"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mardi 25 décembre 2018

La papauté moderne condamnée par le pape saint Grégoire le Grand

Père Vladimir Guettée


La papauté moderne condamnée par le pape saint Grégoire le Grand(VI).


Depuis plusieurs années il est évident qu’à la tête du Patriarcat de Constantinople se dressent des hommes ayant un désir malsain d’étendre leur prérogatives juridictionnelles sur l’ensemble de l’orthodoxie.
Les derniers événements en Ukraine nous montrent un passage à l’acte évident.
Ce désir d’étendre son autorité tous azimuts a déjà infecté le corps de l’Église au cours des siècles et plus particulièrement à Rome, avec les conséquences que nous connaissons depuis 1054.

C’est paradoxalement à Rome qu’un saint pape, Grégoire le Grand, avait diagnostiqué cette maladie spirituelle qui est de se prétendre de droit divin « chef » (tête) de l’Église, infaillible, vicaire du Christ, etc..

Nous vous livrons ici quelques traductions et commentaires réalisés par le P. Vladimir Guettée en 1861 (prêtre catholique-romain français converti à l’orthodoxie)
*

Au commencement de son épiscopat, Grégoire adressa une lettre de communion aux patriarches Jean de Constantinople, Euloge d'Alexandrie, Grégoire d'Antioche, Jean de Jérusalem, à Anastase, ancien patriarche d'Antioche, son ami;  S'il se fut considéré́ comme le chef et le souverain de l'Église, s'il eut cru qu'il l'était de droit divin, il se fut certainement adressé aux patriarches comme à des subordonnés, on trouverait, dans cette circulaire, quelques traces de sa supériorité́. Il en est tout autrement. Il s'y entend longuement sur les devoirs de l'épiscopat, et il ne songe même pas a parler des droits que lui eut conférés sa dignité́. Il y insiste particulièrement sur le devoir, pour l'évêque, de ne point se laisser préoccuper par le soin des choses extérieures, et il finit sa circulaire en faisant sa profession de toi, afin de prouver qu'il était en communion avec les autres patriarches, et, par eux, avec toute l’Église.( S. Grégoire, épître 25, livre 1)

L'occasion de ces lettres fut l'ambition du patriarche Jean de Constantinople, qui prétendit que sa ville épiscopale étant devenue la capitale de l'empire, il devait être reconnu universellement comme le premier évêque de l'Église. À cette fin, il inventa le titre de patriarche œcuménique ou universel et se l'attribua. La première idée d'un pouvoir central et universel dans l'Église est donc venue de Constantinople ce fut de Rome que s'éleva la première opposition contre cette prétention ambitieuse, et de la part d'un des plus grands papes qui se soient assis sur la chaire apostolique de Rome.

Voici ce que dit saint Grégoire au patriarche Jean :
« Réfléchissez donc, je vous en prie, que, par cette présomption téméraire, la paix de l'Église entière est troublée, et que vous êtes ennemi de la grâce qui a été́ donnée à tous en commun. Plus vous croîtrez en cette grâce, plus vous serez humble à vos yeux vous serez d'autant plus grand que vous serez éloigné́ d'usurper ce titre extravagant et orgueilleux. Vous serez d'autant plus riche que vous chercherez moins à dépouiller vos frères à votre profit. Donc, très cher frère, aimez l'humilité́ de tout votre cœur; c'est elle qui maintient la concorde entre les frères, et qui conserve l’unité dans la sainte Église universelle.

Qui, dites-le-moi, je vous prie, qui imitez-vous par ce titre pervers, si ce n’est celui qui, méprisant les légions des anges qui entaient ses compagnons, s'efforça de monter au faite pour n'être soumis à personne et être seul au-dessus des autres. Qui dit : Je monterai dans le ciel ; j’élèverai mon trône au-dessus des astres du ciel ; je placerai mon siège sur la montagne de l’alliance, dans les flancs de l’Aquilon. Je monterai au-dessus des nuées : je serai semblable au Très-Haut ?
Que sont vos frères, tous les évêques de l'Église universelle, si ce n'est les astres du ciel ! Leur vie et leur enseignement brillent, en effet, à travers les péchés et les erreurs des hommes, comme les astres à travers les ténèbres de la nuit. Lorsque, par un titre ambitieux, vous voulez vous élever au-dessus d'eux, et rabaisser leur titre en le comparant avec le vôtre, que dites-vous, si ce n'est ces paroles : Je monterai dans le ciel ; j’élèverai mon trône au-dessus des astres du ciel? Tous les évêques ne sont-ils pas les nuées qui versent la pluie de l'enseignement, et qui sont sillonnées par les éclairs de leurs bonnes œuvres ?
Votre Fraternité́, en les méprisant, en s'efforçant de les mettre à ses pieds, que dit-elle, si ce n'est cette parole de l'antique ennemi : Je monterai au-dessus des nuées  Pour moi, quand je vois tout cela à travers mes larmes, je crains les jugements de Dieu; mes larmes coulent avec plus d'abondance, mes gémissements débordent de mon cœur, de ce que le seigneur Jean, cet homme si saint, d'une si grande abstinence et humilité́, séduit par les flatteries de ses familiers, a pu s'élever jusqu'à un tel degré́ d'orgueil, que, par le désir d'un titre pervers. il s'efforce d'être semblable à celui qui, en voulant être orgueilleusement semblable à Dieu, perdit la grâce de !a ressemblance divine qui lui avait été́ accordée et qui perdit la vraie béatitude, parce qu’il ambitionna une fausse gloire. »

Que celui qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende.

Compilation J.-L. D.

Source : bnf.fr