"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 14 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)e

Tombe de Frère Joseph/Ambroise à Jordanville

4. Sous la protection des croix du cimetière ( fin)
Voici une autre histoire à propos d'un russe qui garda la vérité et lui fut loyal jusques à la fin. Allons sur sa tombe: elle est modestement cachée dans l'ombre des arbres tout au coin du cimetière. C'est la tombe du "diacre Grigorievitch". Les exploits ascètiques de sa vie furent cachées aux "vrais soviétiques" et restèrent inconnus, pourtant ils étaient connus de Dieu.
Basil Grigorievitch Chipilov naquit en 1928 dans l'Altaï. Il passa trente-huit ans dans les camps soviétiques pour sa confession de la foi orthodoxe de 1949 à 1987. Il était sur la liste sous le nom de "Diacre Basile" dans le registre des " prisonniers de conscience". Il fut libéré pendant les premiers jours de le péreistroïka en réponse aux pétitions venant de l'Ouest. Pourtant, il se révéla qu'il n'était pas diacre, mais un simple laïc orthodoxe. On l'appela diacre en prison parce qu'il avait copié tout le Nouveau Testament de ses mains. En ces temps là, c'était une action héroïque, car il était dangereux de posséder une copie de l'Ecriture même hors des murs de la prison, et d'autant plus en prison. Evidemment, ils lui confisquèrent la copie du Nouveau Testament, mais ils ajoutèrent des années de prison à sa sentence.
En 1988, Grigorievitch ( c'est le nom qu'il se donnait quand il se présentait) s'installa au monastère de la Sainte Trinité à Jordanville. De braves gens l'amenèrent là alors qu'il était déjà usé, rompu de souffrance et physiquement infirme. Pendant longtemps, il ne pouvait croire qu'il était libre, que ce n'était pas là une nouvelle prison où les conditions auraient été simplement plus favorables. Grigorievitch faisait même ses promenades comme un prisonnier. Il faisait vingt pas en avant, puis il tournait sur lui-même et faisait le même nombre de pas en sens inverse. Grigorievitch se signait sans arrêt. Il avait souvent été battu au péril de sa vie alors qu'il était encore prisonnier ( c'est la raison pour laquelle il était si découragé), mais personne ne put lui faire renoncer à cette ahabitude pieuse de se signer en permanence.
Petit à petit, Grigorievitch se détendit; il commença à sourire et à parler aux habitants de Jordanville. Et bien qu'extérieurement il parût épuisé, intérieurement il était spirituellement concentré et fixé sur son but: le salut. A chaque fois que quelqu'un lui montrait les bienfaits de la civilisation occidentale, il répliquait qu'il n'en avait nul besoin et que la seule chose qu'il voulait était de sauver son âme. Ses exploits ascétiques de prière étaient surnaturels: quelquefois quand les frères qui s'occupaient de lui entraient dans sa cellule, il le trouvaient dans le beau coin d'icônes, le livre de prières à la main. Il était évident alors que Basile était si concentré dans sa prière qu'il n'avait pas remarqué leur venue. Des cals s'étaient formé sur ses genoux à cause de ses longues heures de prière. Le serviteur de Dieu Basile mourut le 3/16 août 1993.
Curieusement , il avait des fablesses, comme tous les hommes, pourtant elles s'estompent devant la grandeur des actions saintes que Basile accomplit dignement. Car il était de ceux qui ont gardé pure la source de la foi orthodoxe et qui n'ont pas laissé les athées la souiller. C'est grâce à lui que des dizaines de milliers de russes, viennent maintenant à l'Eglise et peuvent boire à la source de jouvence de la foi, tout comme des centaines de non orthodoxes comme le Père Isaac et le hiéromoine Séraphim Rose. Cela signifie que Basile et les gens comme lui n'ont pas sacrifié leur bien-être en vain; ils n'ont pas été privés de liberté, n'ont pas perdu leur santé, et certains même leur vie pour rien. Ce ne fut pas en vain, car nous croyons que le Seigneur a pardonné beaucoup de péchés humains, à cause de leurs prières.
A présent, il est temps de retourner au monastère. Il est bien cependant que nous ayons commencé notre connaissance de Jordanville par le cimetière du monastère, car le souvenir de la mort est l'exploit spirituel le plus important de tout moine orthodoxe. Continuons notre voyage sous la protection de la lumière surnaturelle des croix du cimetière. Donc...le monastère!

