Je voudrais ici vous offrir un de mes souvenirs, qui
révèle clairement la mesure de son amour et la hauteur de sa stature
spirituelle.
Le matin, dès que je me suis réveillé, j'ai pensé au
Père Gabriel et j'ai décidé d'aller le voir.
En entrant dans le monastère de Samtavro, j'ai prié
dans la petite église en l'honneur de sainte Nino et aussi dans le grand catholikon
[1] du monastère, après quoi je me suis dirigé vers la cellule du Père Gabriel.
J’ai gravi les escaliers qui menaient à la cellule du staretz et aux logements
des moniales. Les deux portes de la cellule étaient ouvertes, et à l'intérieur,
sur une chaise basse, était assise Mère Parascève qui souriait tandis qu’elle
me regardait. Alors que j'allais ouvrir la bouche pour demander la bénédiction
d'entrer, Mère Parascève s'avança devant moi et informa le Père Gabriel de mon arrivée.
Puis elle me dit de rester devant la porte.
"Entrez, qu'est-ce que vous cherchez ?"
Je n'ai pas hésité, mais je suis entré à
l'intérieur. Je tenais dans mes mains un petit sac rempli d'aliments divers.
Presque tous les visiteurs apportaient de tels cadeaux pour les startsy avec
une grande joie, et ce, à cause de leur grand amour pour le Père Gabriel. Car
ils avaient tous compris qu'il était un grand trésor dans leur vie. Quant au
Père Gabriel, c'était un hôte vraiment généreux. Il recevait de tout cœur
chaque visiteur avec des bénédictions et avec un repas qu'il préparait
habituellement lui-même, ou qui était préparé par ceux qui lui étaient dévoués.
Il était rare qu'un visiteur qui venait deux, trois ou quatre fois ne reçoive
pas un tel repas. En fait, c’était tout aussi rare qu'un visiteur qui venait
une seule fois ne soit reçoive pas quelque chose - au moins un petit quelque
chose de la table du bienheureux staretz. Lorsqu'il recevait quelqu'un, il le
suppliait de s'asseoir pour manger de telle sorte que, malgré leur satiété, ils
ne pouvaient s'empêcher de goûter afin de mettre le cœur du staretz à l'aise.
Que l'invité mange beaucoup ou peu, le staretz se réjouissait comme un petit
enfant parce que son invité avait mangé à sa table et qu'il était rassasié.
Je vais maintenant continuer avec ce que j'ai à
dire. J'ai donné mon sac à Mère Parascève et en m'approchant du Père Gabriel,
je me suis prosterné et lui ai dit : "Béni Père !" Il m'a béni avec
son sérieux habituel et m'a fait signe de m'asseoir sur une chaise à proximité.
Je voudrais ici m'éloigner du sujet de mon récit et dire quelques mots sur les
prières et les bénédictions du Père Gabriel. Jamais, depuis que j'ai rencontré
le Père Gabriel, je ne me souviens du staretz qui aurait prié ou donné une
bénédiction à la hâte, même si beaucoup attendaient qu'il les bénisse. Je ne
dis pas que le staretz laissait
les gens attendre longtemps ou que par sa fervente prière il cherchait à créer
l'impression de ce phénomène. Le Père Gabriel n'a jamais rien fait
d'artificiel, comme s'il cherchait à faire impression sur quelqu'un. Ce n'était
certainement pas le cas. Sa grâce et sa puissance intérieures étaient révélées
naturellement et ouvertement, et non selon un effort du staretz, ni par aucune
tentative ostensible de se faire valoir. Au contraire, il faisait les choses
naturellement et d'une manière ordinaire, avec simplicité, et malgré ses grands
efforts pour cacher ses dons, ils ne pouvaient pas être cachés. Il était
impossible de cacher l'unité du Père Gabriel avec Dieu. Afin d'expliquer plus
clairement ce qui est écrit ici, je vais essayer d'expliquer davantage mes
réflexions à ce sujet. Je me demande, y a-t-il quelque chose de plus secret, de
plus complètement caché que le Saint-Esprit ? Y a-t-il quelque chose de si
impossible à voir, non seulement pour les hommes, mais aussi pour les saints
anges ? On pourrait dire la même chose de Son serviteur, le grand staretz, qui
avait une unité complète avec le Seigneur - ce qui sera discuté plus loin.
Cette histoire montrera que le staretz avait acquis l'unité avec le Seigneur
dans sa vie terrestre, et la perfection éternelle dans l'autre.
