombre d'erreurs,
mais ce qui précède est suffisant pour comprendre que "la gestion de l’Orthodoxie"
ne peut en aucun cas ressembler à l’action du patriarcat de Constantinople en
relation avec les affaires ukrainiennes. La seule chose que le Phanar a
accomplie au cours de l'année écoulée est de se discréditer aux yeux du monde
orthodoxe. Eh bien, en cela le patriarche Bartholomée s'est avéré être vraiment
"le premier sans égal".
Version
française Claude Lopez-Ginisty
D’après
NB: Pour les lecteurs italophones du blog, une version dans la langue de Dante a été publiée par le site orthodossoatorino