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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vendredi 13 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)d

Pèlerines sur la tombe de Frère Joseph/Ambroise

4. Sous la protection des croix du cimetière ( suite)
Continuons notre marche dans le cimetière de Jordanville. une tombe à la croix inhabituelle attire notre attention. Allons à sa hauteur. Nous voyons des fleurs simples mais belles et une petite croix de pierre dont la forme vous fait penser à la croix monastique que l'on met autour du cou des moines nouvellement tonsurés. C'est la tombe du moine Issaac ( Chotter). Le périple de vie de Père Issaac est inhabituel. D'origine allemande, il est né en 1942 aux USA,. Il fut élevé en Europe où il reçut une excellente éducation. Bien bâti, beau, ayant une brillante carrière militaire, quel futur l'attendait? La voie vers la haute société européenne? Le bonheur domestique? Les richesses?

Non, ce n'étaient pas les richesses terrestres, mais célestes et spirituelles que le Christ préparait pour le futur moine Isaac. Ces richesses l'attendaient dans le sein de la Sainte Eglise Orthodoxe où il parvint après une quête longue et douloureuse. Père Isaac fut baptisé en Europe; là il rejoignit un monastère orthodoxe. Après cela, il vécut au Mont Athos et puis Dieu l'amena à Jordanville où il fut tonsuré en 1990 sous le nom d'Isaac, sous le patronage de saint Isaac d'Optino. Il apprit le russe et commença à enseigner le grec ancien en russe au séminaire. Il semblait que tout ne faisait que commencer pour lui dans sa nouvelle vie...Pourtant en 1996, Père Isaac mourut du cancer.

Quand il découvrit que la mort était proche, il commença à étudier avec assiduité les écrits des Saints Pères sur la mort et la vie après la mort. Il dit un jour, qu'à causedes soucis quotidiens, il n'avait pas eu le temps de vivre concentré sur son monachisme, mais que le Seigneur l'avait débarrassé de tous soucis temporels et l'avait laissé avec le seul souci de la vie éternelle. Néanmoins il passa à travers beaucoup de souffrances avant de mourir. Père Isaac demanda même à son père spirituel la bénédiction de mourir. Son pire spirituel répondit que le Seigneur savait mieux que lui quand l'appeler et que d'abord il devait remettre toutes ses obédiences. Père Isaac remit tout, ses affaires étant dans un ordre parfait. Sa mort fut sans douleur, ce qui étant donnée la nature de sa maladie fut en soi un exemple de la miséricorde de Dieu. Il mourut le 28 juillet/10 août.

On peut se poser la question: " Qu'y avait-il de si spécial dans la vie de Père Isaac? Ma réponse est que toute la famille de Père Isaac qui était autrefois très éloignée de l'Orthodoxie, rentra dans le sein de l'Eglise Orthodoxe. Sa sœur et sa nièce furent baptisées déjà de son vivant; sa mère accepta le saint baptème le dix-huitième jour après la mort de son fils. Elle vint à la tombe récente de son fils revêtue de ses habits baptismaux blancs.

N'est-ce pas un témoignage de ce que la vie de Père Isaac fut juste et agréable à Dieu? Les gens vont souvent sur sa tombe. La partie anglophone de la communauté le vénère particulièrement. Et c'est compréhensible. Cela est dû à la similarité des parcours de vie. Une histoire édifiante pourrait être écrite à propos de tout nouveau converti américain. Ce serait l'histoire de gens qui cherchaient la Vérité et qui la trouvèrent. ( fin de la quatrième partie) A suivre...