Naturellement, bien sûr, le staretz savait quelle
bénédiction ou quel conseil donner à chacun, selon ses besoins. Il ne feignait
pas ou ne faisait pas semblant, mais il avait un don vif, non seulement dans
des moments ou des circonstances particulières, mais tout le temps. Il disait
toujours ce qu'il fallait dire à quelqu'un. Parfois, il se contentait de bénir
; d'autres fois, il mettait en garde contre une épreuve imminente - quelque
chose qui entravait le progrès spirituel ou la formation de l'âme. Le Père
Gabriel n'avait pas besoin d'être informé d'aucune façon, ni d'entendre une
confession ou d'avoir une conversation sur un sujet particulier avec un visiteur.
Il percevait tout avec perspicacité et parlait à quelqu'un après l'avoir
rencontré pour la première fois comme s'il le connaissait depuis longtemps, et
il parlait avec une grande profondeur de sens sur n'importe quel sujet, et il
parlait de façon exhaustive.
Dès que dix minutes se sont écoulées depuis que je m’étais
assis près de lui, le Père Gabriel s'est tourné vers Mère Parascève en disant :
"Va te reposer, et si j'ai besoin de quelque chose, je t’appellerai".
Mère Parascève n'a pas attendu longtemps, et après être restée assise pendant
quelques minutes, avec la permission du Père Gabriel, elle est allée dans sa
cellule. Après le départ de Mère Parascève, quelques instants de silence se
sont écoulés et le Père Gabriel m'a regardé et m'a demandé : "Mon cher, voudrais-tu
parler d'un sujet spirituel aujourd'hui?" J'étais d'accord avec le staretz
souriant, mais en même temps j'étais un peu perplexe, parce que je ne me
considérais pas digne de discuter de questions spirituelles avec le Père
Gabriel. J'attendais impatiemment de voir ce que le bienheureux staretz allait
faire. Il se leva du canapé et ajusta le manteau qui le couvrait. Puis il
alluma de l'encens et s'assit sur un tabouret. Après un court silence, il
demanda avec sa gentillesse habituelle: "Eh bien, mon cher, dis-moi, si tu
le peux, quel psaume tu aimes le plus." Cette question me laissa perplexe,
et je ne savais pas comment répondre parce que je n'avais pas de psaume préféré
en particulier. Mais comme je devais donner une réponse, j'ai mentionné le
fameux Psaume 50 [2], que j'ai récité plus souvent que d'autres, et que, dans
une certaine mesure, j'aimais plus que les autres psaumes.
"Oh, alors tu aimes "Aie pitié de moi...
Ce psaume se détache vraiment parmi les autres psaumes. Donc, si tu l'aimes, tu
dois bien sûr en connaître le sens. Si tu le peux, dis-moi ce que tu penses
qu'on entend par " Tu m'as révélé les choses cachées et secrètes de Ta
sagesse ".[3]
Dès le début, je me suis rendu compte que je ne
pouvais pas donner une réponse suffisante, mais parce que le Père Gabriel m'a
dit : "Si tu l'aimes, alors bien sûr tu en connais le sens", j'ai eu
honte de dire directement que je ne savais pas, et j'ai donc décidé d'essayer
de produire une réponse. Je me suis rendu compte que je souffrais en vain, et
au fil du temps, j'ai commencé à me sentir mal à l'aise en hésitant à répondre.
J'ai rassemblé mes forces et j'ai dit : "Je ne sais pas, Père." Ne
semblant rien remarquer, il m'a souri avec son sourire aimant, ce qui m'a
permis de respirer librement. Cela m'a assuré qu'il comprenait que ma réponse
était due à une infirmité et non à un désir de tromperie.
Très bien, mon cher, si tu ne peux pas le dire,
alors j'expliquerai le sens des mots : " Tu m'as révélé les choses cachées
et secrètes de Ta sagesse. " Commençons d'abord par le caché, que le roi
David mentionne à juste titre et sagement avant le mot secret, et qui, par sa
signification, déclare la merveille de la sagesse de Dieu. Caché signifie le
monde spirituel invisible que le Seigneur Bon et Tout-Puissant a créé selon Sa
providence et Sa sagesse incompréhensible et établi avant la création du monde
visible et de l'homme. Ces deux mondes dans leur unité comprennent la plénitude
de la création de Dieu, et l'homme est l'incarnation parfaite de sa plénitude.
