Joseph à Gangotri, où il a rencontré le Christ dans une grotte.
Je suis un chrétien orthodoxe vivant à Homer, en Alaska et qui a rencontré Jésus-Christ en Inde, dans l'Himalaya.
J'écoute le battement de cœur de la pluie à l'extérieur...
Un brouillard froid d’Alaska souffle depuis la baie, sur les collines vert émeraude maintenant que l'automne est là, et que l'été a été chassé dans les montagnes. Mais un brouillard blanc laiteux s'étend sur la baie comme un fantôme de soie. J'avais l'habitude de visiter des monastères trappistes quand j'étais catholique, au début de l'école secondaire, et d’être en recherche d'une relation d'amour. J'ai lu beaucoup de philosophie, pour savoir alors que la connaissance ne suffit pas, que d'avoir une prise de conscience dans l'esprit est totalement différent de l'expérience d'une révélation du cœur.
J'ai passé deux anniversaires dans l'Himalaya...
Voyageant le long des routes de gravier qui tombent profondément dans les ravins de glace où le Gange en dessous gronde, et n'est pas encore empli de saleté et de boue, et de journaux de villages, et ne charrie pas encore des restes d'Indiens dans son courant, j’ai trouvé le Christ qui m'a trouvé. C'est une atmosphère difficile et étrangement convaincante que de se confronter soi-même, avec l'Inde, et d’être pris en sandwich avec des cadavres noirs, des neiges blanches, des feux païens et des animaux virulents.
J'ai pris un bus au nord de Delhi. Il était bondé, serré et étroit, les mouches bourdonnaient entre mon visage et les fenêtres enduites de boue marron. Tout est tellement pollué à Delhi, tellement couleur café à cause de la fumée, avec tellement de vapeur que l’on peut vraiment pas voir le soleil. Vous le voyez, boule orange et rougeâtre qui brûle sur l'horizon quinze minutes dans la matinée, mais quinze minutes plus tard, il s’affale et redescend, comme une tête épuisée sur les montagnes.
J'ai grandi catholique, mais je me suis tourné vers le bouddhisme lorsque j’ai commencé une classe d’autohypnose dans mon école secondaire catholique, en faisant l'expérience de la méditation et de la "conscience".
J'ai alors vécu de graves symptômes de maniaco-dépression, en partie parce que je me suis consciemment détourné du Dieu judéo-chrétien, et aussi parce que la vie à la maison était très, très difficile pour moi. Je suis devenu anxieux et j’ai commencé à avoir des habitudes extrêmement autodestructrices, et si le bouddhisme semblait une porte parfaite pour aborder - ou ne pas aborder - mon rejet de Dieu et de la famille, et de concentrer mon énergie pour me dissoudre dans un vide, une bulle de dissolution dans un fleuve interminable et impersonnel, le Tathāgatagarbha. L'élément qui m'a séduit était la possibilité de dissoudre mon désir, et d'abandonner mon ipséité, afin d'éviter la souffrance. Mais ce désir ne semble pas si mauvais, surtout quand il s'agit d'amour, ce qui nécessite plus d'une personne, et donc annule toute notion de l'abandon de soi, - et aimer, aimer vraiment, c’est donner, ce qui peut nécessiter le sacrifice, et la souffrance-.
Donc le bouddhisme tibétain revenait sans cesse, parce que la méditation m’aidait à calmer mes angoisses et la dépression, et parce que cette culture s'est révélée très attrayante, avec tous ses drapeaux colorés, ses crânes et ses explications métaphysiques des choses, - mais que reste-t-il, quand le "je" disparaît, et qu’il n'y a personne d'autre pour qui une relation de cœur peut exister? Sans oublier de mentionner, à quoi se résume l'expérience des Évangiles, la nuée de témoins, la Sainte Eglise? Je ne savais rien de l'Orthodoxie quand je suis arrivé dans le placard du bouddhisme, mais à la lumière de celui-ci, maintenant, à quoi se résume-t-il ?
L’attention a œuvré en ce qui concerne le nettoyage de la fenêtre, l'esprit est concerné, ce qui est important, mais beaucoup des doctrines du bouddhisme, (et j’ai exploré d'innombrables doctrines) s’arrêtent vraiment ici. C'est un ciel clair. Mais ce qu'il n'a pas fait [le bouddhisme], et ne pouvait pas faire, vraiment, c’était de m’orienter vers le soleil, et la chaleur du soleil, et la lumière du soleil (toutes les religions semblent contenir des graines de la vérité, mais elles ne parviennent pas à témoigner du Dieu triadique…) et toutes mes habitudes destructrices, et mes relations, et chaque mantra, et le yoga, (et de tout cela j'ai été rassasié…) ont fait que Christ m'a amené à Lui.
Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Joseph Magnus
in
Death to the World
Orthodox Zine
Issue Number 24