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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jeudi 12 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)c

Eglise du cimetière

4. Sous la protection des croix du cimetière ( suite)
La prière faisait de Père Michael un théologien, pourtant il avait peur d'être appelé ainsi, "l'Eglise ne connaît que trois théologiens" avait-il l'habitude de dire, " saint Jean, saint Grégoire et le Vénérable saint Syméon le Nouveau théologien, et tout le reste est superflu..." S'il arrivait à Père Michael de manquer un office de semaine à l'Eglise, il le lisait dans sa cellule. De plus chaque jour il lisait les Saintes Ecritures de l'Ancien et du Nouveau Testament.
On pourrait écrire beaucoup de choses sur l'humilité et la compassion de Père Michael. Je me souviens au retour d'un travail de creusement de tombe, m'être arrêté pour voir Père Michael. Il trouva alors une raison de se faire des reproches, " Je ne vaux absolument rien, je ne fais rien de bon pour le monastère. je ne suis rien qu'un fardeau pour mes frères, pourtant il faudra qu'ils creusent une tombe pour moi. Pourvu que cela ne soit pas en hiver. Comme il est difficile de creuser en hiver!" Et il répéta ces mots sans cesse pendant un long moment.
Quelquefois, il était difficile de rendre le moindre service à Père Michael. Il était très embarrassé lorsque quelqu'un nettoyait sa cellule ou faisait sa lessive, " Mon cher, mon cher, pardonne-moi, pardonne-moi de te faire t'occuper de ma saleté."
" Peu de gens pourraient vivre dans une communauté monastique et ne pas souffrir de l'amertume des offenses. Pourtant Père Michael était ainsi. Dans son testament, il écrivit, avec grande justesse:" Je n'arriverais pas à retrouver dans ma mémoire le souvenir d'avoir été affligé par un des frères du monastère. Je n'écris pas cela parce que c'en est l'usage ou la tradition comme le font quelquefois certains lorsqu'ils quittent la vie. Je le fais en pleine conscience de l'expérience de ma vie qui a été ainsi. Il y a une distinction claire entre la manifestation extérieure d'affection dans le monde et la sévérité extérieure de la vie quotidienne dans l'Eglise; entre la froideur véritable du monde, riche en bénédictions terrestres et la chaleur de la vie dans l'Eglise cachée et méprisée du monde. A l'intérieur des murs de l'Eglise " la lumière brille dans les ténèbres; et les ténèbres ne l'ont pas reconnue."

Je ne puis me souvenir d'un seul instant où Père Michael ait jugé quelqu'un ou médit de lui. Je ne l'ai jamais vu en colère ou ennuyé de ce que je me sois occupé avec négligence de lui. Si j'oubliais de lui porter à manger ou de faire sa lessive, et que je ne m'en souvenais pas ensuite, il ne me le rappelait jamais.

" Le 22 octobre/4 novembre 1988, pour la fête de l'icône de la Sainte Mère de Dieu de Kazan, je m'arrêtai à la cellule de Père Michael et le trouvai mort, mais son front était encore chaud. Il mourut seul. Père Michael fut toujours pour moi un exemple de douceur, d'humilité, de concentration dans la prière et de sobriété, de ces exploits spirituels monastiques auxquels je ne puis qu'aspirer. Il mourut même comme un moine, sans personne présent." C'est la fin de l'histoire de Père Benjamin. ( Fin de la troisième partie) à suivre...

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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mercredi 11 juin 2008

L'icône de la Panaghia


Mère de Dieu de Vladimir

Mère de Dieu Wladimirskaïa

+
Devant l'icône de la Panaghia

Qui ne regarde que ton regard

Tu peux dire la blessure profonde

Par laquelle tu meurs de ne savoir vivre



Elle sait dans Ses yeux lourds de mystère

Tous les chagrins que tes lèvres prononcent

Et quand tu dis la douleur ou la tristesse

Son sourire l'étrange dans Sa prière



Tu deviens le fils qui parle silencieusement

Et ton âme s'épanche dans le sein de Son cœur

Et ta bouche étanche aux lacs de Ses yeux

Sa soif de croire que le bonheur existe



Regarde au-delà de l'icône

Afin de trouver ébloui comme un enfant

La Mère attentive à ton moindre soupir

Qui ourle ton souci d'un liseret tendre



Devant la Panaghia

Qui ne regarde que ton regard

Tu peux oublier la profonde blessure

Par laquelle tu meurs de ne savoir vivre ta vie


Claude Lopez-Ginisty

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)b

Crypte de la Cathédrale: tombeaux des Hiérarques

4. Sous la protection des croix du cimetière ( suite)

Prenons comme exemple Michael Pomazansky. Il ne prononça jamais de vœux monastiques; pourtant, vivant dans le monastère, il fut un modèle pour les moines. Voici ce dont se souvient celui qui partageait sa cellule, le moine Benjamin.