Dieu, par son inconcevable sagesse, a uni les deux natures en une seule
personne, l'être humain : la nature spirituelle supérieure et la nature
physique, qui en comparaison avec la nature spirituelle est inférieure.
Avant la Chute, Adam voyait librement, à la fois le
monde physique et le monde spirituel. Parmi ceux-ci, la sagesse et la majesté
de Dieu se manifestaient de façon plus grande et étaient perçues dans la vision
des demeures célestes du Seigneur : le monde spirituel. Adam l'a vu avant la
Chute, et par la suite, cette vision lui a été cachée ainsi qu'à toute l'humanité
et elle est devenue cachée. Elle nous a été donnée pour la contemplation, mais
elle nous a été enlevée. Le péché, la désobéissance et la transgression de la Parole
de Dieu nous ont privés de cette vision divine. Mais par la grâce de Dieu,
cette vision fut de nouveau accordée à ceux qui en étaient dignes en raison de
leur sainteté particulière et de leur vie vertueuse. Tu vois, mon cher, la
sainteté est nécessaire pour qu'une personne reçoive à nouveau la vision de ce
qui est caché (le monde spirituel), une vision qui, depuis la Chute, nous a été
enlevée et refusée. C'est un héritage merveilleux par lequel nous pouvons
contempler et expérimenter la sagesse de Dieu. Je pense que c'est assez
concernant le caché, si c'était compréhensible, mon cher..."
"Oui, je comprends tout, mon père,"
répondis-je.
"Alors disons quelques mots sur la chose la
plus intéressante qu'on appelle secret. Ce qui est secret est le sein de la
connaissance secrète de la sagesse de Dieu, qui est révélée aux hommes
exclusivement par la miséricorde et la providence de Dieu. Elle est révélée à
ceux qui, constamment et graduellement, selon leur force et avec l'assistance
et l'aide de l'Esprit Saint, se rapprochent des mystères supérieurs de Dieu, et
qui, ayant appris ces mystères, deviennent plus sages dans la connaissance de
Dieu, des anges et des hommes. C'est une chose de voir et d'entendre ; c'en est
une autre de comprendre profondément le mystère de ce que l'on a vu et entendu.
Ce qui est secret n'est pas compris de la même manière que ce qui est caché.
Car la perception du caché est de voir et d'entendre, tandis que la
contemplation du secret est de saisir le mystère de ce qui a été vu et entendu.
Le secret n'est pas perçu de la même manière que le caché. C'est parce que le
secret ne peut être découvert que par l'action guidée du Saint-Esprit. Pour que
les portes révélant la connaissance du secret s'ouvrent, une personne a besoin
non seulement de sainteté, mais aussi de mérite devant Dieu. Une personne
acquiert le mérite en endurant de nombreuses petites et grandes tribulations,
épreuves, persécutions, injustices, moqueries, condamnations, labeurs, sueurs
et efforts... endurant tout cela avec amour et humilité pour le Seigneur et Son
Saint Evangile. Une vie sainte devant Dieu, comme nous l'avons déjà dit,
accorde à une personne la vision de ce qui est caché, et si le mérite est
combiné avec une vie sainte, le secret est également révélé. C'est pourquoi j'ai
dit au début de notre conversation que le roi David a mentionné avec justesse
et sagesse ce qui était caché avant le secret. Car c'est en luttant qu'un homme
atteint d'abord la frange ou le seuil de la sainteté, et c'est en s'élevant
vers des niveaux supérieurs qu'il obtient la vision de ce qui est caché. S'il
reste dans une lutte diligente, il obtient grâce aux yeux du Dieu
miséricordieux et Ami des hommes, il recevra de Lui la connaissance du secret
comme un don.
L'homme qui est plongé dans la connaissance du
secret reçoit des révélations en fonction de ses capacités. Puis il se consacre
de toutes ses forces à cette contemplation, ne pensant à presque rien, même aux
besoins les plus naturels, puisque cet état lui est si agréable. Il s'efforce
d'observer avec toute sa capacité, et ce qu'il voit avec son nous [esprit, intellect] est
soigneusement discerné pour la connaissance. Dans cet état apparemment tendu,
la personne n'est ni fatiguée ni troublée, mais elle est revêtue d'une grande
patience. C'est parce que son âme est dans un état de grande paix dans
l'attente de la révélation du secret. Une telle contemplation est pour elle un
grand délice, tandis que la révélation et la compréhension de ce qu’elle voit
est une joie et un bonheur inexplicables. Tout cela, mon cher, est accordé à un
homme qui a atteint les plus hautes vertus, qui selon saint Jean de Climaque
sont la foi, l'espérance et l'amour. En effet, ce sont les vertus les plus
élevées, comme je l'ai mentionné, car elles forment le dernier échelon de
l'échelle des vertus.