" Tout homme juste a une vertu particulière. Père Michael avait une humilité infinie. Protopresbytre, un des plus éminents théologiens de notre église, merveilleux professeur, auteur de nombreux articles, de quatre livres et d'un manuel de théologie domagtique, dernier diplômé survivant d'une académie de théologie russe, Père Michael vivait sans mettre en avant quoi que ce soit. Ayant accompli tout ce qui lui avait été assigné par l'esprit de l'Evangile, il se considérait encore comme un "serviteur inutile."

Le maelstrom sanglant de la révolution affecta à la fois son pays natal et sa famille. Au temps de la révolution, les parents de Michael était hors de la ville avec leurs enfants. Il rendaient visite à une de leurs filles qui avait déménagé de l'autre côté du Dniepr pendant la guerre. Quand ils revinrent, ils ne trouvèrent que des cendres là où autrefois se trouvait leur maison. Pourtant ce ne fut pas la dernière épreuve qui allait arriver aux parents de Père Michael...

" Un jour, j'ai apporté à Père Michael le livre intitulé " Les nouveaux Martyrs et Confesseurs de Russie" écrit par Père Michael Polsky. Il le lit attentivement, et plus particulièrement la partie consacrée au clergé du diocèse de Kiev massacré, et il trouva beaucoup de ses camarades de classe, de ses professeurs, de ses amis, de ses connaissances parmi eux. Et humble comme à son habitude, il trouva une raison d'être critique vis-à-vis de lui-même. " Ils ont tous souffert, ils sont devenus martyrs et quel bien ai-je fait? Je ne fais rien si ce n'est exister. Je suis un fardeau pour les autres, et je ne fais du bien à personne." Pourtant Père Michael ne souffrit pas moins que les autres, bien que la croix qu'il eut à porter ait été différente. Quand il était jeune, il contracta une paralysie faciale. Seuls ceux qui ont eu cette épreuve savent quelle douleur cela représente. Quelquefois, ses nerfs enflammés sur le visage tremblaient sans cesse pendant plusieurs jours, ne s'arrêtant que quelques instants de trembler. Quelquefois la douleur était si vive que ne pouvant plus la supporter, Père Michael se tapait la tête contre le mur afin d'assourdir la douleur. Je l'ai trouvé dans cet état un jour. C'était un martyr vivant. " C'est pour mes péchés" dit-il et jamais une plainte ne s'échappa de ses lèvres.

A l'exemple du hiérarque Tikon de Zadonsk, Père Michael savait comment trouver le "trésor spirituel" en toute chose. Il trouvait toujours une raison et une voie pour passer de la contemplation des choses terrestres aux choses célestes: dans la nature qui l'entourait, dans les choses banales de la vie de tous les jours, dans ses rencontres avec les gens. C'est probablement la raison pour laquelle saint Grégoire le Théologien lui était si cher, et pourquoi il se sentait si proche de lui... Père Michael ne se lassait jamais de lire ses livres. Pendant les promenades que nous faisions ensemble, il répétait sans cesse: La nature peut nous apprendre à aimer le Créateur, parce qu'Il l'a créée avec amour." Père Michael était un contemplatif, un théologien et un ardent pratiquant de la prière hésychaste. Il était aussi proche en esprit de saint Théophane le Reclus. " Je comprends saint Théophane le Reclus", disait Père Michael" parce qu'il ne voulait pas quitter sa réclusion même à Pâques." Il aurait été plus facile pour moi aussi de célébrer seul dans ma cellule, d'avoir l'expérience de la nuit de la joie pascale dans la quiétude.