Et pourtant, même si une personne fait l'expérience
de cette félicité suprême, elle n'est pas encore complètement rassasiée et ne
cesse de chercher auprès de Dieu cette grâce et une union plus profonde et
inséparable avec Lui. Vient ensuite la théosis [Divinisation], qu'il est
impossible d'atteindre par d'autres moyens. La théosis est seulement un don de
Dieu... quelque chose d'incompréhensible et d'inexprimable, que le Seigneur
accorde comme un don de l'Esprit qui donne la vie à la personne digne des dons
de l'Esprit. Ce qu'on attend de l'homme, c'est qu'il travaille et lutte. Dans
cette situation, l'homme se consacre à l'humilité, s'humilie impitoyablement et
descend au plus profond d'une conscience de sa propre infirmité. Il pleure
continuellement, crie et prie Dieu, suppliant qu'Il lui accorde une vie
inséparable avec Lui, son Créateur. Alors une flamme d'amour s'allume à
l'intérieur de l'homme... une flamme de feu nourrie du feu suprême, le feu éternel
qui s'appelle Amour.4 L'homme désire l'unité avec ce feu, mais pas comme une
flamme distincte ou séparée de quelque manière que ce soit du feu éternel.
L'unité complète désirée avec le feu éternel est la théose. Pour atteindre la
théose, l'homme doit renoncer et s'oublier lui-même, et un tel exploit
s'accomplit par la supplication et l'austérité intérieure avec soi-même. Il
doit aimer chaque personne, voir chaque personne comme un frère et un
compagnon. Il doit garder à l'esprit que notre Seigneur Jésus-Christ a souffert
pour nous tous. Aimer tous, signifie servir tout le monde avec sagesse.... une
sagesse que le Seigneur donne à tous ceux qu'Il regarde et enveloppe de son
amour parfait. Avant d'être uni à Dieu, l'homme se trouve dans l'agonie,
luttant et cherchant à rester en permanence avec le Seigneur. Lorsque cette
unité est réalisée, l'homme fait l'expérience d'un amour marqué par la
tranquillité, la paix et le repos. Avant l'union avec Dieu, une personne lutte
avec tout son être et cherche une coexistence inséparable avec Dieu. Mais
l'union à Dieu est un état d'amour, de grande sérénité, de paix et de repos.
Avant l'union avec Dieu, l'existence de l'homme consiste en labeur et en désir,
car elle manque de plénitude et de perfection.
L'Échelle de l'Ascension Divine de Saint Jean Climaque
détaille l'ascension de l'âme de l'homme, et tout ce qui y est écrit est
merveilleux et divin. Cependant, il manque un dernier échelon, qui est la
couronne et la perfection de tous, et cet échelon s'appelle Amour et Théosis.
Ici, il n'y a que de l'amour, de l'amour et rien de plus. L'homme est
entièrement et inséparablement uni à Dieu. C'est une unité parfaite et
complète. L'esprit s'arrête, les pensées disparaissent complètement de son
esprit, car il ne pense plus à rien. Il ne contemple que Dieu, et ne fait et ne
dit que ce qu'il voit et entend de Dieu. Un tel homme possède la sagesse du
début à la fin des temps. Ce n'est pas notre affaire de savoir qui a atteint
cet état [5], mais nous en connaissons un avec certitude : Saint Jean le
Théologien."
Je fus étonné de ce qu'il avait dit, car tout cela
me semblait incompréhensible. J'aurais cru me tromper si je n'avais pas entendu
une exposition aussi merveilleuse de la bouche du Père Gabriel. Dans la
confusion, je me suis dit : comment cela se peut-il - l'esprit s'arrête, les
pensées disparaissent... c'est impossible. Incapable de supporter
l'incertitude, quand le staretz se tut, je lui demandai : "Pardonne-moi,
Père, qu'est-ce que cela signifie - l'esprit s'arrête, les pensées
disparaissent complètement de son esprit, car il ne pense plus à rien". Il
répondit : "Oui, crois-moi, mon cher, ce qui est impossible à l'homme est
possible à Dieu. L'action sûre de l'Esprit Saint, à l'égard de l'homme, est la
théosis, qui est l'effusion de la plus haute couronne divine de toutes les
vertus - l'amour. Quelle sorte d'union avec Dieu pourrait-il y avoir si le
mental est actif ou quand les pensées restent avec vous et que votre mental est
retenu captif par une pensée ? L'union complète avec Dieu est impossible sans l'inaction
de l'esprit et l'absence totale de pensées. Sinon, il n'y aurait pas de théosis.