Quand Père Michael arriva en Amérique en 1949, l'archevêque Vitaly le nomma Professeur de séminaire de théologie de la Sainte Trinité. Père Michael rejoignit l'équipe enseignante et il enseigna le grec, le salvon d'église et la théologie dogmatique. Ce fut un éminent professeur. Il n'y avait généralement pas de discussion pendant ses cours, non parce que Père Michael était contre, mais parce que personne n'osait interrompre son dicours profond et dynamique.. Père Michael parlait des dogmes de l'Eglise: il parlait d'une manière simple, humble, mais exhaustive, si bien que les questions n'avaient pas lieu d'être, et même si elles faisaient surface, il y avait pour elles des réponses adéquates. Néanmoins, Père Michael disait souvent " Beaucoup de choses restent cachées pour nous, et il est impossible pour nous de tout comprendre."

Après la maladie de son épouse, Père Michael déménagea dans une cellule du monastère. Là, il vécut comme l'un des frères. Il essayait toujours de ne pas être remarqué et pour cela, il choisit une vie de semi-réclusion: il n'allait que dans sa cellule, à l'église, au séminaire et au réfectoire et durant les sept dernières années de sa vie, il alla nulle part si ce n'est de l'église à sa cellule. Il menait une vie ascétique. Un jour durant la première semaine du Grand Carême, je lui demandai, "Père, quelle nourriture dois-je vous apporter?"
" Rien, je veux vivre comme les frères."
" Mais les frères mangent des pommes de terre."
" Rien, merci..."
En dépit de ses paroles, je lui apportai deux pommes de terre en robe des champs. Le lendemain je lui demandai à nouveau, "Père, que dois-je vous apporter?"
" Rien, merci, J'ai encore une pomme de terre du repas d'hier midi."
Père Michael trouvait dans la prière une source d'illumination pour son intellect et pour son cœur. Par la prière, qui attire à nous la grâce purifiante du Saint Esprit, Père Michael devint un théologien véritable, en renonçant aux mortels oripeaux du vieil homme, il put s'embarquer sur la mer de la théologie. Je le trouvai souvent entrain de prier, et involontairement, je ne pouvais m'éloigner de la porte entr'ouverte. Il semblait si digne alors. Son regard était candide et brillant, ses lèvres murmuraient des paroles de la prière et de remerciement. Ils connaissait beaucoup de prières par cœur. ( fin de la deuxième partie) A suivre...

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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mardi 10 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (IV)a






4. Sous la protection des croix du cimetière.

D'abord le cimetière fut établi à gauche de la route, mais à présent la plupart des gens ne sont plus enterrés là. La partie la plus importante du cimetière s'étend sur la verte colline à droite de la route. Nous passons sous un portail en arche, et immédiatement, une église blanche construite suivant le style de Novgorod attire notre attention. Ses coupoles sont couvertes d'un métal brillant qui résiste à la rouille et qui rappelle les heaumes des héros épiques de la vieille Russie. Et tout autour dans la vaste étendue du cimetière, il y a des croix, des croix sans nombre... Les différents styles de croix vous donnent à penser que les gens enterrés dessous sont différents eux aussi.
Presque toutes les croix sont hautes, d'une hauteur d'homme et plus haut encore. La plupart des croix ont huit branches, sont faites de bois et peintes en blanc. Il y a beaucoup d'énormes croix de pierre; il y a plusieurs petites chapelles; il y a des tombes représentant des anges; il y a des croix faites de béton et recouvertes de céramique. L'inscription en mosaique de l'une d'entre elles dit: " Seigneur Jésus-Christ, sauve la sainte Russie!" Rien ne peut être ajouté à ces mots: ils sont un monument à toute l'Eglise blanche de l'immigration; ils expriment sa peine, ses pensées et son combat. Cette croix est érigée sur la tombe d'Eugène Evlampiévitch Alphériev, doyen du séminaire de Jordanville, auteur du livre "L'empereur Nicolas II, homme à la ferme volonté," et l'éditeur du livre " Les Lettres des Martyrs Royaux durant leur captivité."
Les inscriptions sur les autres pierres tombales, disent que des soldats de l'Armée Blanche, des professeurs, des artistes et des scientifiques, et bien sûr des membres du clergé gisent là. Que Dieu donne leur repos à leur âme dans le tabernacle des justes...
Près de l'église elle-même, est la tombe d'un homme qui fut connu et aimé par toute l'Eglise Russe à l'étranger. C'est la tombe du Frère Joseph Muñoz, Gardien de l'icône de la Mère de Dieu d'Iviron, qui fut assassiné. Sa tombe est encore fraîche; la blessure dans nos cœurs est faîche aussi. Nous arrivons à sa tombe.


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Il y a une lampade rouge qui brûle devant sa croix. : un chapelet qui a été accroché par quelqu'un sur la croix, se balance dans le vent. Nos lèvres murmurent quelques mots adressés à Frère Joseph, nos cœurs croient en sa droiture, " Avec les saints donne le repos ô Christ, à l'âme de Ton serviteur Joseph, et par ses saintes prières, aie pitié de nous pécheurs."
Près de sa tombe, il y a les restes du vénérable Ivan Mikhaïlovitch Andreyevsky, un des professeurs de notre séminaire et une figure de l'Eglise dont les travaux étaient grandement estimés par le Hiéromoine Séraphim ( Rose). Ivan Mikhaïlovitch connaissait bien beaucoup des nouveaux martyrs et confesseurs de Russie récemment glorifiés, et il laissa de précieux témoignages et souvenirs les concernant.
La tombe de l'historien Nicolas Dimitrievitch Talberg, est sur la rangée suivante. Un peu plus loin est la tombe du protobresbytre Michael Pomazansky. Ils étaient tous professeurs au séminaire de la Sainte Trinité et représentaient l'école de pensée écclésiastico-théologique de Jordanville, dont la vie et l'âme était l'archevêque Averkii ( Taushev).
Jadis ces professeurs du séminaire de la Sainte Trinité, étaient des gens étonnants.

( fin de la première partie) A suivre...

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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lundi 9 juin 2008

Moine Vsevolod:L'île de l'Amour Divin/ Patéricon de Jordanville (III)