Cela équivaudrait plutôt à l'échelon supérieur de l'échelle, que Saint Jean Climaque
appelle la foi, l'espérance et l'amour."
Ici s'est produit un grand miracle que je n'ai pas
compris pendant que j'étais avec le Père Gabriel dans sa cellule. Au cours de
notre conversation, j'ai tout accepté comme quelque chose d'habituel et
d'ordinaire. La noblesse du discours du staretz se cachait dans son humilité et
sa simplicité. Ce n'est qu'après avoir quitté sa cellule que j'ai compris la
profondeur et l’ampleur de ses enseignements.
"L'amour ne peut être atteint que si l'esprit
s'arrête et est libre de pensées... voici, c'est comme moi..." et alors le
staretz frappa doucement la tête avec ses doigts deux ou trois fois.
"C'est impossible selon nos propres capacités, mais cela n'est possible
qu'avec le Saint-Esprit. Le Saint-Esprit agit sur un homme et rend un tel
miracle possible. Seulement, je ne suis pas digne d'une telle grâce... c'est à
cause de ma vieillesse que je ne peux pas garder mes pensées et mon esprit est
oisif."
Et tout d'un coup, il m'a semblé que quand le Père
Gabriel a dit ces paroles merveilleuses : "J'ai ressenti une certaine
satisfaction, comme si quelque chose m'avait été révélé... et je n'avais aucune
envie de lui demander quoi que ce soit. Ce qui était si étrange, c'est que ce
qui m'était difficile à comprendre m'a été révélé avec les coups de sa main sur
la tête. C'était comme si le geste du Père Gabriel induisait ce que je
percevais dans mon esprit. Quelque chose qui semblait incompréhensible
paraissait soudain si plausible. Maintenant, je pouvais comprendre un peu ce
qu'il m'avait dit.
"Celui qui a atteint la théosis, mon cher, ne
vit pas pour lui-même, mais seulement pour le bénéfice des autres. Avec une
grande humilité, il se cache des gens, afin de ne pas les brûler. Car si les
gens voyaient qu'il possédait un tel don, ils ne le comprendraient pas
correctement, et ils seraient consumés par l'envie. Ou peut-être qu'il leur
arriverait de ne même pas être envieux puisqu'un tel phénomène dépasse jusqu'à
présent le pouvoir de leur compréhension. Le fait que l'amour soit en fait la
couronne de la perfection comme dernier échelon de l'échelle, et que ni cela ni
la théosis ne soient mentionnés par saint Jean Climaque, ni que ces choses
n'aient été mentionnées par personne par la suite, est selon la providence de
Dieu. Dieu me l'a réservé pour que je le dise, et personne d'autre que moi ne
pouvait le dire.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
NOTES
1. Un catholikon est l'église principale d'un monastère orthodoxe.
2. L'Église orthodoxe utilise principalement la version grecque de l'Ancien Testament connue sous le nom de Septante (aussi connue sous le nom de LXX) plutôt que les traductions des éditions hébraïques. La numérotation des psaumes dans la Septante diffère de celle des traductions basées sur les éditions hébraïques. Le Psaume 50 dans la Septante est le Psaume 51 dans l'édition hébraïque. ↩
3. Psaume 50:8 ↩
4. Les traductions grecques et russes de ce texte parlent de la relation d'une flamme individuelle et du feu dont elle fait partie comme μια γλώσσα φλογός & язык огня ou 'une langue de feu', qui implique une unité directe et complète. Je ne l'ai pas traduit directement […], car cette terminologie peut être inhabituelle pour de nombreux [lecteurs] et peut amener certains lecteurs à la confondre avec le phénomène des " langues de feu " mentionnées dans les Actes des Apôtres - note du traducteur. ↩
5. Ceci, bien sûr, le staretz l’a dit pour moi - note de l'auteur. ↩