3. Levouchka ( et Leva Diminutif de Lev/ Léon)

A présent que nous avons vu le rucher, continuons notre marche. Notre chemin devient de plus en plus escarpé, mais nous ne devons pas aller loin, car depuis la colline ici, nous voyons le cimetière du monastère...mais, qui voyons-nous venir vers nous? Levouchka! Quelle chance. Qu'est-ce qu'il porte? Un grand seau d'eau en plastique.
"Salut Leva. Où emportes-tu ce seau?"
"J'ai besoin d'eau pour les fleurs pour les fleurs en bas, près du bâtiment du séminaire."
" Mais pourquoi dois-tu utiliser l'eau du cimetière?" ( Il y a plusieurs grands barils d'eau de pluie au cimetière) " Le seau est lourd et tu vas devoir le porter jusqu'en bas de la colline. Tu aurais dû utiliser l'eau près du bâtiment du séminaire pour arroser les fleurs."
Levouschka rit avec malice et dit." Non, cette eau n'est pas bonne" Allez, devinez, est-il fou ou bien... Instinctivement on se souvient des histoires du Livre des Vies des Pères, dans lesquelles des moines traînaient des pierres d'un endroit à un autre pour humilier leur chair.
Levouchka de Jordanville, y a-t-il quelqu'un qui ne le connaisse pas? Jordanville ne serait pas Jordanville sans lui. C'est un des plus anciens habitants de Jordanville avec sa grâce Laure [l'higoumène] et l'archimandrite Flore. Ils se connaissent depuis qu'ils se sont rencontrés au monastère de Ladomirovo en Russie-Carpathique. Les frères de ce monastère ont déménagé à Jordanville en 1946 et ont rejoint les quelques frères de la communauté du monastère de la Sainte Trinité.
Lev Pavlinets se surnomme lui-même le moscovite, même si ses parents l'ont ramené de Russie en 1919, quand il n'avait qu'un an. Ceci arriva peu après la Révolution et aujourd'hui il a déjà plus de huitante ans. Pendant la période où il vivait en Serbie avec ses parents, il a été gâté par de nombreux et célèbres hiérarques contemporains. Le Patriarche Serbe Barnabé laissait Leva s'asseoir sur ses genoux quand il l'emmenait faire une promenade dans sa voiture. Le Métropolite Antoine ( Khrapovitsky) l'appelait tendrement "Pavlintchik", surnom qu'il avait formé pour plaisanter sur son prénom et qui signifie le "petit paon". Le Métropolite Euloge lui donnait des bonbons. Levouchka se souvient de tous, de même qu'il se souvient de saint Jean, hiérarque de Shanghaï et de San Francisco. Pourtant pour lui, ce dernier est plus qu'un hiérarque, c'est un de ses contemporains aussi.
" Ah, donc tu parles de ce hiéromoine qui enseignait dans le Séminaire Serbe?" dit Levouchka en parlant de saint Jean, mais il parle de lui avec respect.
" Leva, quel souvenirs as-tu de lui?"
" Je me souviens qu'il disait qu'il ne faut pas offenser les pauvres."
"Pourquoi? As-tu offensé les pauvres?"
" Non, mais il y avait un mendiant appelé Boja avec un cou tordu qui était assis près de l'église de saint Marc. C'est à propos de lui que ce Maximovitch parlait."
Si Levouchka est de bonne humeur, il se peut qu'il montre comment l'un ou l'autre de ces hiérarques servait, imitant leur voix et leur manière d'officier.
Les parents de Levouchka appartenaient à la noblesse. Sa mère passa les dernières années de sa vie comme moniale au couvent de Novo-Diviyevo, qui est situé pas très loin de New York. levouchka reçut une bonne éducation quand il était enfant, mais quand il eut environ dix ans, il fut gravement malade. Par la grâce de Dieu, il survécut, mais il resta le petit garçon, Levouchka pour le reste de sa vie.
A Jordanville, il n'est pas difficile de le distinguer des autres habitants du monastère ou des séminaristes. Des bottes énormes ( souvent jaunes) trop grandes pour lui, une veste à carreaux, deux ou trois cravates autour de son cou, un chapeau, généralement un chapeau de femme, ( quelquefois un chapeau d'homme), et toujours un bâton, voilà les vêtements de Levouchka. Et bien sûr, il faut mentionner les grandes croix que Levouchka porte soit sous ou sur sa chemise, quelquefois, il en porte plusieurs à la fois. L'été il aime cueillir d'énormes bouquets de fleurs ou de briser des branches de lilas et de les planter sur les revers de son manteau, en sorte qu'il ressemble à un arbre vivant.
Malgré son âge considérable, Levouchka est encore fort; il a une obédience très exigeante dans la cuisine du monastère et en général il a l'air bien. Son exemple montre que la vie monastique non seulement affermis et renouvelle l'âme, mais aussi le corps. Tout le monde est ami avec Levouchka, et plus particulièrement les jeunes séminaristes. Il est sur un pied d'égalité avec eux. Un des moines a dit de lui. "Dieu merci, nous avons au moins une perrsonne dont personne n'a peur". Il est en effet facile d'être ami avec Levouchka.
Les sujets de conversation favoris de Levouchka, sont le mariage, ce à quoi ressemblent certaines tombes du cimetière, la mort de Palkan ( un chien). Il demande souvent aux gens s'ils sont carpatho-russes etc. En un mot, il semble n'être rien moins qu'un fou. Mais seulement si l'on juge selon les apparences. Qu'arrive-t-il si on y regarde de plus près?
"Levouchka, hé, Levouchka, quelle est la chose la plus importante dans la vie?"
" C'est la foi, la foi orthodoxe,"dit-il, résolument et avec confiance.
" Et ceux qui ne sont pas orthodoxes, seront-ils sauvés?"
"Je ne sais pas"
" Et comment arrivons-nous au salut?"
" Comme une balle. Une balle roule en bas de la route, et elle roulera directement dans le Royaume des Cieux."
Levouhka sourit avec bienveillance tandis qu'il dit ces paroles. Ses yeux, habituellement lumineux et clairs, semblent à ce moment bruns foncés et très profonds. Son regard pénètre l'âme. Mais ce n'est que pour un instant. Et puis, il repart avec les carpatho-russes, le mariage, Palkan le chien, le cimetière... Et en parlant du cimetière...Le voici, réparti de chaque côté de la route. Disons au revoir à Levouchka et rentrons dans la nécropole de Jordanville.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après le texte du site Rousky Inok 
( Le Moine Russe) de Jordanville
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